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Colonisation, décolonisation, coopération xixe -xxe siècles
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Date de parution

01 janvier 2014

Nombre de lectures

0

EAN13

9782811110932

Langue

Français

Poids de l'ouvrage

1 Mo

LA GAUCHE FRANÇAISE
ET L’AFRIQUE SUBSAHARIENNE
Karthalasur internet: http://www.karthala.com (paiement sécurisé)
Couverture : Création de la une : Lab Wat.
© Éditions Karthala, 2014 ISBN : 978-2-8111-1093-2
Abdoulaye Diarra
La gauche française et l’Afrique subsaharienne
Colonisation, décolonisation, coopération e e xix-xxsiècles
Éditions Karthala 22-24, boulevard Arago 75013 Paris
dumêmeauteur
Dmocratie et droit constitutionnel dans les pays francophones d’Afrique noire. Le cas du Mali depuis 1960, Karthala, Paris, 2010.
Introduction générale
Les relations euro-africaines s’inscrivent dans un contexte historique non dépourvu d’ambiguïtés. La pensée socialiste sur les rapports euro-afri-cains n’a pas germé aujourd’hui. Les socialistes européens ont aussi une 1 vieille tradition en matière de politique étrangère . Voilà autant de révéla-tions indissociables de notre perspective. Enracinée dans une conception spécique de l’évolution sociale, la gauche européenne hérite d’une philo-sophie de l’histoire. Née au sein des puissances coloniales, elle a aussi traité des problèmes coloniaux. Est-il nécessaire, ici, d’interroger l’Histoire pour tenter de mieux situer le Nouveau ? Telle semble être notre position complexe. Comment intégrer les références historiques, souvent obligées, e e des dernières années duxixsiècle et de la première moitié duxxau sein e d’un discours se situant à la n duxx?siècle et au début du nouveau siècle Voilà un second problème qui paraît tout aussi saisissant que le premier. Pouvons-nous donc procéder par un rappel historique ? Probablement. Quelles furent par conséquent les positions des gauches anglaise, italienne, allemande, belge et française dans le débat colonial ? Y a-t-il rupture avec cette vieille tradition ou maintien des mêmes principes directeurs aujour-d’hui ? Prenons le cas des travaillistes dans la Guerre des Boers en Afrique 2 australe . La Guerre des Boers surgit dès 1899 en raison du rejet par les Noirs de la domination britannique. Les Boers continuèrent la guerre jus-qu’en 1902. Les organisations ouvrières et le mouvement socialiste essuyè-rent, de par leurs divisions internes, une série d’échecs politiques en 1890. Fondée en 1868, la Fédération des Trade Unions comptaient dès 1869 près 3 de 1 200 000 membres . Les masses affrontèrent les patrons sur la Guerre des Boers. Il s’agit ici de l’opposition des mouvements ouvriers aux colons. F. Bealey écrit :
« En vérité, les leaders des trade-unions étaient dans une large mesure hostiles à l’idée d’une action politique propre à la classe ouvrière, chose à laquelle aspiraient principalement les socialistes, à l’époque un tout petit 4 nombre » .
1. « Le socialisme et la question coloniale», inMouvement social, n° 45, octobre-décembre 1963, Paris. 2. F Bealey, « Les travaillistes et la guerre des Boers », inMouvement social45., n° 3.Ibid. 4. Cf. F. Bealey,op. cit.
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LA GAUCHE FRANÇAISE ET L’AFRIQUE SUBSAHARIENNE
Les organisations socialistes contrôlaient néanmoins les congrès socia-listes. La plus ancienne des organisations socialistes fut celle de H. M. Hyndman, patron et homme d’affaires gagné aux idées marxistes. Il créa en 1881 laSocial Democracy Federationprès de regroupant 2 680 membres. Quant à la société fabienne (Fabian Society, fondée en 1884) elle centra ses activités politiques sur l’introduction des principes collectivistes dans les partis conservateur et libéral. Ainsi, l’action poli-tique occupait le second plan. Ancrée dans les couches moyennes, elle 5 comptait en 1899 près de 861 membres . L’Independent Labour Party (ILP), forme récente des organisations socialistes, créé en 1893, regroupait 7 092 membres. Implanté surtout au nord, ce parti fut dirigé et animé par l’Écossais James Keir Hardie. Nous sommes en pleine période coloniale. Le socialisme de Hardie, conséquence de la révolution industrielle, était orienté vers une certaine réforme de la condition des ouvriers.
« Le socialisme de Hardie, héritier dans une certaine mesure des sectes non conformistes sur les travailleurs industriels, était éthique et émotionnel dans son contenu doctrinal, mais, en pratique, il se présentait comme un mouvement en faveur de la représentation politique de la classe ouvrière, destiné à la rendre indépendante à la fois du parti libéral et du parti conser-6 vateur» .
Dans le débat colonial, le défenseur acharné de l’impérialisme anglais au parti conservateur fut Joseph Chamberlain, le secrétaire colonial. Il rivalisait sur ce point avec les libéraux, eux aussi « impérialistes». Cer-tains radicaux, sous la conduite de Lloyd George, dénoncèrent les prati-ques coloniales. Les centristes du parti libéral, eux, gardèrent l’équilibre 7 autour de Campell Bannermann . La faiblesse de l’opposition résidait dans la popularisation de la doctrine coloniale et impérialiste, c’est-à-dire du « jingoïsme». Il s’agit d’un chauvinisme entretenu et développé par la presse coloniale anglaise des années 1890, entraîné et poussé au point culminant par l’incident de Fachoda qui opposa la France et le Royaume-Uni en 1898. La faiblesse nancière et le manque de mobilisation furent aussi les raisons des échecs socialistes. Le prolétariat, non éduqué, oscillait entre les libéraux et les conservateurs.
« ... Même si le travaillisme britannique et les socialistes britanniques avaient été unis dans l’opposition à la guerre des Boers, ils auraient cepen-dant dû adapter leurs critiques politiques de peur d’offenser ceux qui, 8 virtuellement, la soutenaient» .
5.Ibid. 6. Cf. F. Bealey,op. cit.40., p. 7.Ibid. 8. F. Bealey,op. cit., p. 41.
INTRODUCTION GÉNÉRALE
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Voilà une contrainte nationale qui inéchissait le discours socialiste anglais pendant la colonisation. Les socialistes étaient eux-mêmes divisés sur la question coloniale. Les socialistes intégrés par le « Little-Englande-rism » se sont dressés contre la guerre des Boers et les autres ne s’y oppo-sèrent que timidement. C’est au sein de la société fabienne que sedévelop-pèrent les tendances fractionnistes du mouvement socialiste anglais. Les théoriciens de la société fabienne mettaient l’accent, dans leurs analyses économiques, sur les avantages scaux possibles dès la n de la guerre des Boers et sur l’intégration, au sein de l’empire britannique, de la nouvelle république des Boers. Ils préconisaient également des réformes adminis-tratives qui devaient entraîner l’égalité raciale. Selon Shaw, un des théori-ciens de la société fabienne, « une grande puissance doit gouverner dans 9 l’intérêt de la civilisation considérée comme un tout » . Il convient égale-ment d’ajouter à ce défenseur des colons le courant conservateur de la société fabienne, même si leurs réactions relevaient de l’instinct. Le troi-sième courant des Fabiens fut celui du silence ; néanmoins, ce courant désapprouvait de manière discrète la politique raciste de Chamberlain. Il 10 s’agit, entre autres, de Widney et de Béatrice Webb . Par contre, la section fabienne du centre de Londres condamnait sévère-ment la colonisation. Le Fabien Olivier disait : « Si la société devait sup-poser que la question de la guerre ne la concernait pas, cela signierait que la pourriture sèche qui a étranglé le parti libéral s’est aussi emparée de la Société fabienne et qu’il n’y a pas de raison, dorénavant, pour qu’elle 11 continue à mener une existence séparée » . D’où un débat rigoureux au sein de la Société sur la question coloniale. Que faire ? Les anti-impéria-listes proposèrent, conformément à leur ligne politique, une consultation générale de la Société en février 1900. À la question : « Souhaiteriez-vous que la Société fabienne se prononce ofciellement sur la question de l’im-périalisme dans ses rapports avec la guerre ? », la réponse fut la suivante : 217 réponses favorables ; 259 réponses négatives. Comptetenu de ce résul-tat les anti-impérialistes convaincus quittèrent la Société. Ramsay Mac Donald démissionna de l’exécutif. Madame Panklurst « championne des droits de la Femme », et quelques représentants des Trade-unions (Georges Bearnes du Syndicat des ingénieurs et Pete Curran de celui des travailleurs du gaz) quittèrent eux aussi la Société. La contradiction interne déboucha sur la défaite des anti-impérialistes. Les conservateurs fabiens se rallièrent à un autre groupe constituant la nouvelle forme de l’impérialisme. Pour-quoi cette césure ?
« La défaillance que constitue le refus par la Société fabienne de suivre ceux qui voulaient une protestation publique contre le gouvernement à l’égard de l’Afrique avait ses racines dans la conviction que l’avenir de
9. Cité par F. Bealey,op. cit., p. 42. 10.Ibid. 11. Cité par F. Baeley,op. cit.43., p.
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LA GAUCHE FRANÇAISE ET L’AFRIQUE SUBSAHARIENNE
l’Afrique était celui d’un pouvoir industriel en expansion et non d’une 12 nation agraire stagnante» .
On voit, ici, l’ambiguïté des positions de la gauche anglaise face à la colonisation. La contestation fondamentale portait sur la vision conserva-trice du colonialisme. Le discours de la société fabienne souligne la néces-sité d’instaurer dans les territoires sous la colonisation un ordre social et industriel acceptable. L’inuence des idées marxistes n’a donc pas empêché la société fabienne d’adopter des points de vue spéciques sur le phéno-mènecolonial. Des termes tels que « production », « progrès », « dévelop-pement industriel» occupent une place privilégiée dans la structuration du discours. Comment situer les Boers par rapport à la lutte des classes ? Cette ques-tion créa une nouvelle divergence au sein des Fabiens. L’assimilation des Boers aux capitalistes signierait que la guerre est impérialiste et que les indigènes bantous en Afrique du Sud sont des prolétaires. Du coup, cer-tains idéologues Fabiens considéraient la guerre du Transvaal comme une guerre de classe et soutenaient que les Boers menaient une lutte des travailleurs contre le capitalisme. Le journalJustice, journal de la Société, devait plus tard préciser que « les mineurs des États de l’Ouest et du 13 Canada combattent le même homme de monopole que le fermier boer » . L’ambiguïté socialiste serait, ici, fonction de l’impact de l’intérêt national et de la voie politique suivie pour la conquête du pouvoir. Cependant, la position de Hyndmann se précisa après 1901. Démissionnaire, il devait déclarer :
« La mission de la Société des Fabiens est de répandre le socialisme... et je considère, pour ma part, que nous avons consacré assez d’énergie à l’Afrique du Sud pendant ces deux dernières années... Ce pays n’appartient ni aux Anglais, ni aux Boers... L’avenir de l’Afrique du Sud... appartient 14 aux Noirs » .
Devenu plus tard un militant au niveau international, Hyndmann se rendit successivement en Finlande, en Allemagne, en France, en Chine, en Russie, en Belgique et en Afrique australe pour défendre sa cause, celle des Noirs d’Afrique du Sud. Ainsi se sont dégagés progressivement deux grands courants : les nationalistes et les internationalistes. Le Congrès de l’ILP (Independent Labour Party) de 1900 a condamné l’impérialisme en demandant l’indépendance des colonies. La guerre est un mal, c’est l’exploitation. Néanmoins, Hardie lui-même mélangeait le radicalisme avec le néo-marxisme en raison de la difculté d’appliquer le marxisme à la lutte en Afrique du Sud. Il semble donc que l’échec des
12. F. Bealey,op. cit.45., p. 13. Cité par F. Bealey,op. cit.47., p. 14. Hyndmann, cié par F. Bealey,op. cit., p. 47.
INTRODUCTION GÉNÉRALE
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socialistes anglais face à la politique impérialiste soit moins lié aux raisons profondes de cette guerre qu’à la stratégie socialiste à adopter. Des jeux d’alliance furent inventés en vain. L’« impérialisme intellectuel» des 15 Fabiens se substitua au chauvinisme populaire de Batchford . Le mouve-ment socialiste resta divisé. L’Italie, aussi, fut une puissance coloniale. L’installation de Crispi au pouvoir en 1893 coïncida avec les affaires coloniales. Les socialistes 16 italiens ont donc traité la question coloniale. Pourquoi, et comment ? La volonté politique de remettre en cause le traité d’Uccialli par lequel le Negus avait accepté le protectorat italien sur l’Abyssinie créa en Italie une atmosphère de guerre civile. Rappelons que les troupes italiennes essuyèrent une terrible défaite en 1896 près d’Adoua. Était-ce la n de l’aventure italienne ? La deuxième conquête italienne fut celle de la Libye en 1911 alors dominée par la Turquie. Favorisée par un certain chauvi-nisme, cette conquête entraîna une série de difcultés politiques et diplo-matiques. Qualiée de « danses sur les œufs » elle se termina par la souve-raineté absolue de l’Italie sur la Libye. Le débat politique italien sur la colonisation fut insigniant, du moins au début, en raison de la misère en Italie, de l’impossibilité de suivre les exemples français ou anglais mais aussi et surtout du patriotisme. Le nationalisme italien aurait sa source dans la nécessité de lutter 17 ensemble contre le fascisme. Joseph-Emmanuel devait en 1928 spécier la position des socialistes italiens sur la colonisation devant l’internatio-nale socialiste.
« Aucune utilité, aucune tâche grandiose, aucune nécessité nationale, aucune des raisons qui ailleurs poussèrent les socialistes à envisager les problèmes nationaux d’un point de vue moins intransigeant. L’intransi-18 geance du socialisme italien était la sagesse même» .
Le parti socialiste italien d’alors était caractérisé par sa jeunesse et l’ab-sence d’une idéologie précise sur la colonisation. Néanmoins, au niveau individuel, le parti disposait d’idéologues sufsamment imprégnés de la pensée marxiste, tel Turati. L’Italie est restée d’une certaine manière atta-chée au droit des peuples à disposer d’eux-mêmes, en s’opposant à la répression d’une nation par une autre. « Le peuple a déjà inscrit de façon indélébile, depuis un siècle, dans ses cahiers politiques, la paix, la frater-19 nité, le respect de l’autonomie des races » disait Turati. Poussant plus loin cette option, il qualie de fou celui « qui traite avec mépris cette autonomie
15. F. Bealey,op. cit., p. 68. 16. Cf. G. Arfe, « Les socialistes italiens», inMouvement social, n° 45, octobre-décembre 1963. 17. Cf. G. Arfe,op. cit., p. 72 et suiv. 18. Cité par G. Arfe,op. cit., p. 74. 19. Cité par G. Arfe,op. cit.75., p.
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