Noces d'éternité , livre ebook

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2014

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Angleterre, année 1890...


Ellen Covert vit dans un manoir victorien sujet à d’étranges manifestations : empreintes de pas mouillés, robe de mariée qui saigne,...


L’atmosphère se charge de mystère jusqu’au jour où le corps de son futur époux est retrouvé mort au matin de ses noces.


En dépit des conventions, Ellen enquête sur le mystère de la demeure et sur celui qui entoure sa propre personne. Dépourvue de droits, elle se heurte aux secrets de son père et à la mort mystérieuse d’une esclave.


Perdue entre intimes convictions et troubles, elle s’apercevra que le plus grand danger ne vient pas d’où elle pense...

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Date de parution

08 octobre 2014

Nombre de lectures

10

EAN13

9782919550913

Langue

Français

Noces d'éternité
Aude Réco
Éditions du Petit Caveau - Collection gothique
Avertissement

Salutations sanguinaires à tous !
Je suis Van Crypting, la mascotte des éditions du Petit Caveau.
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R  L'aube sombre du marié R
Un hurlement déchira la nuit. Loin derrière la falaise, dans le manoir Covert, nul ne se réveilla pour autant.
1890, vingt ans plus tard
Debout au bord de la falaise, Ellen Covert contemplait la mer qui s’écrasait sur les rochers en contrebas. Le soir, la vaste étendue d’eau s’empourprait au coucher du soleil. Elle flamboyait avant de disparaître dans le noir, la rendant aux mythes que l’on écrivait sur elle depuis la nuit des temps. Une légère bise caressa le visage d’Ellen alors que ses longs cheveux dorés volaient au vent. Elle adorait venir jouer ici depuis qu’elle était en âge de marcher.
Reculé, le manoir de son père disparaissait au milieu des arbres. Il fallait longer un petit sentier pour le rejoindre. La tranquillité de ces lieux apaisait la jeune lady. Loin de l’agitation permanente de la demeure, elle profitait des derniers beaux jours de l’été. Il faisait frisquet pour la saison, mais l’automne arrivait prématurément chaque année. Ellen avait l’habitude.
Bientôt, Ayden, son père, apparaîtrait derrière elle et la gronderait avec la gentillesse qui le caractérisait tant. Son épouse était morte en couches à la naissance d’Ellen, aussi veillait-il sur leur enfant avec un soin tout particulier.
— Je ne comprends pas ce que tu trouves à cet endroit, dit-il en la rejoignant.
Elle se tourna dans sa direction et lui sourit sans répondre. Elle connaissait cette phrase par cœur. Grand, bel homme et bien bâti, une fossette creusait chacune des joues de lord Covert quand un sourire étirait ses lèvres. Mais là, tel n’était pas le cas.
— Même ta suivante n’ose pas mettre les pieds ici, poursuivit-il tandis qu’ils rentraient.
— Parce qu’elle craint le vide, père.
L’immense bâtisse se dessina derrière les branches à peine effeuillées. Le cœur d’Ellen se serra. Demain, elle quitterait cette vie pour rejoindre celle de Wilhelm Scrope, médecin réputé dans tout le nord de l’Angleterre. Elle ne désirait pas l’épouser. Mariage arrangé. La santé de son père devenant fragile, il jugeait préférable de confier sa fille unique à un homme bien avant son décès. Il lui avait exposé ses raisons avec un calme sidérant. Pas un tremblement dans la voix, pas un doute. Rien de ceci. Ayden Covert ne faillait pas. Jamais. Trop fier pour ça.
Le manoir manquerait à Ellen. Son agitation aussi, en fin de compte. Wilhelm travaillait toute la journée et, le soir venu, buvait un whisky ou deux dans le salon. Il ne parlait presque pas, l’esprit toujours ailleurs. Ellen ne le verrait que très peu, contrairement à son père. Elle ferma les paupières pour s’empêcher de pleurer.
Une image lui apparut soudain comme un flash. Celle du domaine. Les écuries se trouvaient encore quelques mètres sur le côté et non au fond. Des barrières entouraient l’habitation. Aujourd’hui, de longues marches y menaient, avec un gros pot de fleurs de part et d’autre. L’ensemble était constitué d’un bâtiment central auquel s’ajoutaient deux ailes et, si l’extérieur restait agréable à contempler, l’intérieur se révélait plus lugubre.
Loin derrière le parc, au sud du manoir, s’étendait un lieu inconnu pour Ellen. Elle n’avait jamais eu le droit d’y aller, jamais eu l’autorisation de franchir ce qu’il restait de l’ancienne haie. Maintenant, même si cette limite concrète n’existait plus, la jeune femme se gardait bien de désobéir à son père.
Une main se posa sur son épaule ; Ellen sursauta et revint à la réalité. Lord Covert la considérait d’un œil préoccupé. Elle le rassura. Ce fut tout. Ellen masqua sa surprise quant à l’apparition avec une facilité qui l’étonna. Une légère crainte s’immisça, puis elle la balaya d’un geste discret de la main. Son père n’y avait vu que du feu ou préférait ne pas aborder le sujet.
La jeune femme ressentit un léger vertige dès ses premiers pas vers le manoir. Appréhension d’y vivre ses derniers instants ou résultat de ce qu’elle venait de voir ? Elle n’aurait su l’expliquer. Images troublantes, en tout cas. Elle avait déjà parcouru des albums photos, hissée sur les genoux de Covert. Aucune ne reflétait sa vision.
Ellen se retint à une branche tombante pour éviter de chuter et reprit sa marche. Au-delà des feuillages, haut dans le ciel, le soleil descendait au milieu de volutes nuageuses rouge-orangé. Il était prévu que la jeune femme se couche tôt. Son mariage serait célébré le lendemain matin dans une chapelle voisine, et elle se devait d’être en forme. La mort dans l’âme, elle passa la porte principale qui menait à un hall décoré de statues, monta le grand escalier de chêne massif et traversa le sombre couloir du premier étage. La moquette rouge sang étouffait ses petits pas. Les flammes des lampes à pétrole en étain dansèrent à son passage jusqu’à sa chambre. Ellen se perdit un instant dans ses pensées. Son lit à baldaquin, sa table de nuit, sa coiffeuse… c’était la dernière fois qu’elle dormirait ici. Elle regarda par la fenêtre. Une pluie naissante brouillait les vitres. Le ciel pleurait toutes les larmes de son corps et, bientôt, si le courage lui manquait, Ellen le rejoindrait dans sa peine. Elle essaya de distinguer ce monde qu’elle s’apprêtait à quitter, celui de son enfance, mais les gouttes rendaient le paysage flou. Le vent se leva. Derrière Ellen, les voix de ses servantes la rappelèrent à la réalité.
Quand elles eurent terminé de l’aider à enfiler sa tenue de nuit, elles se retirèrent dans un silence qui troubla la future mariée. Elles ne lui parlaient presque plus depuis trois jours, juste pour les banalités d’usage. Ellen eut la sensation d’être déjà partie à leurs yeux, ce qui renforçait son chagrin. Elles évitaient les conversations de peur de commettre une erreur, c’était évident. Néanmoins, Ellen ne pouvait pas leur en vouloir. Son mariage avec Wilhelm ne la destinait pas à une existence malheureuse. Seulement morne, dénuée de tout intérêt puisqu’il n’y aurait plus son père pour lui raconter des histoires. Mais elle avait passé l’âge de ces récits depuis bien longtemps. Lord Covert continuait de les lui conter parce qu’il y tenait beaucoup. Rien de plus. Et Ellen ne se sentait pas le cœur à gâcher ces précieux instants. Son père était un homme occupé, et avec la maladie, il renonçait à tant de choses.
Désappointée, elle se coucha. Le TIC-TAC de la pendule attira son attention. Ces mêmes TIC-TAC qui la berçaient d’habitude quand la fatigue montait peu à peu mais qui, à son sens, l’agaceraient plus qu’autre chose durant les prochaines heures. Elle leva les yeux sur l’horloge puis se résolut à essayer de dormir. Son cœur se serra d’angoisse. Elle formula une prière dans sa tête destinée à lui accorder au moins le bonheur auquel elle pensait avoir droit. Elle veillait lord Covert depuis presque un an avec la peur au ventre, celle de le voir mourir sans qu’elle puisse lui dire adieu.
Emmitouflée dans ses couvertures, elle ferma les paupières en espérant trouver le sommeil. Très vite, le temps devint long. Le bruit de la pendule égrenait les secondes avec une régularité qui irritait Ellen. Avec la promesse d’une issue inéluctable : le mariage. Au bout du chemin, de la nuit se dressait forcément l’autel. Peu importaient les souhaits les plus profonds. Peu importaient les prières. Dieu, dans son infinie sagesse, ne pouvait qu’encenser cette union. Et Ellen n’irait jamais à l’encontre de ses décisions car, quoi qu’il puisse arriver, le destin de tout un chacun se voyait tracé dès sa naissance.
À l’embrasure de la porte entrouverte, lord Covert la regardait dormir. Minuit approchait, elle venait de sombrer dans le sommeil. D’habitude, il ne lui fallait pas longtemps. Un pli soucieux barra le front d’Ayden. Peut-être qu’il avait commis une erreur avec Scrope, mais s’il s’en tenait aux principes d’Ellen en personne, la part de déterminisme de chaque acte restait faible. Sans nul doute le Seigneur avait-il contribué au choix de lord Covert. Du moins, celui-ci tâcha de s’en convaincre. Il balaya son inquiétude d’un geste léger et préféra ne pas y songer. De toute manière, le mal était fait, et il ne se voyait pas annuler la cérémonie sous prétexte qu’il se débattait avec sa conscience.
Le bruissement des draps attira son attention. Ellen rêvait déjà. Chaque nuit, le même cauchemar la hantait sans qu’aucun docteur n’ait pu faire quoi que ce soit pour l’aider. Ce n’était pas faute d’avoir essayé. Ayden avait une époque durant parcouru l’Angleterre entière à la recherche d’un médecin capable de la soulager. Mais la falaise réapparaissait toujours dans les songes d’Ellen. Cette maudite falaise ! Covert serra le poing...

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