Labyrinthe , livre ebook

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Médina de Sousse. Été 1994. Ombres et lumières, senteurs de jasmins, couleurs de chaux et de Bougainvilliers mènent Younes dans la quête de ses parents. Il revient en Tunisie après en avoir été coupé pendant toute une enfance. Mais derrière les portes qu'il pousse, toutes autres vérités se dévoilent. Au cœur du Labyrinthe, perdrait-il tout repère ou s'en créerait-il de nouveaux...
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Date de parution

01 janvier 2024

EAN13

9789938076974

Langue

Français

Poids de l'ouvrage

1 Mo

Meriam T urki L abyrinthe AR ABE SQUE S 2024
L ivre : L abyrinthe Auteur : Meriam T urki T ous droits de reproduction, de traduction et d‘adaptation réservés à l‘éditeur © ARABE SQUE S E DIT IONS Premiè re édition ISBN : 978-9938-07-697-4 er 5 Rue 20 Mars 1956, 1 étage bureau n° 3, Bab Saâdoun 1005  www.editionsarabesques.com E -mail : editionsarabesques.tunis@gmail.com
A ma mè re, A mon pè re,
1. Mes yeux fouettés par les rafales sales résistè rent encore pour percevoir la belle surface marine jalonnée d’écume. Accoudéau bord du ferry, les cheveux secoués au rythme irrégulier duvent, j’inspirai l’odeur marine, qui transperçant mes poumons, planait sur toute autre odeur. Ça faisait 8h quej’étais aubord duferry ; et voilà labellecotequi apparut en une petite bande dont le bleu était légè rement plus sombre que celui de la mer et du ciel. Je sentis toujours le cordon qui me liait à la Tunisie présent, inébranlable. J’y laissai une partie de mon âme et elle laissa une partie de la sienne en moi. Depuis dix-neuf ans, j’en fus arraché. Dans ma mémoire d’enfant, si trouée qu’elle soit, je puisai pour longtemps mon lien indéfectible avec ses senteurs, ses couleurs, avec mes parents. Je venais dépoussiérer les souvenirs mourants, retrouver l’étreinte de Ghalia et le
regard rassurant de Mahmoud que, depuis mes cinq ans, je ne rencontrais que dans les songes.
Lacrê tesedécoupafinement sur lablancheur duciel ; deux silhouettes imposantes se détachaient, par leur turquoise envoutant, entre ciel et mer, décrivant le plus féerique des paysages. Trè s vite, les montagnes s’assombrirent et une lignée blanche de maisons en jaillit. Ce fut la goulette qui m’accueillit et m’immergea chaleureusement dans la beauté de ses habitations.
Une sirè ne retentit. Le port s’approcha et nous aspira entre ses navires. T out le monde commençait à s’animer. Poussé par la foule, je posai le pied sur le quai. Une langueur heureuse m’habita subitement. Me faufilant entre les proches qui s’enlaçaient et les amants qui s’embrassaient, je rejoignis la ville. E t pris d’un sentiment de légè reté extraordinaire, je m’adonnai au rythme des rues, flânais dans cette goulette où les langues et les mœ urs s’entremê laient, où le charme de ma T unisie se dévoilait dans son harmonie absolue. Je m’installai à la terrasse d’un caféet commandai une tasse de thévert. Ma demande fut naturellement en français et j’en étais légè rement dérangé car j’avais pratiquémon arabe assidument avant de venir. Le serveur, quant à lui, n’en fut nullement gê né. L es hommes jouaient aux cartes, riaient, buvaient ou s’accrochaient au poste de radio posésur le comptoir pour suivre un match de foot, tout dans une sérénitéestivale qui
me remplit de joie. Le liquide fumant d’une odeur sucrée mê lée à celle de la menthe me fit le plus grand bien, coula jusqu’à mes veines et libéra mon corps d’une tension jusque-là incomprise. Je filai vers la petite station du T GM, pris un train vers la gare de place Barcelone, d’où je partis vers Sousse. A la modernitéde la capitale suivait l’étendue des plaines et l’immensité des montagnes. Le soleil s’apprê ta à se coucher et enlaça de ses derniè res f lammes les oliviers dont les extrémités de feuilles scintillaient d’un bel argenté. A mesure que la lumiè re fanait, le dégradéde l’arbre majestueux s’approfondit. Le front collé à la vitre sale de la fenê tre, je me perdis parmi les rangées, parfaitement alignées et symétriques. Soudain, l’espace d’une seconde, je perçus une vieille femme, vê tue d’étoffes rouges et bleues, portant un grand chapeau de paille. Une secousse traversa mon corps à la pensée de ma mè re. Ma plus grande hantise se raviva : leur probable disparition. Mon cœ ur cogna dans ma poitrine et mon souffle fut coupé. Mais je parvins à chasser cette idée de ma tê te. Mahmoud n’aurait que cinquante-cinq ans cette année, et Ghalia n’en aurait que quarante-six. Cet argument, aussi faible qu’il soit, me rassura. On arrivaà Sousse. Lagareétait moinsencombréequecelle de T unis. Il était 19 heures et le ciel prenait des teintes bleuesauparking désert. Deslampadairestranspercè rent de leur lumiè re jaune le feuillage épais et remuant de trois arbres centenaires plantés au rond-point. V alise à la main,
j’avançais sur le trottoir jusqu’à ce que j’aperçoive un taxi. Monté, l’hommemesaluachaleureusement et medemanda ma destination
« L’hôtel Sindbad s’il vous plait, à Chatt Mariem »
Le regard aspiré par les lumiè res de la ville, je ne pus percevoir la gê ne du chauffeur dans ce silence.
-C’est notre saison la plus prospè re en matiè re de tourisme, vous avez bien fait de venir maintenant monsieur.
-Merci Haj mais je ne suis pas touriste, je suis tunisien.
-Originaire de Sousse ?
-Oui, enfin, je suis néà Hergla.
-Ah Hergla est notre plus beau joyau. C’est notre Sidi Bou du Sahel.
-C’est vrai, répondis-je, malgrémon ignorance de la beauté de Sidi Bou.
Je savais que si mon usage continuel de français persistait, tout le monde croirait que je suis français. J’essayais donc de commencer une conversation avec ce bonhomme en arabe ; et il s’amusait avec bienveillance de mon accent tordu et de mes fautes incalculables. J’en étais néanmoins heureux. Je sentais fleurir en moi un bourgeon longuement dépourvu de soleil et d’eau.
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