Médium les jours de pluie , livre ebook

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Schoulberg est un producteur de musique en bout de course. Mal à l'aise avec son époque, il aurait rêvé de produire un groupe comme les légendaires Cramps. Au moment de suicider, il ne se doute pas qu'il va pourtant vivre la plus grande histoire d'amour de toute l'histoire du rock'n roll. « L’un des romans les plus farfelus qu’on ait lus au cours des dernières années » (Le Journal De Montréal), « Une balade barrée détonante" (Ouest France), "Un roman d’amour obsessionnel » (Grazia), « On en revient ensorcelé » (L’Alsace), « Louis-Stéphane Ulysse explose la gamme » (Rock’n’ Folk), « Au coeur même du magnétisme et du désir » (Un Livre Un Jour), « Une histoire incroyable ! » (Radio Nova), « Hilarant et décalé à la Hunter S. Thompson » (Librairie Charybde).

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Date de parution

27 décembre 2021

Nombre de lectures

1

EAN13

9782957301256

Langue

Français

Louis-Stéphane Ulysse
Médium les jours de pluie
Dédicace
Prologue
Les deux vies de Schoulberg
1
2
3
4
5
6
Dix ans plus tard, au nord de la ville…
7
8
9
10
11
12
13
14
15
16
17
18
Gérard de Paris
19
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25
Les nuits de Glendale
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29
Automne
30
31
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33
Les montagnes sacrées
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38
39
40
41
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43
Sept ans plus tard…
Remerciements
À propos de Medium les jours de pluie (interview)
Du même auteur
Copyright
À Mickey Baker (1925-2012) qui a traversé tout ça en la bouclant.
Prologue


Je suis dans le noir. On dit qu’il vaut toujours mieux écrire comme si l’on était mort, sans doute afin de mieux se détacher de la particularité de nos vies, en restant seulement sur ce que nous avons en partage, sans pesanteur, comme un courant passant de l’un à l’autre, au travers des autres, sans raisonnement ni jugement, toujours avec le même flux, le même fluide.
Avec cette histoire, j’ai appris que les morts, à bien des égards, étaient plus vivants que nous croyons l’être. S’ils n’aiment pas la lumière naturelle, et répugnent à nous parler en sa présence, c’est tout simplement parce qu’elle ressemble à ce que peut être la nuit pour nous. Le jour, ils ne voient pas grand-chose, et peinent à distinguer le contour des formes, autant que la fluorescence des auras. Ils ont leur lot de superstitions et de traumatismes, comme nous avons les nôtres. Ainsi, la simple lueur d’une allumette, peut-elle leur rappeler le mauvais moment où certains d’entre eux durent affronter les flammes de la crémation. Quant à la répugnance qu’ils éprouvent à nous suivre au fond d’un parking, d’un métro, d’une cave, ou même dans les chiottes d’un café, elle se rattache au jour où certains se sont retrouvés, pas toujours au gré de leurs dernières volontés, enfouis profond dans la terre, comme si ceux qui restaient, souhaitaient oublier la peine provoquée par leur disparition… L’enfouir, l’enterrer, comme des animaux qui ne savent pas quoi faire de leur douleur.
À plusieurs reprises, et contrairement à une croyance fort répandue chez les vivants, Schoulberg m’assura que les morts éprouvaient finalement bien peu d’intérêt à notre endroit, sauf, bien entendu, pour ceux qui nous avaient connus, et qui désiraient nous rester proches et parfois bienveillants. « Il ne s’agit pas de mépris mais, bien davantage, d’une indifférence quelque peu atone et distanciée, voyez-vous, comme lorsqu’un troupeau croise un autre troupeau sur le chemin d’un point d’eau. Ils sont de la même espèce, mais ils ne sont pas sur la même rive. Certes, la source est identique, mais il est aisé de comprendre que les morts ne puissent la considérer du même point de vue que les vivants. La différence, selon moi, c’est que les vivants savent bien peu de choses sur les morts, là où les morts savent toutes sortes de choses sur les vivants. »
J’acquiesçais en évitant de croiser le regard de Schoulberg, car, à cette époque, je pensais qu’il était complètement timbré.
Les deux vies de Schoulberg

« Écoutez, écoutez-moi bien ; 
vous êtes debout, les deux pieds joints,
vous allez faire un grand M, M de madison ;
en partant sur la gauche, puis en arrière ; prêts ? »
(Jean Schmitt, Mickey Baker ; «Le grand M ».)


1

Schoulberg pensait que la migraine qui le flinguait depuis le réveil, allait lâcher prise une fois sur le balcon de son bureau, mais une fois sur le balcon de son bureau, c’était encore pire : la migraine cognait toujours sur la peau de ses sinus et de ses gencives, avec le même rythme et la même intensité. « On devrait inventer une méthode qui nettoie les migraines par le vide, avec de l’air pulsé au citron et au Coca. Les bulles acides attaqueraient les muqueuses enflammées en les nettoyant au Kärcher… » Et le regard de Schoulberg se posa sur la circulation en contrebas, un peu vide, un peu défait, comme s’il n’avait même plus la force de croire à ses propres conneries. Ça faisait déjà quelques semaines que des petites voix lui pourrissaient la vie. C’étaient des sirènes, comme il en avait connu plein quand il produisait encore des disques dignes de ce nom, mais celles-ci étaient minuscules, blondes, roses, rondes, vertes, et elles le narguaient, en dansant sur l’écume des flots urbains : « Schouuuuul-beeeerg ! You-you-yooouuuuu ! Schouulbe-è-è-è-èrrrr-ggg ! Ah-ha-ha-haaaaaaaaaa, Schou-schoul ! »
Schoulberg respira profondément, tête baissée, bras tendus, mains crispées sur la rambarde ; et ça dura bien deux, trois minutes jusqu’à ce que les voix se lassent et se laissent couler dans le flot de véhicules, en le renvoyant à lui-même… Son vide, son vertige, sa migraine, et le petit couple de gamins qui l’attendait, de l’autre côté de la vitre, bien sagement assis dans son bureau.
Le garçon et la fille étaient arrivés quelques minutes plus tôt, pas vraiment bavards, balbutiants à peine en tendant leur CD, et rien d’autre. Le producteur n’avait rien fait pour les mettre à l’aise, juste un geste pour leur indiquer où s’asseoir, avant de lancer le CD, et de se lever, sans la moindre explication, pour aller prendre l’air sur son balcon. Les deux gosses se regardèrent en se demandant ce qu’il se passait. Une fois dehors, Schoulberg resta cramponné à la rambarde du balcon comme une vieille guenon dépressive, tandis que la rythmique des morceaux lui cognait dans le dos. Il se voyait sur l’os de son sinus maxillaire, à contempler les flammes de sa douleur. La vérité, c’est qu’il avait envie de dégager tout ça illico, – « Musique de merde/posture de merde » –, mais que l’autre vérité faisait que le père de l’un des deux, Schoulberg savait plus lequel à cause de sa migraine, tenait le budget pub du label. Alors, il lâcha sa rambarde, repassa la porte-fenêtre, la referma soigneusement, et s’assit derrière son bureau. Là, il fit mine de trier ce qu’il avait déjà trié cinquante fois depuis le début de la matinée, comme n’importe quelle vieille guenon dépressive, tandis que le troisième titre de la maquette démarrait. C’était une mélodie sans saveur, comme les précédentes, avec des paroles indigentes où la fille susurrait qu’elle allait convoquer Satan si sa copine terminait pas la nuit avec elle. Et Schoulberg ne put s’empêcher de ricaner à l’intérieur de lui : « Si Satan déboulait vraiment, ça serait surtout le commissariat en bas de chez toi que t’irais convoquer ! »
La gamine se tortillait sur son siège en cherchant l’oeil du producteur. Schoulberg pensait qu’elle avait dû être privée d’oxygène à la naissance. Petite chose osseuse des beaux quartiers, passant son quatre-heures à gribouiller des slogans improbables sur ses cahiers à spirales… Manger, c’est démodé ! Vomir, c’est réussir ! Osez la transsssss-sexualité !     Et Schoulberg descendit péniblement de son os en marmonnant : « Ma pauvre, le jour où on sortira Osez l’intelligence, t’auras quand même du mal à trouver un exemplaire pour toi toute seule… » Le gamin ouvrit la bouche à son tour, et Schoulberg pensa aussitôt : « Oh, toi aussi, ta gueule. Je sais très bien de qui t’es le fils, et de pourquoi t’es là ! »
Le gamin continuait de parler tandis que Schoulberg continuait de pas l’entendre : « À six, tu dansais sur la table du salon en montrant ton zizi à ta famille en admiration ; à neuf, maman ou tonton t’ont payé ta première gratte électrique… C’est le gros problème avec les gauchistes : pensent qu’ils ont mis au monde des génies mais pondent la plus part du temps des dégénérés indécents. »
Schoulberg serra les dents en consultant sa montre. De quoi parlait le gamin déjà ? La fille soupirait sur le cinquième morceau en poussant des petits cris de souris, et tout ça devenait parfaitement grotesque… Dire, qu’on était venu au monde pour entendre des trucs pareils.

Personne n’avait jamais vraiment su pour les migraines de Schoulberg : paracétamol, codéine, anti-stéroïdiens, homéopathie et huiles essentielles, massages de pieds, psychanalyse, fumigation, acupuncture, nage avec des dauphins dans la mer Rouge, séance sado-maso chez des putes, oui mais non, que dalle : quand ça commençait, ça partait jamais avant la nuit, et en attendant, fallait assurer... Comme ça depuis des années... Des auditions, des rendez-vous, une vraie torture de Chinois, et comme par hasard, à chaque fois, c’était le jour précis où les pires baltringues de Paris déboulaient dans son bureau... Le gratin, un florilège, et tous avec cette indécence propre aux imbéciles qui se croient suffisamment intelligents pour prendre les autres pour des cons.
Dans un ultime reniflement qui aurait déchiré les sinus de n’importe qui de normal, Schoulberg se demanda « pourquoi ? » et « pourquoi lui ? »… Parce qu’à la base, ça se voyait peut-être pas, mais Schoulberg était pas comme ça, il voulait rien de mal à personne. Savait bien que les standardistes en bas, à l’accueil, gloussaient en lui donnant du « Schoulberne » et du « Schoulburne » à longueur de temps, mais d’une : il les emmerdait, deux : elles comprenaient rien, et trois… Oh, et puis merde, tout ça était trop embrouillé, c’était pas ça le truc… Depuis qu’il avait commencé à produire des disques, Schoulberg cherchait juste des gens sincères, avec quelque chose de relativement cohérent qui puisse sortir d’eux : une vision, une fantaisie, une forme d’amour dans leur regard sur autre chose qu’eux-mêmes ; quelque chose qui transporte, qui donne de l’énergie et qui donne envie de bouffer la vie, de la redessiner, à se sentir autre, à oser se lancer dans un truc de pure folie, après écoute, et plus si affinité… Putain, quelque chose qui change le regard, qui donne envie d’aimer, quelque chose qui fasse rire, quelque chose qui fasse peur, mais qui fasse quelque chose pour de vrai. A priori , ça paraissait évident mais, dans la réalité, ça tenait du miracle. Des crasseux, ça oui, autant qu’on voulait ; des qui voulaient plus se laver en pensant qu’ils tutoyaient les sommets de la transgression, ça manquait pas trop non pl

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