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Français
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2019
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Publié par
Date de parution
07 mars 2019
Nombre de lectures
13
EAN13
9791027804870
Langue
Français
Le roman le plus lu de Bernanos !
Un jeune prêtre est nommé curé à Ambricourt, un village du nord de la France. Tentant de guider ses paroissiens sur les voies du Seigneur, le jeune curé combat par la parole les subtiles perversions de la condition humaine. Son zèle favorise les insinuations, les médisances, les injures, desquelles sa santé fragile est incapable de le protéger. Ébranlé, mais toujours ferme dans sa foi, son cancer sera l'ultime témoignage de la force de Dieu, lui montrant que les âmes comme les corps, viciés, doivent se soumettre à Sa volonté.
Son journal est une cartographie de sa conscience, détaillant ses espaces lumineux comme ses zones d'ombres, avec ses pages déchirées, sa fin brutale.
Considéré comme la plus populaire des œuvres de Bernanos, le Journal d’un curé de campagne fut inclus dans la liste des douze meilleurs romans du demi-siècle et adapté au cinéma en 1950 par Robert Bresson.
Georges Bernanos (1888-1948), a écrit quelques-unes des œuvres majeures de la France littéraire du XXe siècle. On lui doit Sous le soleil de Satan, Les Grands cimetières sous la lune ou encore La France contre les robots.
Préface de François Angelier
Publié par
Date de parution
07 mars 2019
Nombre de lectures
13
EAN13
9791027804870
Langue
Français
GEORGES BERNANOS
JOURNAL D’UN CURÉ DE CAMPAGNE
Préface de François Angelier
Collection « Galaxie » Le Castor Astral
LE CINQUIÈME ÉVANGILE
Préface de François Angelier
Le médecin, musicien et théologien protestant Albert Schweitzer a dit de J.S. Bach qu’il était pour lui comme un « cinquième évangéliste ». Loin de moi l’idée d’orner d’un pareil titre la mémoire de Georges Bernanos. Néanmoins s’il est un livre, un seul livre, qui m’ait jamais donné la sensation profonde, la vibration intime du récit évangélique, c’est bien Journal d’un curé de campagne . Pourquoi ?
Si sa Vie de Jésus , esquissée au Brésil le 8 septembre 1943, jour de la Nativité de la Vierge, nous manquera toujours, s’il a pu, écrivant Saint Dominique (1926) puis Jeanne, relapse et sainte (1929) , méditant les Ultima verba de sainte Thérèse de Lisieux ou la vie du Curé d’Ars, faire acte d’hagiographe et approcher ainsi l’héroïque esprit d’enfance de ces saints qui, pour lui, tiennent « le pas gagné » (Rimbaud) et sont le sel d’une Église qu’ils arrachent au conformisme de la technocratie céleste et sortent de la somnolente sottise des repus, Georges Bernanos est parvenu, écrivant Journal d’un curé de campagne , à toucher enfin, tel un pèlerin le haut-lieu tant quêté, le point focal de sa mission d’écrivain, le cœur de la rosace : écrire l’irradiante vision d’un prêtre agi par la grâce. Là se rallient enfin, tendrement baignés par la déchirante candeur de l’enfance, « les rayons et les ombres », la mortifiante amertume de l’échec et les tenaces espérances, les trous de vase et les canons de lumière, les masques torves et les regards purs. Tout un monde romanesque que couve enfin l’ardeur calme de la charité, un monde délivré par un regard, transmis par une voix que Bernanos vocatus , Bernanos l’inspiré, semble avoir autant conçu que reçu.
Écrit à la veille de la guerre civile espagnole, entre décembre 1934 et janvier 1936, dans l’animation des cafés majorquins, Majorque où Bernanos s’est réfugié en octobre 1934 avec sa femme et ses six enfants pour fuir une tenaillante panique financière, Journal d’un curé de campagne bénéficie, en effet, d’une genèse et d’une écriture différente de ses œuvres précédentes et suivantes. De fait, si la plupart de ses six autres romans, de Sous le soleil de Satan (1926) à Monsieur Ouine (1946 pour l’édition française) semblent des romans « gagnés », arrachés dans la rage et l’effort, mettant (en tout cas pour les deux titres cités) entre sept et douze ans pour s’écrire, l’histoire du curé d’Ambricourt apparaît, elle, telle une œuvre presque « donnée », et ce dès le départ. Un an suffira pour en toucher le terme. Alors qu’il a également en chantier Un mauvais rêve , amorcé en 1931 et Un crime , récit policier à visée commerciale censé pallier ses dif-ficultés d’argent, Bernanos a travaillé, entre avril et juillet, au chapitre XVI de « La Paroisse morte », titre provisoire de Monsieur Ouine . Chapitre où se confrontent les deux figures du curé de Fenouille, cadre villageois du roman, et du maire local Arsène sombré dans la folie, une confrontation désespérée que précède la déambulation du prêtre de son presbytère à l’église, un parcours durant lequel l’atterre et l’étreint le spectacle de « la triste maison de briques, si triste dans sa nudité » puis celui du sanctuaire : « L’immense vaisseau lui apparut désert, avec ses bancs luisants, ses grandes dalles rongées par le temps, crevassées, d’où monte une odeur funèbre, les hauts murs nus avec leur épaisse carapace de chaux (…) il n’avait jamais été ici qu’un passant et la vieille église le repoussait sans colère comme le rejetait ce village dont il pouvait apercevoir les toits, car église et village ne faisaient qu’un. » Visions d’un monde rongé et déserté, celle d’un prêtre qui peine et s’évertue à lui restituer sa vitalité spirituelle, mais vision qui génère d’emblée, nous suivons là les analyses de Daniel Pezeril et des bernanosiens Max Milner ou Michel Estève, comme un phénomène de dédoublement : le curé d’Ambricourt semble le double lumineux émané du curé de Fenouille avec lequel il partage maints éléments bio-graphiques (origines familiales pauvres) ainsi qu’une même approche de leur paroisse rongée de l’intérieur par un vice sournois (le mal ou l’ennui). Là où la figure du curé de Fenouille offre un aspect, certes prophétique mais éperdu et presque désemparé, celui d’Ambricourt témoignera d’une éblouissante foi en l’espérance. Touché le fond, éprouvé au plus nu de lui-même, comme en rêve, la morbide déchéance de cette paroisse abandonnée, Bernanos y prend appui pour remonter vers des altitudes de l’âme non moins rudes, mais plus sereines et plus lumineuses, à tout le moins indemne de cette nécrosante soumission et humiliante capitulation intérieure. Journal d’un curé de campagne sera cette sortie des catacombes, cette remontée vers la lumière. « J’ai commencé le Journal un soir du dernier hiver, absolument sans savoir où j’irais. Combien j’ai commencé ainsi de romans qui n’ont pas été jusqu’à la vingtième page puisqu’ils ne menaient nulle part » , écrit-il fin 1935 à la comtesse Villiers de la Noue. Celui-ci ira jusqu’à la page 366. On n’en saura pas plus de ce qui s’est déroulé dans « la chambre noire du rêve » bernanosien, ce terreau intérieur à la puissante fructuosité d’où ont jailli déjà Donissan, Mouchette, Cénabre ou Chantal de Clergerie. Bernanos, en tout cas, sait assez vite où il veut aller, résumant dès le 6 janvier 1935 l’intrigue du « bon vieux livre » à Robert Vallery- Radot, l’ami-confident de toujours : il s’agira de « faire le journal d’un jeune prêtre, à son entrée dans une paroisse. Il va chercher midi à 14 heures, se démener comme quatre, faire des projets mirifiques, qui échoueront naturellement, se laisser plus ou moins duper par des imbéciles, des vicieuses ou des salauds, et alors qu’il croira tout perdu, il aura servi le bon Dieu dans la mesure même où il croira l’avoir desservi. Sa naïveté aura eu raison de tout, et il mourra tranquillement d’un cancer. » Il lui écrit le 10 n’avoir « jamais atteint jusqu’ici à cette fermeté, cette tendresse. Je voudrais que ce livre rayonnât. » Parlant du curé comme de son « ami », un ange bienveillant dont le regard, levé sur lui, l’illumine, déplorant néanmoins deux haltes dans son parcours d’écriture (en janvier pour finir Un crime , puis en juillet), Bernanos connaît, pour la première fois, écrivant Journal , l’expérience d’une rare plénitude intérieure. S’il évoque pour sa sœur Marie-Thérèse, en janvier, « (Sa) méthode ordinaire de travail et l’énorme difficulté (qu’il a) à (se) rendre maître de (ses) sujets, l’espèce d’hallucination épuisante hors de laquelle (il est) incapable de rien écrire » , il déclare par ailleurs : « Le livre que j’écris en ce moment me paye de mes peines, d’ailleurs. Je crois que le surnaturel y coule cette fois à pleins bords. (…) je frappe un grand coup sur les âmes (…) je vois se lever peu à peu devant moi un visage inoubliable que je me tue à essayer de peindre avec toute ma foi et mon amour. Quel regard, jour et nuit, sur le mien ! (…) le langage humain est tout de même plein de Dieu. » Libéré du carcan et des cadres de production de la « littérature industrielle » auquel l’a soumis Un crime (codes qu’il subvertit par ailleurs notablement), visité par un personnage qui le fascine et dont il se laisse « sans haine » traverser par la voix, il accède enfin à son plus profond désir : épouser le langage de la sainte pauvreté. Une conviction qui l’emporte au point d’en témoigner la vérité directement à son éditeur Maurice Bourdel au mois de septembre : « Je crois être sûr de lui. Je le crois appelé à retentir dans beaucoup d’êtres, et je n’ai d’ailleurs jamais fait, même de loin, un tel effort de dépouillement, de sincérité, de sérénité pour les atteindre. J’espère que mon gentil curé sera mon interprète et mon conciliateur vis-à-vis de beaucoup de catholiques qui ne me connaissant guère, se laissent prendre à beaucoup d’apparences. » Si « cette prose dont l’accent est sûrement la plus belle et la plus complète réussite de ma vie d’écrivain » lui coûte l’habituel travail de raturage, gommage et grattage, elle lui apparaît sans coup férir comme ce qu’il a « écrit de mieux » .
Cette certitude résulte d’abord, pour Bernanos, d’un nouveau sentiment intérieur, celui d’un apaisement, d’une sérénité : « Je puis écrire maintenant proprement parce ce que je suis maintenant sans colère. Du moins sans haine » , écrit-il à Vallery-Radot. Une forme de charité, d’équanimité, semble l’avoir gagné qui, sans émousser sa puissance, génère, au cœur de l’œuvre, un climat tout autre. Présentant son roman, en mars 1936, aux lecteurs de la revue Le Cahier , il donne de ses précédentes œuvres, résumées en formules nettes, une vision sombre et tragique : Sous le soleil de Satan lui apparaît comme « un feu d’artifice, tiré un soir d’orage, dans la rafale et l’averse » , L’Imposture tel « un visage de pierre, mais qui pleure de vraies larmes » et La Joie « un murmure, mais le Magnificat attendu n’y éclate nulle part » . Avec Journal d’un curé de campagne c’est la triste mélodie à petit bruit d’une source pure qui emplit l’atmosphère, jaillie d’une terre ingrate qu’elle baigne sans la féconder. Reprenant un cadre et des personnages déjà éprouvés, il délivre là un chant qui n’est pas l’hymne de marche d’un croisé, la cantique des gouffres, mais le plain-chant d’une âme solitaire, fragile mais inexpugnable.
On retrouve en effet, une nouvelle fois, avec le village d’Ambricourt, cadre de Journal d’un curé de campagne , l’habituel terroir romanesque bernanosien, cette France du Nord réfractée par la mémoire de l’enfance. La dimension spirituelle du roman se double d’ailleurs d’une volonté historique explicite : « Je voudrais que ce petit village fût un “condensé” de notre pays – le châtelain, l’adjoint,