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Français
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Publié par
Date de parution
01 avril 2010
Nombre de lectures
1 566
EAN13
9782296252219
Langue
Français
Poids de l'ouvrage
2 Mo
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Date de parution
01 avril 2010
EAN13
9782296252219
Langue
Français
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AVANT-PROPOS
En mars2008, Julie Cocoual, Sophie Gaultier, Aurélie Grellier et
Marine Ledour, quatre étudiantes dumaster Politiques de
communication de l’université de Versailles-Saint-Quentin,
organisaient une journée d’études sur la communication des ONG
humanitaires.
Cetouvrage estle prolongementde cette rencontre. Il faitle pari
de faire dialoguer des professionnels etdesuniversitaires, en
considérantque le pointdevue desuns nourritcelui des autres.
Le conseil scientifique de l’université de Versailles-Saint-Quentin a
alloué à ce projet une subvention à la publication. Qu’il soitremercié
pour son soutien.
Que soitaussi remercié Youcef Djedi, ingénieur d’études au
CARPO, pour sa relecture dumanuscrit.
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INTRODUCTION
LA COMMUNICATION DES ONG HUMANITAIRES
PASCAL DAUVIN
« SelonMédecins Sans Frontières, le procès intenté par la compagnie
pharmaceutique suisse Novartis contre la loi indienne sur les brevets pourrait avoir
des conséquences désastreuses. Si Novartis obtient gain de cause, l’accès des pays
pauvres aux médicaments s’en trouvera limité. MSF exhorte Novartis à abandonner
immédiatement son procès. »(Extraitducommuniqué de presse de MSF du
20décembre2006)
« Problème posé : réinsérerle problème de la faim dans l’actualité; réaffirmer
Action Contre la faim comme l’association référente qui lutte contre la faim dans le
monde ;remobiliser les français autour du problème de la faim et déclencher des
dons. »(Extraitde la fiche de présentation de la campagne de ACF en
2002)
« Derline, 24 ans, a été retrouvée sous les décombres de la maison où elle vivait,
le lendemain du tremblement de terre. ‘‘ J’ai pensé que j’allais mourir, j’ai prié Dieu
et la vierge Marie pour me donner de l’air.’’ […] À cause de la gravité de sa
blessure, Derline a été amputée. […] Une équipe de Santé de Handicap
International, constituée d’un kiné et d’un ergothérapeute, s’est occupée d’elle. Elle a
reçu ensuite un fauteuil roulant. »(Extraitdusite internetde HI)
« Médecins du monde a lancé en 2008 une campagne de sensibilisation contre
les expulsions d’étrangers gravement malades. Atteint de diabète, d’un cancer, du
SIDA ou d’une autre maladie grave, un étranger renvoyé dans son pays où il ne
pourra être soigné, risque la mort ou de graves handicaps.»(Extraitdusite
internetde MDM)
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La communication des ONG humanitaires
Ces différents extraits n’ontpas d’autre ambition que d’illustrer, de
façon sélective, commentdes ONG fabriquent, sous des formes etdes
intentionsvcommariées, de la «unication humanitaire ». Ces discours
parlentcommde «unicataion »umoins sur deuxplans. D’abord, ils
évoquentdes outils, des réseauxetlivrentdes informations. Ensuite, ils
suggèrentdes pratiques sociales,une division du travail symbolique sur
des images etdes représentations. Ces extraits racontentaussi des
« ONG » auxraisons sociales propres, mais suffisammentproches pour
être socialementidenthifiées comme «umanitaires ». Qu’elles mettent
en avantl’urgence médicale, la faim oule handicap, elles relèvent
toutes dumême statutjuridique –un statutd’ailleurs particulièrement
1
flou. Elles soignentet témoignent, revendiquent un engagement
librementconsenti, agissentsur des scènes principalement
internationales, fontappel à la générosité dupublic etsontorganisées
selon des principes managériaux.
Aulieude proposerune définition préalable de la
« communication des ONG humanitaires »en combinant, dansune
formule ramassée,tous les éléments évoqués, on a choisi de présenter
les arguments mobilisés pour expliquer le succès social de ce
phénomène. Le premiertype d’explication – largementprésentdans la
littératureuniversitaire etprofessionnelle – est téléologique. La
communication des ONG humanitaires poursuitplusieurs fins. La
communication estd’abord consubstantielle de l’humanitaire, puisque
lesans-frontiérismeestné de l’obligation morale de porter dans l’espace
publicuntémoignage sur les situations de conflit. Le deuxième objectif
concerne le financementde l’association etde ses missions.
Communiquer, c’estassurer les rentrées de fonds nécessaires pour
couvrir des frais de structure, les actions menées sur leterrain etles
investissements àvenir entermes de collecte. Troisième explication
téléologiqula promoe :tion de l’ONG. Pour exister dansun champ
humanitaire de plus en plus concurrentiel, il estnécessaire de faire
connaître sa marque (ses actions, son positionnementidéologique, son
mode de fonctionnement) auprès des donateurs oudes bailleurs publics
potentiels. Enfin, la dernière explication renvoie à la nécessité de
mobiliser les différentes populations (adhérents, bénévoles,volontaires,
salariés) qui participent, chacune à leur façon, à l’œuvre humanitaire.
Cettetypologie appelleun commentaire rapide. Si elle présente à coup
sûr des repères commodes, elle pêche par son simplisme en oubliant
1
Voir sur cette question MeyerD., «ONG :une catégorie juridique introuvable,une définition
utilitaire »,in SiméantJ. etDauvin P. (dir.),ONG et humanitaire, Paris, L’Harmattan,2004,
p.139-151. Voir aussi Ryfman P.,Les ONG, Paris, La Découverte,2004, p.28-29.
8
Introduction
que les actions de communication, même lorsqu’elles sont rattachées à
l’une des catégories recensées, répondent toujours, intentionnellement
ou non, à d’autres fins. Pour ne prendre qu’un exemple, il serait
réducteur de considérer la diffusion duspot télévisé de MSF sur les
camps bosniaques en décembre 1992simplementcommeune
opération detémoignage. En effet, le choixdumédia, le moment, la
2
forme dumessage , la signature par le logo sontautantde signes qui
montrentqu’il estaussi question de solliciter des dons etde produire de
lavisibilité institutionnelle.
Le deuxièmetype d’explication souligne l’importance destechniques
dans l’essor de la communication humanitaire. Il existe sur le marché
des outilsvariés qui sontissus dumarketing (l’informatisation des
fichiers, le couponing, le mailing, les produits-partage, le sponsoring) ou
de la communication (la création d’événements, les campagnes de
presse, les journauxinternes, lesconsumer magazine). Parallèlement,
internetpermetaujourd’hui de démultiplier les fenêtres avec les
téléchargements de bandeauxpublicitaires, l’envoi de e-card, le
marketingviral, les cyber mobilisations, etc. Comme latélévision qui
s’appuie sur des moyenstechniques de plus en plus performants, leweb
conforte les formes du« genrehumaniteaire »trenouvelle celles de
l’interpellation publique. On aurait tortde sous-estimer la pertinence
de cette explication. Il suffitd’ailleurs, pour s’en convaincre, de
rappeler l’efficacité des dispositifs qui sollicitentles dons par le biais des
nouvellestechnologies. Il ne fautcependantni se laisser abuser par
l’idée que l’ensemble des médias s’aligneraitmimétiquementsur les
cadragestélévisuels, ni oublier que lestechniques, aussi nouvelles
3
soient-elles, reformulentsouventdes répertoires ancrés dans l’histoire .
Enfin, àtrop accorder de pouvoir à latechnique, on masque les
conjonctures etles ressources des professionnels oudes publics dans
l’usage qui en estfait.
Letroisièmetype d’explication permetde pallier cette dernière
4
critique. Philippe Juhem montre ainsi que le discours humanitaire est
promuparun ensemble d’acteurs spécialisés, organisés etcoordonnés,
envue de ramener des fonds. À cela, il ajoute que les dons récoltés
favorisentla professionnalisation des entreprises humanitaires.
Autrementdit, selonune logique circulaire, le succès non démenti du
discours des ONG depuis les années quatre-vingta nourri son
2
Une victime commente : «J’aivuAuschwitch, il m’estarrivé la même chose. » Puis, avantle
plan final sur le logo de MSF,une phrase à l’écran : « Maintenant, nous savons. »
3
Voir sur cethème Dufourcq N. (dir.),L’argent du cœ