L'heure d'été , livre ebook

Alice Ajar
 
 
 
 
 
 
 
 

 
 
 
 
 
 
Roman
 
 
 
 
 
 
IGB EDITION
 
 
 
 
 
 
 
© 2022 IGB Édition / Alice Ajar
Photographie de l’auteur : Alice Ajar
Conception de la couverture : Emma Palissot
Maquette intérieure : © 2022 IGB ÉDITION.
ISBN 978-2-491770-96-9
 
Cet ouvrage est une œuvre de fiction qui révèle certains aspects autobiographiques. Ainsi les noms, lieux et actions peuvent relever de l’imaginaire ou illustrer le passé de l’auteur. Cependant toute ressemblance avec des personnes inconnues, vivantes ou décédées, des évènements ou des situations serait pure coïncidence.
 
 
TABLE DES MATIERES
 
1
On ne saurait défier le Destin
2
Deux pizzas quatre fromages
3
Ces addictions dont on ne peut se séparer
4
Bourrasques
5
Quelques minutes dérobées
6
Par contre, c’est « il » !
7
La vie sait compter les cartes
8
Est-ce moi que tu cherches ?
9
Du vin et des asperges
10
L’Arcane sans nom
11
Seuls ensembles
12
Momentum
13
Le coup du berger
14
Un cinquième As dans la manche !
15
Une histoire pour plus tard
16
Rallumons les étoiles
17
Un délicieux frisson
18
En eaux troubles
19
C’est de bonne guerre
20
«  Je n’aime que mon lit et ma mère  »
21
Sous le signe du Lion
22
Un instant solaire
23
L’heure d’été
 
Remerciements

 
 
 
 
 
 
« Roman, pas mort !»
 
 
1
 
On ne saurait défier le Destin
 
 
 
Boston, 13 juillet 2012. 22 h 24. Magda titube légèrement sur ses talons hauts, ses chaussures claquent sur les dalles de béton. Elle avance fièrement dans la rue, sa meilleure amie accrochée à son bras. Sur l’annulaire gauche de la jeune femme, une bague en argent sertie d’un diamant semble briller dans la nuit. La brunette observe un instant le bijou, un sourire ravi s’étire sur ses lèvres. Demain, elle sera mariée. Demain, elle ne sera plus Mademoiselle, mais Madame. Elle pourra inscrire son nouveau nom de famille sur tous les documents officiels. Elle est tellement ravie par cette idée qu’elle a déjà essayé de se créer une nouvelle signature. Une signature qui lui ressemble, tout en attestant, d’un simple mouvement du poignet, qu’elle appartient déjà à quelqu’un. Pas qu’elle ne soit infiniment amoureuse de l’homme qu’elle va épouser, mais elle est jeune et éprise de l’idée même du mariage. Lorsque sa mère lui a dit qu’elle avait trouvé le parfait époux pour elle, Magda était déjà comblée, avant même de le rencontrer. Elle a alors passé quelques mois à fréquenter le dénommé Aaron, un trentenaire plutôt riche et gentleman. Génie de la finance, l’homme a réussi à doubler sa fortune familiale en investissant dans la cryptomonnaie. Magda sait d’ailleurs qu’elle va pouvoir habiter dans son immense demeure, qu’il a fait construire sur mesure avec ses premiers retours d’investissement. Dès qu’ils seront officiellement des époux, elle pourra emménager chez lui et passer ses journées avec ce bellâtre qu’elle admire tant. Les traditions des deux familles prohibaient effectivement une telle union avant le mariage. Mais demain, ce sera différent. C’est justement pour cette raison qu’elle passe la soirée en compagnie de ses meilleures amies. Pour son enterrement de vie de jeune fille, elle a décidé de se rendre dans un club huppé de la ville, après un souper quatre étoiles payé par son futur époux. Pourtant, si elle s’amuse avec Helen, Victoria et Sophie, elle ne pense qu’au lendemain. Demain… demain… demain…
— Viens, Magda, on va essayer ça ! l’interpelle soudain Helen, en désignant un petit commerce d’un geste du poignet.
 
Sortie de ses pensées, la future mariée ramène son attention vers le lieu indiqué par sa meilleure amie. Les deux autres sont sûrement déjà dans le club, mais elles attendront leur arrivée. Hésitante, Magda adresse un regard énigmatique à la rouquine. Pourtant, Helen l'entraîne déjà en direction de la petite boutique faiblement éclairée, dont l’enseigne indique :
« Médium, voyance – GRATUIT ». 
 
Quand elles entrent, une odeur d’encens envahit rapidement leurs narines. Helen avance sans hésiter à travers la pièce tapissée de pourpre, dont seules quelques bougies éclairent les motifs. Elle s’assoit devant une petite table ronde, comportant trois chaises. Intimidée par un lieu si étrange, Magda l’imite, sans grande conviction. Quelques secondes plus tard, un homme entre dans la pièce, comme par apparition. Il s’installe en face des jeunes femmes en les saluant, avant de sortir un paquet de cartes de sa poche. Magda essaie de ne pas se laisser désarmer par ses yeux verts, même si elle se sent peu à son aise. L’homme à la peau sombre se présente alors comme un spécialiste de l’invisible, tout droit venu de la Louisiane.
— Magdalena … Wallace, c’est bien ça ? s’enquiert-il en souriant d’un air carnassier.
Face à lui, la future mariée se sent plutôt angoissée, désormais. Comment peut-il connaître son nom ? songe-t-elle .
— Félicitations pour le mariage… demain, ajoute-t-il, ne relevant toujours pas ses yeux de son paquet de cartes qui entre ses longs doigts, ces dernières semblent virevolter, comme contrôlées par une force obscure, quasi indépendantes de ses paumes, avant d’ajouter : 
— Et Helen Thompson, enchantée, lâche-t-il enfin à l’adresse de la rouquine. Qu’est-ce que vous voulez savoir ?
Sa question s’étire dans l’atmosphère parfumée de la pièce tandis qu’il sépare ses cartes en deux paquets distincts. Il étale ensuite l’un d’eux sur la table et adresse un clin d’œil à Magda.
 
Pourtant, elle ne se laisse pas désarmer par ce qu’elle pense être un charlatan :
— Ben… effectivement, Magda va se marier demain, déclare Helen, visiblement ravie par son talent. Et on voudrait savoir comment ça va se passer, combien d’enfants vont-ils avoir, ce genre de trucs…
 
Aussitôt, Magda lui donne une légère tape sur le poignet :
— Je ne veux pas savoir ce genre de trucs. Je suis sûre que Monsieur va dire un nombre au hasard et que mon existence entière va être influencée par sa soi-disant prédiction, s’agace la future mariée, de plus en plus mal à l’aise par la présence de l’homme.
— En fait, je ne pourrais pas vous dire de telles informations sur votre mariage, très chère, sourit le médium, confiant. Et ce… parce que vous n’allez pas rester avec votre cher Aaron.
 
La déclaration fait évidemment sursauter les deux jeunes femmes.
Encore plus irritée par son arrogance, Magda serre les poings sur ses cuisses.
— Vous allez l’épouser parce que c’est votre mère qui vous l’a conseillé, mais Aaron n’est pas votre âme sœur, très chère. Vous avez à peine vingt ans et vous ne pourrez malheureusement pas vivre avec la personne qu’il vous faut avant bien longtemps…
— Ce sont des foutaises, gronde l’intéressée, décontenancée par son assurance. J’aime Aaron et je suis sûre que c’est la personne qu’il me faut. Je le sais depuis que je l’ai rencontré.
Suite à cette affirmation, l’homme éclate d’un rire sarcastique. Il propose à nouveau une carte à la jeune femme, qui refuse instinctivement. Elle déteste l’idée même que ce genre de personne puisse influencer la vie des gens qui viennent chercher leurs conseils. Elle n’aurait jamais dû suivre les suggestions de Helen, encore une fois.
— Je sais que vous détestez l’idée que je puisse voir ce qui va vous arriver, Magda, mais c’est la vérité. Je peux même vous en dire plus sur votre âme sœur, si vous êtes curieuse…
— Pourquoi diable voudrais-je entendre ça ?
— Ah ? Vous n’êtes finalement pas si hostile à cette idée, sourit le médium. Hum…
Il dépose délicatement le second paquet de cartes sur la table et les étale sans même les regarder. Il en pioche une au hasard, la retourne, avant de la placer devant la jeune femme. Entre-temps, ses yeux verts n’ont pas quitté ceux de la future mariée. 
— Quelle est cette carte ? interroge-t-il d’un air sérieux.
— C’est un cinq de pique, souffle Magda, sur un ton agacé.
 
Aussi, l’homme se redresse légèrement sur sa chaise, comme troublé par cette annonce :
— Je suis vraiment désolé, très chère…
— Qu’est-ce que ça signifie ? s’enquiert Helen, abasourdie par ses dons.
— Ça signifie que Magda va croiser la route de son âme sœur plusieurs fois au cours des prochaines années. Malheureusement, les circonstances de ces rencontres ne seront jamais de très bon augure pour Mademoiselle, ni pour son âme sœur, explique-t-il, sûr de lui. 
— Ce sont des conneries, maugrée la future mariée en croisant enfin les bras sur sa poitrine.
 
Elle adresse un regard à sa meilleure amie, espérant lui faire comprendre qu’elle souhaite s’en aller. Pourtant, l’homme l’interrompt encore une dernière fois :
— Je n’ai pas envie de vous laisser ainsi avec de si mauvaises nouvelles, Mademoiselle Wallace, admet-il d’un ton plus rassurant. Savoir que vous n’allez pas pouvoir être heureuse avec la bonne personne avant longtemps peut être assez troublant. Je préfère donc vous donner une dernière information sur cette personne.
— Dépêchez-vous parce que j’ai un enterrement de vie de jeune fille à célébrer, râle alors la future mariée.
Elle se lève pourtant, ne quittant pas des yeux le médium. Un sourire se dessine ainsi sur son visage, comme s’il était amusé de ce qu’il allait dire : 
— Vous allez… au bar de L’escalier, n’est-ce pas ?
— Qu’est-ce que ça peut vous foutre ? 
— Vous allez croiser votre âme sœur ce soir. Ça sera la première fois, et la dernière avant un long moment, détaille-t-il, apparemment ravi de cette bonne nouvelle.
— Okay, c’en est fini de vos foutaises ! peste-t-elle d’un ton plus grave.
 
L’homme se lève sans attendre et saisit son poignet délicatement :
— Cette personne vit sous le signe du Lion, Magda. C’est même ancré dans sa peau, ajoute-t-il. Ses initiales sont la dixième... et la dix-neuvième lettre de l’alphabet. J’ajouterais seulement que votre âme sœur n’est pas n