La Pauvresse du taudis , livre ebook

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2018

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« “Monsieur, fit-il, avec une politesse affectée, je ne réclame rien pour moi, je désire seulement informer les élus de la ville de ce qui se passe dans ce quartier, en espérant qu'on apportera une amélioration à la vie quotidienne de ces femmes et leurs enfants, par exemple, des toilettes convenables, un point d'eau pas trop éloigné de ce campement à défaut de construire un logement correct, ce qui devrait se faire sans trop de frais. Je suis venu pour vous informer et aussi, pour vous pousser à intervenir, ce qui semble loin d'être le cas actuellement.” Cette dernière phrase provoqua une riposte furieuse de l'adjoint : “Et vous faites quoi, vous, des paroles, toujours des paroles, seulement des paroles ! On croirait entendre un communiste ! — On dirait un raisonnement de fasciste”, se permit André. » Divorcé, veuf, André ne travaille plus à moins de quarante ans. Depuis son accident, il vit de sa pension et de ses cultures. Le cœur sur la main, il vend à bas prix ses légumes sans engrais ni pesticides, voire les offre aux nécessiteux. Mais sa générosité ne plaît pas à tout le monde. Lorsqu'il s'insurge contre les conditions de vie de ce camp de fortune établi aux abords de la ville, certains à la mairie pensent au contraire à se débarrasser du problème une fois pour toutes... Partagé entre son amitié pour la vieille Marthe, son flirt avec sa fille Nathalie et son affection pour Claire prête à tout pour faire vivre son enfant, il tâchera d'agir au mieux, sur tous les fronts... Chronique sociale engagée, La Pauvresse du taudis s'attache avant tout à dépeindre des personnages plus vrais que nature, frappants d'humanité dans leur richesse comme dans leur fragilité. Mêlant romance et thématiques d'une actualité hélas toujours brûlante, le nouveau roman de René Bard, s'il reste lucide, choisit l'espoir et défend avec conviction le vivre-ensemble.

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Date de parution

14 juin 2018

Nombre de lectures

0

EAN13

9782342161823

Langue

Français

La Pauvresse du taudis
René Bard
Société des écrivains

Le Code de la propriété intellectuelle interdit les copies ou reproductions destinées à une utilisation collective. Toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite par quelque procédé que ce soit, sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants cause, est illicite et constitue une contrefaçon sanctionnée par les articles L 335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.


Société des écrivains
175, boulevard Anatole France
Bâtiment A, 1er étage
93200 Saint-Denis
Tél. : +33 (0)1 84 74 10 24
La Pauvresse du taudis
 
Toutes les recherches ont été entreprises afin d’identifier les ayants droit. Les erreurs ou omissions éventuelles signalées à l’éditeur seront rectifiées lors des prochaines éditions.
Livre I
1
En cette fin de journée, les deux mains sur la balustrade, André Ganlin regardait la terre cultivée à ses pieds. La surface en formait un long rectangle découpé en bandes d’environ quatre mètres sur un ; elles étaient accolées deux par deux, chaque groupe séparé de l’autre par un étroit passage. Sous le balcon, elles se terminaient de façon régulière, alors qu’à l’autre bout, elles s’achevaient un peu n’importe comment, en suivant la lisière du bois. L’ensemble de l’espace était le résultat d’heures de travail avec la pioche, la pelle, sur un sol de cailloux dont il avait empli des brouettes ; après avoir tamisé, il avait pavé au pied de la maison une sorte d’allée, qui se prolongeait jusqu’à l’extrémité du jardin. En serrant la balustrade, André exprimait à sa façon combien il était content et fier de son potager. Certes, il ne pouvait être comparé à ces immenses terres cultivées où bien qu’il se fît tard, roulaient encore des tracteurs. Il les distinguait à travers les éclaircies entre les arbres du petit bois. En petites quantités, ses récoltes étaient de qualité. La plupart de ses voisins venaient se servir chez lui et choisissaient eux-mêmes les légumes qu’ils désiraient en disant : « C’est de meilleure qualité et moins cher ici. » André Ganlin ne cherchait pas à s’enrichir, il était pensionné à la suite d’un accident à l’approche de quarante ans, et sa pension lui suffisait pour vivre d’autant qu’il se nourrissait de ses propres légumes, cultivé sans engrais ni pesticides. Parfois, il lui prenait l’envie d’acquérir un motoculteur. Pourquoi se demandait-il aussitôt ! Son plaisir, c’était de semer, de produire, à l’aide de la bêche, du râteau. Depuis les quelques années qu’il la travaillait, la terre était devenue parfaitement meuble. Cultiver était pour lui un jeu ; un divertissement auquel il s’adonnait le matin ou l’après-midi, parfois la journée entière. Un an auparavant, il avait décidé d’agrandir le potager en direction de la cave de Marthe. L’espace vaste était couvert de broussailles donc difficile à bonifier. André avait pris la sage décision d’essarter petit à petit. La double bande gagnée sur le sol lui avait demandé beaucoup de temps ; au bout de l’année, elle n’était pas encore prête à être mise en culture. André avait une sorte de fourneau où il brûlait les mauvaises herbes. En dehors du jardin, il avait d’autres occupations. Veuf, il devait entretenir sa maison, préparer les repas, il ne pouvait compter sans arrêt sur Marthe. D’autre part, comme il était assez adroit en plomberie, en menuiserie, en électricité aussi, il n’était pas rare qu’un de ses voisins fît appel à lui. Il n’acceptait aucun paiement ; lui suffisaient un verre de café ou un apéritif et André se contentait de dire : « C’est le verre de l’amitié ».
Sa plus proche voisine, Marthe Bérand, était une charmante dame plus âgée que lui. Sa chevelure épaisse, striée de nombreux fils argentés, encadrait son visage, cachait ses oreilles, débordait sur son front ; la peau de son visage était pâle car madame Bérand se coiffait d’un chapeau lorsqu’elle sortait. Ses rides fines ne la vieillissaient pas, on ne les remarquait pas, elles étaient cachées par le perpétuel sourire qu’elle offrait à ses interlocuteurs. Un sourire qu’on retrouvait dans sa voix quand elle évoquait ses trois enfants, qui l’avaient quittée pour « vivre leur vie » comme elle disait. L’aîné, le garçon était marié et avait deux enfants, bientôt des adolescents. Ses deux sœurs travaillaient loin et ne rendaient visite à leur mère que lors des vacances scolaires. Et encore, pas tous ensemble, car Marthe ne pouvait les accueillir, son domicile, avec deux chambres seulement, était exigu. Lorsqu’André et Marthe avaient fait mieux connaissance, il lui avait proposé de mettre à sa disposition la chambre qu’il n’utilisait pas. Par discrétion, Marthe avait refusé : « L’année prochaine, André, je te remercie. » Leurs rapports de bon voisinage s’étaient peu à peu transformés en cordialité en particulier lors des beaux jours où il n’était pas rare que Marthe vînt s’asseoir en bordure du jardin. André piochait, ratissait, semait ou recevait des clients. Il ne faisait pas payer cher ses légumes mais suffisamment afin d’augmenter le pécule qui lui servait à acheter des graines ou du matériel pour ses divers travaux. Marthe faisait un peu de ménage dans la cuisine de la maison d’André où elle entrait sans demander une quelconque autorisation ; les légumes étaient gratuits pour Marthe. Quand il rentrait chez lui, André trouvait la vaisselle lavée mise à sécher sur la table et les pavés balayés. Ils se rendaient des services pour lesquels il n’était jamais question d’argent. Ce qu’André appréciait particulièrement, c’était ces visites qu’elle lui rendait en s’installant avec, sur les genoux, des pelotes de laine : elle tricotait, à une vitesse incroyable, toutes sortes de vêtements, pulls, chandails, cache-nez, chaussettes… etc., qu’elle apportait ensuite à la société de bénévoles venant en aide aux SDF, aux misérables. On lui fournissait les pelotes de laine et on se gardait de la remercier depuis qu’elle avait répondu assez sèchement : « Ce n’est pas pour vous, c’est pour les pauvres et leurs enfants ».
— Nous le savons bien ! avait approuvé le gestionnaire de la salle de réception, tout de même étonné par la brusquerie de la réponse.
Un jour, c’était un mardi, en apportant ses ouvrages, Marthe avait aperçu, sur un coin de la table d’accueil, un cageot de légumes : le cageot était reconnaissable entre mille ! Le même type de cageot qu’utilisait André ! On le lui confirma, le cageot et les légumes venaient de chez son voisin et c’était la première fois.
Sur le chemin du retour, elle peinait pour pédaler, tant cette question la troublait. « Pourquoi André ne l’avait-il pas informée ? »
Le lendemain, elle l’interrogea :
« J’ai reconnu le cageot. Pourquoi ne m’as-tu pas mise au courant ? »
Avant qu’il répondît, elle ajouta :
« Je croyais être ton amie.
— Pourquoi ? bafouilla-t-il, je ne sais pas trop mais tu es mon amie et, si tu le veux bien, tu le seras toujours. »
Face à lui, Marthe regardait André, sa tête baissée, la main posée sur le manche de la pioche :
« J’ai préparé un gratin avec tes aubergines. Je t’invite à déjeuner. »
L’invitation n’était pas la première mais l’atmosphère était, cette fois, différente. Marthe le fixait, il faisait errer ses yeux. Il les arrêtait parfois sur le visage de Marthe, esquissait un sourire auquel elle répondait alors en baissant la tête, pendant un court instant. Il murmura : « Je viendrai. » À midi, il toqua à la porte d’une main, embarrassée de trois roses rouges. Marthe ouvrit, André lui offrit immédiatement les fleurs. Elle le fit entrer :
« Installe-toi, je m’occupe du bouquet. »
Elle posa le vase fleuri sur la table.
« Elles sont superbes, je te remercie. »
Elle s’assit en face de lui, ils restèrent un moment sans rien dire. André se décida :
« Je sais pourquoi, Marthe, je n’ai rien dit, parce que je craignais que tu penses que c’était à cause de toi que j’allais donner ces légumes. Et…
— Et ?
— Ce n’était pas à cause de toi mais grâce à toi que m’était venue cette idée : un cageot de légumes ce n’était rien pour moi, mais beaucoup pour les malheureux qui en ont besoin. J’ai demandé à la personne qui m’a reçu s’il fallait que j’apporte d’autres légumes. « Vous faites beaucoup m’a-t-elle répondu. Si le besoin s’en faisait sentir, nous ferions appel à vous, à votre bon cœur, comme nous disons. Si vous ne pouvez pas, il ne nous viendra pas à l’idée de vous faire un quelconque reproche. » Avant que je m’en retourne, elle m’a informé que sa Société organisait une soirée loto au bénéfice de tous les gens que nous aidions. Nous avions envisagé, m’a-t-elle précisé, d’inviter tous nos généreux donateurs. La plupart n’ont pas été d’accord et la majorité nous a dit : « Nous rendons service sans exhibitionnisme. L’un a même spécifié : « Je viendrai jouer au loto mais en restant anonyme ! »
« Et toi, Marthe, qu’en penses-tu ?
— Pour moi, rester anonyme serait difficile : beaucoup de nos pauvres me connaissent, je vais chez les uns et les autres pour prendre les mensurations, surtout celles des enfants. Mais il ne faut pas en faire un spectacle et, personnellement je n’irai pas jouer au loto. »
André accueillit cette décision avec le sourire et osa s’amuser :
« Même pas pour m’accompagner ? »
Marthe ne se démonta pas, se mit à rire :
« Pour faire dire que nous formons un couple : une vieille femme avec un homme jeune et tout ce que cela sous-entend ? »
André resta coi et s’intéressa au gratin. Puis, il félicita Marthe :
« Ton gratin est parfaitement réussi. Si tu m’y autorises, je finirai le plat.
— Il est là pour ça ! »
André ne fit pas des manières, acheva le gratin et dit :
« Ce soir, je me contenterai d’un yaourt et de quelques fruits. Au fait, ajouta-t-il, le buffet tout déglingué, il faudrait que je m’en occupe.
— Tu as suffisamment de travail avec le jardin. »
André sembla ne pas avoir entendu. Il continua :
« Comme il est dans la cave, je ne te dérangerai pas.
— Mais André, tu ne me déranges jamais, je vais te

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