La parure & Autres nouvelles , livre ebook

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Date de parution

01 janvier 2018

Nombre de lectures

6

Langue

Français

Guy de Ma upa ssa ntL a par u r e &A u t r es n ou vel l es
Edition : D ar AL QAL AM AL ARABI M AR OC-20 18
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L a P ar u r e C’étai t une de ces jolies et char mant es filles, nées, comme par une erreur du desti n, dans une famille d’employés. Elle n’avait pas de dot, pas d’espérances, aucun moyen d’être connue, comprise, aimée, épousée par un homme riche et distingué ; et elle se laissa marier avec un peti t commis du minist ère de l’instr uct ion publi que. Elle fut simple ne pouvant être parée, mais malheureuse comme une déclassée ; car les femmes n’ont point de caste ni de race, leur beauté, leur grâce et leur charme leur servant de naissance et de famille. Leur fi nesse native, leur instinct d’élégance, leur souplesse d’esprit, sont leur seule hiér archie, et font des filles du peupl e les égales des plus grandes dames. Elle souffrai t sans cesse, se sentant née pour toutes les déli catesses et tous les l uxes. Elle souffrai t de la pauvreté de son logement, de la misère des murs, de l’usure des sièges, de la laideur des ét offes. Toutes ces choses, dont une autre femme de sa caste ne se ser ait même pas aperçue, la tort uraient et l’i ndignaient. La vue de  3
la petite Bret onne qui faisait son humble ménage éveillait en elle des regrets désolés et des rêves éperdus. Elle songeai t aux antichambres muettes, capit onnées avec des tentures orient ales, éclairées par de hautes tor chères de bronze, et aux deux grands valets en culotte courte qui dorment dans les larges fauteuils, assoupis par la chaleur l ourde du calorifère. Elle songeait aux grands salons vêtus de soie ancienne, aux meubles fins portant des bi belots inesti mables, et aux petits salons coquets, parfumés, faits pour la causerie de cinq heures avec les ami s les plus intimes, les hommes connus et recherchés dont toutes les femmes envient et désirent l’attent ion. Quand elle s’asseyait, pour dîner, devant l a table r onde couverte d’une nappe de t rois jours, en face de son mari qui découvrait la soupi ère en déclar ant d’un air enchanté : « Ah ! le bon pot-au-feu ! je ne sais rien de meilleur que cela…» elle songeai t aux dîners fi ns, aux argenteries reluisantes, aux tapisseries peuplant les murailles de personnages anciens et d’oi seaux ét ranges au milieu d’une forêt de féeri e ; elle songeait aux plats exquis servis en des vaisselles merveilleuses, aux galanteri es chuchotées et écoutées avec un sourire de sphinx, tout en mangeant l a chair rose d’une tr uite ou des ailes de gélinot te. Elle n’avait pas de toilet tes, pas de bij oux, rien. Et elle n’aimait que cela ; elle se sent ait faite pour  4
cela. Elle eût t ant désiré plaire, êtr e enviée, êtr e séduisante et recherchée. Elle avait une amie riche, une camarade de couvent qu’elle ne voulai t plus aller voi r, tant el le souffrai t en revenant. Et elle pleurai t pendant des jours entiers, de chagrin, de regret, de désespoir et de détresse. * * * Or, un soir, son mari rentra, l’air glorieux, et tenant à la mai n une large enveloppe. – Tiens, dit-il, voici quelque chose pour toi. Elle déchir a vivement le papier et en tira une carte i mprimée qui portait ces mot s : « Le mi nistre de l’instruction publique et M me Georges Ramponneau prient M . et M me Loi sel de leur faire l’honneur de venir passer la soirée à l’hôtel du ministère, le lundi 18 janvier. » Au lieu d’être r avie, comme l’espér ait son mari, elle jeta avec dépit l’invi tati on sur la table, murmurant : – Que veux-tu que je fasse de cela ? – M ais, ma chéri e, je pensais que t u serai s content e. Tu ne sors j amai s, et c’est une occasion, cela, une belle ! J’ai eu une peine infini e à l’obtenir. Tout le monde en veut ; c’est très recherché et on n’en donne pas beaucoup aux employés. Tu verras là t out le monde officiel.
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Elle le regardait d’un œil irrité, et elle déclar a avec i mpati ence : – Que veux-t u que je me mette sur le dos pour aller là ? I l n’y avait pas songé ; il bal buti a : – M ais la robe avec laquelle tu vas au théâtre. Elle me semble très bien, à moi… I l se tut, stupéfai t, éper du, en voyant que sa femme pleurai t. Deux grosses larmes descendaient lentement des coins des yeux vers les coi ns de la bouche ; il bégaya : – Qu’as-t u ? qu’as-tu ? M ais, par un effort vi olent, elle avait dompté sa peine et elle répondit d’une voix calme en essuyant ses joues humi des : – Rien. Seulement je n’ai pas de t oilett e et par conséquent je ne peux aller à cette fête. Donne t a carte à quelque collègue dont la femme ser a mieux ni ppée que moi. I l était désolé. I l reprit : – Voyons, M athilde. Combien cela coûterait-il, une toilette convenable, qui pourrait te servir encore en d’autres occasi ons, quelque chose de très simple ? Elle réfléchit quel ques secondes, ét ablissant ses compt es et songeant aussi à la somme qu’elle pouvait demander sans s’attir er un refus immédiat et une exclamati on effarée du commis économe.  6
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