100
pages
Français
Ebooks
2016
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Publié par
Date de parution
31 août 2016
Nombre de lectures
4
EAN13
9782764428856
Langue
Français
Poids de l'ouvrage
3 Mo
Publié par
Date de parution
31 août 2016
EAN13
9782764428856
Langue
Français
Poids de l'ouvrage
3 Mo
Du même auteur
Tout homme rêve d’être un gangster , Québec Amérique, 2013.
Comme un intrus , Québec Amérique, 2011.
Projet dirigé par Marie-Noëlle Gagnon, éditrice
Conception graphique : Nathalie Caron
Mise en pages : Pige communication
Révision linguistique : Sylvie Martin et Chantale Landry
En couverture : © Michele Paccione / shutterstock.com© fontStocker / shutterstock.com
Conversion en ePub : Marylène Plante-Germain
Québec Amérique
329, rue de la Commune Ouest, 3 e étage
Montréal (Québec) H2Y 2E1
Téléphone : 514 499-3000, télécopieur : 514 499-3010
Nous reconnaissons l’aide financière du gouvernement du Canada par l’entremise du Fonds du livre du Canada pour nos activités d’édition.
Nous remercions le Conseil des arts du Canada de son soutien. L’an dernier, le Conseil a investi 157 millions de dollars pour mettre de l’art dans la vie des Canadiennes et des Canadiens de tout le pays.
Nous tenons également à remercier la SODEC pour son appui financier. Gouvernement du Québec – Programme de crédit d’impôt pour l’édition de livres – Gestion SODEC.
Catalogage avant publication de Bibliothèque et Archives nationales du Québec et Bibliothèque et Archives Canada
Charbonneau, Jean
Camus doit mourir
(Latitudes)
ISBN 978-2-7644-2883-2 (Version imprimée)
ISBN 978-2-7644-2884-9 (PDF)
ISBN 978-2-7644-2885-6 (ePub)
I. Titre. II. Collection : Latitudes.
PS8605.H366C35 2016 C843’.6 C2016-940728-4 PS9605.H366C35 2016
Dépôt légal, Bibliothèque et Archives nationales du Québec, 2016
Dépôt légal, Bibliothèque et Archives du Canada, 2016
Tous droits de traduction, de reproduction et d’adaptation réservés
© Éditions Québec Amérique inc., 2016.
quebec-amerique.com
À la mémoire de Cortright McMeel, ami très cher, francophile et fou de littérature. Il aimait la vie, mais il n’est pas arrivé à l’endurer. Rest in peace, Cort.
Pour Julie.
Il s’agit ici d’un roman, d’une œuvre de fiction, et donc d’une histoire où tout est permis – la folie, la fantaisie, l’extrapolation, la connerie, la liberté totale et absolue vis-à-vis de la réalité historique, qui, il faut bien l’admettre, est de toute façon une notion plutôt fallacieuse.
Je me crois en enfer, donc j’y suis.
Arthur Rimbaud
Je pense que la vie est une triste bouffonnerie…
Luigi Pirandello
Août 1944
Couché à plat ventre sur son lit, le visage enfoui dans un oreiller, Albert Camus est seul. Chose plutôt rare ; lui qui déteste passer la nuit sans une femme à ses côtés. À la TSF, le speaker de Radio-Londres y va de messages codés comme on en entend depuis les tout débuts de l’Occupation allemande : Le bison est nerveux … Claude a une moustache très longue … Le fantôme n’est pas avare … Les yeux de Julie … Puis le général de Gaulle lui-même prend la parole : La bataille suprême est engagée. Après tant de combats, de fureur, de douleurs, voici venu le choc décisif … Mais la voix du général se métamorphose pour devenir celle, nasillarde, d’un autre speaker . Celui-ci relate le meurtre d’un écrivain français par un membre de la Milice : Le milicien s’est introduit dans sa chambre … À cet instant précis, Camus sent une présence derrière lui. Une présence menaçante. Il s’agit du milicien, pas de doute. Camus tente de bouger, de se lever, mais il est cloué à son matelas par une force obscure. Le milicien , poursuit le speaker , s’est approché de l’écrivain et, à l’aide d’un parabellum P.08, a fait feu dans le dos de sa victime … Sitôt cela dit, une forte détonation se fait entendre dans la chambre et Camus sent une balle l’atteindre au dos. Le projectile pénètre sa chair et crée une série de cercles concentriques, telle une pierre larguée dans un étang. La douleur est ressentie comme une décharge électrique.
Camus pousse un cri et se dresse dans son lit. Le sang bat à ses tempes. Il veut calmer sa respiration hystérique, la contrôler, et n’y parvient qu’après de longs moments d’effort. Bien qu’il ne croie pas aux rêves prémonitoires, il ne peut qu’être anxieux – Béard veut bel et bien sa mort.
De nouveau, Camus se demande pourquoi il est détenu dans cette chambre, cette cage, cette cellule, pourquoi il est séquestré contre son gré, alors qu’il n’a rien fait d’illégal, de mal. Au contraire… Accusé de rien, coupable de rien, et pourtant emprisonné. Il se tue à le répéter à Ève.
Camus va à la fenêtre. C’est le black-out à cause des bombardements de l’aviation alliée, comme à chaque nuit. Pas un seul lampadaire allumé. En plus, le ciel cette nuit est couvert. Aucune lumière, donc, pas même celle de la lune. La noirceur est totale.
Les 21 points de la Milice (janvier 1943)
Contre l’égoïsme bourgeois. Pour la solidarité française.
Contre le scepticisme. Pour la foi.
Contre l’apathie. Pour l’enthousiasme.
Contre la routine. Pour l’esprit d’initiative.
Contre l’influence. Pour le mérite.
Contre l’individualisme. Pour la société.
Contre l’ancienneté. Pour la valeur.
Contre l’anarchie. Pour la discipline.
Contre l’égalitarisme. Pour la hiérarchie.
Contre la vaine liberté. Pour les vraies libertés.
Contre la démagogie. Pour la vérité.
Contre la démocratie. Pour l’autorité.
Contre le trust. Pour le métier.
Contre le capitalisme international. Pour le corporatisme français.
Contre la tutelle de l’argent. Pour la primauté du travail.
Contre la condition prolétarienne. Pour la justice sociale.
Contre la dissidence gaulliste. Pour l’unité française.
Contre le bolchevisme. Pour le nationalisme.
Contre la lèpre juive. Pour la pureté française.
Contre la franc-maçonnerie païenne. Pour la civilisation chrétienne.
Contre l’oubli des crimes. Pour le châtiment des coupables.
CHAPITRE 1 Albert Camus doit mourir
Une lumière crue éclabousse le plan de Paris déployé sur la table de cuisine. La fumée de cigarettes achetées au noir (des Gitanes, des Gauloises, des américaines) remplit la pièce. Trois hommes en manches de chemise scrutent le plan. Ils ne portent pas l’uniforme de la Milice, qui leur permet d’imposer leur loi durant leur quart de travail, d’arrêter et de déporter les ennemis de la patrie, soit les communistes, les résistants, les métèques, les dépravés sexuels, les clodos, les francs-maçons, les fainéants qui essaient d’échapper au Service du travail obligatoire, la racaille juive, les drogués, les parasites sociaux, les intellos de gauche, les gaullistes, les travestis, les Noirs.
Les miliciens ont très mauvaise réputation en ce mois d’août 1944. La Milice n’est pas qu’un instrument de répression détestable et détesté, mais l’un des éléments les plus actifs de la collaboration avec l’occupant nazi. Les miliciens procèdent à des arrestations arbitraires, ils volent les biens de Français lors de perquisitions, violent les femmes, torturent leurs compatriotes, exploitent le marché noir pour leur propre profit, contribuent à l’atmosphère de furie qui règne dans le pays. Mais pour ces hommes penchés sur le plan, la Milice a pour mission de prendre une part active au redressement politique, social, économique, intellectuel et moral de la nation française. Elle est l’incarnation de la vieille et glorieuse France, celle de Charlemagne, de Louis XIV, de Napoléon Bonaparte, du maréchal Pétain.
En plus de la carte de Paris, il y a sur la table des coupures de journaux, ainsi que deux photos du même homme. La première, un gros plan : le front du type est haut, ses cheveux sont lissés en arrière, son regard est noir et perçant, intelligent. Une cigarette est vissée aux commissures de ses lèvres. Sur la seconde photo, l’homme porte un trench-coat, le col relevé contre la nuque. Sa tête est penchée de côté, comme si la présence même du photographe l’importunait. Au bec, cette même éternelle clope.
Tout comme ses comparses, Francis Béard est membre de la branche armée de la Milice, la Franc-Garde. Son grade : chef de main. C’est donc qu’il porte un chevron r