Le mouvement civil au Liban Revendications, protestations et mobilisations associatives dans l’après-guerre , livre ebook

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Date de parution

01 janvier 2006

Nombre de lectures

0

EAN13

9782845868030

Langue

Français

Poids de l'ouvrage

2 Mo

Karam KARAM
Le mouvement civil au Liban
Revendications, protestations et mobilisations associatives dans l’après-guerre
KARTHALA - IREMAM
LE MOUVEMENT CIVIL AU LIBAN
KARTHALAsur internet : http://www.karthala.com
Couverture : Manifestation après l’assassinat du premier ministre, Rafic Hariri, 2005, Cl. K. Karam.
© Éditions Karthala, 2006 ISBN : 2-84586-803-0
Karam KARAM
Le mouvement civil au Liban
Revendications, protestations et mobilisations associatives dans l’après-guerre
Préface d’Élizabeth Picard
Éditions Karthala 22-24, boulevard Arago 75013 Paris
IREMAM 5, rue du Château de l’Horloge 13617 Aix-en-Provence Cedex 1
Je tiens à remercier Daniel Rouvier, Élizabeth Picard et Myriam Catusse pour leurs contri-butions indispensables à la rédaction de cet ouvrage.
Préface
Comment penser la paix, comment développer une réflexion sociolo-gique, lorsqu’on est un jeune Libanais grandi pendant la guerre, éduqué sous les bombes et préparant une thèse de science politique dans les déceptions et les crises de l’après-guerre ? Presque unanimement, les aînés ont scruté les événements de la décennie quatre-vingt dix avec leurs outils traditionnels : les règles du système consociatif, l’observation des relations clientélaires et du fonc-tionnement des groupes de solidarité primaire. Ils les jaugeaient à l’aune des années d’avant-guerre, parées par la nostalgie de vertus pacifiques, d’une croissance remarquable, de signes de modernisation. Et leurs analyses rejoignaient les jugements désabusés du sens commun : mainte-nant, c’est pire que pendant la guerre. Quinze ans de batailles ont ramené le Liban à son point de départ pour l’enfermer dans un système de partage communautaire plus rigide encore, pire, sous le contrôle d’une puissance étrangère qui l’a fait passer du statut de démocratie imparfaite à celui de régime autoritaire. Passionné par la chose politique (cela, au Liban, n’est pas vraiment exceptionnel), formé dans les meilleures universités (nommons-les : l’Uni-versité Libanaise et l’Université d’Aix-Marseille III), Karam Karam acquiert rapidement l’intuition que, derrière ce théâtre politique où se jouent et se rejouent les mêmes drames archaïques, comme dit Clifford Geertz, d’autres acteurs, d’autres institutions et d’autres modes de faire promettent d’en renouveler le scénario. Naïveté ? À la lecture des déve-loppements sévères qu’il consacre au fonctionnement interne des nou-velles associations civiles, et aux interactions entre les mouvements sociaux qu’elles organisent et les acteurs politiques, on sent plutôt la rigueur lucide de celui qui a payé tôt les illusions meurtrières de ses aînés. Il pose clairement que les militants associatifs sont encore peu nombreux – un peu plus d’un millier pour les quatre associations aux-quelles il s’est particulièrement intéressé ; que leurs motivations, comme celles de tout acteur social, sont souvent ambiguës, tiraillées entre intérêt privé et intérêt collectif si bien que tensions et crises traversent le monde associatif ; et que la capacité du pouvoir à étouffer et réprimer ces mouvements est insondable. Ce qui lui donne le droit de prendre pour objet ces militants et d’ana-lyser ces mouvements sociaux dans le Liban de l’après-guerre, c’est sa connaissance directe, construite dans la durée, mieux, dans un investisse-ment personnel au sein des associations « de plaidoyer » qui deviennent
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LE MOUVEMENT CIVIL AU LIBAN
son objet d’enquête. À l’encontre d’une formule célèbre, les « bons senti-ments » qui sont les siens, c’est-à-dire son engagement civil et civique, ne le condamnent pas à une « mauvaise recherche ». Au contraire. Un cher-cheur de sciences sociales ne saurait déployer une infinie curiosité, une subtilité méthodologique, une perplexité théorique avec la constance nécessaire sans une véritable sympathie pour son objet. « Faire parler les acteurs » ce n’est pas le moins du monde les agiter comme des marion-nettes mais au contraire donner profondeur et sens à leurs actes et à leurs discours. Weber le premier avait pris soin d’établir la distinction nécessaire entre le jugement de valeur dont doit se garder le savant et le rapport aux valeurs qu’il se doit de garder toujours. À l’instar des révolutionnaires des années 1960 qui rêvaient la poli-tique autrement (en cela, les militants associatifs présentés ici sont bien leurs héritiers), Karam Karam a déplacé son regard et étudié la politique au Liban autrement. Sans négliger les contraintes et les opportunités du système et de la conjoncture, sans séparer la décennie 1990 d’une riche histoire du mouvement associatif libanais dont il restitue brillamment les problématiques, il nous entraîne du côté de quelques bandes d’utopistes. Avec leurs alliés des organisations de développement et de secours, ces militants fondent des associations civiles, lancent des mouvements sociaux pour tenter de faire adopter par le pouvoir des réformes que le monde politique, les élus, les partis, ont échoué à promouvoir. Il y a le moment magique où le REM semble mobiliser le pays tout entier (chaque fois que je prenais l’avion, on me munissait d’un crayon et de la pétition à faire signer aux passagers !) et où il contribue concrètement à la renaissance du pouvoir local. Il y a le moment tragique où quelques dizaines de personnes à peine commémorent le début de la guerre en brandissant, solitaires, les portraits des disparus. Ce que Karam Karam donne à lire à partir d’observations très riches et à comprendre par ses analyses distanciées, ce sont des interactions complexes entre la société et ces mouvements sociaux puisque la pre-mière nourrit les seconds de ses attentes et les contraint par ses pesan-teurs (notamment, nous y reviendrons, par ses affiliations communau-taires). C’est aussi la naissance de nouveaux modes de mobilisation, l’entrée en scène de nouveaux acteurs, la mise sur agenda de nouveaux enjeux et de nouvelles interactions avec la société politique. Sans faire disparaître l’ordre ancien, ils tentent de le recomposer en se réappro-priant la politique. Bien sûr, cet ordre ancien résiste efficacement. Décennie « pour rien », comme l’écrit avec amertume Samir Kassir au moment d’en faire le bilan ? Ne serait-ce que par trois aspects que je voudrais évoquer à la suite de Karam Karam (mais son livre en aborde bien d’au-tres) les années 1990 auront peut-être été l’amorce de changements struc-turels profonds. Le premier réside dans la nature tions et des mouvements sociaux de Karam entend qu’ils sont distincts de
« civile » (et civique) des associa-l’après-guerre. Par civil, Karam , ou confrontés à, l’État dont ils se
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veulent les nouveaux interlocuteurs. Il indique aussi qu’ils sont transcom-munautaires à la fois par la nature des causes (les droits civiques et humains, la promotion de l’écologie, etc.) dont ils sont porteurs et par l’identité des militants qui les animent (dans ce sens, le puissant mouve-ment social qu’est Hizbollah n’est certainement pas un « nouveau » mouvement social). Surtout, il montre qu’ils sont civiques en opposition à la guerre qui vient de faire rage et à l’usage de la violence, aussi bien symbolique que physique. À cet égard, la place du juridique tant dans le fonctionnement interne des associations, dans leurs objectifs (changer la Loi) que dans leurs argumentaires est remarquable. Non qu’il faille seulement s’en réjouir pour l’avenir des très nombreux étudiants en droit du Liban, mais parce que l’avènement de l’État de droit – celui qui applique la Loi et rien que la Loi – est une révolution dans le Machrek arabe dominé par des régimes autoritaires. En lisant Karam Karam et en observant que les immenses manifestations de 2005 s’inscrivent en conti-nuité avec les mobilisations politiques pacifiques qu’il a étudiées, qu’elles se sont mises à l’école des militants associatifs, on comprend que la société libanaise est capable, autrement mieux capable qu’en 1975, de prendre ses distances avec un héritage historique belligène et de résister aux entrepreneurs de la violence. Mais cela suffira-t-il à exorciser les dangers ? Le deuxième changement a trait à l’essor des nouveaux mouvements associatifs au Liban et, plus généralement, dans les pays arabes. Sans se lancer dans des développements hasardeux sur la (re)naissance d’une société civile ou sur la capacité de ces mouvements à engager avec les régimes politiques auxquels ils s’adressent un processus de démocratisa-tion (mais il vaut mieux que ce soit eux qui engagent ce processus plutôt que George Bush, non ?), Karam Karam met en exergue des mobilisa-tions variées, structurées et relativement durables, totalement différentes tant des mobilisations communautaires que des mouvements organisés par le pouvoir. Ni les dirigeants politiques ni les observateurs ne les attendaient, et si puissants, dans un tel contexte. Les premiers s’em-ploient systématiquement à fragmenter les protestations transversales en autant de demandes qui ne trouvent satisfaction qu’en se soumettant à des patrons politiques. Ou ils brisent carrément le mouvement par la force. Et les seconds sont restés, à quelques exceptions près, prisonniers du préjugé selon lequel l’autoritarisme arabe ne laissait aux sociétés qu’une alternative : la soumission ou l’émeute. Comme il se plaît à le dire, et à la suite de sympathiques pionniers, Karam Karam a fait « voyager les paradigmes », c’est-à-dire testé dans le « laboratoire » liba-nais, les variables locales des formes d’action collective et des réper-toires d’actions que les sociologues ont repéré dans d’autres contextes. Ce qu’il apporte à l’étude comparative des mouvements sociaux, notam-ment à propos de la prise en compte de la culture politique des sociétés concernées, est digne de débat. Ce qu’il propose d’étendre à d’autres contextes et d’autres pays arabes est passionnant, à l’heure où les mili-
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tants de Kefaya se font matraquer dans les rues du Caire, où le Forum Vérité et Justice organise des sit-in sur les places de Rabat, où à la Déclaration de Beyrouth (mai 2004) fait écho la Déclaration de Damas (novembre 2005). Le troisième changement structurel, il faut nous demander s’il est vraiment là, et même quelles sont ses chances de s’imposer durablement. Il s’agit de la capacité des nouveaux mouvements sociaux à marginaliser les mobilisations communautaires et segmentaires (mais non à les éradi-quer). Karam Karam n’a pas tort de voir dans l’intifadha de 2005 un avatar triomphant des mouvements de la décennie 1990 : la plate-forme commune de revendications, l’investissement personnel des militants associatifs, les modes d’action pacifiques et ludiques. Il est remarquable que des responsables associatifs lucides aient géré l’espace public à la place des autorités étatiques et esquivé tant de pièges : ceux des soutiens ostentatoires des États occidentaux (Etats-Unis et France venaient de faire passer la résolution 1559 au Conseil de sécurité) ou d’ONG inter-nationales au discours prescriptif. Mais aussi ceux du conflit communau-taire et du recours à la violence. En face, la société politique n’a claire-ment pas joué le rôle de médiateur qu’on attendait d’elle, entre les acteurs sociaux et l’État. Semblant un temps épouser le mouvement, les dirigeants de parti se sont employés de concert à dénouer les fils tissés dans la mobilisation entre société civile et société politique. Confrontés à un enjeu national, ils ont vite récupéré leur mise et se sont préoccupés d’assurer leur réélection par leurs clients traditionnels en un combat qui sentait déjà l’arrière-garde. « Revendiquer, mobiliser, participer » – l’am-bition politique du mouvement associatif est de longue haleine.
Élizabeth PICARD
ADDL AFDC
Liste des sigles les plus utilisés
ALDHOM CPE LADE LCPS MGD MDH MRD MSL REM RMC
Association pour la défense des droits et des libertés Association pour le développement et la conservation des forêts Association libanaise des droits de l’Homme Commission parlementaire de l’Environnement
Association libanaise pour la démocratie des élections Lebanese Center for Policy Studies Mouvement de la Gauche Démocratique. Mouvement pour les droits humains Mouvement du renouveau démocratique
Mouvement social libanais Rassemblement pour la tenue des élections municipales Rassemblement pour une loi civile facultative des statuts personnels
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