76
pages
Français
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2023
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Publié par
Date de parution
04 juillet 2023
Nombre de lectures
1
EAN13
9781781606551
Langue
Français
Poids de l'ouvrage
1 Mo
Publié par
Date de parution
04 juillet 2023
EAN13
9781781606551
Langue
Français
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1 Mo
Auteur : Nathalia Brodskaya
Mise en page :
Baseline Co. Ltd
61A-63A Vo Van Tan Street
4 ème étage
District 3, Hô-Chi-Minh-Ville
Vietnam
© Confidential Concepts, worldwide, USA
© Parkstone Press International, New York, USA
ISBN 978-1-78160-655-1
Tous droits réservés
Tous droits d’adaptation et de reproduction réservés pour tous pays. Sauf mention contraire, le copyright des œuvres reproduites se trouve chez les photographes qui en sont les auteurs. En dépit de nos recherches, il nous a été impossible d’établir les droits d’auteur dans certains cas. En cas de réclamation, nous vous prions de bien vouloir vous adresser à la maison d’édition.
Nathalia Brodskaya
Paul Cézanne
SOMMAIRE
Paris et les années de formation
Les rapports équivoques de Cézanne avec l’impressionnisme
Les natures mortes « cézanniennes »
Les paysages et le questionnement de l’espace
La « période constructive » de Cézanne
Liste des illustrations
Notes
1. Portrait de l’artiste , vers 1873-1876,
Musée d’Orsay, Paris.
2. Portrait de Ivan Morozov .
A la charnière des deux siècles, l’art de Cézanne attire de plus en plus 1’attention des peintres d’avant-garde : Matisse, Picasso, Braque, Derain, etc., ainsi que celle des jeunes peintres russes créant un nouvel art dont les fondements sont basés sur les leçons du maître de Provence. Pourtant, à sa mort, une dizaine de journaux parisiens publièrent des nécrologies ambiguës où l’on pouvait lire : « un talent incomplet », « une peinture grossière », « peintre manqué », « incapable de créer autre chose que des esquisses par suite d’un défaut naturel de la vue » ; ce sont de telles caractéristiques qui accompagnèrent le peintre dans son dernier chemin. L’incompréhension de l’art de Cézanne n’était pas le résultat de la « myopie » de certains peintres ou critiques, mais la conséquence de la complexité réelle de sa peinture, du caractère spécifique du système artistique que le peintre développa toute sa vie sans jamais arriver à le réaliser complètement dans une œuvre. Cézanne est sans doute le peintre le plus complexe du XIX e siècle. Lionello Venturi écrivait dans son livre Da Manet a Lautrec [1] que « devant la grandeur de Cézanne on éprouve comme une sorte de peur ; on a l’impression d’entrer dans un mo nde inconnu, riche, austère et possédant de si hauts sommets qu’ils semblent inaccessibles ». Atteindre ces sommets est, en effet, une chose bien difficile. Aujourd’hui, l’art de Cézanne se déploie devant nous dans toute la logique de son développement, depuis ses premiers pas contenant déjà les germes de son futur prestige. Mais pour les gens qui ne pouvaient voir que des fragments de cet ensemble, il est normal qu’ils leurs semblassent étranges et incompréhensibles.
3. Les Quatre Saisons , 1859-1860,
Musée du Petit Palais, Paris.
Pour la majorité, ce qui frappait avant tout, c’était une étrange diversité de style et un niveau différent de finition des tableaux. Les uns impressionnaient par la force du tempérament qui jaillissait des formes et par la puissance brutale des volumes comme ciselés au burin et modelés dans une pâte colorée ; les autres par leur rationalisme, leur composition savante, la modulation de leurs couleurs et leur surprenante diversité ; les troisièmes étaient de rapides esquisses où quelques touches transparentes d’aquarelle évoquaient la profondeur et, dans les quatrièmes enfin, de puissantes figures modelées étaient placées dans des rapports spatiaux complexes qu’un auteur russe qualifia fort justement « d’espace entrelacé » [2] . Et Cézanne lui-même, avec ses incessantes plaintes sur l’impossibilité de réaliser ce qu’il ressentait, soufflait à la critique l’idée que son art était fragmentaire. Chaque œuvre lui semblait une partie inachevée d’un tout. Souvent, après plusieurs dizaines de séances, Cézanne abandonnait le travail commencé, espérant le reprendre plus tard. Et dans chaque tableau suivant, il s’efforçait de surmonter les insuffisances du précédent pour arriver à le faire plus parfait que l’autre. « J’ai cheveux et barbe plus longs que le talent » [3] . Et juste un mois avant sa mort, il écrivait à Emile Bernard : « Arriverai-je au but tant cherché et si longtemps poursuivi ? Je le souhaite, mais tant qu’il n’est pas atteint, un vague état de malaise subsiste, qui ne pourra disparaître qu’après que j’aurai atteint le port ».
De telles idées amères résonnent comme un leitmotiv tragique dans la correspondance de Cézanne et dans ses discussions avec ses amis ; elles constituent le drame de toute sa vie : tragédie de doutes permanents, de l’insatisfaction, du manque de confiance dans ses propres forces. Cependant, c’est dans cette incertitude que réside la force motrice de son art qui se développait comme grandit un arbre ou se forme un rocher, par une lente accumulation de couches toujours nouvelles.
Souvent, il grattait au couteau ce qu’il avait peint au cours d’une journée de travail acharné en colère contre lui-même, il jetait par la fenêtre ses toiles ou, déménageant d’un atelier dans un autre, il laissait plusieurs dizaines de toiles qu’il considérait comme inachevées. Il pensait pouvoir un jour réaliser entièrement sa vision du monde dans une seule et grandiose œuvre d’art comme les génies de la peinture classique et, en s’efforçant de « refaire du Poussin sur nature », égaler ce dernier [4] .
4. Scène d’intérieur , début des années 1860,
Musée des Beaux-Arts Pouchkine, Moscou.
5. Pastorale , vers 1870,
Musée d’Orsay, Paris.
6. Déjeuner sur l’herbe , vers 1870-1871,
Collection particulière, Paris.
7. Portrait de l’Oncle Dominique en habit de moine , vers 1865,
Coll. M. and Me Ira Haupt, New York.
8. L’Homme au bonnet de coton ( L’Oncle Dominique ) , 1865,
The Museum of Modern Art, New York.
Mais pour l’homme de la fin du XIX e siècle, la réalité apparaissait combien plus complexe, plus fluide et plus instable qu’au temps de Poussin.
Cézanne dépensa des années de travail pour trouver ces aspects, espérant par la suite découvrir un système unique. Il désirait en fin de compte réaliser un chef-d’œuvre. Il peignit de nombreux tableaux que maintenant nous considérons comme tels. Mais il fit plus : il élabora une nouvelle méthode et un nouveau système artistique qu’il appliqua à travers toute son œuvre et favorisa ainsi l’apparition de l’art moderne du XX e siècle. Il serait vain de chercher l’essence et l’esprit du système artistique de Cézanne dans ses propos. Il n’acceptait des raisonnements sur l’art que le pinceau à la main. Et ses réflexions ne possèdent pas le caractère de postulats théoriques, elles sont plutôt des conseils pratiques adressés à ses collègues peintres. Ainsi d onc, ce ne sont pas les propos théoriques du peintre, mais bien ses œuvres elles-mêmes qui doivent nous aider à élucider comment, pas à pas, se forma sa méthode et comment se scellaient les maillons de ce que nous sommes en droit aujourd’hui d’appeler le « système artistique de Cézanne ».
9. Madame Cézanne dans un fauteuil rouge ( Madame Cézanne à la jupe rayée ), 1877,
Museum of Fine Arts, Boston.