147
pages
Français
Ebooks
2019
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Publié par
Date de parution
15 février 2019
Nombre de lectures
26
EAN13
9791093167749
Langue
Français
Publié par
Date de parution
15 février 2019
Nombre de lectures
26
EAN13
9791093167749
Langue
Français
9791093167732
Dépôt légal : mars 2019
9791093167732
Paroles d’homme
et
culottes courtes
Tous droits réservés
©Estelas Éditions
BP 20, 11800 Trèbes France
estelas.editions@gmail.com
http://www.estelaseditions.com
ISBN : 9791093167749
« Le Code de la propriété intellectuelle interdit les copies ou reproductions destinées à une utilisation collective. Toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite par quelque procédé que ce soit, sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants cause, est illicite et constitue une contrefaçon, aux termes des articles L.335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle. »
Max Heratz
Paroles d’homme
et
culottes courtes
Roman
Table des matières
1 – Le Grand Chassagnon
2 – L’orthophoniste
3 – Un voyage mouvementé
4 – Le grenier
5 – La bonne affaire du père Labrosse
6 – Je parle !
7 – Bonne nouvelle !
8 – L’arrivée du piano
9 – Souvenirs, souvenirs
10 – Première rentrée
11 – « Les bêtises, tu les fais chez toi ! »
12 – Vengeance !
13 – Réveil tumultueux
14 – Mon premier encrier
15 – Ardoise cassée
16 – K.-O.
17 – 6 ans !
18 – Les escargots de M. Pic
19 – L’encre et le bénitier
20 – Le marché place Durel
21 – Souricière dans le grenier
22 – Traquenard
23 – Invitation du curé
24 – Séance de rasage
25 – L’armoire des parents
26 – M. Azoulay !
27 – Dr Guttéro
28 – Et bientôt nous serons cinq !
29 – Les cahiers du CP
30 – La chasse au trésor
31 – Torture d’insectes
32 – La 203
33 – Première virée en voiture
34 – Richard
35 – Naissance de la ZUP
36 – Feyzin
37 – Business
38 – Les égouts et les Javelu
39 – Cinéma Souvenirs
40 – Marraine et la Dudu
41 – Richard malade
42 – Antépénultième
43 – Suzy
44 – Mes premières lunettes
45 – La bagarre
46 – Les Docks
47 – Antonella
48 – Lancer de jouets
49 – Décès de la vieille
50 – Les JO
51 – La Mercedes
1 – Le Grand Chassagnon
Saint-Fons 1 , printemps 1964
Du haut de mes cinq ans, je regarde mon père occupé à un curieux travail dans la cour de notre maison. Torse nu, les muscles saillants, il vient de transporter sur son épaule un sac de ciment de cinquante kilos qui ne l’a pas fait plus forcer que lorsque je me déplace avec ma pelle et mon râteau de bac à sable. Ses cheveux couleur corbeau coiffés en arrière accentuent son air sérieux quand il fronce les sourcils pour se concentrer sur ce qu’il fait.
Accroupi devant un cadre hexagonal posé à même le sol sur un papier, la sueur perlant sur ses tempes, il remplit ce moule à l’aide d’un ciment fraîchement gâché qu’il a modifié avec un pigment ocre jaune faisant oublier la triste couleur grisâtre habituelle du mortier. Encore une de ses nouvelles inventions dont il a le secret !
À ses côtés, il y a des petits sacs de papier kraft. À mes yeux, toutes ces choses ont une âme, les objets s’animent et mon père en joue avec magie. Cet ancien sportif, d’origine italienne, ouvrier mécanicien à Saint-Gobain, bricole avec génie tout et n’importe quoi, allant jusqu’à créer ses propres outils. Je l’admire beaucoup et ma fierté est de fêter mon anniversaire quatre jours après le sien bien que trente-six années nous séparent.
Nous habitons à Saint-Fons dans l’agglomération lyonnaise. Cette commune est connue dans la région pour son bloc erratique d’environ deux mètres de haut, c’est-à-dire un bloc de calcaire crétacé probablement originaire de la Savoie, amené sur cette colline en bord de la Nationale 7 par les glaciers alpins aux premiers âges de l’humanité. Nous, nous résidons un peu plus haut, dans le quartier du Grand Chassagnon, uniquement bâti de villas individuelles, hors lotissements. En périphérie, les premiers HLM de l’avenue Antoine-Gravallon se dressent et un monde nous sépare. Ce grand ensemble crasseux et miséreux est formé de trois bâtiments de cinq étages sans ascenseur bien sûr. Du linge, qu’on aurait cru devoir être à laver, sèche sur les balcons, et en le voyant on se demande si les ménagères se contentent de le rincer ou si elles le nettoient réellement. Ce secteur particulier, duquel émanent la plupart du temps des odeurs d’huile brûlée pour des frites trop cuites, entre en contraste avec la verdure des champs qui s’étendent à perte de vue. Tout le monde s’en méfie et l’assimile à une zone de non-droit, celle des voyous. C’est pourquoi cet espace a été baptisé « Coupe Cou ». Nous ne le traversons que la journée, par obligation, pour aller faire nos courses à la supérette L’Économique ou pour emprunter le bus n o 12 qui nous conduit à Lyon.
À l’opposé se trouve un champ que nous contournons pour nous rendre au petit Casino qui se trouve juste derrière. Dans ce pré se promènent paisiblement trois chevaux : un gris tacheté qui est un poney Connemara pommelé, un autre à la robe alezan brûlé avec des poils et des crins de la couleur du café torréfié, une peau noire et des yeux foncés, et enfin mon préféré : un holsteiner blanc comme le lait et très élégant dans sa démarche. Plus tard, j’apprendrai qu’il s’appelle Mysther, c’est très joli comme nom et je trouve que ça lui va à merveille. Quand il m’arrive de m’arrêter devant la barrière faite de poutres en béton, c’est lui qui vient me voir ; on se regarde, il m’écoute avant de secouer la tête dans un sens ou dans l’autre, parfois en soufflant, parfois en remuant ses oreilles. C’est drôle, parce qu’il est sans doute le seul à comprendre ce que je dis. Lorsque j’accompagne ma mère au Casino, elle sait que c’est juste pour profiter des chevaux. Elle me laisse quelques minutes avec eux avant de m’appeler, impatiente, pour continuer notre chemin.
De l’autre côté de nos pavillons, des maisons individuelles plus austères nous font face. Seul un champ pouvant contenir l’équivalent de quatre terrains de football et équipé de deux courts de tennis nous sépare les uns des autres. En ces lieux relativement calmes, les gens coexistent malgré la différence de milieu social, un mélange d’ouvriers et de cadres. Mais l’église construite au début du siècle nous unit. Nous nous y retrouvons tous, mélangés les uns aux autres sans distinction, tous les dimanches, échangeant quelques banalités à la sortie de l’office avant que chacun ne rentre chez soi pour le repas dominical. Nous avons d’autres occasions de nous rencontrer, notamment lors des kermesses organisées par le prêtre au sein de sa cure. Le lien social entretenu par ce petit monde s’apparente davantage à la vie d’un village plutôt qu’à celle d’une banlieue d’une grande ville.
Nous sommes situés au sommet d’une colline de laquelle s’étend une vue panoramique jusqu’à Lyon d’un côté du champ et Feyzin avec sa raffinerie de l’autre côté. Notre quartier, le Grand Chassagnon , est formé d’une place au centre de laquelle s’épanouissent aux quatre coins de magnifiques acacias ainsi qu’un grand massif de buissons dans lequel nous aim