118
pages
Français
Ebooks
2020
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Publié par
Date de parution
09 avril 2020
Nombre de lectures
1
EAN13
9782898190148
Langue
Français
Publié par
Date de parution
09 avril 2020
Nombre de lectures
1
EAN13
9782898190148
Langue
Français
Copyright © 2020 Dominic Bellavance
Copyright © 2020 Éditions Corbeau Inc.
Tous droits réservés. Aucune partie de ce livre ne peut être reproduite sous quelque forme que ce soit sans la permission écrite de l’éditeur, sauf dans le cas d’une critique littéraire.
Éditeur : Simon Rousseau
Révision éditoriale : L.P. Sicard
Révision linguistique : Marie Laporte
Conception de la couverture : Mathieu C. Dandurand
Photo de la couverture : © Getty images
Mise en pages : Sébastien Michaud
Icône des enveloppes : © Freepik
ISBN papier : 978-2-89819-012-4
ISBN PDF numérique : 978-2-89819-013-1
ISBN ePub : 978-2-89819-014-8
Première impression : 2020
Dépôt légal : 2020
Bibliothèque et Archives nationales du Québec
Bibliothèque et Archives Canada
Éditions Corbeau Inc.
1471, boul. Lionel-Boulet, suite 29
Varennes (Québec) J3X 1P7, Canada
www.ada-inc.com
info@ada-inc.com
Participation de la SODEC.
Nous reconnaissons l’aide financière du gouvernement du Canada par l’entremise du Fonds du livre du Canada (FLC) pour nos activités d’édition.
Gouvernement du Québec — Programme de crédit d’impôt pour l’édition de livres — Gestion SODEC.
Catalogage avant publication de Bibliothèque et Archives nationales du Québec et Bibliothèque et Archives Canada
Titre : Un roman dont vous êtes la victime : laissez-les brûler / Dominic Bellavance.
Autres titres : Laissez-les brûler
Noms : Bellavance, Dominic, 1982- auteur.
Identifiants : Canadiana 20200073753 | ISBN 9782898190124
Classification : LCC PS8603.E54 R66 2020 | CDD C843/.6—dc23
Ce livre est une œuvre de fiction. Même s’ il fait référence à des institutions publiques de Saint-Odilon-de-Cranbourne et de Frampton, particulièrement au Service Incendie de Saint-Odilon, toute ressemblance entre les personnages et des personnes réelles ne serait que pure coïncidence.
This is fine. I’m okay with the events that are unfolding currently. That’s okay, things are going to be okay.
— K. C. Green
Chapitre 1
A ssise à l’arrière de la nef, le plus près possible de la sortie, Sarah observait d’un œil scrutateur la marée humaine à l’intérieur de l’église de Saint-Odilon-de-Cranbourne. Tout le monde portait du noir de la tête aux pieds, à l’exception des maladroits qui avaient ignoré le code vestimentaire exigé par les célébrations de funérailles catholiques.
Cela faisait tout drôle pour Sarah de voir Alexis Paré habillé en soutane, debout sur la chaire, en train de prêcher devant ses fidèles. Depuis combien d’années ne lui avait-elle pas adressé la parole ? Cinq ans ?
Certes, Alexis faisait beaucoup jaser au village. Sarah savait que personne n’osait encore l’appeler « monsieur le curé », étant donné qu’il était plutôt jeune pour avoir cette position dans l’Église. En temps normal, la prêtrise était un club réservé aux croûtons échevelés dans la soixantaine, et de son côté, Alexis n’avait même pas trente ans. Il n’avait surtout pas la tête de l’emploi. Si la plupart des curés du Québec étaient aussi attirants sexuellement qu’un tronc d’arbre, Alexis avait tout pour lui : en plus d’avoir un regard capable de faire fondre du beurre sans micro-ondes, il ressemblait comme deux gouttes d’eau à l’acteur Kit Harington, qui incarnait Jon Snow dans Game of Thrones . Sans les problèmes d’alcool. Les gars comme lui, avec des cheveux noirs légèrement bouclés, une barbe fine, des yeux perçants comme ceux-là, le tout assorti avec un air mystérieux et sombre, on ne les appelait pas « monsieur le curé ».
Sarah se demandait si les dames assises dans les premières rangées devaient changer leurs sous-vêtements en revenant chez elles le dimanche, après chaque célébration. Un charisme comme le sien ne s’inventait pas.
Sarah en savait quelque chose.
Et pourtant…
Ce matin-là, le sermon d’Alexis ne collait en rien avec l’image qu’elle avait conservée de ce jeune homme, de l’époque où elle et lui étaient, disons… plus proches. L’homélie était saccadée, maladroite. Alexis bégayait sans cesse ; on aurait dit un gamin de troisième année du primaire qui récitait un exposé oral, les yeux plantés sur sa feuille de notes, les fesses serrées.
Une odeur de chien mouillé flottait dans l’église ; il devait y avoir une centaine de parapluies dégoulinants cachés sous les bancs. La lumière turquoise filtrée par les vitraux latéraux donnait une ambiance tout sauf chaleureuse à ce lieu de culte. Sarah grelotta. Elle songea à remettre son manteau sur ses épaules.
Elle lorgna la sortie du coin de l’œil, encore une fois, puis redirigea son attention vers le curé.
Devant l’autel, Alexis réajusta le micro filiforme accroché à sa tête. Il prit une profonde inspiration ; les haut-parleurs retransmirent un sifflement aigu dont l’écho subsista quelques secondes sous le plafond vertigineux.
— Ne crains p oint.
Le « p » avait explosé dans les enceintes. Alexis bougea son micro une deuxième fois.
— Je suis… le Premier et le Dernier, et le Vivant. J’ai été mort…
Il s’essuya le visage avec la manche de sa soutane, tout en observant les paroissiens assemblés devant lui. Il cligna des yeux à répétition comme s’il venait de se réveiller.
Enfin, il continua :
— … et voici que je suis vivant aux siècles des siècles. Je tiens les clés de la mort et de l’Enfer.
Sarah ignorait si c’était le cercueil à la base des marches de la chaire qui troublait Alexis à ce point. Avait-il connu feu Ludovic Jolicoeur personnellement ?
Sarah se pencha à l’oreille de Justine, assise à sa gauche.
— Cibole. On dirait qu’il est aussi magané que toi.
Depuis qu’elle avait déposé ses fesses de taille 3 sur le banc d’église, aux côtés de Sarah et de Bianca, Justine se plaignait sans cesse d’avoir mal à la tête. Sarah se demandait si Alexis et elle n’avaient pas attrapé le même microbe.
— J’ai l’air si pire que ça ? maugréa Justine. Je me suis arrangée avant de venir, pourtant. Mon fond de teint est flambant neuf.
— Ta face rayonne pas de santé. Même si t’en avais mis trois couches, ça aurait rien changé.
— J’ai fait ce que j’ai pu.
Agacée, Bianca souffla en direction de Sarah et de Justine :
— Chut ! Voyons, les filles !
— Calme-toi, répondit Sarah en chuchotant. On est assises au fond. Personne nous entend.
Comme elles, plusieurs personnes tournaient la tête pour discuter à voix basse avec leurs voisins, sûrement pour commenter l’état général du curé.
— En passant, dit Bianca en sifflant les mots entre ses dents, pourquoi t’es pas venue à l’exposition de Ludo, hier ? Je pensais que tu connaissais sa famille. Tes parents étaient pas amis avec les Jolicoeur ?
— Mes vieux sont pas ici, ils sont en croisière dans le Sud avec mon frère. Nah… Ça aurait été vraiment bizarre que je me pointe sans eux.
Bianca haussa les sourcils, étonnée.
— Comment ça, « bizarre » ? Qu’est-ce qu’il peut y avoir de bizarre à venir serrer des mains et à dire « mes sympathies » ? Moi, j’aurais ben trop peur qu’on remarque mon absence. Le village aurait jasé.
— C’est pas une catastrophe. Tout le monde sait que ma famille est partie. Ils ont dû penser que j’étais avec eux.
— Pourquoi t’as pas pris l’avion, toi ?
— J’ai mes raisons, Bianca.
— En tout cas, aujourd’hui, les gens voient que t’es là… Je te le dis, ça va jaser.
— Chuuuuuuuuut ! ironisa Justine, clairement à l’attention de Bianca, qui lui avait fait le même reproche.
Mais comme prévu, personne ne semblait avoir remarqué cette petite discussion. Les trois personnes assises directement en avant d’elles devaient cumuler 405 années de vie terrestre à elles seules. Si elles avaient un superpouvoir, ce ne devait pas être lié à l’audition.
— Je voulais juste pas y aller, OK ? J’aurais même pas su où me placer dans la salle.
Bianca la fixa deux secondes, comme si son pouvoir à elle , c’était de juger le monde sans intermittence.
— Qu’est-ce que tu veux dire par là ?
— Le gars dans le cercueil, là-bas. C’était mon… chum ?
— HEIN ? dirent Justine et Bianca.
Sarah se frotta le visage, privilège de fille qui ne mettait jamais de maquillage.
— Ah… C’est compliqué. J’ai rencontré Ludovic sur Tinder il y a de ça même pas deux semaines. On se voyait un soir sur deux. Pour le fun. Sans arrière-pensées. Vous comprenez ? On a pas eu le temps de faire grand-chose. Je savais même pas si on était exclusifs, j’ai pas osé demander ce qu’il voulait tirer de « ça », de « nous ». Et sa famille était au courant de rien. Vous m’auriez vue, vous autres, me pointer à l’exposition hier pour annoncer la nouvelle à sa mère ? « Salut, Francine. Mon nom, c’est Sarah Bonenfant, j’étais la blonde secrète de ton fils de 28 ans… ou 29, je sais pas trop, bref… Ça te dérange-tu si je viens ramasser des sympathies à côté de toi ? » Jamais de la vie.
— Voyons, Sarah, protesta Bianca. T’aurais pu nous le dire. Le gars dans le cercueil, c’est ton chum ?
— Je viens de te dire que non. Je l’sais pas. Asti. Arrête.
— Sacre pas dans une église.
— J’ai pas sacré.
Justine, qui avait déjà l’air malade sous son épaisse couche de maquillage, eut du mal à cacher son malaise en entendant l’histoire de Sarah.
— Tu te sens comment ? demanda-t-elle avec douceur, en posant une main sur son avant-bras.
— Je le sais pas, comment je me sens, Justine. Est-ce que je devrais pleurer ? Me fâcher ? Je le connaissais à moitié pas, Ludovic. Il m’a dit qu’il a toujours habité à Saint-Odilon, et me semble que je l’ai jamais croisé avant ce mois-ci. C’était bien le fun, les deux semaines qu’on a passées ensemble, c’est vraiment plate son AVC, y’était trop jeune pour mourir de façon niaiseuse comme ça. Mais qu’est-ce que tu veux que j’y fasse ? Y’est mort ! J’suis quand même pas pour aller brailler sur son cercueil en grattant le bois avec mes ongles ? C’est poche, mais la vie continue.
— Ouf, souffla Bianca. C’est fucked-up , ton histoire.
— J’étais déjà au courant, merci.
— Donc, t’as pas de peine ? demanda Justine.
— C’est quoi, cette question-là ? Est-ce que j’suis obligée d’en avoir ? Est-ce que c’est requis par la loi ?
— Tu dois ress