101
pages
Français
Ebooks
2020
Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne En savoir plus
Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement
Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement
101
pages
Français
Ebooks
2020
Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne En savoir plus
Publié par
Date de parution
29 août 2020
Nombre de lectures
1
EAN13
9782373420814
Langue
Français
Le roi de France a sombré dans la folie. Les princes du sang se déchirent pour s’emparer du pouvoir tandis que la reine tente d’oublier cette nuit où elle a failli mourir, étranglée par son époux. Le duc d’Orléans assiste impuissant à la montée des tensions entre la Champagne et la Bourgogne, alors même qu’une attaque de l’empire aléman semble imminente. Dans l’ombre, la duchesse s’inquiète de son propre sort, comme de celui du royaume. Clémentia d’Orléans souffre de crises de langueur qui la vouent au silence de sa chambre tout le jour. Et pourtant, à la nuit tombée, un nouvel élan l’anime, celui du sang. La duchesse pourra-t-elle guérir de ce mal qui la fait tant souffrir ? Le chevalier Hermant lui en a fait promesse. Il ira quérir un remède dans les forêts d’Armor, là où la magie est plus vivace qu’ailleurs.
Publié par
Date de parution
29 août 2020
Nombre de lectures
1
EAN13
9782373420814
Langue
Français
En la forêt de triste amertume
Céline Rosenheim
Éditions du Petit Caveau - Collection Sang Ancien
Avertissement
Salutations sanguinaires à tous ! Je suis Van Crypting, la mascotte des éditions du Petit Caveau. Je tenais à vous informer que ce fichier est sans DRM, parce que je préfère mon cercueil sans chaînes, et que je ne suis pas contre les intrusions nocturnes si elles sont sexy et nues. Dans le cas contraire, vous aurez affaire à moi.
Si vous rencontrez un problème, et que vous ne pouvez pas le résoudre par vos propres moyens, n’hésitez pas à nous contacter par mail ou sur le forum en indiquant le modèle de votre appareil. Nous nous chargerons de trouver la solution pour vous, d'autant plus si vous êtes AB-, un cru si rare !
« En la forest d'Ennuyeuse Tristesse,
Un jour m'avint qu'a par moy cheminoye,
Si rencontray l'Amoureuse Deesse
Qui m'appella, demandant ou j'aloye.
Je respondy que, par Fortune, estoye
Mis en exil en ce bois, long temps a,
Et qu'a bon droit appeller me povoye
L'omme esgaré qui ne scet ou il va. »
« En la forêt d’Ennuyeuse Tristesse,
Un jour m’advint qu’à part moi cheminais,
Si rencontrai l’Amoureuse Déesse
Qui m’appela, demandant où j’allais.
Je répondis que, par Fortune, étais
Mis en exil en ce bois, long temps a,
Et qu’à bon droit appeler me pouvait
L’homme égaré qui ne sait où il va. »
Charles d’Orléans
Chapitre I
Clémentia s’éveilla dès les premières lueurs de l’aube et ne put se rendormir, malgré la fatigue qui embrumait encore son esprit. Lorsqu’elle s’assit sur le bord du lit, la duchesse d’Orléans remarqua qu’elle portait la bague qui lui venait de sa défunte mère : un grenat serti sur un fin anneau d’or. Elle était pourtant persuadée de l’avoir ôtée la veille, juste avant de se coucher.
Clémentia appela sa domestique qui accourut aussitôt. La demoiselle lui présenta un surcot bleu ourlé de fourrure d’hermine qu’elle l’aida à enfiler par-dessus sa chemise, puis la duchesse alla s’asseoir devant la coiffeuse et sa servante commença à lui peigner les cheveux. Plusieurs mèches étaient très emmêlées et une fine toile d’araignée était même prise dans l’un des nombreux nœuds qui ornaient la tête de Clémentia. La jeune fille n’osa pas demander où sa maîtresse avait pu passer la nuit, cette simple idée lui mettait déjà le rose aux joues. Elle se contenta donc de démêler patiemment la chevelure de la duchesse.
— Ne peux-tu tirer moins fort ? protesta Clémentia.
— Madame, je ne sais comment vos cheveux se sont tant emmêlés. J’essaye de passer le peigne aussi délicatement que possible, mais cela m’est très difficile, se défendit la demoiselle.
Clémentia ne trouva rien à lui répondre. Ce n’était pas la première fois qu’elle remarquait quelques bizarreries à son réveil. Sa bague avait déjà reparu à son doigt la veille et sa chemise avait laissé apparaître des traces de poussière ou de terre plus d’une fois.
La duchesse n’eut cependant pas le loisir de se questionner plus avant, car le duc l’avait fait mander. Elle se dirigea donc vers les appartements de son époux dès qu’un bref coup d’œil dans le miroir lui assura que sa chevelure était présentable.
— Madame, je pensais que vous pourriez m’accompagner pour une promenade à cheval, commença le duc. Je dois me rendre auprès du seigneur de Chaumont pour le suivi d’une affaire courante, mais notre entretien ne devrait pas être long et nous pourrions cheminer tranquillement le long de la Loire.
— Ce serait avec joie, répondit Clémentia.
— Les dames apprécient rarement le grand air autant que vous le faites, constata le duc.
— En Armor, le vent et les vagu es ne tolèrent guère qu’on les dédaigne, affirma la duchesse.
— Je reconnais bien là les propos de votre père, répondit Louis d’Orléans, qui pour avoir voyagé jusqu’au palais des ducs d’Armor et vu les falaises plongeant dans l’océan, ne pouvait qu’acquiescer.
Les époux sortirent du château de Blois, accompagnés d’une petite escorte qui n’était composée que de quatre chevaliers. Les eaux de la Loire étaient hautes en cette saison et certains champs en bordure du cours d’eau prenaient l’allure de véritables petits étangs. Les chevaux marchaient prudemment sur le chemin boueux qui longeait le fleuve et s’ornait de multiples flaques. Le temps était lumineux et glacial à la fois. La duchesse, emmitouflée dans sa pelisse, prenait plaisir à observer les reflets du soleil sur l’eau qui se faisait miroir du ciel.
Clémentia se laissait bercer par la foulée régulière de sa jument et observait un couple d’oiseaux qui se chamaillait près d’un buisson de gui. La plante n’était pas rare dans les forêts d’Armor qui jouxtaient le château où elle avait grandi. La duchesse se souvint de la silhouette des arbres dans le crépuscule, lorsque la lune était pleine et que sa lueur d’argent éclairait ses pas. Les peupliers et les saules avaient l’air de géants aux membres déformés, ainsi affublés de boules de gui. Clémentia aimait qu’on lui apportât de cette plante en hiver, car elle restait toujours verte tandis que l’arbre qu’elle vampirisait s’endormait pour la morte saison. La duchesse se demandait comment elle connaissait la silhouette nocturne des arbres lorsqu’un souvenir lui revint soudain. Sa nourrice lui avait dit qu’elle marchait la nuit, sans mot dire, le regard fixe. La vieille femme n’avait pas osé la ramener de force à son lit, car les anciens disaient que les somnambules devenaient furieux lorsqu’on venait à les contrarier. Clémentia devait alors avoir huit ou neuf ans. La duchesse triturait la bague qui lui venait de sa mère comme si cela l’aidait à replonger dans les strates du passé.
— Madame, vous êtes bien silencieuse, constata le duc.
— Ce sont les boules de gui, monseigneur, elles m’ont rappelé la sève de la vie qui jamais ne disparaît tout à fait, même quand le gel fait briller la plaine de son blanc translucide. En Armor, nous aimons la cueillir pour les fêtes de Noël et l’accrocher à l’entrée des maisonnées, car cela porte bonheur pour la nouvelle année de passer sous son feuillage.
— Je vous avouerais volontiers que je n’avais jamais prêté attention à cette plante jusqu’à présent. Toutefois, dit-il beaucoup plus bas, il me semble que ces deux biches qui se dissimulent derrière les taillis à notre droite seraient plus dignes d’intérêt.
— En effet, monseigneur, je puis les voir maintenant que vous les mentionnez. Je vous remercie de m’avoir tirée de ma rêverie. Père m’a trop souvent sermonnée sur ce point et voilà que je retombe dans mes travers.
— Vous êtes toute excusée, madame.
Chapitre II
La reine s’était tôt retirée dans ses appartements, car une migraine la faisait souffrir. Sa suivante, Blanche, l’aidait à se défaire des épingles de son chignon. Cependant, Isabelle la congédia vite, la demoiselle ne pouvant s’empêcher de bavarder. Elle commentait la cuisson de la viande servie au dîner, puis les bruits de couloirs que les servantes colportaient. La comtesse de Nevers n’avait-elle pas souri à un courtisan de vingt ans son cadet lorsqu’elle l’avait croisé dans la cour du palais, au sortir de la messe ? Cela semblait inconvenant.
La reine était lasse et aspirait au silence. Elle ne manqua pas de faire ses prières à la vierge Marie, puis s’allongea sur son lit pour profiter de l’apaisement que procurait la pénombre. La reine faisait dériver son regard sur une tapisserie où les dames écoutaient de la musique et riaient près d’une fontaine. Isabelle songea que l’hiver touchait à sa fin et qu’elle pourrait bientôt organiser une fête dans les jardins du château. Cette agréable pensée dut la bercer, car elle s’endormit aussitôt.
Isabelle fut surprise de voir le roi entrer dans ses appartements quelques heures plus tard. Jean n’avait pas partagé sa couche depuis plusieurs nuits, aussi n’osa-t-elle pas refuser sa compagnie, malgré la douleur qui n’avait pas quitté ses tempes. La reine souleva les draps et la courtepointe pour inviter Jean à se glisser à l’intérieur. Les nuits étaient encore fraîches, aussi se blottirent-ils immédiatement l’un contre l’autre. Jean enfouit le nez dans le creux du cou d’Isabelle.
Tandis qu’il respirait le parfum de rose dans ses cheveux, il posa la main sur son sein et le pressa avec avidité avant de laisser courir ses doigts entre ses cuisses. Isabelle ferma les yeux et gémit doucement. Impatient, le roi bascula au-dessus de sa femme et vint coller ses hanches aux siennes. Isabelle enserra le dos de Jean dans l’étreinte de ses mains et de ses jambes. La reine s’étonna de l’ardeur soudaine du roi. Lui dont les va-et-vient étaient d’ordinaire lents et profonds, haletait contre sa poitrine et donnait des coups de reins de plus en plus forts. Isabelle ne savait plus trop si elle gémissait de plaisir ou de souffrance, car Jean la meurtrissait de ses assauts trop vifs. La reine sentait ses muscles se crisper peu à peu face à la douleur.
Le roi releva soudain la tête, et s’il était essoufflé, une lueur noire passa dans son regard. Isabelle ne manqua pas de noter cette nouvelle étrangeté. Elle demanda à son époux si quelque chose n’allait pas, mais n’obtint nulle réponse, malgré son insistance. Jean ne s’en agaça que davantage et détourna les yeux, puis il se mit à marmonner des paroles qu’Isabe lle ne put saisir.
La reine s’était redressée et tentait de calmer Jean qui s’agitait et criait. Lorsque le monarque dévisagea à nouveau sa femme, il le fit avec haine et colère. Isabelle n’eut pas le temps de s’écarter lorsque les reproches et les insultes se transformèrent en coups. Le roi enroula ses mains autour de son cou pour le serrer. La jeune femme suffoquait rapidement et ne parvenait pas à se dégager de l’étau de son étreinte. Ses bras frêles tentaient de repousser son époux, mais ni ses maigres forces ni ses griffures ne parvinrent à leur fin. Par chance, la suivante d’Isabelle couchait dans la pièce adjacente. Alertée par les cris du roi, la demoiselle avait pris une chandelle avant de sortir