142
pages
Français
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2009
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Publié par
Date de parution
01 janvier 2009
Nombre de lectures
0
EAN13
9782748374315
Langue
Français
Dans les mines du Nord, des hommes descendent dans les boyaux de la terre, en dépit des coups de grisou et des écoulements de boue provoqués par la pluie... La famille Loriot mène cette existence depuis plusieurs générations déjà. Hier, c'est le petit qui est descendu pour la première fois dans la " fosse du diable ". Mais aujourd'hui c'est le drame : une inondation se propage dans les galeries. Y a-t-il des survivants ? Pierre Loriot, le père, prend la direction des opérations de sauvetage...
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Date de parution
01 janvier 2009
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0
EAN13
9782748374315
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Français
La Fosse au diable
Pierre Edouard Roland
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75015 PARIS – France
Tél. : +33 (0)1 53 69 65 55
PREMIÈRE ÉPOQUE
EL CHAU
LE VILLAGE
EL CHAU EN 1850
Ce village de six cents hectares, en Artois, dans le Pas-de-Calais, s’appelle El Chau (la chaux, la craie).On y parle un vieux français, un patois qu’on retrouve de la Belgique wallonne à la Picardie. C’est encore un bourg agricole où se dessinent les ailes du moulin à vent. Sa gentilhommière et son pensionnat de jeunes filles en briques de craie, ses quelques fermes en torchis, les « censes », parmi les champs à perte de vue, lui confèrent une impression de paix tranquille. À travers une terre fertile, on y trouve également des carrières et de l’argile.
De verts pâturages où gambadent les chevaux quand ils ne sont pas attelés aux travaux champêtres, nourrissent bovins, ovins et porcins, tout ce monde animal vivant en bons termes, à l’image des paysans dont le temps de travail est fonction de la durée du jour. On les croirait eux-mêmes nés de cette terre, qu’ils chérissent et qu’ils respectent. Cette terre qui leur donne la vie, ils en parlent comme d’une mère, la mère nourricière, et vivent comme elle, au rythme qu’elle leur impose selon les saisons.
L’hiver, les journées sont courtes, la terre est au repos, la paille et le foin sont dans la grange pour nourrir les bêtes, quatre mois sans herbage et les tenir au chaud, puis le blé et le maїs pour les volailles, les légumes et les fruits en conserve dans les bocaux. Le bois coupé s’épuise pour chauffer pendant la journée. On se couche tôt en laissant s’éteindre le feu, près de l’étable, pour profiter de la chaleur animale.
Puis les journées s’allongent, le printemps s’installe, la nature se réveille, c’est le temps des labours et des semis ; au chant du coq, tout le monde est debout. Les bœufs et les puissants chevaux tirent les charrues tandis que l’homme sème la graine qui deviendra plante.
L’été est la saison florissante où les blés et les maїs ondulent sous la brise chaude, alors que les houblons grimpent au long de leurs perches, en d’étranges forêts de bois croisés que les hommes d’ici ont inventées, vers un ciel de pureté divine. Le soleil y est parfois terrifiant de sécheresse. Plus tard, des imbéciles laisseront croire que ce département ne connaît que la pluie. Il est vrai que la pluie, quand elle commence à tomber, ne sait plus quand elle doit s’arrêter, mais elle est aussi l’annonce de l’automne roux et tiède, quand elle ne s’éternise pas au début d’un hiver tardif. Les hommes intelligents d’ici savent mieux que quiconque que la pluie est source de vie mais qu’elle peut être une terrifiante ennemie, si elle n’est pas domptée.
L’automne est le temps des bilans et de la préparation à la protection des temps froids, le temps où l’on coupe et entrepose le bois, le temps où l’on sait si l’année a été bonne ou médiocre, voire mauvaise. On voit ensuite les bergers rentrer leurs moutons dans un concert de bêlements et d’aboiements des bouviers gardiens de troupeaux.
En ces temps, les saisons se remarquent encore, elles sont réelles et partagent distinctement l’année. Chaque période de la journée est repérée par la sonnerie de l’Angélus, à 6 heures le matin puis à midi, où l’on remercie Dieu du pain du dîner, donc de la moisson de blé, moulu au moulin communal, enfin à 18 heures, où chacun s’arrête, quelle que soit sa tâche et prie silencieusement, célébrant l’incarnation du dieu chrétien, en une prière qu’ils appellent les vêpres.
L’importante église, en briques de craie d’Artois elle aussi, avec autour le cimetière, le jardin et l’abreuvoir se dresse au milieu de la place. Comme si elle était le centre des quatre points cardinaux, de cette place divergent quatre rues principales, la rue d’En Bas vers le Sud, la Grand’Rue vers l’Ouest, la Petite Rue vers l’Est, enfin, la rue d’En Haut vers le Nord.
Partant de l’église par cette rue d’En Haut, on se dirige vers la route royale en passant par le moulin, dans la plaine de Hurtebise. De là, continuant cette rue, démarre un sentier de terre et de silex appelé, à juste titre, le sentier du Moulin, qui remonte vers deux lieux-dits, Saint-Pierre d’abord, du nom du bois Saint-Pierre s’étendant à droite, puis La Rambelle, du nom du fossé qui y draine les eaux. Quelques rares et modestes maisonnées y sont parsemées. El Chau, Saint-Pierre et La Rambelle forment une campagne verdoyante où l’élevage et la culture rythment les saisons et nourrissent, bon an, mal an, les quelque six cents habitants.
Quand l’automne et l’hiver amènent le brouillard givré, des biches et des cerfs égarés traversent les champs et les villages, le museau levé, d’un pas hésitant qui traduit leur inquiétude, face à ce phénomène météorologique qui les aveugle et les prive de tout sens d’orientation. On voit en même temps les faisans, les tourterelles, les ramiers et les cailles sortir du bois Saint-Pierre et s’approcher des habitations, attirés et rassurés par les pépiements de leur cousine volaille domestiquée. Les chasseurs savent profiter de ces errances de gibiers pour améliorer leurs repas quotidiens en des dimanches copieux, festoyant de viande sauvage. En contrepartie, au moins le prétendent-ils, ils savent cesser leurs assassinats de gibiers innocents afin de permettre aux rescapés d’assurer la reproduction. Les renards, quant à eux, savent venir voler une poule au poulailler quand le bois se déserte.
Chaque année, au moment du rut, les truies de la ferme Semoine ont droit aux hommages des sangliers de passage, sortis du bois Saint-Pierre pour les honorer, ce qui donne naissance à des bâtards porcelets parés de sombres livrées, faisant la fierté du fermier. La chair aussi n’en est que meilleure, à qui aime la viande sauvage.
Le sol argileux a formé de nombreux souterrains et chaque ferme a son puits d’eau potable, claire et fraîche. Les plus aisés font leur bière. Quitte à surprendre, on y cultive aussi la vigne et on y fait son vin. On fait pousser la pomme de terre et le blé, principale richesse de la région, mais aussi le lin qui nourrit vaches et cochons et dont la tige, filée et tressée avec dextérité par les femmes, sert à fabriquer draps et vêtements.
A la Saint-Jean, le village se réunit autour d’un grand feu de bois entretenu toute la nuit et l’on y déguste la tripée , une fois tué le cochon bien gras. Tel est le quotidien dans cette paisible contrée d’Artois.
LES MÉTAMORPHOSES DU PROGRÈS
Mais bientôt, un destin et un décor nouveaux allaient transformer cette campagne et ses villages. La région enfermait dans la profondeur de ses terres un trésor gigantesque. Des forêts préhistoriques, aujourd’hui englouties, s’étaient pétrifiées au fil des siècles et transformées en houille, en charbon : l’or noir !
Déjà, depuis dix ans, on en avait trouvé à l’Escarpelle, puis, depuis un an, à Courrières, puis, en 1850, de Lens à Bruay-en-Artois ! En cette année 1852, à Ames puis à Ferfay ! La prospection approchait à pas de géants !
Les Challois, les habitants d’El Chau, ainsi que ceux de Saint-Pierre et La Rambelle redoutaient l’arrivée de ces chercheurs d’or noir et tentèrent de les chasser dès qu’ils furent sur leurs terres, mais en vain. Puis, tout alla très vite.
Cet or noir amenait des gens des environs voisins qui migraient là pour y trouver travail et prospérité. Les habitants ne voyaient pas d’un œil complaisant l’arrivée de ces étrangers turbulents autant que leurs enfants, dont le langage paillard à faire rougir les jeunes filles du pensionnat, ne s’embarrassait pas de fioritures.
Mais, peu à peu, les aversions s’estompaient. L’exploitation du charbon impliquait la construction d’une ville naissante autour de cette usine nouvelle nommée Compagnie des Mines. On avait acheté à bon prix les terrains aux censiers , les paysans. Toutes ces nouvelles âmes étaient aussi des consommateurs pour les commerces existants ou à venir, que la mine générait.
Les ouvriers des censes , les premiers, virent l’opportunité de cesser leurs servitudes auprès des fermiers et d’améliorer nettement leur salaire.
El Chau et Saint-Pierre gardèrent leur nom mais, face à son essor effarant par l’importance et la rapidité de sa transformation, La Rambelle fut bientôt rebaptisée Ville Rambelle aux Mines et prit son indépendance vis-à-vis d’El Chau.
Chacun y trouvant son compte, tout allait donc pour le mieux : l’or noir ouvrait un âge, lui aussi, en or.
DEUXIEME ÉPOQUE
VILLE RAMBELLE AUX MINES
LA CITÉ MINIÈRE
VILLE RAMBELLE, VILLE NOUVELLE
Cinquante ans plus tard, le hameau d’El Chau et ses lieux-dits, Saint-Pierre et La Rambelle avaient bien changé. De six cents en 1852, il abrite en cette année 1907 douze mille trois cents âmes ! Le moulin d’El Chau a perdu sa place du bâtiment le plus haut de la ville au profit des deux chevalets de Ville Rambelle, hautes sentinelles, la première en bois appelée Saint-Léonard, la plus récente en acier, appelée Sainte-Barbe. Au sommet des chevalets, tournent inlassablement les molettes , énormes roues qui assurent la descente et la remontée des cages, à plusieurs centaines de mètres de profondeur, dans les puits, verticaux, où se logent les mineurs de fond, l’outillage ou la recette , production de houille. Plus haut encore, étaient nées des montagnes bleuâtres, les terrils , des stériles, terres non combustibles.
Dans les entrailles de la terre s’étaient creusées les galeries , horizontales, o