109
pages
Français
Ebooks
2022
Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne En savoir plus
Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement
Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement
109
pages
Français
Ebooks
2022
Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne En savoir plus
Publié par
Date de parution
27 avril 2022
Nombre de lectures
1
EAN13
9782738156587
Langue
Français
Poids de l'ouvrage
1 Mo
Publié par
Date de parution
27 avril 2022
Nombre de lectures
1
EAN13
9782738156587
Langue
Français
Poids de l'ouvrage
1 Mo
Page de titre
Christian Vigouroux
La Société du dédain
Copyright
Inscrivez-vous à notre newsletter ! Vous serez ainsi régulièrement informé(e) de nos nouvelles parutions et de nos actualités : https://www.odilejacob.fr/newsletter
© O DILE J ACOB , MAI 2022 15, RUE SOUFFLOT, 75005 PARIS
www.odilejacob.fr
ISBN 978-2-7381-5658-7
Le Code de la propriété intellectuelle n’autorisant, aux termes de l’article L. 122-5, 2 o et 3 o a, d’une part, que les « copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective » et, d’autre part, que les analyses et les courtes citations dans un but d’exemple et d’illustration, « toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause est illicite » (art. L. 122-4). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L. 335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.
Cet ouvrage a été composé par Alket édition / Le vent se lève... – 16210 Rioux-Martin
Remerciements à B. C., M. C.-V., M. D. et F. V.
Sommaire
Introduction
Quand Théophile Gautier et Honoré Daumier s’en mêlent
Pouvoir par le dédain et dédain vis-à-vis du pouvoir
Chapitre 1. Le nuancier du dédain : le mot et ses adjectifs
Le mot « dédain »
Les stratégies de dédain
Mépris et dédain
Le dédain péremptoire et durable
Dédain, dégoût, racisme, sarcasme
Éventuelle utilité sociale du dédain bien mené
Faux dédain et fausse modestie
Chapitre 2. Les origines du dédain : doutes de soi et méfiance envers les autres
L’habitude et l’héritage : se perpétuer
Le choix de l’immobilisme : se préserver
La différenciation des mondes : se distinguer
La déception et l’humiliation : se réconforter
La peur du déclassement : se maintenir
Le dédain n’est-il qu’humain ?
Le dédain est-il sexué ?
Le dédain est-il de droite ou de gauche ?
Chapitre 3. Les théâtres d’opérations du dédain : en toutes circonstances, en tous lieux
Un parfum envoûtant
En maintes circonstances
La famille
L’amour
En société
En politique, le dédain est un classique
À la guerre
La capacité à nier sa victime : le silence
Chapitre 4. Les manifestations du dédain : toujours sobres mais démonstratives
Des manifestations précisément dosées par leur auteur
Des manifestations qui s’imposent
Des manifestations déchiffrables par tous
Par l’allure, tout simplement
Par la distance, le refus d’entendre, et même de regarder
Par l’attente infligée au demandeur
Par un vocabulaire réducteur, péjorant et diminutif
Par le rire
Par le défi
Les régulateurs ou renforts du dédain
Chapitre 5. Les cibles du dédain : cherchez la faiblesse
L’Autre
L’élite
Les institutions
Le pauvre
Le démodé
Le gros
Le voyage organisé
Le dédain est à la fois l’arme du fort et l’arme du faible
Chapitre 6. Les terreaux du dédain : rancune et désespérance
Des mots tellement connotés
Des services publics en difficulté
Des administrations oublieuses
Des choix populaires ignorés
Des orphelins de la promotion sociale
Chapitre 7. L’empreinte du dédain : déchirures et morcellement
Le dédain, facteur d’histoire
Quatre formes de dédain
Le dédain d’engagement : faire fi des obstacles au nom de l’héroïsme et du sacrifice
Le dédain d’activisme : la fin justifie les moyens
Le dédain de certitude : les autres ne sauraient avoir raison
Le dédain d’abstention : méconnaître ce qui dérange
La menace pour la société
Chapitre 8. Le dépassement du dédain : maîtrise et contrepoison
L’intelligence de soi
L’attention aux faits
L’écoute des autres et le compromis
La politesse
Le respect
L’élection
Dans suffrage universel, il y a « suffrage »
Dans suffrage universel, il y a « universel »
Et pourquoi l’élection est-elle si indispensable ?
La Révolution
La fraternité
Chapitre 9. Chroniques d’actualité pour aujourd’hui et pour demain : poursuivre le combat contre le dédain
L’économie et la politique
La question du miroir : le peuple doit-il s’admirer en délibération ?
La question de l’indifférence : moi sans les autres
Sur l’indifférence aux corps intermédiaires
Sur l’indifférence à la connaissance
Sur l’indifférence aux différences
La question des invisibles : redécouvrir et reconnaître les oubliés
La question de la minorité : se constater minorité, le devenir, le rester, en sortir
La question des territoires : le voyage à Vierzon
La question de la reconnaissance du citoyen : un pour tous, tous pour un
En conclusion
Notes
Introduction
« Quel beau livre ne composerait-on pas en racontant la vie et les aventures d’un mot {1} ? »
Honoré DE B ALZAC .
« Ô ma jeunesse abandonnée
Comme une guirlande fanée
Voici que s’en vient la saison
Et des dédains et du soupçon {2} . »
Guillaume A POLLINAIRE .
Nul n’échappe au dédain. Qu’il le délivre ou qu’il le subisse, chacun l’emporte avec soi jusque dans ses rêves nocturnes puis, dès le réveil, le diffuse, le distille, le suggère, parfois le brandit, le proclame... le combat ou le subit. Le dédain accompagne et module la vie quotidienne.
Les individus ne sont pas les seuls qui s’échangent du dédain. Les groupes et collectivités le pratiquent assidûment. Les institutions ne subsistent que par l’attachement que leur portent les hommes. Or, sans retour ni détour, le dédain consume cet attachement.
Il se signale comme l’ennemi irréconciliable des institutions.
Faut-il combattre le dédain ? En tout cas le comprendre et savoir vivre avec sa menace.
Le jaune des ronds-points ne doit pas être la couleur qui cache la forêt. Innombrables sont ceux qui, à tort ou à raison, se sentent méconnus, sous-estimés, discriminés, sous-employés, oubliés parce que dédaignés. L’ouvrier sidérurgiste du bassin de Longwy qui refuse la délocalisation en Inde, le jeune diplômé issu de l’immigration heureux d’être enfin accueilli et promu sans plafond de verre au Qatar, l’agriculteur renonçant à reprendre l’entreprise familiale du fait des incohérences du cours du porc. Et la caissière d’hypermarché dont l’horaire de travail se rétrécit sans rémission, le policier de CRS qui divorce après dix années de mobilité contrainte, semaine après semaine au rythme des manifestations, et le professeur qui réussit à captiver ses élèves, face à une classe très majoritairement non francophone, en abandonnant le programme officiel à ses risques et périls en cas d’inspection. Et l’urgentiste qui, en l’absence de téléphone en accès libre dans la salle, prête élégamment son portable personnel à un jeune patient pour prévenir la famille et peine à le récupérer au bout d’une demi-heure de conversation à l’autre extrémité du monde, et le médecin de ville, providence de sa commune, laissé seul sans protection pendant l’épidémie de Covid-19. Et l’employé de préfecture qui n’a jamais vu le préfet depuis treize mois. Quant au maire, sollicité la nuit pour un chien errant ou parce que tel lampadaire clignote dangereusement, il ne se représentera pas, accablé des défis qui ne seront plus relevés. Et le cadre supérieur de quinze ans d’ancienneté qui disposera d’une heure pour rendre badge et ordinateur puis quitter les lieux après l’acquisition de sa « boîte » par un fonds d’investissement australien. Et le chercheur qui verra ses travaux méconnus mais récupérés puis exploités par le tiers qui l’oubliera quand viendra la reconnaissance.
Chacun est fier de son métier, de son insertion dans la société, sûr de ses talents. Et, pourtant, tous rencontrent, un jour ou l’autre, l’obligation de renoncer et de se réinventer une vie, affaiblis par la conscience diffuse d’avoir été abandonnés des « autres » et des institutions. Ils ressentiront, à tort ou à raison, le dédain quasi universel qui les enveloppe, les étouffe et les déroute vers le bord du chemin pendant que la caravane passe. Même les géants sont dédaignés. Les grands artistes de demain se fédèrent au Salon des refusés, Van Gogh et Modigliani sont morts dans la pauvreté et l’oubli, Pierre Mendès France n’a gouverné que huit mois, le colonel Picquart aurait sombré dans l’oubli sans Clemenceau pour lui rendre justice.
Qui douterait du poids et des conséquences du dédain dans la vie personnelle, sociale ou politique de tous et de chacun s’exposerait à de sérieuses déconvenues. Et ce, malgré le masque d’impassibilité dont il s’affuble habituellement.
Le dédain a mauvaise réputation. Ce qui suit ne va pas rétablir son image. Mais il ne fait aucun effort pour se rendre fréquentable. Il ne souhaite pas résister à son penchant pour la provocation de bon aloi. En amour, il désespère, en politique, il détruit tout sur son passage, en droit, il ouvre la porte à l’arbitraire, en stratégie, il conduit à la faute, au travail, il se transforme en harcèlement. Il n’est probablement pas amendable. La seule issue est, non pas de tenter de le convertir en un aimable compagnon, mais, tout au plus, de le repérer assez tôt pour le tenir à distance, lui opposer que la soirée est à la fois privée et complète et qu’il n’est pas invité. Chacun se souvient d’avoir, un jour, par mégarde, laissé entrer le dédain pour aussitôt s’apercevoir de l’erreur commise et constater les dégâts par la naissance de haines irréparables. Le dédain pulvérise une soirée mais sait aussi décourager le matin.
Quand Théophile Gautier et Honoré Daumier s’en mêlent
Et pourtant, les mises en garde contre sa puissance délétère n’ont jamais cessé. Parmi les plus célèbres, un roman de Théophile Gautier et une sculpture de Daumier.
Le dédain a son roman. Le Capitaine Fracasse {3} plonge le lecteur avec le baron de Sigognac dans le monde violent du royaume de Louis XIII où chacun dédaigne chacun sous toutes les formes d’expression imaginables. La question n’est pas « doit-on dédaigner » mais « comme