Soufisme, religion et médecine en Islam indien , livre ebook

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Date de parution

01 janvier 2010

EAN13

9782811104122

Langue

Français

Poids de l'ouvrage

2 Mo

Fabrizio Speziale
Soufisme, religion et médecine en Islam indien
SOUFISME, RELIGION ET MÉDECINE EN ISLAM INDIEN
Cet ouvrage est publié avec le concours de l’unité de recherche « Mondes iranien et indien » (UMR 7528), Centre national de la recherche scientifique – Sorbonne nouvelle – Institut national des langues et civilisations orientales – École pratique des hautes études.
KARTHALA sur internet : http://www.karthala.com
Couverture: un talisman pour la fièvre dans leMuraqqa’-i Kalīmī de Shāh Kalīm Allāh Jahānābādī (m. 1729, Delhi), voir pp. 213-214.
© Éditions KARTHALA, 2010 ISBN : 978-2-8111-0412-2
Fabrizio Speziale
Soufisme, religion et médecine en Islam indien
Éditions KARTHALA 22-24, boulevard Arago 75013 PARIS
Introduction
Le mythe de l’opposition anti-médicale du mysticisme musulman
Le premier texte médical arabe traduit en persan en Inde e remonte au XIII siècle, soit l’époque à laquelle les savants européens sont occupés à traduire en latin les textes scientifiques arabes, avec leur version de la science grecque. Les musulmans introduisent dans le monde indien et dans sa culture scientifique millénaire un savoir médical conservant des liens essentiels avec celui des civilisations préislamiques, tout en ayant déjà acquis une physionomie musulmane bien définie. Dans le monde musulman, les études médicales ont atteint une période de splendeur avant la pénétration de l’Islam en Inde, et e au XIII siècle la médecine du monde musulman présente déjà son identité composite typique. Celle-ci se présente sous deux formes : d’une part, une école considérée comme « séculière », expression de l’absorption musulmane de la science médicale en langue grecque. D’autre part, une tradition médicale religieuse, appeléeibb-i nabawī, « médecine prophétique », fondée sur les dits du prophète Muḥammad (570-632). La première est forgée par l’assimilation de la médecine 1 grecque où galénique, d’après Galien (129-200 env.) , et est
1. Le grand systématiseur du savoir des écoles médicales et philosophiques de la Méditerranée et du Moyen Orient.
6SOUFISME, RELIGION ET MÉDECINE EN ISLAM INDIEN appeléeyūnānī ibb(médecine grecque) en Inde. C’est surtout à e partir du IX siècle, sous le califat abbasside de Bagdad, que les œuvres de Galien, avec celles de Hippocrate (m. 377 env. avant J.-C.), de Dioscoride, d’Aetius d’Amida (m. 575), d’Alexandre de Tralles (m. 605), de Paul d’Egine (m. 690) et d’autres, mais aussi des textes scientifiques indiens et iraniens, circulent dans le milieu musulman. Les figures principales de cette école galénique en terre d’Islam sont les médecins et philosophes célèbres, y compris en Europe, que sont Rhazès (al-Rāzī m. 925), Haly Abbas (al-Majūsī m. vers 994), Avicenne (Ibn Sīnā m. 1037) et Averroès (Ibn Rushd m. 1198). Les sciences musulmane et indienne ont d’autre part des contacts significatifs avant la conquête musulmane de l’Inde, et aussi à travers l’héritage de l’Iran sassanide. Des médecins indiens sont actifs à la cour abbasside et lessaṃhitāde Caraka, Suśruta et Vāgbhaṭa sont traduits en arabe. ‘Alī ibn Sahl al-Ṭabarī (m. vers 855) consacre une section de son traité,Firdaws al-ikmat, à la médecine indienne. Des éléments scientifiques d’origine indienne tels que la connaissance de plusieurs drogues, la fonction du sinus et les chiffres indiens, font déjà partie du corpus intellectuel des savants musulmans lorsqu’ils arrivent en Inde. Ce travail décrit le rôle qu’ont joué les savants liés aux cercles soufis et religieux dans la transmission du savoir médical dans le monde indo-musulman. Il essayera de montrer comment, en Islam indien, les milieux mystiques et religieux contribuèrent à modeler des caractères importants des études médicales, de la transmission du savoir et de la production littéraire en médecine. Le soufisme est la voie mystique majeure du monde musulman sunnite, dont la structuration en ordres – un trait fondamental dans le monde indien – se développe à e partir de maîtres actifs au XII siècle. Les maîtres soufis et leurs initiés constituent dans l’Inde médiévale et moderne une élite de savants dont l’autorité n’est pas limitée à la sphère religieuse, ayant également une influence considérable dans la vie scientifique, littéraire et sociale de l’Islam indien. Si le lien entre les soufis et la médecine prophétique est habituellement confirmé, celui avec la médecine galénique est au contraire souvent omis ou nié par les historiens de la médecine arabo-musulmane, tandis que ce sujet demeure un domaine peu connu,
INTRODUCTION
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aussi bien dans le monde arabe que dans le monde indo-2 musulman . Le peu d’attention consacré à la relation entre le soufisme et la médecine n’est qu’un aspect du désintérêt plus général touchant jusqu’à présent au rapport entre le soufisme et les 3 sciences . Un premier obstacle au traitement du sujet provient de la définition de la position des soufis dans la culture musulmane, héritée des orientalistes et des historiens européens de la médecine dans le monde musulman. Cette définition repose essentiellement sur les seules sources arabes et sur le mode selon lequel la science arabe a interagi avec la culture européenne au Moyen Âge, et plus tard avec le colonialisme. Selon cette vision, qui rappelle la controverse entre science et foi dans le monde occidental, les soufis sont perçus comme des figures religieuses orthodoxes opposées aux thèses des savants arabes profanes, héritières des sciences séculières des Grecs. L’interprétation dominante des historiens occidentaux du rapport des religieux musulmans avec le savoir médical se fonde essentiellement sur des oppositions telles que science/religion, philosophe profane/soufi religieux, médecine galénique/médecine prophétique, qui constituent des dichotomies d’inspiration positiviste (telle science/religion, science/magie, médecine scientifique/médecine populaire), qui dès l’époque coloniale caractérisent les disciplines nées dans ce milieu, comme l’anthropologie, l’orientalisme et l’histoire comparée des sciences. La question, ici, n’est pas de nier l’aspect folklorique et populaire évident de certaines pratiques ni les différences existant entre les termes de ces dyades, évidentes dans la pensée musulmane même et sa répartition des disciplines en sciences rationnelles (‘aqlī) et sciences traditionnelles (naqlī) ; cependant, d’une vision aussi naïvement dichotomique du sujet dérive une connaissance réduite qui empêche de voir les rapports qu’entretiennent ces savoirs. En Islam, bien que le
2. Sur la relation entre les soufis indiens et la médecine galénique cf. Hussain 1976 ; sur les aspects religieuxCensus of India1961 ; Lawrence 1980 ; Pfleiderer 1984 ; Kakar 1998 : 15-52 ; Aquil 1995 : 96 sq. 3. Cf. à ce sujet, l’observation de Bausani 1978a : 199.
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