LA CÔTE D’IVOIRE , livre ebook

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Date de parution

01 janvier 2009

EAN13

9782811101961

Langue

Français

Poids de l'ouvrage

2 Mo

Philippe David
LA CÔTE D’IVOIRE
LA CÔTE D’IVOIRE
.
KARTHALA sur internet : http://www.karthala.com
Photo de couverture: © Martel Olivier/Hoa-Qui/Eyedea Illustration.
© Éditions KARTHALA, 2009 ISBN : 978-2-8111-0196-1
Philippe David
La Côte d’Ivoire
Nouvelle édition revue et augmentée
Éditions KARTHALA 22-24, boulevard Arago 75013 PARIS
REMERCIEMENTS
À Sidonie Atiapo, à toute l’équipe deMarchés tropicauxet à e la librairie Anibwè (Paris-2 ).
PROLOGUE
Surprenant et même incompréhensible à ses débuts, explicité ensuite de mille manières plus ou moins convaincantes par des observateurs de qualités diverses, le drame que subit la Côte d’Ivoire depuis bientôt dix ans fait qu’il est bien difficile de 1 raconter de nouveau ce pays, pour la troisième fois . L’ami étranger qui se réjouissait autrefois – comme moi-même entre 1970 et 1999 – de trouver partout, d’Aboisso à Tabou, de Treichville à Ferkéssédougou et d’Odienné à Bonoua, une cer-taine aisance en même temps qu’une précieuse amitié, éprouve aujourd’hui beaucoup de peine à découvrir, dans l’âme de ce pays, tant de pans inquiétants, tant de mauvais replis, tant de funestes éclats. En outre, ses convulsions ne font-elles pas redouter que des crises aussi graves ne surviennent dans les nations voisines, tout aussi jeunes et fragiles, et, de surcroît, moins riches pour la plupart ? À l’aune de ce qui a pu se passer ici, Cotonou, Lomé, Niamey, Bamako, Lagos, Ouagadougou ou Douala n’auraient-elles pas, elles aussi, bien des raisons de s’embraser ? Mais, au moment d’entamer ce troisième récit, plus de vingt ans après le premier, je veux d’abord revenir aux origines pour conserver toujours, chemin faisant, l’espoir que les délices et les vertus d’autrefois vont très bientôt revivre pour le bonheur des Ivoiriens et de tous ceux qui leur conservent confiance et amitié.
re 1. 1 édition en 1986, réédition en 2000.
Quelques points de repère Appellation contrôlée, tourisme et turbulences
Moins avisée peut-être que sa voisine orientale, la Gold Coast devenue Ghana trois ans plus tôt, la Côte d’Ivoire avait choisi à l’indépendance, en 1960, de conserver le double nom commun français trop facilement traduisible que l’histoire coloniale lui avait attribué. Elle s’était condamnée ainsi à perdre son appella-tion officielle chaque fois qu’elle s’aventurait hors des limites de la francophonie, contrainte en somme de se traduire pour se faire situer et reconnaître, devenant tour à tour, selon les lieux et les circonstances, Ivory Coast, Elfenbeinküste (à Berlin), Costa de Marfim (à Rio), Costa d’Avorio (à Rome), Bereg Slonovoï Kosti (à Moscou), Sahel el Aaj (au Caire), Pantai Gading (à Djakarta), Norsuunluuraniko (à Helsinki) et j’ai oublié quoi à Bangkok. De plus en plus irrité par cet état de choses, le président Houphouët-Boigny obtint finalement des Nations unies, à la fin des années 1980, que le nom de son pays soit désormais intouchable et intraduisible. Depuis lors, son drapeau tricolore orange-blanc-vert flotte bien à Manhattan selon l’ordre alphabétique, entre ceux du Costa Rica et de la Croatie. Et si d’aventure vous tombez, au hasard de vos lectures, sur un texte anglais, américain, ghanéen ou nigérian qui persiste à la nommer Ivory Coast, sachez que le journaliste, le diplomate ou le fonctionnaire qui se permet encore pareille incongruité n’a – en principe – plus le droit pour lui.
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LA CÔTE D’IVOIRE
Ceci dit, presque cinquante ans après l’indépendance, la Côte d’Ivoire doit bien être, sinon traduite, du moins expliquée à qui ne la connaît pas. Compte tenu des épreuves qu’elle traverse encore, ce n’est certes pas chose facile. Tout au long de ce livre, il faut désormais, phrase après phrase, s’interroger sur la valeur des temps verbaux utilisés, substituer à des présents solides ou prometteurs des imparfaits désabusés ou des passés qui ne sont hélas pas simples, avant de risquer quelques futurs incertains. Pourtant, la Côte d’Ivoire était – et redeviendra peut-être – un pays à merveilles, original par maints aspects, et qui, depuis l’indépendance, se moquait presque de faire connaître ses vertus cachées. Bien sûr, tous les pays sont uniques. Les plus voisins, les plus semblables vus de loin, n’ont jamais tout à fait la même composition biochimique, historique ou culturelle. Déjà, à l’intérieur d’un même ensemble national, toutes les provinces ne se ressemblent pas. En Afrique de l’Ouest, la Gambie n’est pas le Sénégal, ni le Togo le Bénin, et la Côte d’Ivoire d’avant la tourmente n’était semblable qu’à elle-même, tranquillement et sans complexe. Elle avait beau être passée, comme une douzaine d’autres pays du continent, par le moule de la coloni-sation française pendant trois générations – tout juste la vie d’un homme – et se situer de surcroît sur les mêmes longitudes que la France, elle ne se comparait vraiment à aucun d’eux, sauf peut-être par les formes extérieures de l’État et de l’administration. Elle demeurait surtout, en dépit des graves turbulences écono-miques apparues à la fin des années 1980, plus riche, plus pros-père que la plupart de ses voisins d’Afrique occidentale, et cela compte. Il fut un temps – est-il même achevé ? – où cette situa-tion assez privilégiée dérangeait jusqu’à certains milieux fran-çais qui auraient dû plutôt s’en réjouir. Qu’on le veuille ou non, la Côte d’Ivoire moderne n’avait-elle pas été enfantée par un système colonial somme toute plus fécond que destructeur ? Enfantement honteux et illégitime aux yeux de certains, indis-cutablement douloureux ici et là (on y reviendra), mais les grandes confrontations historiques les plus fécondes n’ont-elles pas plus souvent relevé du viol que du rendez-vous galant ? À Dakar en 1970, il avait suffi d’une Quinzaine économique ivoirienne particulièrement séduisante pour que les Sénégalais,
QUELQUES POINTS DE REPÈRE
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impressionnés par les performances de leurs voisins – cousins un peu rivaux – cessent de dire «mann dall li !» ou «astafou-roullaye !» pour exprimer leur admiration : pendant quelques mois, on ne disait plus que «Hoouphoouët-Kodiwaar ! Booooigny !» en traînant longuement sur les syllabes. Quelques mois plus tard, je m’envolais moi-même vers Abidjan pour la première fois. Dans les réunions internationales, pendant longtemps et quand on voulait croire encore aux lende-mains chantants de Sékou Touré, de Nkrumah ou de Modibo Keïta, les interventions des Ivoiriens suscitaient l’étonnement et l’intérêt. Les autres délégués confessaient à la pause-café leur ignorance ou leurs préjugés à l’encontre d’un pays qui ne prenait guère la peine de se faire connaître. Pourtant, tous ces immigrés « allogènes » maliens, voltaïques (futurs burkinabé), libériens et ghanéens qui avaient déjà choisi par centaines de milliers de venir s’installer en pays baoulé, bété, dan ou guéré (nous les y retrouverons pour le meilleur ou pour le pire) savaient bien, eux, que la Côte d’Ivoire était plutôt bonne à vivre. C’est comme ça ! La Côte d’Ivoire ne venait pas aux autres, elle les a laissés et même fait venir. Et pendant très longtemps, sa politique fut la bonne. Elle ne donnait et ne se donnait qu’à ceux qui se dérangeaient pour lui faire visite. Et quand ils venaient – j’en témoigne à mon tour trente-neuf ans après akwabaa !bienvenue !, ils n’étaient pas déçus. En général et autrefois... Juillet 1970. Pour la première fois, l’Afrique opulente et verte des tropiques humides se substitue sous mon regard émer-veillé à celle, blonde, rousse, famélique, de toutes mes pérégri-nations sahéliennes antérieures. Forêts, plantations, verdure sauvage ou au contraire très ordonnée : des bataillons élancés d’hévéas, l’océan moucheté des palmiers à huile ou encore, au royaume des ananas, l’ondulation des champs épousant fidèle-ment les courbes de niveaux du paysage, des touffes de forêt sombre (peut-être vierge encore ?), les bosselures des collines chauves d’Aghien et de Bingerville... des noms qui ne chantent pas encore à mon souvenir, mais j’ai déjà entraperçu par le hublot quelques délicieux recoins de Polynésie africaine sur la lagune scintillante et même le palais, baroque et fantôme, des gouverneurs de la vieille époque.
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