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Les années 1980 sont pour le fondateur de la communauté de Taizé une période extraordinairement dense. Avec ses frères, il accompagne les nouvelles générations dans leur recherche de Dieu et il leur lance un appel à placer la confiance au commencement de tout. Il met en route un pèlerinage de confiance sur la terre. Il accueille le pape à Taizé. Il franchit plusieurs fois le « rideau de fer » pour rejoindre des jeunes en Europe de l’Est, jusqu’à ce que tombe le Mur de Berlin. Il va partager la vie des plus pauvres. Il collabore avec mère Teresa.
En un temps où de fortes tensions menacent l’équilibre mondial, il rend visite avec des enfants à des responsables politiques pour demander désarmement et engagement en faveur de la paix. Ses efforts sont reconnus par des Prix internationaux.
Frère Roger, de Taizé
Si tout commençait dans la confiance...
1984 - 1990
Collection
Les écrits de frère Roger,
fondateur de Taizé
copyright © 2021 Ateliers et Presses de Taizé,
71250 Taizé, France
Photo de couverture : Communauté de Taizé
Photo à la fin: Sabine Leutenegger
ISBN 978 2 85040 437 5
e-book ISBN 978 2 85040 438 2
Communauté, 71250 Taizé
Tél. 03 85 50 30 30
community@taize.fr – www.taize.fr
Dans les années 1970, un ébranlement des valeurs spirituelles a commencé à se produire en Occident et un vide s’est créé. Un vide peut se remplir de beaucoup de choses, même des idées les plus étranges. Dans ces années-là, les secousses dans les sociétés ont été parfois si fortes qu’elles ont blessé la conscience de certains chrétiens et c’est un peu comme s’ils ne s’en étaient pas complètement remis.
Tant de jugements définitifs ont été portés, tant de sévérités exprimées. Sous cette pression, les spontanéités de la foi ont été atteintes, il en est qui en sont venus à un autodénigrement, une perte d’estime d’eux-mêmes, ils ne croient plus à la valeur de ce qu’ils ont vécu jusque-là.
Alors à Taizé nous nous sommes dit : les chrétiens ne peuvent pas être des « maîtres de l’inquiétude » mais bien des « serviteurs de la confiance ». Ainsi est née l’idée de mettre sur pied un « pèlerinage de confiance à travers la terre ».
Frère Roger, 1995
Le 1 er janvier 1985, frère Roger surprend les milliers de jeunes réunis à Cologne pour la rencontre européenne annuelle en leur proposant de ne pas s’adresser les uns aux autres ce banal souhait « Bonne année ! » mais de se saluer réciproquement par les mots : « Confiance du cœur ! »
C’est aussi à ce moment-là que le pèlerinage, lancé depuis quelques années pour remplacer le concile des jeunes, prend le nom qu’il portera désormais : « Pèlerinage de confiance à travers la terre ».
Le théologien orthodoxe Olivier Clément, dans un livre qu’il consacrera à Taizé en 1997, le relèvera : « La confiance est un mot-clé à Taizé » : un mot humble, quotidien, simple, commentera-t-il, plus accessible que les mots volumineux que sont amour ou communion.
Depuis Pâques 1981, frère Roger n’écrit plus de journal au jour le jour et, après Passion d’une attente (1985), il ne publie pas de nouveau livre pendant une dizaine d’années, à l’exception de trois petits ouvrages qu’il rédige en commun avec mère Teresa, et qui contiennent de larges reprises de textes antérieurs, réaménagés et actualisés (Le Chemin de Croix , 1986, Marie, mère de réconciliations , 1987 et La prière, fraîcheur d’une source , 1992 ) .
Par contre, plus qu’auparavant, il parle aux frères à Taizé pendant les repas de midi, considérant que récits et souvenirs qu’il partage avec eux et qui sont enregistrés pourront un jour constituer des pages de journal spontanées.
Il ne renonce pas pour autant à sa vocation d’écrivain, il apporte un grand soin à ses lettres annuelles aux jeunes, en y développant souvent un style poétique qui lui est propre. Il travaille longuement les méditations qu’il prononce lors des stations du pèlerinage d’un pays à l’autre. Les introductions aux conseils qui réunissent la communauté une fois par an, les prières qu’il aime formuler, reflètent aussi l’évolution de sa pensée.
Ce sont ces textes, dans toute leur diversité, que reprend ce neuvième volume des écrits de frère Roger. Il recouvre les années 1984 à 1990, avec notamment la chute du mur de Berlin et les changements en Europe de l’Est.
Pendant cette période, quels que soient ses interlocuteurs, d’une manière ou d’une autre le prieur de Taizé leur fait cette suggestion : si tout commençait dans la confiance…
1984
28 décembre 1983 – 1 er janvier 1984, Paris, 6 e rencontre européenne de jeunes, Lettre de Haïti avec les engagements de Haïti (voir Pèlerin à travers la terre , 8 e volume des Écrits de frère Roger ).
13-25 février, Rome, rencontre avec le pape Jean-Paul II.
13-14 avril, Rome, jubilé des jeunes, chemin de croix avec mère Teresa au Colisée.
22 avril, Pâques.
31 mai – 3 juin, Dresde, Allemagne de l’Est.
29 juin, Bari, Italie.
De juin à septembre, chaque semaine une rencontre européenne de jeunes à Taizé.
4-7 novembre, conseil de la communauté.
9-16 décembre, Nouakchott, Mauritanie.
28 décembre 1984 – 1 er janvier 1985, Cologne, 7 e rencontre européenne de jeunes, Lettre du désert avec une Lettre à ceux qui croient n’avoir rien été et une Lettre aux enfants . Apparaît l’expression « pèlerinage de confiance sur la terre ».
Rome, jubilé des jeunes
Le chemin de croix
Jésus est mis en croix
Jésus notre joie 1 . Jésus notre vie. Il veut faire de nous des vivants. Il se donne, il guérit. Par lui, Dieu offre à chacun la joie sereine, non pas le malheur.
À travers le monde, l’innocence des plus jeunes est si souvent blessée, quand leurs intentions les plus sincères sont défigurées, quand leur amour est rejeté. Récemment, à la fin d’un séjour en Haïti, dans un bidonville de misère, un enfant qui ne possédait rien, même pas un seul vêtement, me demandait avec insistance : « Prends-moi avec toi ! » Et autour de lui, les enfants s’exclamaient : « Oui, il n’a pas de maman, pas de père. » Dans ce bidonville, tant de visages laissaient transparaître un reflet du Christ sur la croix.
Le Christ ressuscité, qui vit dans le rayonnement de Dieu, est en même temps en agonie, aujourd’hui et demain et jusqu’à la fin du monde. Aussi, pour comprendre la mort de Jésus sur la croix, il importe de saisir d’abord qu’il est ressuscité, et qu’à chaque moment il vient nous rencontrer tels que nous sommes. Il est là pour ceux que le mépris et la violence haineuse font traverser comme de petites morts.
Jésus meurt en croix
Nous avons des yeux pour regarder, et notre regard a besoin de s’arrêter sur le visage de Jésus sur la croix. Parfois des mains d’artistes ont su exprimer ce visage au point qu’un simple regard en pénètre le mystère.
Le Christ Jésus laisse chacun libre de le choisir ou de le rejeter. Il n’oblige personne. Simplement, depuis bientôt deux mille ans, il se tient à la porte de tout cœur humain et il frappe : resteras-tu avec moi afin de veiller et prier pour ceux qui, en ce jour, sont abandonnés par ceux qu’ils aiment, subissent la haine, la torture ?
Sans même savoir comment prier, nous pouvons nous tenir en présence du Ressuscité. Et dans les longs silences, où apparemment rien ne semble se passer, le meilleur se prépare en nous, nous nous construisons intérieurement.
Jésus est détaché de la croix et déposé dans les bras de sa mère
Actuellement beaucoup cherchent le Christ tout en l’abandonnant dans cette unique communion de son Corps qui est l’Église : le Christ y est délaissé comme rarement. Pourtant, plus l’Église est terre de compassion et de réconciliation, plus elle devient maternelle à l’image de Marie et appelée à la joie : Réjouis-toi, Marie, comblée de grâce ! Réjouis-toi, Église, comblée de grâce ! Réjouis-toi, mon âme, comblée de grâce !
Toi le Christ, en nous offrant de vivre en réconciliés, tu nous arraches à l’isolement et tu nous donnes de prendre appui sur la foi de toute ton Église, depuis les premiers chrétiens, les apôtres, et Marie, jusqu’à ceux d’aujourd’hui. Ta mystérieuse présence nous ouvre aux réalités du Royaume de Dieu, surabondance du cœur, simplicité, émerveillement, jubilation.
Pâques à Taizé
Faire confiance à la foi de l’Église
Certains se disent : je ne parviens pas à comprendre la résurrection du Christ, ni non plus ma propre résurrection 2 . Que chacun sache bien que Dieu ne demande à personne de s’inquiéter. Personne ne peut croire