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Français
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2003
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Publié par
Date de parution
01 janvier 2003
Nombre de lectures
237
EAN13
9782876233539
Langue
Français
Poids de l'ouvrage
4 Mo
Eero Tarasti, musicologue finlandais de renommée internationale, se propose dans cet ouvrage, devenu déjà lui-même un classique du genre, de repenser entièrement l'interrelation du mythe et de la musique. Comment mythe et musique s'unissent-ils dans les pages des différents compositeurs ? Comment la structure d'un mythe peut-elle correspondre à la structure de l'œuvre musicale ? Est-il possible de distinguer un genre mythique spécifique, ou bien est-ce le système mythique qui s'apparente à un idiome musical ? Quelle technique permet au musicien d'avoir recours au « mythe » sans avoir à se référer à un seul mythe particulier ? Si l'on considère les divers courants musicaux, peut-on dire qu'un genre précis — par exemple, l'opéra, la symphonie ou le poème symphonique — convienne plus particulièrement aux représentations mythiques ? Autant de questions que tente de résoudre ce livre.
Eero Tarasti n'a d'autres intentions ici que d'étudier le style et l'évolution du style de la musique mythique et entreprend donc un examen détaillé des partitions de ceux qu'il tient pour les maîtres en la matière : Wagner, Sibelius et Stravinsky.
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Date de parution
01 janvier 2003
Nombre de lectures
237
EAN13
9782876233539
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Français
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4 Mo
MYTHE & MUSIQUEEero Tarasti
MYTHE & MUSIQUE
Wagner – Sibelius – Stravinsky
Traduit de l’anglais par Damien Pousset
MICHEL DE MAULE© ÉDITIONS MICHEL DE MAULE, 2003.« Nous ne prétendons donc pas montrer comment les hommes
pensent dans les mythes, mais comment les mythes se pensent
dans les hommes, et à leur insu ».
Claude Lévi-StraussPREMIÈRE PARTIE
1. INTRODUCTION
Nous nous proposons dans cet ouvrage d’explorer les relations
entre le mythe et la musique. Bien que l’on puisse dire que cette
étude est, en un sens, fondée sur l’anthropologie, nous tenons
néanmoins à souligner qu’elle porte essentiellement sur la tradition
occidentale de la musique savante. Le mythe y est avant tout considéré
comme phénomène esthético-philosophique. C’est pourquoi, toute
référence faite à la problématique complexe du mythe ne le sera
qu’en fonction de la place du mythe et de la pensée mythique dans
la philosophie occidentale, et plus particulièrement à partir des liens
1qu’ils entretiennent avec la musique et le discours musical .
Naturellement, la corrélation du mythe et de la musique pourrait
s’envisager comme un cas à part de l’interaction entre le mythe et
l’art en général. Après tout, n’est-il pas d’usage de confronter le
mythe et la poésie? On peut alors se demander pourquoi le mythe
ne pourrait pas lui aussi être comparé à la musique. On observe par
ailleurs que la musique s’apparente sans doute plus volontiers aux
autres systèmes de signes artistiques – poésie, peinture, architecture
– qu’au système mythique proprement dit (si tant est qu’il faille la
comparer à autre chose).
9L’hypothèse de départ de cet ouvrage – le mythe et la musique –
ouvre toutefois de nouvelles perspectives pour la recherche
musicologique, notamment en ce qui concerne l’évolution des structures
purement musicales mais aussi pour les interrogations
philosophiques et musico-esthétiques qu’elle suscite. Bien qu’en principe ce soit
l’intertextualité qui nous intéresse ici, du fait de la convergence du
mythe et de la musique en Occident, ce type de comparaison nous
permet néanmoins d’approfondir encore plus finement notre
compré hen sion des formes strictement musicales.
Or, il est indéniable que cette confrontation du mythe et de la
musique proposée comme sujet d’étude n’est possible que si l’on
passe par une méthode structuraliste ou sémiotique. Nous examinons
en effet le mythe et la musique dans la mesure où tous deux forment
des systèmes de signes cohérents, et l’exercice de la sémiotique, qui
fait ici office de levier d’Archimède, nous permet de penser les liens
complexes et subtils qui existent entre eux. La sémiotique nous offre
également les moyens de les étudier en tant que discours, révélant
de ce point de vue leurs spécificités, et nous permettant de les situer
dans notre « archéologie » de la civilisation occidentale, ce terme
étant à prendre dans l’acceptation structuraliste que lui a conférée
2Michel Foucault . Mythe et musique constituent donc deux formes
de discours étroitement liées. Lorsqu’on explore l’histoire de la
culture occidentale, il est permis de mesurer combien, à certaines
époques, ces deux domaines se rapprochent, se frôlent ou
s’interpénètrent, alors qu’ils divergent à d’autres. On parlera en
l’occur3rence d’une « géologie » des structures culturelles profondes ,dans
laquelle plusieurs couches peuvent être observées et dont on peut
suivre l’évolution sur de longs laps de temps.
Méthodologiquement, notre démarche se rattache au
structuralisme ou à la sémiotique. C’est pourquoi nous ne manquerons pas
d’utiliser les outils conceptuels associés à ces champs d’étude. Par
ailleurs, le structuralisme est à prendre ici comme un outil de
synthèse qui, alors même qu’il ne peut être défini immédiatement en
raison de sa fusion avec la méthode sémiotique, comme dans l’analyse
10musicologique par exemple, n’en régit pas moins l’orientation et
l’av an ce ment de la recherche. Aussi, bien que le structuralisme
n’apparaisse que rarement, se cantonnant à son propre projet
épistémologique, on peut dire que les structures sont, elles, omniprésentes.
La méthode structuraliste proprement dite n’entre dans cette
étude qu’avec l’application de l’analyse du mythe de Claude
Lévi4 5Strauss , et de l’usage qu’il fait de « la pensée mythique » lorsqu’il
compare les différentes occurrences du mythe dans la musique
savante occidentale. Certains concepts d’A.J. Greimas, l’instigateur
de théories et de méthodes structuralistes comme celle de l’analyse
6dite « sémique » (sans parler du concept de « sème » lui-même), ou
7encore celle des isotopies du discours , seront notamment utilisés
dans l’analyse du « sème mythique ». Ce dernier est envisagé ici soit
comme catégorie esthétique, soit comme orientation possible de la
musique. Il s’étend en principe de l’époque romantique à celle du
début du siècle – ces mêmes concepts seront également utilisés dans
l’analyse du substrat mythique des trois œuvres choisies pour notre
étude comparée: Siegfried de Wagner, Kullervo de Sibelius et Œdipus
Rex de Stravinsky. Bien que nos investigations, en accord avec
l’épistémologie sémiotique, portent essentiellement sur la structure, le
message et les codes implicites d’une œuvre, nous ne manquerons
pas d’examiner ces compositions dans un cadre de référence qui soit
culturellement approprié: le romantisme allemand, le mouvement
finnois dit carélianiste de la fin du dix-neuvième siècle et le
néoclassicisme des premières décennies du vingtième siècle. Ces
périodes constituent donc différents courants de la culture, caractérisés
entre autres par leurs façons d’aborder le mythicisme et par leurs
attitudes différenciées envers le mythe. L’idée même de classifier les
cultur es selon leur orientation spécifique est née avec la théorie de
la culture initiée par l’école de Tartu, et plus particulièrement par
son chef de file, Juri Lotman.
En fait, notre observation des liens existant entre la narration
mythique et la narration musicale sera fondée sur les théories d’une
118logique de la narration mythique développées par Vladimir Propp
9et Claude Bremond .
Du point de vue de la théorie structuraliste, ces investigations
s’efforcent d’apporter leur contribution à la sphère de la sémiotique
10musicale . Aucune étude tangible et exhaustive sur les œuvres
musicales et leurs cadres de référence n’a encore été menée à ce jour.
Notre ouvrage se divise en deux parties: dans la première, nous
nous efforçons de jeter les bases théoriques d’une comparaison entre
le mythe et la musique, tandis que dans la seconde, nous donnons
quelques exemples de leur interaction proprement dite.
Ce livre se concentre en fait sur un problème majeur: de quelle
manière le mythe et la musique s’interpénètrent-ils? Quelles sont, en
tant que discours de la musique savante occidentale, leurs
différentes façons de s’unir dans des œuvres précises et chez différents
compositeurs? Comment la structure d’un mythe peut-elle correspondre
à la structure d’une composition ? Est-il possible de
distinguer un genre mythique spécifique, ou bien est-ce le système
mythique qui s’apparente à un idiome musical ? Si tel est le cas,
quelles en sont les composantes, ou encore quelle technique permet
à un compositeur de recourir au « mythe » sans pour autant se
référer à un mythe particulier? En considérant les divers courants
musicaux, peut-on dire qu’un genre précis – par exemple, l’opéra, la
symphonie ou le poème symphonique – convienne plus particulière -
ment aux références ou représentations mythiques?
Bien que nous nous efforcions de déterminer les points communs
entre le mythe et la musique ainsi que certaines conditions
historiques et culturelles pré-requises, il nous faudra cependant expliquer,
dans un chapitre à part, ce qu&