76
pages
Français
Ebooks
2016
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Publié par
Date de parution
14 septembre 2016
Nombre de lectures
1
EAN13
9782342055504
Langue
Français
Parce qu'il est gentil, poli et serviable, un garçon de douze ans se voit mis à l'écart par ses deux frères cadets et parfois même par sa mère qui n'hésite pas à le prendre à partie. Seul son père le traite avec amour et bonté. Devenu presque adulte, il se heurte à de nombreux imprévus qui vont le conduire à découvrir des secrets profondément enfouis dans son lointain passé.
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Date de parution
14 septembre 2016
Nombre de lectures
1
EAN13
9782342055504
Langue
Français
Cruel destin
Hafed Nouiouat
Mon Petit Editeur
Le Code de la propriété intellectuelle interdit les copies ou reproductions destinées à une utilisation collective. Toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite par quelque procédé que ce soit, sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants cause, est illicite et constitue une contrefaçon sanctionnée par les articles L 335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.
Mon Petit Editeur
175, boulevard Anatole France
Bâtiment A, 1er étage
93200 Saint-Denis
Tél. : +33 (0)1 84 74 10 24
Cruel destin
Retrouvez l’auteur sur son site Internet : http://hafed-nouiouat.monpetitediteur.com
Je remercie chaleureusement mon frère aîné et ma sœur, Mme K. Taleb, ainsi que tous ceux qui ont si bien su me soutenir et m’encourager tout au long de mon parcours initiatique dans le domaine de la littérature.
L’auteur
Certains seront tentés de dire que c’était de la timidité, d’autres de la faiblesse, d’aucuns penseront que cela relevait purement et simplement d’un manque de courage. Quant à moi, je ne m’étais jamais posé la question, car, en ce temps-là, je n’étais encore qu’un petit enfant, un enfant qui ne devait pas dire non ou qui, tout simplement, avait peur de le dire.
Aussi loin que je m’en souvienne, j’ai toujours été un garçon frêle, voire squelettique. J’avais cru devoir vivre toute ma vie avec ce handicap, ce désavantage encombrant qui me poursuivait comme une ombre, qu’il fît beau ou mauvais temps. Mes frères en profitaient pour me confier les tâches les plus pénibles, les plus difficiles. J’acceptais sans jamais me plaindre. Nous étions trois garçons et deux filles. J’étais l’aîné des garçons et pourtant, mes frères ne me considéraient pas comme tel. Mes deux sœurs s’occupaient de la maison en aidant ma mère comme elles le pouvaient. Contrairement aux garçons, elles étaient aimables et complaisantes à mon égard, mais pas toujours. En tout cas, c’est ce qu’il m’avait toujours semblé.
Mes frères Amir, onze ans et Chokri, dix ans, n’hésitaient pas à se lamenter chaque fois que notre père nous chargeait d’un travail, mais jamais en sa présence. Je ne devais et ne pouvais pas refuser ce que mes cadets rechignaient à faire. Les corvées les plus dures me revenaient. Je n’avais jamais osé avouer à mon père – Ali – que tel ou tel travail était pénible pour moi, lui qui m’avait toujours considéré comme un enfant obéissant et dévoué. C’est pourquoi il me traitait toujours avec douceur. Il trouvait mon dévouement si méritoire qu’il n’osait pas – ou ne voulait pas – me punir lorsqu’il m’arrivait, sans le vouloir, de commettre quelque erreur, car, dans la vie, nul n’est parfait. C’étaient plutôt mes frères qui héritaient du fruit de sa colère. Ce qui rendait notre mère hors d’elle. Et moi je subissais, sans broncher, les conséquences de sa colère à elle, car elle rejetait, comme toujours, le blâme sur moi. Elle me ressassait sans cesse qu’ils étaient plus petits que moi et que je devais les traiter avec indulgence et modération.
Curieusement, je ne portais pas le même nom que celui de mes frères. Lorsqu’à l’école mes camarades de classe me demandaient pourquoi nous n’avions pas le même nom, je ne trouvais aucune réponse. Un beau jour, je posai la question à mon père et je dus accepter la réponse qu’il me donna :
— Tu sais, mon garçon, m’avait-il répondu, c’est simplement une erreur commise involontairement par l’officier de l’état civil. Je ne m’en étais aperçu que lorsque tu as été à l’école pour la première fois. Et pour corriger cette erreur, il aurait fallu beaucoup de patience et beaucoup de temps, sans parler de tous les documents administratifs qu’il aurait fallu fournir. Or, mon garçon, je n’avais ni le temps ni la patience pour cela.
Je m’étais toujours demandé pourquoi notre mère ne nous traitait pas de la même façon. Même mes frères assouvissaient leur vengeance sur moi. Et moi, comme un nigaud, je n’osais jamais me plaindre, de peur de son châtiment plus tard. Quand nous sortions pour jouer, mes frères refusaient de m’associer à leurs jeux. Ils disaient que j’étais trop timide, trop lent, trop passif… Bref, ils disaient que je les ennuyais. « C’est normal, m’étais-je toujours dit : puisque notre propre mère nous traite différemment ! »
Amir et Chokri ont toujours préféré s’allier aux autres garçons, plutôt qu’à moi, leur propre frère. Et, lorsqu’il arrivait rarement à une âme charitable de me soutenir, ils devenaient agressifs et l’écartaient au même titre que moi. C’est pourquoi personne n’osait les contrarier. Je m’éloignais alors loin de leur groupe de jeux et m’isolais dans mon coin, comme une bête sauvage blessée à mort et abandonnée par ses congénères, parce que, inutile et encombrante ; la bête blessée dans sa chair, moi, dans ma dignité.
Les jours passaient et ma timidité persistait. Un jour, je m’étais trop éloigné de la maison à la recherche d’un coin isolé. Je longeai la rivière qui, ce jour-là, était déchaînée. Il avait plu à verse la veille et elle collectait tous les torrents affluant des montagnes avoisinantes. Je ne m’étais jusque-là jamais aventuré aussi loin. Je marchai pendant des heures et ne m’arrêtai que lorsque j’ai senti la fatigue m’envahir et le soleil me brûler le haut du crâne.
Déjà, et par beau temps, lorsque la rivière était à son plus bas niveau, j’éprouvais cette sourde terreur de trop m’approcher de la berge, de peur de glisser et de tomber. J’avais toujours été un piètre nageur. J’avais plusieurs fois essayé d’apprendre, mais je n’étais jamais arrivé à maintenir mon corps à la surface de l’eau plus d’une minute. Je me fatiguais à l’instant même où j’essayais de faire quelques brasses.
Je me mis sur la tête mon mouchoir noué en ses quatre coins et m’assis à quelques mètres de la rive pour profiter du paysage fantastique qui s’offrait à mes yeux. Le bruit des eaux, constamment en mouvement, était tel que je n’entendais même plus le chant des oiseaux que je voyais pourtant tournoyer au-dessus de moi. Aussi, sursautai-je lorsque je sentis une présence derrière mon dos.
Je me retournai et aperçus un garçon beaucoup plus grand que moi et que je n’avais encore jamais vu. La peau de son visage était d’une blancheur presque translucide, ses cheveux étaient si blonds que même ébouriffés, ils brillaient au soleil. Il avait de grands yeux pers. Il me toisa longuement de la tête aux pieds avant de me demander :
— D’où sors-tu, toi ?
Je ne lui répondis pas.
— Tu n’es pas du coin. Je ne t’ai jamais vu par ici.
Berné par le ton neutre dont il usa, je répondis :
— J’habite au pied de la montagne.
— Et que viens-tu faire si loin de chez toi ?
— J’étais à la recherche d’un coin tranquille.
— Tu viens souvent ici ?
— Non, c’est bien la première fois, répondis-je.
Il se haussa sur la pointe des pieds et appela ses amis qui se trouvaient à une centaine de mètres plus loin et que je n’avais pas aperçus à mon arrivée. Ils semblaient ne pas l’avoir entendu à cause du bruit de la rivière fougueuse. Il y avait deux grands garçons qui, de loin, me semblèrent avoir le même âge que le premier. Ils étaient trop occupés à vouloir attraper à la main des poissons effrayés dans la rivière en crue.
Le garçon revint vers eux et tous trois s’approchèrent de moi. J’aurais dû fuir quand il avait le dos tourné, mais je n’en fis rien. J’étais tellement confiant !
Le pantalon retroussé jusqu’aux genoux, la chemise déboutonnée et nouée au niveau de la taille, les deux autres étaient pieds nus et avaient le teint hâlé et les cheveux dépeignés. L’un d’eux s’approcha encore plus près de moi et je sentis son haleine sur mon visage. Il écarquilla sur moi des yeux d’un noir intense et je pus remarquer une petite cicatrice en forme de croissant, juste au-dessus de son sourcil gauche. Il me demanda si je savais nager. Je répondis que personne ne m’avait appris. Ils éclatèrent de rire. Deux d’entre eux se penchèrent sur moi. Je fus pris d’une grande terreur. Ils me prirent chacun par un bras et le troisième, un grand gaillard, se plaça entre mes deux jambes et ils me soulevèrent comme une plume. Sans savoir ce qu’ils avaient l’intention de faire, je me mis à hurler et à me débattre comme un forcené. C’était peine perdue. Ils étaient beaucoup plus forts que moi. Mon corps oscilla plusieurs fois à gauche puis à droite et, au signal de l’un d’eux, ils me jetèrent, d’une hauteur de trois mètres environ, dans les eaux en furie.
Projeté dans les airs, j’attendais l’instant décisif où mon corps allait toucher l’eau. Je ne descendais pas dans la bonne position, et je savais que c’était dangereux de tomber sur le dos. Aussi ai-je tenté de me retourner afin de choir à plat ventre. Mais, comme cette prouesse n’est digne que d’un félin, mon corps ne dévia donc pas d’un iota. Lorsque j’eus touché l’eau, je sentis un choc si terrible, que pendant plusieurs secondes, je ne pus bouger ni les bras ni les jambes. Je m’enfonçais dans l’eau, les yeux fermés. Je ne saurai jamais comment j’eus l’idée d’aspirer une grande bouffée d’air avant le grand plongeon. Le fond de la rivière m’attirait comme un aimant attire le fer. Je me débattais en essayant de remonter à la surface, mais c’était comme si quelque chose me retenait au fond. Soudain, l’air vint à me manquer et je sentis mes poumons au bord de l’éclatement. Lorsque mes pieds touchèrent enfin le fond rocailleux, j’eus la force de me cabrer comme un cheval et, d’un coup de reins digne d’un nageur professionnel, je remontai à la surface. Cela me sembla une éternité. Quand ma tête fut hors de l’eau, je pus enfin ouvrir la bouche et respirer. L’eau me sortait des narines et de la bouche et m’empêchait de respirer. J’ouvris les yeux et eus juste le temps de m’apercevoir que j’étais loin du lieu où ils m’avaient balancé. J’aspirai une large bouffée d’air, car je savais que j’allais bientôt couler à nouveau. Je suffoquais et essayai