121
pages
Français
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2020
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Publié par
Date de parution
21 février 2020
Nombre de lectures
0
EAN13
9782368329641
Langue
Français
À la mort de Judith, Caroline hérite de deux cahiers, d’une maison à l’ombre d’un tilleul, et d’un étui à violon, vide.
Les cahiers ont été écrits par Nora, une ancêtre hongroise, matriarche, mi-guérisseuse, mi-devin, et Giselle, l’aïeule despotique.
Elles n’auraient jamais dû se rencontrer et pourtant, le destin ou plutôt le diable, en ont décidé autrement.
Le destin de Nora est guidé par la haine que son fils aîné nourrit à son égard. En revanche, celui de Giselle est guidé par la passion amoureuse d’une jeune péronnelle écervelée.
Chaque personnage est habité d’une rage peu commune. Rage de nuire. Rage d’aimer.
Le tilleul sera le témoin de ces sentiments exacerbés à l’ombre duquel, l’un et l’autre, ne vont-ils pas finir par se confondre ?
Quant à l’étui, vide, il a la nostalgie de son violon qui faisait danser les belles, tandis que le fouet des csikos claquait à travers la puszta hongroise, déchaînant les passions.
Publié par
Date de parution
21 février 2020
Nombre de lectures
0
EAN13
9782368329641
Langue
Français
Haines et passions
Tome 2 : Giselle
La SAS 2C4L — NOMBRE7, ainsi que tous les prestataires de production participant à la réalisation de cet ouvrage ne sauraient être tenus pour responsables de quelque manière que ce soit, du contenu en général, de la portée du contenu du texte, ni de la teneur de certains propos en particulier, contenus dans cet ouvrage ni dans quelque ouvrage qu’ils produisent à la demande et pour le compte d’un auteur ou d’un éditeur tiers, qui en endosse la pleine et entière responsabilité.
Cathy Ramon
Haines et passions
Tome 2 : Giselle
Roman
Aux amours de ma vie : Sébastien, Alexandre, Jean-Baptiste
Chapitre I
Ses mocassins glissant silencieusement sur le carrelage à damier noir et blanc, Giselle traversa le corridor d’un pas décidé. Elle inspecta le salon d’un dernier regard. Les ultimes rayons de lumière dorée qui filtraient à travers le feuillage naissant du vieux tilleul voletaient par la fenêtre entrouverte. Ils venaient caresser la pendule du salon, dont le cadran brisé adoucissait d’une sorte de langueur la course implacable du tic-tac. Une atmosphère printanière régnait dans la petite pièce au décor vieillot, à la tapisserie maculée de taches douteuses, sang ? vin ? lui donnant un air de havre paisible.
Havre paisible ?
Tout était en ordre. Avec l’aide de son amie, Giselle avait traqué la saleté dans ses derniers retranchements. Elles avaient redressé le vieux buffet glissant des cales sous le pied manquant, brûlé le tapis souillé et trois chaises hors d’usage, lavé les vitres. Elles étaient allées jusqu’à grimper dangereusement sur un tabouret afin de polir le lustre aux pampilles de cristal dont la plupart avaient servi de cibles à des hommes devenus fous. Elle s’approcha du sofa éventré recouvert d’un plaid et de deux fauteuils qui, par miracle, avaient échappé aux barbares.
Au creux de l’un d’eux reposait un étui à violon, vide.
Ils encadraient une table basse encore debout sur laquelle trônaient quatre verres à liqueur ciselés, flanqués d’une petite carafe octogonale aux arêtes adoucies, faisant miroiter le liquide ambré de ce digestif particulier. Son amie l’avait retirée de la mallette de Nora, cette mallette qui était restée abandonnée dans leur cachette, cette mallette qu’elle avait retrouvée, à côté de l’étui à violon.
Ultimes souvenirs !
— Cette liqueur annihile la volonté, avait-elle énoncé en le tendant à Giselle. Elle les rendra inoffensifs et les mettra à notre merci.
Giselle avait poursuivi, lisant dans ses pensées.
— Nous guetterons ces rats. Nous les laisserons prendre de l’assurance, au besoin, nous nous divertirons en leur compagnie. Quand nous serons lassées de cet amusement, nous déchiquèterons ces charognards qui nous ont tant fait souffrir.
Détournant son regard vers l’extérieur, elle aperçut le potager baigné dans les derniers rayons du soleil. Un petit monticule de terre se dressait au pied du grand tilleul.
Belle nuit pour parfaire leur vengeance.
Dans quelques heures, ils seraient là.
Bientôt.
Elle se glissa dans la chambre contiguë, celle au grand lit à coquille, celle dont le miroir fracassé de l’armoire en noyer avait reflété des amours clandestines, celle où elle était revenue à la vie.
Son amie la rejoignit. L’une revêtit un chemisier et une jupe, l’autre, une robe. Toutes deux étaient munies de profondes poches.
Alors, pour tuer les heures d’attente à venir, Giselle sortit un cahier et se mit à écrire.
— Que faites-vous ?
Elle répondit d’une voix laconique :
— Je note tout, pour Judith. Un jour, elle devra savoir, ultérieurement… après ma mort.
Son amie hocha la tête, sortit, revint avec la mallette, l’ouvrit et lui tendit un manuscrit.
— C’est celui de Nora.
Giselle caressa la couverture rugueuse, feuilleta les pages. L’étonnement agrandit ses yeux. Son amie la rassura.
— Je le traduirai. J’aurai le temps. Vous le donnerez aussi à Judith avec l’étui du violon. Elle devra savoir pour eux aussi.
Tard dans la nuit, les pneus d’une voiture crissèrent.
Les portières claquèrent…
Chapitre II
Un air tzigane interprété par les Yeux noirs s’échappait de la chaîne stéréo, tandis que Caroline se laissait bercer mollement par le rocking-chair. Elle le relançait parfois du bout du pied, distraitement, les bras posés bien à plat sur les accoudoirs, la tête rejetée en arrière, calée au creux d’un coussin moelleux. Elle sentait son corps se détendre. Un souffle paisible soulevait sa poitrine. Son regard se perdait dans le feuillage du grand mûrier ombrageant la terrasse qu’une brise légère agitait, jouant à créer des jeux d’ombre et de lumière. Les perroquets chamailleurs l’avaient déserté pour un autre univers. Même les mouches semblaient avoir disparu.
Il y a bien longtemps qu’elle n’avait pas ressenti autant de calme et de bien-être. Une profonde expiration s’échappa de ses lèvres. Sans tourner la tête, elle saisit de sa main droite la tasse de thé glacé qui reposait sur la table de la terrasse, aspira une gorgée. Le glaçon émit un tintement léger. Elle ébaucha un sourire… Quelques mois auparavant, il se serait dilué dans le whisky. Aujourd’hui, il fondait dans la tisane. Quel changement ! Contrairement à ce qu’elle appréhendait, il lui fut aisé d’abandonner l’alcool, le bonheur familial s’étant montré la meilleure cure de désintoxication.
Voilà des mois que la famille s’était reconstituée. La maison, calme et silencieuse pendant longtemps, retentissait à nouveau de bruits et de rires. Chacun, tout doucement, avait trouvé sa place. Louison n’avait pas tardé à baisser sa garde. Comme promis lors de ses retrouvailles avec Quentin, elle avait rattrapé le temps perdu.
Les premiers jours, leur relation fut empreinte de retenue, hésitant entre confiance et appréhension, puis leur amour s’affirma, remporta la partie et sortit gagnant de cette longue séparation. Lentement ils creusèrent les fondations de leur vie de couple. Aussi souvent qu’ils le pouvaient, ils partaient pour de folles chevauchées. Quentin n’avait pas été long à monter à cheval aussi bien que sa compagne. Il avait fait du ranch son domaine, en était devenu le vétérinaire, ainsi que celui de toutes les propriétés environnantes. Ayant rapidement prouvé ses compétences, il avait intégré sans difficulté le cercle restreint des fermiers.
Très souvent le jeune couple laissait les enfants à la garde de Caroline. Ceux-ci étaient devenus inséparables. Ils fréquentaient l’école du village. Bien vite, leur nouvelle langue ne leur posa plus de problèmes. Avec la facilité d’adaptation qui caractérise les jeunes, ils avaient appris l’anglais en un temps record. Bénéficiant de l’aura de mystère qui entoure tout étranger, ils n’avaient pas tardé à se faire des copains. Désormais, ils évoluaient en pays conquis, aidés en cela par Caroline et Peter qui ne faisaient aucune différence entre eux, les considérant tous les deux comme leurs petits-enfants.
Georgia, habituée depuis longtemps à vivre seule avec son père, acceptait bien sa nouvelle famille. Mieux, elle s’épanouissait de jour en jour. Gaie, spontanée, jouant sur la gamme du rire et de la séduction, elle parlait peu de sa mère, évoluant au sein du groupe comme s’il en avait toujours été ainsi. Avec Peter, elle entretenait des liens particuliers de complicité. Souvent, elle glissait sa petite main dans celle rugueuse du cow-boy à la sempiternelle chemise à carreaux. Il s’était épris démesurément de la gamine et lui avait offert son premier poney. On les voyait rarement l’un sans l’autre. Geoffrey, par contre, malgré toute la bonne volonté de son grand-père lui restait inaccessible.
C’est vrai que pour le petit garçon, tout était différent. Il avait compris très vite que ceux qui avaient été ses parents jusqu’à présent l’avaient quitté pour toujours. Il vivait désormais avec sa vraie mère dans un autre foyer et avait fréquemment des accès de mélancolie. Il se renfermait dans le silence, se repliant brusquement sur lui-même et restait prostré pendant des heures. Seule la musique le sortait de sa torpeur. Elle semblait être son refuge, son havre de paix. Dans les premiers temps, lorsque le chagrin s’abattait sur ses frêles épaules, il allait s’enfermer dans sa chambre avec le transistor. De l’autre côté de la porte, Louison se morfondait, incapable d’apporter un quelconque apaisement à son fils, malgré tout son amour.
— Comment dois-je m’y prendre, demandait-elle souvent à Caroline ?
— Laisse faire le temps, répondait celle-ci. C’est un grand monsieur qui vient à bout des situations les plus délicates.
— Le temps ! Le temps ! Tu crois que ça lui fera oublier Maximilien et Claire ? interrogeait-elle en se tordant les mains. Je ne supporte pas de le voir souffrir de la sorte et j’enrage d’être impuissante devant tant de tristesse.
— Sois patiente. Laisse-le s’habituer. Il oubliera. Il t’aime, tu sais.
Caroline se voulait rassurante. Elle commençait à comprendre son petit-fils et se rapprochait de lui subrepticement. Ils devenaient complices. Parfois, sans rien dire, il se blottissait dans ses bras. Alors, pour lui seul, elle fredonnait une comptine pendant que la petite tête bouclée se cachait au creux de son épaule.
Finalement, ce fut Georgia qui, d’instinct, dédramatisa la situation. Se plantant un jour devant Louison, les mains sur les hanches, elle l’apostropha :
— T’as pas remarqué qu’il écoute de la musique quand il est malheureux ?
— Si, mais je ne sais pas comment l’aider.
— T’as qu’à lui faire apprendre un instrument, rétorqua la gamine en haussant les épaules, comme si une telle évidence la dispensait de commentaires.
Geoffrey battit des mains et son regard s’illumina lorsque sa mère lui proposa de prendre des cours de musique. Il se jeta dans ses bras en s’écriant :
— J’ai toujours rêvé d’être violoniste.
— Pourquoi ne le disais-tu pas ? s’étonna-t-elle.
— Parce qu’ici personne ne joue. Vous n’aimez que les chevaux. Il n’y a que m