On se met à table. On lit le Journal d’usine de la philosophe Simone Weil, ses notes d’ouvrière pendant qu’elle planifie une grève. On lit les carnets de l’artiste Lee Lozano, écrits alors qu’elle abandonne peu à peu le milieu de l’art. Malades au travail, excédées par l’ordre des choses, toutes deux renoncent dorénavant aux impératifs les plus élémentaires de la vie : l’une à la nourriture, l’autre à l’amitié. On porte aussi attention aux textes de mystiques du Moyen Âge, à leur pari d’atténuer la voix pour se faire entendre autrement et, ainsi, déjouer les rapports d’autorité.
Il semble qu’on puisse se retirer des marches à suivre, mais pas du travail d’écrire. Maude Pilon apprend à tisser une dentelle : entrelacer les matériaux, faire avec, tendre faiblement et couper le fil deviennent ses moyens de lire et d’écrire. Elle se permet de ne pas trop expliquer. Elle a confiance, « les lecteurices font ce qu’iels peuvent ».
À midi, une joie est une communication expérimentale où s’entrecroisent citations, images, et tables jonchées de matériaux divers. Voilà « une chorale ultrapersonnelle ». Ni enseignement ni récit, et pourtant lieu d’apprentissage artisanal et politique, cet ouvrage tente de dessiner les outils d’une ère post-travail. Car « qui peut faire plus ? »
C'est présenté comme si je faisais des liens. Je n'écris pas tout ce que je lie. Je cache des ruptures, et aussi certains collages paralysants. Je ne cite pas tout ce que je lis. Il ne s'agit pas de faire mieux. Les lecteurices font ce qu'iels peuvent. Il ne s'agit pas d'aller mieux. Je montre aussi des ruptures. Je n'ai pas d'heure de lunch. On cherchera un nom pour ce travail qu'on voudra qualifier de littéraire ou d'œuvre, alors que l'œuvre arrive quand c'est fini. Le désœuvre, elle, sans ifn, continue une détérioration. On cherchera mon nom, j'exposerai une difficulté : l'interruption.
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