116
pages
Français
Ebooks
2011
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Publié par
Date de parution
01 septembre 2011
Nombre de lectures
218
EAN13
9782296348080
Langue
Français
Poids de l'ouvrage
1 Mo
Publié par
Date de parution
01 septembre 2011
Nombre de lectures
218
EAN13
9782296348080
Langue
Français
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1 Mo
Ouvrage publié sous la direction éditoriale de Jacqueline Farmer
Les éditeursremercient toutparticulièrement Marc
Bonnel,lesmembres del’associationAvicenneFrance,Frantz
Grenet,Libby,JulienetCharlieGrenet,Djallalet Mamoura
Djamalov, YuryKarev,JohannUhres,UzbekistanAirways,
AliéAkimova,KhaetNemat,PhilippeBabo,RemyDoret
CatherinePoujol.
Éditions duSandre
57,rueduDocteurBlanche
75016Paris
ANTHOLOGIE DE LA POÉSIE
D’OUZBÉKISTAN
Tome I
Établie,traduitede l’ouzbek etprésentée
par Hamid IsmaïlovetJean-PierreBalpe
avec l’aide dePahlavonTurgunov, AzamObidovet SirojiddinTolibov.
Éditions du Sandre
AVANT-PROPOS
ParFrantzGrenet
Al’heureoùlepatrimoinemonumentaldel’Ouzbékistan
subit certainesatteintesfâcheuses dufait derestaurations
effectuées sansrespect, sansgoûtet sans compétence,
c’estpour lesamis decepays– etils sontnombreux–une
consolation quedevoiruneautrepartnon moinsessentiellede
sonhéritagemise eninàladispositiond’un largepublic, grâce
au travailenthousiaste d’unjeune éditeuret de inslettrés.
Cettepoésieturcophone etiranophoned’Ouzbékistan
ad’ancienneslettres denoblesse –leplusancien poème
retenuici est dumystiqueHodjaAhmadYassaviquivivaitau
e
XIIsiècle –,etelle formeunechaîne ininterrompue jusqu’à
aujourd’hui.CommelesouligneavecjustesseHamidIsmaïlov
dans sonintroduction, certains despoèmeslesplusanciens
sontaussilesplusactuels : cesonteux surtoutqueproposent
lesmusiciensetquedemandentleurclientèledansles concerts
privésoulesnoces,oùfortheureusementl’hégémoniedes
musiquesmodernesgagnebeaucoup pluslentementquedans
d’autrespayshéritiers dumême fonds culturel.
Danslagrandecontinuitédes thèmeset desimages,qu’on
suit surhuit siècles à traversles variations de formepoétique
et decontextepolitique,les citations d’un poèteàl’autre
tissent des sortes deconnivences.Hommes– etparfois
femmes–depouvoiry voisinentavec desanticonformistes,
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avec des pendus.Serevendiquantrebelle,IkromOtamurod
citeaujourd’huiMashrab,exécutéau Ferghanaen 1711.
«L’âgedupeuple estencoreloin»,proclamesansillusion
EshqobilShukur.Mais,pourtous,Farhâdet Shirin,Leyla
et Madjnoun,modèlesindépassablesdesamantspersans
etarabes,sontdescompagnonsaussiprésentsqueleurs
compatriotesen poésie,etàquiproclamesonabandonà
Dieul’imagequivientnaturellementàl’espritestle « gibet
deMansour»,lemystiqueal-Hallâdj,intercisàBagdad
en922dansdesconditionsquiconsciemmentdesapart
évoquaient Jésus.Pourtous, aussi, c’estlagrandeculture
arabo-persanequirestel’horizonderéférence:onest
surpris,mêmechez ceuxquis’exprimententurc djaghataï
ououzbek, dupeu deprésencedela steppenomade et de
lamontagnedansleurunivers.D’unemanière généralela
poésiepersane estéconomedenotationspittoresqueset
dedétailslocaux.Parfois, au détourd’un poème,la terre
del’Asiecentralereprend ses droits :pourLouti,« il n’est
pasfaciledebâtirunemaisonsur leDjaïhoun», c’est à dire
«leFurieux»,nom poétiquedel’Amou-darya, donteneffet
les crues violentes sapentles bordsetontengloutibiendes
e
villes.EtOuvaïssi,poétessedeKokand àlainduXVIII
siècle, dans undélicieuxpoème,pleuresachaussureperdue
àOuratioubé, sur la routedeHodjent àKokand–un
caillouteuxparcours dedervicheset desouis,oùencore
danslesannées trentel’on rencontrait devieuxmanuscrits
et desavantsmoullahs.
Poésieouzbèke,poésietadjike?Poésied’Ouzbékistan avant
tout,qu’aujourd’huiun peuplerevendiquecommel’héritage
tout àlafois diverset cohérent desesancêtres.Dansla
Transoxianemédiévale,quipréigurel’Ouzbékistan actuel
parseslimitesgéographiqueset ses villes-phares(Samarkand,
6
Boukhara,Shahr-i Sabz,Tachkentplus tard),onsaisit bienà
e
partirduVsiècle denotre èrelacoexistence depopulations
turques et depopulations « iraniennes », c’est à direparlant
deslangues delafamille deslangues iraniennies –lva
de soiqu’aucunenotionde «race »n’intervient ici.Les
marchands deSamarkandont exporté surtoutelaRoute
delaSoieleur langue iranienne,le sogdien,maisles textes
quelesarchéologuesontretrouvé sur lesanciennes étapes
marchandes sontparfois écrits dans un mélange inextricable
oùalternentlesphrases sogdiennes et turques – commele
persanetl’ouzbek dansle genrepoétiqueshir-ô shakar«lait
e
et sucre »pratiqué àKokandauXIXsiècle, etaujourd’hui
encoredansla languedela rueàSamarkand.Lebilinguisme
étaitlemodedepensée et d’expression natureldeNavoï
et deBabour:nuldoutequ’ilsauraient bien ridesevoir,
àl’époquesoviétique, disputésentrelaGrande Encyclopédie
ouzbèkeetlaGrandeEncyclopédietadjike(d’ailleursNavoï était
d’origineouïghoure)!C’est un autredesgrandsmérites de
celivrequedes’être généreusementouvertaux deux voix
par lesquelles, depuisles tempslesplusanciensoùellenous
estaccessible, s’exprimela poésiedel’Ouzbékistan.
F.G.
7
INTRODUCTION
ParHamid Ismaïlov
Chaquenuit,quandmonilsde dixans vase coucher,je
luichantedesberceusesqui igurentpresquetoutesdans
celivre.Il m’écoutedepuis sespremiersjoursetjamais
n’a discutécette façond’allersecoucher.Jepensequeson
acceptationdeceschansonsplutôt tristesestinscritedans
sesgènes.Jemesouviensqu’àsonâgemongrandpèreavait
l’habitudedelireàmonchevetlesmêmespoèmes:
Jem’endorspaisiblement
Mon oreillerestlaterre,
Mondésir mafoi,
Mareligion l’Islam.
Merci
Au serpentquisenommeQureysh.
PrèsdelaporteduParadis
Ilyaunarbre,
Commeunevictoire,
Mais sesfeuilles sont safranées
Suff…suff…suff…
Jen’ai jamaiscompriscepoèmepasplusquemonils
necomprendmeschants sophistiqués,maisjesuis sûr
quedans vingtans,ilchanteraourécitera àsesenfantsles
9
mêmespoèmesparcequelapoésie constituenotre identité,
notre façondepensée,notre histoire etnotrevie.
*
**
Une anecdote de ZahiriddinMuhammadBabour–
fondateurdel’empire des GrandsMogols.Dans sonfameux
journalintitulé «Babour-Nameh », danslepassageconsacré
e
auplusgrand despoètesouzbeks—AlisherNavoï, duXV
siècle — il rapportequ’unjourAlisherNavoï jouaitaux
échecsavec son rivalBinai etque,aumilieu dela partie,
étirant sesjambesiltoucha lesfesses deBinai etplaisanta:
«Ici, dansHérat,quandonétiresesjambes,ontoucheles
fesses d’un poète ».Binairépliqua:«Ici, àHérat,on peut
nepasétirersesjambeset cependant toucher lesfesses d’un
poète… »
Ilyatant derécits surces terres,etilyavaitalorsetilya
tantaujourd’huidepoètes.Chacunyestpoètedepleindroit.
Parfois,laissantma maison pourunesoiréedepoésie
élaborée etprécieuseàLondresjemets unecassettede
chansondevariétéouzbèke et unchanteurdevariété
ouzbekchantedespoèmes devariété.
Surta perte jeversedeslarmes
J’auraisaimé êtrependuauxrayons desoleil
Etportépar lesoleil au-delà delaterre…
Et danslachansonsuivanteuneautrestrophe:
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Si,ici,j’allumeunfeu,safuméeapparaîtàFerghana
Y a-t-il quelqu’undanslemondequin’aitlecœurbrisé?
S’ilyaquelqu’unj’installeraimalamme horsdupapieretle
bois surgira desleurs
Laissezlesleursleurirsous vospas
Commedit undenospoètes :«Siles chansons deces
peuples sont sitristes, comment vivent-ilsleurs vies?»
*
**
Le ghazalestlaformedominantedenotrepoésie écrite.
D'originearabe,lemotghazalsigniie «aimer parleravecles
femmes» et désigneune formedeversiicationcommune
à touslespeuplesmusulmansorientaux del'Iranàl'Inde
Moghole.Deson origineànosjours, cette formes'est
maintenue, àpeuprèsinchangée,pendantpresqueun
millénaire.Et,mêmesidenombreuses autresformes
poétiques codiiéesexistent—moukhamass,k'ita, tchiston,
roubaï, touyouk,fard,moustazod…—toutes, à untitreou
unautre,peuventêtreconsidérées commedes variations
autour