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C'est une aventure bien singulière qui attend Laura, Hugo et Iassine. Alors qu'ils viennent de trouver une lanterne mystérieuse, une étrange adolescente leur indique qu'ils peuvent s'en servir pour voyager dans le temps, pas pour des vacances non, mais parce qu'ils auront des missions précises à remplir et d'une extrême importance. Qui est-elle ? Et pourquoi ont-ils été choisis ?
Le premier élément de réponse se trouve peut être pendant la seconde guerre mondiale dans le quartier des États-Unis à Lyon...
présente
La lampe des siècles
Une lampe mystérieuse
Nicolas le Breton
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Chapitre 1
Après l’école, trois amis discutent dans un parc. Ils ont encore leurs cartables sur le dos.
— Hé, d’ailleurs, pourquoi on l’appelle le boulevard des États-Unis ? demande Laura.
Elle désigne le grand axe qui coupe en deux le quartier bien quadrillé où ils vivent tous les trois.
— Peuh, tu ne sais pas ? Tout le monde sait ça ! répond d’abord, impatient, Hugo.
Mais le regard d’Iassine s’illumine. Il explique :
— C’est parce que, quand on l’a fait, on voulait faire des rues aussi larges et longues que celles qu’il y a en Amérique. America, sister, America! fredonne Iassine en inventant une chanson à partir de ces trois mots.
Et il commence une danse improvisée en claquant des doigts en rythme. Le papa d’Iassine – le papa adoptif –, M. Lambesc, tient une bouquinerie plus loin sur la rue Cazeneuve. Du coup Iassine passe de longues heures à dévorer tous les livres – et les vieux disques – qui passent à sa portée.
— Et puis, ajoute Hugo, qui n’aime pas qu’on le dise moins savant, le maire de Lyon voulait remercier les États-Unis de nous avoir aidés pendant la Première Guerre mondiale contre les Allemands.
Les deux garçons semblent tout savoir. Laura les aime bien pour cela, même s’ils ne l’écoutent pas aussi souvent qu’elle le voudrait. Ils ont onze ans, et elle une année de moins. Mais aujourd’hui, Laura a de quoi les surprendre. Cette fois, se dit-elle, c’est à eux d’être suspendus à ses lèvres.
Laura retrousse ses manches et, sur un ton conspirateur, elle leur souffle :
— Vous savez quoi ? J’ai trouvé quelque chose de vraiment étonnant.
Iassine sourit largement. Hugo fronce les sourcils, ce qui semble assombrir ses yeux bleus :
— Comment cela ?
— Pas ici, lui répond Laura en baissant la voix.
— D’accord, décide Hugo. Allons au QG 1 !
La jeune fille pile net :
— Euh, on peut pas aller ailleurs ? C’est tout froid et humide, et ça sent mauvais, là-bas.
— Ouais, dis plutôt que t’as la frousse, se moque Hugo.
— Non ! C’est juste que c’est trop sombre, et puis je crois que c’est pas permis d’y aller, en fait, dans ce souterrain.
— Les chocottes, les chocottes !
— J’ai peur de rien, réplique Laura, furieuse. On y va, si vous y tenez tant. J’ai pas peur !
Ils quittent le jardin protégé entre les immeubles de cinq étages et gagnent le boulevard. De l’autre côté de la voie de tramway, c’est l’antre des merveilles : la droguerie Askarian, qui appartient aux parents de Laura. De haut en bas, de droite à gauche, ce ne sont que balais, chiffons pliés, outils de bricolage et ustensiles de cuisine. Mille produits chimiques embaument d’odeurs à la fois attirantes et vaguement nauséabondes : naphtaline des antimites ; fragrances de peinture, d’acide, de white-spirit ; ou l’odeur riche des sacs de terreau.
Ils zigzaguent tous les trois entre les clients. Laura passe derrière le comptoir, puis contourne sa mère pour aller décrocher le trousseau de clés du sous-sol. Trop occupée à renseigner les chalands, Mme Askarian ignore le trio familier et les laisse s’engouffrer dans l’arrière-boutique.
Laura s’agenouille, soulève un tapis. Une trappe se révèle, et Laura glisse la clé dans la serrure. Un à un, ils descendent avec précaution l’escalier raide qui mène à la cave.
Pendant que Hugo allume, Iassine s’enquiert de sa voix perchée :
— On va dans le QG, alors, vraiment ?
Lui-même semble manquer d’assurance au moment d’entrer. Ce souterrain, ils l’ont découvert le mois dernier et il est effectivement terrifiant, avec ses courants d’air sifflants. En tout cas, aucun des trois amis n’irait seul dedans…
— Chuut ! l’interrompt Hugo en pointant du doigt le sommet de l’escalier : sa mère ne doit pas savoir. C’est notre secret, on a dit.
Ses deux comparses acquiescent et lui font comprendre d’un geste qu’ils ne feront plus de bruit.
Laura va droit vers la vieille armoire de fer scellée contre la paroi du fond.
On disait que cette armoire inamovible était là depuis l’aménagement du quartier dans les années 1930. Ce que nul ne sait, hormis eux – ils l’ont découvert par hasard trois semaines auparavant –, c’est que le meuble de tôle a un double fond coulissant. Laura et Iassine le poussent, et un afflux d’air froid leur caresse le bout des doigts. Un réseau souterrain entier existe derrière ce passage secret.
— La torche, prends-la ! demande Laura à Iassine.
Celui-ci sursaute : il est toujours assez distrait. Il obéit et décroche la grosse lampe électrique du mur de la réserve.
Les trois amis passent par l’ouverture au fond de l’armoire, puis à travers le mur. Le trou large et haut comme un homme les engloutit.
1 Quartier général : un terme militaire qu’ont repris nos amis pour désigner leur base secrète…
Chapitre 2
Au bout du tunnel creusé dans le béton, la lampe torche caresse les parois grises d’un ancien abri antiaérien de la Seconde Guerre mondiale. Ici, les familles du quartier venaient se réfugier pendant les alertes. Le souterrain a des murs assez épais pour résister aux bombardements. Maintenant abandonné et fermé au public, le réseau est livré à l’humidité et à l’obscurité.
— Qu’est-ce que tu veux nous montrer ? demande Iassine, soudain nerveux.
Laura tremble, et ce n’est pas que de froid. Elle s’arrête au milieu du chemin :
— Vous allez voir. Mais quand même… nos parents ne seraient pas d’accord pour qu’on vienne ici.
Mais Hugo balaie les arguments des deux autres :
— Nous en avons déjà parlé. S’ils ne savent pas qu’on y est, ils ne vont pas nous interdire d’y venir, non ?
Les deux autres se rangent à cette logique implacable.
— Et puis, ajoute Hugo pour les convaincre, le QG, c’est le QG ! C’est notre base secrète où personne ne peut venir.
— Tu m’étonnes, mec, lui répond l’autre garçon. Personne n’en aurait envie .
Malgré les protestations, ils avancent. Le couloir ne cesse de tourner de gauche et de droite… La veille, Iassine a trouvé dans un livre l’explication à cette drôle de construction en zigzag ; si jamais une bombe était parvenue, à travers le sol et le béton, à pénétrer jusqu’ici, le souffle de l’explosion n’aurait détruit qu’un bout du couloir, et chaque virage aurait protégé les occupants dans les autres portions du boyau.
C’est dans le creux du dernier angle que les trois amis ont créé leur QG secret. Ils y ont entreposé leur « trésor de guerre », comme ils aiment à l’appeler. Deux boîtes pleines de ficelle, de billes et de petits jouets, des crayons gras et un galet tout lisse auxquels Laura tient beaucoup ; et trois tas de vieilles cordes entassées sur lesquelles ils s’assoient et se racontent dans la pénombre des histoires pour frissonner… des posters, qui sont accrochés tout autour d’eux ; des bougies et des boîtes d’allumettes ; et une vieille radio qui, il faut bien le dire, ne capte pas grand-chose, ici.
— Alors, qu’est-ce que tu dois nous montrer ?
Laura, pour toute réponse, demande à Hugo de braquer la lumière sur son sac d’école. Elle en tire un objet long et brun qu’elle dépose sur la caisse de bois renversée qui leur sert de table. Cela ressemble à une petite théière dont le bec est presque aussi épais que le corps.
— Je l’ai récupérée dimanche dans le vide-grenier sous la grande halle. Elle était dans un vieux carton plein de bricoles toutes rouillées qui semblait abandonné. Maman m’a dit : « Écoute, la personne qui l’a laissée n’en voulait certainement plus : tu peux la garder. Mais il faudra bien la nettoyer, sinon elle ne rentrera pas dans la maison ! Promis ? » J’ai dit oui. Mais je voulais surtout vous l’apporter.
Laura conclut son explication le rose aux joues. Elle est fière de sa trouvaille.
Hugo fronce le nez :
— Mais, c’est quoi, en fait, ce truc ?
— Une lampe. Une lampe magique !
— Peuh ! fait Iassine. Ça ne ressemble même pas à une… lampe.
— Si, se défend Laura. C’en est une, faite comme dans les temps anciens. Tu vois les deux trous ? Il y en a un pour ajouter l’huile, au centre, et l’autre pour recevoir une mèche… comme celle que j’ai mise.
Laura se tait, concentrée sur l’allumage de sa précieuse découverte. Jamais à court de matériel, elle sort un paquet d’allumettes de sa poche. Elle en craque une, porte la petite flamme jusqu’au bout de corde imbibé d’huile. Bientôt une lumière orangée caresse leurs visages, ainsi que les murs de l’abri antiaérien.
Hugo ne détache pas le regard du petit fantôme jaune et bleu qui danse au-dessus de la mèche. Il croise les bras et fait remarquer :
— Oui, enfin, ça n’existe pas, les lampes magiques.
— Oh, allez, on n’a qu’à dire que c’en est une, hein ? répond Laura avec des étincelles dans les yeux.
Laura caresse le sommet du précieux objet. La flamme semble devenir de plus en plus forte.
Mais, à ce moment-là, un bruit de pas se fait entendre.
— Il y a quelqu’un ! lance Iassine.
— Vite, partons ! ajoute Hugo dans un souffle.
Les garçons courent droit vers le tunnel creusé dans le béton. Laura prend la lampe encore allumée et essaie de les suivre. Elle gémit :
— Hé, attendez-moi !
Elle les rattrape. Ils passent à travers l’armoire dans l’autre sens. Ils ne reprennent leur souffle qu’une fois la trappe refermée.
Laura tient encore la lampe d’une main tremblante. La flamme vacille de tous côtés, mais éclaire toujours leurs visages.
— O.K., c’est la dernière fois que je rentre dans ce souterrain, déclare Hugo, blanc de peur.
Mais Laura et Iassine le connaissent : sitôt sa frayeur passée, sa curiosité sera la plus forte, et il insistera pour y retourner.