358
pages
Français
Ebooks
2018
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2018
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Publié par
Date de parution
23 avril 2018
Nombre de lectures
7
EAN13
9782897869755
Langue
Français
Publié par
Date de parution
23 avril 2018
Nombre de lectures
7
EAN13
9782897869755
Langue
Français
Copyright © 2012 Patrice Cazeault
Copyright © 2012 Éditions AdA Inc.
Tous droits réservés. Aucune partie de ce livre ne peut être reproduite sous quelque forme que ce soit sans la permission écrite de l’éditeur, sauf dans le cas d’une critique littéraire.
Éditeur : François Doucet
Révision linguistique : Daniel Picard
Correction d’épreuves : Nancy Coulombe, Katherine Lacombe
Conception de la couverture : Matthieu Fortin
Photo de l’auteur : © Patrick Lemay
Image de la couverture : © Gettyimage
Mise en pages : Sébastien Michaud
ISBN papier 978-2-89786-973-1
ISBN PDF numérique 978-2-89786-974-8
ISBN ePub 978-2-89786-975-5
Première impression : 2012
Dépôt légal : 2012
Bibliothèque et Archives nationales du Québec
Bibliothèque Nationale du Canada
Éditions AdA Inc.
1385, boul. Lionel-Boulet
Varennes, Québec, Canada, J3X 1P7
Téléphone : 450-929-0296
Télécopieur : 450-929-0220
www.ada-inc.com
info@ada-inc.com
Diffusion
Canada : Éditions AdA Inc.
France : D.G. Diffusion
Z.I. des Bogues
31750 Escalquens — France
Téléphone : 05.61.00.09.99
Suisse : Transat — 23.42.77.40
Belgique : D.G. Diffusion — 05.61.00.09.99
Imprimé au Canada
Participation de la SODEC.
Nous reconnaissons l’aide financière du gouvernement du Canada par l’entremise du Fonds du livre du Canada (FLC) pour nos activités d’édition.
Gouvernement du Québec — Programme de crédit d’impôt pour l’édition de livres — Gestion SODEC.
Conversion au format ePub par:
www.laburbain.com
à Martin dont l’imaginaire nourrit le mien
MYR
Première
partie
Il attendait dans la pénombre dans une immobilité inquiétante. Même ses yeux semblaient figés au fond de ses orbites. Malgré son inactivité, de la sueur perlait sur sa peau habituellement sèche. Affalé dans un large fauteuil, les bras pesamment appuyés sur les accoudoirs, il se livrait à une intense réflexion.
Il pouvait entendre les bruits de la réception que donnait sa famille dans la pièce adjacente : les verres qui s’entrechoquaient, les toasts prononcés en l’honneur des hôtes, les invités qui se congratulaient. Il discernait également les conversations. On parlait des conquêtes, des nouvelles colonies, des rencontres diplomatiques…
Nous vivions dans un âge de promesses. Il s’agissait d’une ère de découvertes. Une époque grandiose pour l’Empire.
Et on allait tenter de l’écarter de tout ça.
Il n’était pas dupe. Il pressentait les signes avant-coureurs. Il devinait les intentions.
Des tractations se livraient depuis les coulisses. On en parlait ouvertement dans certains milieux. Malgré sa position privilégiée, il existait des moyens de lui dérober ce qui lui appartenait de droit. Ça s’était déjà vu dans le passé. Il ne comptait pas les laisser faire…
Il s’absentait de la réception depuis plus d’une heure, prétextant devoir répondre à un important message. En vérité, toute cette hypocrisie le dégoûtait au plus haut point. Toutefois, quelqu’un remarquerait bientôt qu’il tardait à retourner dans la grande salle. On enverrait des domestiques pour s’assurer qu’il revienne porter son masque devant les autres invités.
Le Tharisien pencha finalement son regard sur ses genoux. Appuyé sur ses cuisses trônait un puissant désintégrateur. Il l’empoigna d’un geste lent et vérifia qu’il était armé.
Il quitta son siège et rejoignit les autres convives dans l’antichambre de l’amphithéâtre où se tenait la réception.
* * *
Le menton appuyé dans la paume, je regardais le soleil se coucher au loin. Distraite, j’agitais une cuillère de bois dans le chaudron bouillant. J’étais seule, et je me sentais bien. Alors que mes nouilles ramollissaient lentement sur la cuisinière, je laissai vagabonder mes pensées. En quelques enjambées, j’approchai de la grande fenêtre et m’y postai. Sans surprise, je compris que je me remémorais encore une fois mon voyage sur la Terre. Il s’agissait d’images que je chérissais, et elles revenaient tout naturellement à la surface lorsque le calme m’envahissait.
La Terre. Avec ses gigantesques villes tentaculaires, ses bâtiments qui s’étendaient jusqu’au ciel, sa population hétéroclite… J’avais finalement pu la visiter. J’en avais tant entendu parler à l’école. De plus, j’y étais allée accompagnée d’un Tharisien, le Moniteur Haraldion. Ils en avaient fait un événement historique : la première humaine d’Averia à se rendre sur Terre depuis la conquête, ainsi que le premier Tharisien à y être invité depuis la fin de la guerre.
Je quittai la fenêtre pour surveiller mes pâtes. Celles-ci semblaient prêtes. Assaisonnée et recouverte d’un fond de sauce rescapé du souper de la veille, la portion me parut un tantinet trop grosse pour une personne. En m’assoyant pour les déguster, je replongeai dans mes souvenirs. La visite avait amené son lot d’entrevues et de discours. Un miracle que j’aie survécu à tant d’attention ! On disait qu’il s’agissait d’un événement unique, que c’était l’occasion idéale de rapprocher le peuple humain des Tharisiens. Les relations demeuraient glaciales depuis la fin de la guerre, et tout avait failli voler en éclat pendant l’insurrection sur Averia. Pour ma part, j’avais fait de mon mieux pour ne pas m’écrouler sous l’acharnement médiatique qui pesait sur moi. En comparaison, notre Charal Assaldion m’avait paru bien discret ! Alors qu’on me harcelait de toutes parts, je n’avais souhaité que contempler de mes propres yeux la planète qui peuplait si souvent mes rêves.
Heureusement, peu après notre arrivée, d’autres dignitaires tharisiens étaient venus sur Terre. Nous avions pu souffler un peu et poursuivre notre visite de façon plus anonyme. J’étais plus que soulagée de passer le flambeau de cette mission diplomatique.
Myr avait été des nôtres pendant le voyage. La vie avait été si dure avec nous pendant les quelques semaines qui avaient précédé notre départ d’Averia. Avoir ma petite sœur à mes côtés pendant ce périple, malgré tout ce qui nous avait opposées auparavant, s’était avéré d’un réconfort indescriptible.
Nous avions tant de choses à nous dire, tant de conflits à régler.
En plongeant à nouveau mes ustensiles dans mon plat, je trouvai soudainement à mes pâtes un goût amer. Je les retournai quelques fois dans mon assiette avant de décider de les abandonner à la poubelle. De toute façon, soupirai-je, cuisiner pour soi est d’un ennui.
Je jetai un autre coup d’œil dehors. Il se faisait tard, et Myr ne rentrait toujours pas…
* * *
La musique était trop forte, mais ça me plaisait. Les décibels entravaient toute prétention de conversation tenue à un volume normal et ça empêchait tous ces abrutis de venir m’embêter.
— Hé, me lança tout de même l’un d’eux. Ton mec n’est pas là ce soir ?
Il devait crier pour se faire entendre et ça lui conférait un air débile.
— Non, et ce n’est pas mon mec, pestai-je.
Il s’agissait probablement du bar le plus sale dans le quartier le plus infâme d’Averia. Tout y était repoussant. Les tables, parsemées de graffitis et de gravures, étaient si collantes que je me demandais sincèrement si quelqu’un s’était donné la peine de les nettoyer depuis l’ouverture. De vieilles affiches couvraient les murs suintants et sombres. Certaines, de toute évidence, servaient à dissimuler les trous béants qui décoraient l’établissement, brèches parfois démesurées, cicatrices des nombreuses bagarres qui ne manquaient pas de se déclarer tôt ou tard pendant la soirée. De plus, il régnait dans le bar une forte odeur nauséabonde. On s’y habituait, certes, mais cela contribuait à rendre cet endroit peu accueillant.
Et je préférais ne pas penser à l’hygiène des toilettes…
Le type avait pris la liberté de s’asseoir à mes côtés, près du banc que j’avais choisi pour surveiller l’entrée.
— Tu veux une bière ? m’interrogea-t-il.
Je détestais cette boisson.
— Oui.
Un tel établissement attirait inévitablement une clientèle à son image. Les gens étaient laids et sales. Le bar ne portait pas de nom officiel, mais était connu de ses tenanciers sous le pseudonyme de l’Antre. Abritant la vermine d’Averia, il s’y déroulait toute la panoplie d’activités illicites auxquelles pouvait s’adonner l’élite de l’humanité sous le nez des Tharisiens.
Le barman déposa nos consommations sur le comptoir. Quand il me vit, il fit sa moue habituelle.
— Myr, dégage d’ici. Tu sais bien que, s’il y a une perquisition dans le bar, je suis dans le pétrin.
— Les Tharisiens ne viennent jamais dans ce trou, Ernest. Ou du moins, pas les soldats tharisiens… Alors fiche-moi la paix, d’accord ?
Ernest s’en retourna sans insister, comme chaque fois. Le gars à mes côtés laissa échapper un rire désagréable de sa large gorge.
— Y a pas à dire, tu as du cran, gamine. Je comprends mieux pourquoi l’autre te tourne autour.
Je lui lançai mon regard le plus glacial.
— Mais c’est que tu es jolie aussi, renchérit-il d’un timbre inhabituel pour un type de sa carrure. Surtout quand tu te fâches.
Il fit mine de me caresser la joue avec le revers de sa main. Je le laissai faire sans me départir de mon regard acéré. Dès qu’il eut enlevé sa patte de mon visage, je pris une longue gorgée de bière. Mon dégoût pour ce liquide réussirait peut-être à compenser l’aversion que j’avais éprouvée pour ce contact physique.
— Hé, doucement, Myr. Ce truc coûte une fortune. Déguste-la un peu.
Je jetai un œil autour de moi. Il se faisait tard, et l’endroit commençait à se bonder d’indésirables. Je savais qu’ il ne viendrait pas.
— Va m’en chercher une autre, dis-je au pauvre type qui ne me lâchait pas des yeux.
* * *
Je préparais distraitement mes effets pour assister à mes cours à l’université. La crise qui avait sévi sur Averia, deux ans auparavant, avait considérablement retardé mes études. L’université n’avait pas été épargnée pendant les combats entre les milices improvisées et les régiments de soldats tharisiens appelés en renfort par Karanth. Les insurgés avaient transformé de nombreuses facultés en place forte. Certains bâtiments avaient