214
pages
Français
Ebooks
2014
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Publié par
Date de parution
03 avril 2014
Nombre de lectures
13
EAN13
9782760633018
Langue
Français
Poids de l'ouvrage
1 Mo
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03 avril 2014
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EAN13
9782760633018
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ePub: claudebergeron.com
Catalogage avant publication de Bibliothèque et Archives nationales du Québec et Bibliothèque et Archives Canada
Vedette principale au titre:
Agriculture et paysage: aménager autrement les territoires ruraux
(Paramètres) Comprend des références bibliographiques.
ISBN 978-2-7606-3299-8
1. Paysages agricoles - Québec (Province). 2. Aménagement du territoire - Québec (Province). I. Ruiz, Julie. II. Domon, Gérald, 1957- . III. Collection: Paramètres.
GF91.C3A37 2014 333.7309714 C2013-942465-2
Dépôt légal: 1 er trimestre 2014
Bibliothèque et Archives nationales du Québec
© Les Presses de l’Université de Montréal, 2014
ISBN (papier) 978-2-7606-3299-8
ISBN (ePub) 978-2-7606-3301-8
ISBN (pdf) 978-2-7606-3300-1
Les Presses de l’Université de Montréal reconnaissent l’aide financière du gouvernement du Canada par l’entremise du Fonds du livre du Canada pour leurs activités d’édition.
Les Presses de l’Université de Montréal remercient de leur soutien financier le Conseil des Arts du Canada et la Société de développement des entreprises culturelles du Québec (SODEC).
IMPRIMÉ AU CANADA
AVANT-PROPOS
Agriculture et paysage, premier regard
Lionel Levac
Quelles sont les images que nous projette le Québec rural? Comment et pourquoi sont-elles aujourd’hui différentes et parfois désolantes? Avant de plonger dans la lecture d’analyses plus techniques et scientifiques de ces deux questions, il peut être utile de proposer un point de vue plus «impressionniste» et faire part d’observations issues de plusieurs années passées à parcourir le Québec rural, à rencontrer les gens qui y vivent et à observer ce qui se passe dans les fermes.
Insistons d’abord sur la différence entre environnement et paysage, deux notions à ne pas confondre. Respecter l’environnement ne signifie pas du tout, pas automatiquement du moins, offrir à l’œil un environnement agréable, évocateur des richesses du milieu et respectueux des éléments du patrimoine dans lequel ont évolué les générations précédentes. Il y a un grand nombre de fermes qui se conforment en tous points aux règles environnementales mais qui offrent un paysage triste, dénudé, pas du tout harmonieux.
Malheureusement, dans nos politiques gouvernementales, dans les mesures d’appui et de soutien, dans l’organisation et la régie d’une ferme, comme dans tellement d’autres secteurs d’activités dans notre société, très peu d’actions sont synchronisées, sont harmonisées. Et d’ailleurs, comment en arriver à influer positivement sur le paysage simultanément à la mise en place de nouveaux équipements, de nouvelles façons de faire. Une «belle» ferme du point de vue d’un agriculteur ne sera souvent pas agréable à voir pour le promeneur. À l’inverse, des fermes belles, aux décors bucoliques, qui projettent de véritables images d’Épinal aux touristes, aux urbains, seront souvent perçues comme archaïques par des exploitants agricoles qui ne conçoivent pas que l’on puisse faire de la production agricole à travers des fleurs, des haies, des bosquets, des bâtiments aux couleurs assorties à celles de la maison sur des parcelles entourées de fossés eux-mêmes bordés d’arbres, avec des vaches qui se promènent librement. Pour un certain nombre d’agriculteurs, tout cela constitue plutôt des problèmes, des contraintes, des difficultés.
Mais attention, je ne peux aucunement trancher aussi radicalement entre ce qui est beau et ce qui ne l’est pas. Des fermes ultramodernes offrent aussi à l’occasion des décors fort agréables et s’harmonisant bien avec l’environnement, avec le décor avoisinant. Il faut probablement faire du cas par cas si l’on veut qualifier une ferme et une autre.
Abordons donc la question par le biais des pratiques agricoles, des façons de cultiver la terre et d’élever les animaux. Ce sont d’ailleurs ces pratiques qui ont influencé le paysage agricole québécois, sinon carrément modelé le paysage agricole, depuis que la terre a ici une vocation agricole. Les maisons, le bungalow urbain, le «pavillon» de banlieue transposés en décor champêtre, ce n’est souvent pas très heureux. Mais cette maison de banlieue est apparue pour nombre de familles agricoles comme une façon de se rapprocher de la vie de la ville qu’elles enviaient. Mais à vouloir copier la ville, on en reproduit les fautes. La brique rose, la tôle orange vif, le petit «clin» fade appliqué à tous les bâtiments et qui en dissimule tout détail, toute particularité architecturale, tout cela détonne souvent.
L’évolution de l’agriculture
Du temps où il y avait encore 150 000 fermes au Québec, et ce n’est pas si lointain, 1940-1950, il y avait des familles, des enfants, des animaux, des bâtiments pour faire un peu de tout. Des potagers, des pâturages, des pacages, des céréales… Dans les rangs, chaque rang avait sa beurrerie ou sa fromagerie. C’était «l’autarcie», l’autosuffisance. Est-ce que le paysage agricole à cette époque était plus beau? Et si on remonte un peu plus loin dans le temps, à l’époque de la colonisation, est-ce que le paysage était plus beau à ce moment? Plus beau qu’aujourd’hui? Non, probablement pas. Il était probablement assez désolant. Le monde agricole n’était pas riche et ce qui primait était de nourrir toutes les bouches et de bûcher de nouvelles parcelles de terrain pour les enfants qui voudraient à leur tour tenter de vivre de la terre.
Opération rationalisation
De décennie en décennie, on grossit, on absorbe la ferme du voisin. Des rangs qui comptaient autrefois 20-25 fermes n’en comptent aujourd’hui que 3 ou 4. Il y a quelques années encore, si on voulait savoir où avait déjà existé une ferme, aujourd’hui disparue parce que fondue dans celle du voisin, on cherchait au printemps les lilas en fleurs. Chaque maison avait ses lilas. D’ailleurs si vous visitez le parc national Forillon, cherchez les lilas, vous verrez où étaient les maisons des familles déplacées ou qui avaient déjà laissé la terre avant que la zone ne devienne parc. Dans le Québec agricole, on voit de moins en moins ces talles de lilas parce que même les quadrilatères où s’élevaient jadis d’humbles maisons ont été nettoyés et nivelés pour agrandir les parcelles de culture.
On est en voie de faire la même chose avec les vieilles granges de milieu et de fond de terre que l’on utilisait comme entrepôts hors saison pour différents équipements. Ces bâtiments n’ont souvent pas été entretenus et tombent en ruine, enfin ceux qui restent encore. Ces granges entrepôts ont fait fortement partie du décor agricole des dernières décennies, mais leur règne achève. Tout comme celui des vieilles granges étables, en bois vieilli, plus grandes, situées à proximité des maisons et que l’on a dramatiquement négligées au fil des années, alors que l’on construisait souvent juste à côté de nouveaux bâtiments plus fonctionnels, mieux équipés, certes, mais qui se trouvaient aussi dans la logique, parfois discutable, qu’un bâtiment désuet pour ses fonctions d’origine ne pouvait qu’être abandonné. Dans la perception de plusieurs familles agricoles, il n’est pas conforme à une agriculture moderne, contemporaine, de conserver et d’intégrer à une ferme efficace de vieux bâtiments. Ou bien, si on le fait, c’est la plupart du temps au mépris de la valeur et des caractéristiques des bâtiments en question.
C’est un peu comme les tracteurs. Un très fort pourcentage des tracteurs de ferme au Québec, lorsqu’ils sont remplacés par des véhicules neufs, auraient encore eu une vie utile de plusieurs années. C’est connu, les agriculteurs québécois sont des acheteurs de tracteurs. Les Américains le savent, les agriculteurs des autres provinces aussi puisqu’ils sont souvent acheteurs de tracteurs usagers québécois. Donc, au Québec, il faut pouvoir stationner un tracteur neuf à côté d’un bâtiment neuf, ou moderne en tout cas.
Bien sûr, pour ce qui est des bâtiments, de nouvelles normes sanitaires ont souvent été à l’origine de l’abandon des vieilles structures. Les allées devaient être plus larges entre les rangées de vaches, les laiteries mieux équipées et plus isolées des troupeaux. Les tas de fumier, la tuque, comme l’appellent encore certains agriculteurs, devaient être éloignés un peu du bâtiment. Et rapidement, on a vu les fosses à fumier, sous gestion liquide, remplacer les tas de fumier. Les fosses de lisiers se sont aussi multipliées près des porcheries alors que des milliers de familles délaissaient la production laitière pour élever des porcs. Plus facile et plus payant disait-on. Aujourd’hui on ne tient plus le même langage, mais l’apparition des porcheries a aussi, très souvent, accéléré l’abandon des granges étables. S’est donc accéléré le mélange des genres dans l’architecture agricole. Le souci d’harmonisation du décor, du paysage n’était assurément pas une priorité.
Aussi, depuis les années 1970 environ, on a vu progressivement disparaître les vaches des champs. Parce que plusieurs familles élevaient maintenant du porc, mais également parce qu’on a jugé plus efficace une régie de troupeau de bovins laitiers gardés en permanence à l’intérieur.
Les silos, pour entreposer les grains avant que le marché ne soit intéressant pour écouler les récoltes, se sont multipliés. Ces structures, métalliques pour la plupart, se sont ajoutées aux silos un peu plus anciens et dont la construction avait marqué l’adoption de la pratique de l’entreposage de fourrages hachés, l’ensilage. Beaucoup de producteurs avaient alors remplacé le foin sec par l’ensilage. Malheureusement diront plusieurs fromagers qui prônent le retour à l’alimentation des bovins au foin sec. Donc fini les vaches au champ.
Les cours de ferme sont désormais conçues pour la manœuvre des camions, toujours de plus en plus gros. L’entreposage extérieur des balles rondes ou carrées (surtout rondes) est une pratique qui pèse très lourd sur le décor. Près des bâtiments, des maisons et sur des parcelles de terre avoisinantes, on étend sur des centaines de mètres ces grands sacs plastiq