Contes peuls du Mali , livre ebook

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Date de parution

01 janvier 2005

Nombre de lectures

1

EAN13

9782845867204

Langue

Français

Poids de l'ouvrage

1 Mo

Christiane Seydou
Contes peuls du Mali
KARTHALA
CONTES PEULS DU MALI
KARTHALAsur Internet : http://www.karthala.com Paiement sécurisé
Couverture :
Tenture de mariage askilla keska (III 27026), Museum der Kulturen Basel.
¤Éditions KARTHALA, 2005 ISBN : 2 84586-720-4
Christiane Seydou
Contes peuls du Mali
Éditions KARTHALA 22-24, boulevard Arago 75013 Paris
Introduction
À Almâmi Mâliki Yattara
Les contes figurant dans ce recueil ont été enregistrés au cours de mes 1 missions au Mali , entre les années 1970 et 1980, lors de soirées informelles et occasionnelles et dans un contexte familial ou privé, au cœur même des maisons amies qui m’accueillaient dans les différentes villes ou villages où je séjournai. C’est ce qui explique la diversité des styles de ces textes, narrés par des femmes et des hommes, des adolescents et des personnes d’âge mûr, des mères de famille et de jeunes tisserands, voire même un griot..., les uns particulièrement talentueux, 2 d’autres plus modestement doués ... Ils ont été produits dans des situations que l’on peut considérer comme « normales », le seul facteur déclenchant étant la curiosité à l’égard d’une hôte étrangère, qui attirait les voisins dans la cour de mes logeurs, favorisant ainsi la tenue spontanée de veillées ; celles-ci devenant quotidiennes – et la rumeur ayant tôt fait de courir que je m’intéressais aux récits, poèmes, etc. –, elles amenèrent leur lot de contes en suscitant, de plus, une certaine émulation chez les participants ; je n’eus plus qu’à pousser discrètement le bouton de ce qu’on appelait alors une mini-K-7 pour me retrouver avec un corpus de plus de cent cinquante contes. Trente-cinq de ces contes, recueillis à Douentza en 1970 au cours de 3 deux veillées ont déjà été publiés en édition bilingue . Lors de ces deux 1. Ces missions, financées par le CNRS, faisaient partie de mon programme de recherche sur quatre des genres les plus importants de la littérature peule du Massina (épopée et poésie pastorale, profane et religieuse), et non sur les contes. 2. Voir le tableau, p. 483-484. 3. Seydou, 1976.
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séances spontanées, trois femmes d’âge et de tempérament différents ainsi que deux jeunes garçons se sont relayés, prenant la parole tour à tour, sans gêne ni contrainte, au gré des associations de souvenirs qu’éveillait le récit précédent, et se lançant dans la narration sans aucune prétention et non, parfois, sans quelque maladresse. Dans un souci méthodologique, avaient été respectées hésitations et erreurs, comme avaient été conservés les récits tronqués ou réduits à leurs seuls chants, suivant en cela un principe de fidélité absolue, afin de livrer une sorte de document brut illustrant une situation de veillée improvisée où les contes s’enchaînent selon une logique qui leur est propre, et préservant l’authen-ticité de cette littérature orale populaire, saisie dans son jaillissement même. Le présent recueil en deux parties n’a d’autre prétention que de fournir, uniquement en traduction française, soixante-sept de ces contes recueillis dans différentes occasions et regroupésgrosso modo par thèmes. Notons toutefois que la traduction est restée absolument fidèle au texte peul original et que si, cette fois, l’ordre d’émission des contes n’a pas été retenu, c’est que l’abondance des textes a laissé apparaître un autre type d’organisation des thèmes. Certes, un corpus aussi restreint ne permet pas de conclusions fiables ; pourtant on ne peut s’interdire de constater, d’une part une certaine répartition des répertoires selon le sexe et l’âge des conteurs, d’autre part, la prédominance de certains sujets qui, dans la vie, suscitent le plus large éventail de problèmes. C’est ce qui nous a incitée à nous autoriser une intervention personnelle dans le choix et la présentation des textes. Ainsi, le répertoire enfantin a été sacrifié : beaucoup moins fourni que celui des adultes et consacré majoritairement aux petits contes animaliers et aux chantefables déjà bien connus, il était surtout, le plus souvent, raconté d’une façon gauche ou erronée. La masse des contes restant a laissé apparaître deux grands axes de prédilection : l’un centré sur la femme dans toutes ses situations, l’autre sur « l’aven-ture », celle-ci pouvant impliquer des personnages des deux sexes, mais privilégiant tout de même la part masculine de l’humanité. J’ai donc opté pour une présentation de ce corpus en deux parties. La première traite de l’ensemble des problèmes concernant la femme, de sa naissance et son enfance jusqu’à son mariage et à sa maternité, compte tenu de l’ensemble du réseau relationnel familial et allié que ces diffé-rents stades de sa vie mettent en question. Dans le second, plus disparate, sont regroupés des thèmes plus variés, mettant en scène les mondes humain, animal, surnaturel pour illustrer un éventail de situations aventu-reuses suscitées par des personnages originaux au caractère singulier. Ces regroupements ont fait apparaître une répartition des narrateurs selon leur sexe, qui s’avère significative : en effet, dans chacun des
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volumes, on constate une disproportion entre le ratio homme/femme dans le groupe des conteurs et le nombre des contes dus à chaque sexe. Dans la partie consacrée à la femme, on observe une distorsion manifeste : ainsi, bien que l’on compte seulement cinq conteuses pour sept conteurs, on doit aux premières vingt-cinq contes, contre seulement treize pour les hommes. Inversement, dans la seconde partie, une nette majorité revient encore aux conteurs, au nombre de six, alors que seules trois conteuses sont présentes ; mais, cette fois, la disproportion entre les sexes persiste en s’accentuant fortement, vingt-deux contes étant dus aux six hommes et seulement sept aux trois femmes. On voit ainsi se dessiner les tendances qui nourrissent les répertoires masculin et féminin, suivant une orien-tation bien prévisible, chaque sexe retenant sans doute spontanément les histoires dans lesquelles il se sent plus directement concerné : « impos-sible de faire confiance à la femme », voilà qui inspire nos jeunes tisserands ; de même les diverses versions du « mariage à épreuves » sont données exclusivement par des hommes, les hauts faits des prétendants entrant dans la grande rubrique des contes à aventures qui semblent attirer plus particulièrement la gent masculine. Au contraire, tout naturellement, c’est aux femmes exclusivement que l’on doit les histoires mettant en scène la relation mère/enfant. Ces différences d’intérêt pour tel ou tel sujet selon le sexe se reflète dans la proportion des contes dus à des narratrices – vingt-cinq contes, dans la première partie, contre sept dans la seconde – et à des narrateurs – vingt-deux contes dans la seconde partie contre treize dans la première.
Première partie : la Femme
Une remarque préalable s’impose : la plupart des thèmes de contes représentés dans ce recueil sont communs aux différentes populations de l’Afrique de l’Ouest ; toutefois, chacune en traite selon son idéologie propre. L’interprétation « peule » se fait plus particulièrement sentir ici et là, par exemple dans le traitement des personnages de femmes face au monde masculin représenté par les pères, les frères et les maris, et cela quel que soit le sexe des narrateurs. On relève en effet, chez bon nombre des femmes mises en scène dans l’ensemble de ces textes, cette indépen-dance d’esprit – abondamment illustrée surtout dans les récits épiques qui est l’une des constantes de l’idéal héroïque dupulaaku, manière d’être spécifique et identitaire du Peul, focalisée sur la notion de liberté intérieure qui incite la personne à refuser toute sujétion vis-à-vis d’autrui
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comme de ses propres contingences. Ainsi dans les textes sur le thème du « mariage à épreuves » (contes 29, 30, 42, 52, 57) on est frappé par le fait que, contrairement à la plupart des contes provenant d’autres populations tant africaines qu’européennes, c’est toujours la fille et non son père, qui pose les conditions extravagantes à son mariage. Ici, la fille, non seulement n’est pas réduite à l’état d’objet-récompense attribué par son père au prétendant vainqueur des épreuves choisies par lui, mais au contraire se fait, elle seule, meneur d’un jeu on ne peut plus oppressif vis-à-vis de la gent masculine, les vaincus se trouvant décimés sans pitié. La passivité des pères qui se contentent de recevoir les prétendants pour les envoyer directement discuter de l’affaire avec leur fille et de les informer des risques qu’ils encourent, va à l’encontre des règles élémentaires de l’instauration des alliances suivant le mode traditionnel. En effet, en se proposant comme enjeu, à l’issue des épreuves insurmontables qu’elle impose à ses prétendants, la fille s’arroge un monopole qui est norma-lement détenu par la génération parentale ; pourtant, cette usurpation n’est jamais présentée ici comme un acte de rébellion vis-à-vis du système social ou de l’autorité paternelle ; c’est qu’en se posant comme objet de conquête – conquête héroïque puisque mise en balance avec la mort infligée en cas d’échec – la fille ne fait qu’entrer dans le jeu masculin de la valorisation par la compétition, jeu ici poussé jusqu’en ses limites extrêmes. Son excès narcissique se trouve alors réhabilité dans la mesure où il va permettre à chacun des partenaires du couple, de devenir le faire-valoir de l’autre, la valeur de l’objet de la conquête se mesurant à l’aune des exploits accomplis pour le mériter, et la valeur du vainqueur à celle des obstacles mis à cette conquête. Outre le personnage de la fille à marier, telle version du « mariage à épreuves » (conte 29) introduit celui de la sœur du prétendant, comme étant le véritable artisan de la réussite de celui-ci, pour avoir su le préparer convenablement à l’exercice d’arithmétique imposé ; en détour-nant la gloire du prétendant victorieux sur sa sœur, cette version met encore davantage la femme à l’honneur en la plaçant, comme dans tous les contes mettant en scène le couple frère/sœur, au centre même du destin matrimonial de l’homme. En complément, c’est aussi, fort souvent, l’intervention du frère qui sauve des dangers d’un mariage hors normes la Fille difficile qui exige un mari sans cicatrice et refuse les mises en garde de sa famille (contes 22-25). Lorsque le destin matrimonial de la fille est entre les mains de son père, le statut normal de donneur d’épouses de celui-ci se trouve battu en brèche puisque la réclusion à laquelle il soumet sa progéniture pour la soustraire à tout risque de grossesse illégitime se révèle inefficace : ici encore, c’est à lui qu’en est imputée la faute par une fille entreprenante
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qui lui reproche ouvertement sa négligence (conte 21) et décide de prendre elle-même son destin en main délibérément, à ses risques et périls. Plus communs, les problèmes suscités par la polygamie et la jalousie entre coépouses constituent rarement le sujet central de ces contes (conte 6), mais plutôt la raison déclenchante (conte 5) ou au contraire l’action concluante (conte 2) d’une histoire ; le plus souvent, la jalousie entre les coépouses n’est là que pour introduire la situation des orphelines persécutées par leur marâtre (contes 8-9). Enfin, fort curieusement, dans le long conte intitulé Tambour-de-Hyène (conte 42), c’est à la demande expresse de son épouse et sous son insistance menaçante, qu’un homme se résout à prendre une seconde femme ! Ce qui l’entraînera d’ailleurs dans de nouveaux périls... Enfin, lorsqu’il s’agit du couple lui-même dans le contexte des rela-tions conjugales, peut alors s’étaler l’éventail des vertus et des vices : de l’épouse adultère (contes 32-33) à la femme parfaite (conte 38) en passant par la femme pleine de ressources et de malice (conte 37), et du conte moralisateur (conte 34) au conte facétieux (contes 35-36), l’auditoire peut trouver matière à alimenter ses rêves ou son ironie vengeresse. Pourtant, même là, bien souvent la leçon est moins de stigmatiser les défauts fémi-nins (indocilité, infidélité, autrement dit rébellion par rapport à l’autorité maritale ou sociale) que de brocarder la naïveté masculine et de mettre en garde contre l’empire des femmes sur les hommes. Il semble même – comme le suggèrent les deux contes sur les maris jaloux (contes 35-36) – que la prétention de l’homme à considérer sa femme comme sa propriété exclusive soit assimilée, du point de vue social, à la folie : c’est d’ailleurs l’aspect antisocial de la jalousie qui fait que, dans la vie réelle, ce sentiment est particulièrement critiqué ; comme le remarque Paul 4 Riesman , « c’est une émotion antisociale parce qu’une belle femme est belle pour tout le monde » et qu’un mari « a tort de s’offusquer à cause des sentiments que celle-ci suscite » chez les autres hommes ; de plus on peut se moquer d’un homme jaloux parce qu’il « fait preuve d’un manque de maîtrise de soi-même et risque, par là, d’être accusé d’être plus faible que sa femme ». Enfin, le conte sur l’épouse du pauvre (conte 37) brosse un per-sonnage de forte femme, dominatrice et madrée, dont la rouerie semble légitimée par le secours qu’en tire son époux et le châtiment de ses victimes fautives. Dans ce conte en forme de fabliau, on retrouve en effet l’ambiguïté de la représentation de la femme, à la fois dupeuse et
4. P. Riesman,Société et liberté chez les Peul Djelgôbé de Haute-Volta, Paris-Mouton-La Haye, Cahiers de l’Homme, 1974, p. 203.
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