La vie est un jeu d'échecs , livre ebook

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2019

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1983. Vasu, 14 ans, participe à un tournoi d’échecs... et perd, sous le regard d’un mystérieux vieil homme, qui lui propose de devenir son Maître d'échecs, à deux conditions : il ne l’accompagnera à aucun tournoi, et Vasu ne devra pas chercher à en savoir plus sur son passé. Séduit à l’idée de devenir grand Maître à son tour, et pourquoi pas champion du monde, Vasu s’empresse de l’annoncer à ses parents. D’abord réticents, ceux-ci finissent par accepter. Commence alors un entraînement intensif pour Vasu : outre les multiples stratégies du jeu, le jeune garçon doit apprendre la patience et maîtriser la colère qui gronde en lui. Le maître lui raconte comment, jeune garçon vivant dans l’Inde coloniale, il a perdu de façon humiliante contre un Anglais. Il en a tiré une leçon : « Be a lion », être le meilleur pour gagner quelles que soient les circonstances, et ainsi vaincre ses peurs. L'apprentissage ne fait que commencer...

Titre original : The Last Gambit


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Publié par

Date de parution

29 janvier 2019

Nombre de lectures

351

EAN13

9782215172260

Langue

Français

Poids de l'ouvrage

1 Mo

Table des matières
I – La pilule magique
II – Une absence exaspérante
III – Un bateau en papier
IV – Pas de victoire sans combat
V – Du poisson en abondance
VI – L’esprit des échecs
VII – Un coup de fil magique
VIII – Mon charme
IX – Mon meilleur coup
X – Le droit de rêver
XI – Le « missile des échecs »
XII – La dame perdue
XIII – Mis en gage
XIV – Le duel avec Andreï
XV – Fais avancer ton fantassin
Notes
Page de copyright
Dans un pays où le cricket est une religion nationale, je dédie ce livre aux héros discrets de notre nation qui nous ont couverts de gloire en jouant silencieusement aux échecs avec un drapeau indien sur leur table. Leur tempérament calme dissimule des milliers d’heures d’entraînement – jalonnées de difficultés – comme les braises cachent le feu.
Lorsqu’ils remportent des titres de champion et des compétitions prestigieuses, nous ne déferlons pas dans les rues en allumant des pétards. Ils ne vivent pas environnés d’un essaim frénétique de photographes essayant de les prendre sur le vif. Ces génies ne sont pas la coqueluche de Twitter, aucune réception grandiose n’est organisée en leur honneur, ils rentrent au pays sans tambours ni trompettes. À leur descente d’avion, ils récupèrent eux-mêmes leurs bagages, regagnent leur domicile sans se faire remarquer, et se remettent aux échecs.

À travers ce livre, je salue ces brillants esprits de notre nation.
CHAPITRE I
La pilule magique
Je ne sais pas pourquoi, mais les gens m’agacent quand ils prennent un ton de philosophe pour affirmer que la vie est un jeu d’échecs. Ouais, c’est ça. Comment peut-on faire une comparaison pareille ? D’abord, il y a des règles aux échecs. C’est une œuvre d’art tout en élégance, tandis que la vie, elle, n’est qu’un horrible marteau. Même s’il s’abat avec grâce, c’est pour vous réduire en miettes.
Aux échecs, on sait exactement quand le drapeau va s’abaisser. On peut obtenir un prolongement. On peut jouer en finesse, surpasser l’adversaire par d’habiles manœuvres. La vie, elle, perce votre stratégie à jour. Elle vous dépouille de vos illusions. Pas d’avertissement, pas de mise en garde. Les prolongements, on peut oublier.

On était en 1983 et je venais d’avoir quatorze ans. L’Inde avait remporté sa première Coupe du monde de cricket. Cette victoire m’importait aussi peu que la taille d’un œuf de dinosaure.
– Paidal chalao, fais avancer ton fantassin, m’a-t-il dit.
Nous avons éclaté de rire, parce qu’il avait appelé un pion un fantassin. Personne n’appelle un pion un fantassin ! Ce vieil homme mal dégrossi participait-il vraiment à notre tournoi, ou était-il simple spectateur ? Son jargon nous semblait comique, ainsi que sa tenue vestimentaire hors d’âge et très simple.

Il n’a pas réagi à cette hilarité. Derrière ses grosses lunettes, ses yeux saillants étaient fixés sur l’échiquier. La partie en cours opposait deux amateurs pendant la pause d’un tournoi d’échecs ouvert à des joueurs de tous âges. Je ne savais pas s’il y participait, car pour l’instant, il n’était que simple spectateur, comme nous tous.
À chaque fois que ce vieux hibou – qui paraissait aussi incongru dans notre tournoi qu’une pièce d’échecs patinée au milieu de pièces flambant neuves – désignait une pièce en hindi, il déclenchait des gloussements. Certains d’entre nous cherchaient même à provoquer de sa part une parole, un conseil stratégique. Mais il restait d’une indifférence agaçante à nos rires et commentaires.
Son visage m’avait d’emblée fait penser à des chai-patti 1 . Après ébullition et passage au tamis. En un peu plus sombre, peut-être. Il était grand et mince, vêtu d’un pull de laine tricoté main aux couleurs fanées, qui paraissait aussi vieux que lui.
La cloche a sonné le début de la quatrième partie. Il s’agissait d’un tournoi toutes-rondes de onze jeux ; pour l’instant, j’avais gagné deux jeux sur trois.
J’ai commencé la quatrième manche avec prudence. Vingt coups plus tard, j’étais en position assez solide et j’avais un pion d’avance. Confiant, je suis passé à l’attaque, mais mon plan s’est retourné contre moi quand mon adversaire a enfoncé son cavalier dans une chaîne de pions en forme de U au centre de l’échiquier. Quinze coups plus tard, je me trouvais en mauvaise posture : deux pions éliminés, un échange de fous et d’autres pièces menacées. Par son habileté et sa patience, mon adversaire avait fait basculer le rapport de force.
Tandis que je faisais mes calculs à la vitesse de l’éclair, lui restait assis en silence, à penser, penser, penser, comme Le Penseur de Rodin. Je ne savais pas ce qui m’exaspérait : le fait de ne pas avoir sa patience, ou qu’il ne fasse pas preuve de ma rapidité. Quoi qu’il en soit, à cause d’erreurs minimes, j’ai perdu la maîtrise de ce jeu qui s’annonçait si bien.
Soudain, surgissant à nos côtés, le vieil homme s’est mis à surveiller mon jeu comme ma grand-mère surveillait ses poppadoms en train de frire. Le règlement du tournoi autorisait les étrangers à observer les parties, à condition qu’ils ne parlent pas et qu’ils ne soufflent rien aux joueurs. Malgré le silence du vieil homme, j’ai senti la gêne m’envahir. Ma situation sur l’échiquier était déplorable.
Ça faisait dix minutes que mon adversaire fixait le plateau des yeux.
Je priais mentalement : S’il commet une faute, ô Hanuman, j’irai mardi dans ton temple et je t’offrirai des modaks. Je nourrirai même les singes du zoo. Je suis prêt à tout pour gagner ta faveur.
Si seulement cette prière pouvait m’obtenir une erreur de calcul me permettant de m’en tirer avec un point. Mais Hanuman a fait la sourde oreille.
Mon adversaire non plus n’a pas réussi à tirer parti de sa situation. La partie s’est enlisée, le temps imparti s’est écoulé. Nous avons échangé une poignée de main. J’ai refermé mon jeu d’échecs d’un coup sec et fourré dans mon sac mes pièces de bois vaincues.
Nous nous sommes approchés du banc pour donner notre score : un demi-point ex æquo.
– Tu aurais dû gagner, m’a dit le vieux en m’emboîtant le pas.
– Ouais, je sais.
Je ne crois pas vous avoir demandé votre avis.
– Alors pourquoi n’as-tu pas gagné ?
– Pardon ? ai-je demandé sèchement.
– Oui, je te pose la question, a repris le vieux d’un ton grave : si tu sais, pourquoi tu n’as pas gagné ?
Il avait insisté sur pas ; ça m’a mis en rogne.
– Ce ne sont pas vos oignons.
Et j’ai tourné les talons pour partir dans le sens opposé.
– Mais ce sont les tiens, m’a-t-il lancé.
Je n’ai eu qu’une envie, me retourner et l’assommer avec mon jeu d’échecs pour le punir de remuer le couteau dans la plaie. J’ai fait quelques pas de plus, mais une chose en moi – je ne sais toujours pas quoi – m’a poussé à pivoter sur mes talons. Il se tenait toujours là, avec un sourire moqueur qui a accru ma colère. Une partie de moi aurait rêvé qu’il disparaisse, mais quelque part, au plus profond de mon être, j’étais heureux de sa présence.
– Maîtrise ton impatience si tu veux vraiment gagner, m’a-t-il dit.
J’ai eu envie de lui crier dessus, de le traiter de tous les noms d’oiseaux, mais au lieu de ça, j’ai répondu :
– Excusez-moi, je ne voulais pas être grossier.
Peut-être à cause de ce qu’il me renvoyait en miroir, ou peut-être parce que je n’arrivais pas à savoir s’il était sincère ou sarcastique. Je me suis approché de lui.
– Je sais que l’attaque de mes fous était risquée.
– Quels fous ? Ils étaient au repos sur la table quand je suis arrivé, a-t-il répondu de but en blanc. Je te parle de l’attaque de la tour et du cavalier.
– Ouais, c’est ça. Sa dame lorgnait ma tour. J’ai eu de la chance de pouvoir dégainer.
– Écoute, gamin.
Il m’a enserré le poignet de ses doigts noueux pour m’entraîner vers une table voisine. Il y avait de la conviction, de la fermeté dans cette étreinte ; pas de force.
Sous mes yeux, le vieux a reconstitué l’échiquier tel qu’il était au moment où il nous avait rejoints. J’en suis resté pantois – je savais reconstruire un jeu, mais je n’aurais jamais pu le faire avec une telle précision.
– Voilà, Rg8 + Tg8, Cf7 ++. Deux coups de plus, et tu l’avais, ton échec et mat. Tu ne laissais pas de choix à l’autre. Il était prisonnier derrière ses propres pions.
J’ai écarquillé les yeux.
Ses mains s’étaient déplacées sur le plateau à une vitesse remarquable, comme s’il était en train de ramasser ses gains au poker, et non de jouer aux échecs. Pas de maladresse, pas de faille – c’était une attaque imparable.
Chose inavouable, je me suis senti petit. Le vieux ne me paraissait plus gâteux. Ce qui me sautait aux yeux, à présent, c’

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