Sécurisation des quartiers et gouvernance locale Enjeux et défis pour les villes africaines (Afrique du Sud, Kenya, Mozambique, Namibie, Nigeria) , livre ebook

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Publié par

Date de parution

01 janvier 2009

EAN13

9782811103187

Langue

Français

Poids de l'ouvrage

4 Mo

Claire Bénit-Gbaffou, Seyi Fabiyi et Élisabeth Peyroux (éd.)
Sécurisation des quartiers et gouvernance locale
Enjeux et défis pour les villes africaines (Afrique du Sud, Kenya, Mozambique, Namibie, Nigeria)
KARTHALA - IFAS
SÉCURISATION DES QUARTIERS ET GOUVERNANCE LOCALE
ENJEUX ET DÉFIS POUR LES VILLES AFRICAINES
KARTHALAsur Internet : http://www.karthala.com Paiement sécurisé
Couverture: © Mamba Security, cliché Bénit-Gbaffou 2007, Isando (zone industrielle en périphérie de Johannesburg, Afrique du Sud). En optant pour le mamba (serpent africain dont la toxicité du venin lui a valu une réputation de tueur) comme emblème, cette compagnie de sécurité johannesbourgeoise s'affiche comme délibérément africaine par rapport à des compagnies multinationales jouant de symboliques ancrées dans les imaginaires du Nord. Par ailleurs, ce logo fait écho à un préjugé racial courant selon lequel les Noirs auraient peur des serpents et n'oseraient donc pas s'approcher de propriétés protégées par Mamba.
© ÉditionsKARTHALA – IFAS,2009 ISBN : 978-2-8111-0318-7
SOUS LA DIRECTION DE Claire Bénit-Gbaffou, Seyi Fabiyi et Élisabeth Peyroux
Sécurisation des quartiers et gouvernance locale
Enjeux et défis pour les villes africaines (Afrique du Sud, Kenya, Mozambique, Namibie, Nigeria)
KARTHALA 22-24, bd Arago 75013 Paris
IFAS PO Box 542Newtown Johannesburg
L’IFAS
L’Institut français d’Afrique du Sud (IFAS), créé en 1995 à Johannesburg, assure la présence culturelle française en Afrique du Sud. Il est également un organisme de recherche en sciences humaines et sociales dépendant du ministère des Affaires étrangères et européennes (MAEE) et destiné à stimuler et soutenir les travaux universitaires et scientifiques français sur l’Afrique australe. Depuis avril 2007, l’IFAS est une Unité Mixte des Instituts Français de Recherche à l’Étranger, l’UMIFRE 25, dans le cadre d’un accord de partenariat entre le MAEE et le Centre National de la Recherche Scientifique. Sous l’autorité de son conseil scientifique, l’IFAS participe à l’élaboration et la direction de programmes de recherche en partenariat avec des institutions universitaires ou d’autres orga-nismes de recherche dans les différentes disciplines des sciences sociales et humaines. L’Institut apporte également son soutien aux chercheurs travaillant sur la région pour l’octroi de bourses et de subventions de recherche et appuie les échanges scienti-fiques avec ses partenaires sud-africains. Il gère une bibliothèque spécialisée, aide à la publication des résultats de recherche et organise des colloques et conférences. L’Institut publie deux fois par an une lettre scientifique, LESEDI, disponible en ligne sur son site web.
INSTITUT FRANÇAIS D’AFRIQUE DU SUD 66, Margaret Mcingana Street Po Box 542, Newtown 2113 Johannesburg Afrique du Sud
Tél. : + 21 11 836 05 61 - Fax : + 27 11 836 58 50 Courriel : secretariatrecherche@ifas.org.za www.ifas.org.za/research
INTRODUCTION
Quartiers résidentiels fermés, privatisation de la sécurité et gouvernance urbaine : lecture croisée des phénomènes observés dans les villes d’Afrique sub-saharienne
Élisabeth PEYROUXet Claire BÉNIT-GBAFFOU
Préambule – Contexte et objectifs de l’ouvrage
Notre point de départ – Un éclairage sur les quartiers résidentiels fermés en Afrique sub-saharienne
Le phénomène des « communautés fermées* », « ensembles résiden-tiels sécurisés », « quartiers fermés » ou encore « enclaves fortifiées » suscite depuis quelques années un vif intérêt de la part de la communauté scientifique. De nombreuses études ont été conduites dans les contextes nord-américain (Blakely et Snyder, 1997 ; Low, 2003 ; Le Goix, 2003 ; Degoutin, 2006), français et européen (Charmes, 2003, 2005), latino-américain (Caldeira, 1999 ; Thuillier, 2002 ; Capron, 2006), asiatique (Leisch, 2002 ; Glasze, 2003c) et dans une perspective comparative (Glasze, Webster et Frantz, 2005 ; Atkinson et Blandy, 2006 ; Billard, Chevalier et Madoré, 2005). Différentes perspectives théoriques et conceptuelles ont été mobilisées au sein de plusieurs disciplines pour analyser ce phénomène complexe et multidimensionnel (voir en particulier Atkinson et Blandy, 2006). De nombreux travaux se sont attachés à analyser de manière critique les risques et les enjeux liés au développe-ment de ces quartiers fermés : la « privatisation » de l’espace public, les phénomènes d’exclusion et de ségrégation, les entorses aux principes démocratiques, la prédation de ressources publiques ainsi que les risques
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de sécession politique ont été largement débattus (Flusty, 1994 ; Marcuse, 1997 ; Davis, 1990 ; Soja, 2000 ; Glazse, 2003b ; Le Goix, 2006). Les interprétations de ce phénomène ont en outre fait l’objet de relectures critiques, notamment de la littérature états-unienne, latino-américaine et française, autour des rapports entre processus d’enfermement, de sécurisa-tion, d’autonomisation et d’homogénéisation résidentielle (Capron, 2004). À l’instar des autres continents, les quartiers fermés ont connu un déve-loppement important dans les villes d’Afrique sub-saharienne depuis les années 1980 : particulièrement répandus en Afrique du Sud, il sont égale-ment observés dans les pays voisins du Mozambique et de Namibie, au Kenya et au Nigeria. Pourtant, peu d’études ont été consacrées à l’analyse de ce phénomène dans le contexte africain, à l’exception notable de travaux récents portant sur l’Afrique du Sud (Landman, 2003, 2006 ; Jürgens et Gnad, 2000) et le Ghana (Grant, 2006). Les facteurs d’émergence, les formes et les implications spatiales du développement de quartiers fermés dans des villes fortement ségréguées ont été peu analysés de même que leurs implications politiques dans des contextes marqués par une transition post-apartheid (Afrique du Sud, Namibie), militaire (Nigeria, Mozambique) et par des crises économiques et politiques (Kenya). Cet ouvrage a pour objectif d’enrichir les débats portant sur les quartiers fermés à travers un regard croisé sur le phénomène observé sur le continent africain. Si l’Afrique du Sud occupe une place prépondérante dans cet ouvrage, notamment en raison du nombre de chercheurs travaillant dans ce pays (voir encadré : cadre institutionnel de la recherche), les études de cas couvrent d’autres capitales (Maputo, Windhoek, Nairobi) et villes impor-tantes d’Afrique sub-saharienne (Ibadan, Lagos, Kano). Ce regard sur le continent africain, sous la forme d’études de cas individuelles ou d’analyses comparatives, permet de mettre en perspective les approches nord-améri-caines et européennes et de questionner ce qui fait la spécificité du phéno-mène en Afrique sub-saharienne. Des lotissements privés enclos, appelés gated communities, Gated Residential Developements(ousecurity villages dans le contexte sud-africain ;condominiums*à Maputo), aux quartiers rési-dentiels fermésa posteriorisur l’initiative d’associations de propriétaires (qualifiés deroad closures,ou enclosures*, en Afrique du Sud, Nigeria et Kenya), ces objets révèlent en effet, au-delà de la similarité des formes observées à travers les continents, une grande diversité de processus ancrés dans le contexte spécifique des villes d’Afrique sub-saharienne. Si les contributions de cet ouvrage envisagent les quartiers fermés sous leurs différents aspects, il en est un qui fait l’objet d’une attention particulière : la privatisation de la sécurité constitue en effet le fil direc-teur de cet ouvrage car ce processus représente, à nos yeux, un révélateur particulièrement pertinent des changements politiques et sociaux et des transformations spatiales qui affectent les villes contemporaines. À la
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différence des autres études sur la privatisation de la sécurité en Afrique, qui mettent l’accent sur la croissance du secteur privé, son impact et ses modalités de régulation à l’échelle nationale ou régionale(Gumedze, 2007)ou sur l’évolution du rôle des compagnies de sécurité privées (Cleaver, 2000 ; Pérouse de Montclos, 2008), cet ouvrage s’attache à analyser ce phénomène principalement à l’échelle locale, voire micro-locale, tel qu’il se déploie au sein des espaces résidentiels. Le choix de mettre l’accent sur la privatisation de la sécurité nous a incités à ne pas nous attacher exclusivement à une analyse des quartiers fermés : si ces espaces ont constitué le point de départ de la réflexion, celle-ci s’est élargie à d’autres formes de mobilisation et d’organisation des quartiers répondant à des enjeux sécuritaires et reposant sur un prin-cipe de privatisation.
Des quartiers fermés à d’autres formes et lieux de privatisation de la sécurité : City Improvement Districts (CID), espaces de loisirs et de consommation, vigilantisme
Les contributions de cet ouvrage s’intéressent ainsi à trois autres phénomènes qui ne sont pas non plus spécifiques à l’Afrique sub-saha-rienne. Le premier, incarné par lesCity Improvement Districts*(CID) de Johannesburg et du Cap, appelésBusiness Improvement Districts(BID) dans le contexte anglo-saxon, correspond à une forme d’auto-organisation et d’autogestion de quartiers centrée sur la fourniture de services publics supplémentaires, notamment la sécurité, financée par les propriétaires fonciers (Houstoun, 2003). Bien que les périmètres des CID ne soient pas enclos, on observe des logiques similaires à celles des quartiers fermés : la demande de sécurité représente l’un des facteurs moteurs de la mobilisa-tion (Hoyt, 2004 ; Morange et Didier, 2006a) ; les associations de proprié-taires jouent un rôle prépondérant (en partenariat avec les autorités publiques) ; les mesures sécuritaires mises en place au sein des CID ont pour objectif de contrôler et de réguler les usages et les pratiques de l’espace ; enfin, à l’image desgated communities, les CID représentent un modèle international importé d’Amérique du Nord qui se diffuse dans de nombreux contextes géographiques (Hoyt, 2003 ; Ward, 2006 ; Peyroux, 2008 ; Pütz, 2008) et a suscité de vifs débats invoquant également leurs conséquences en termes de démocratie locale, de privatisation et de marchandisation de l’espace public (Briffaut, 1999 ; Hoyt et Gopol-Agge, 2007, Töpfer, Eick et Sambale, 2007). La deuxième forme de privatisation de la sécurité étudiée dans le cadre de cet ouvrage se déploie dans des espaces dits « semi-publics » ou « semi-privés » : le Victoria & Alfred Waterfront* au Cap, un centre
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commercial en centre-ville, est emblématique des processus de privatisa-tion et de marchandisation de l’espace affectant les lieux de loisirs, de consommation et de tourisme (Sorkin, 1992). Tout comme les quartiers fermés et les CID, il s’inscrit dans les débats autour de la ségrégation et de la discrimination liées aux pratiques sécuritaires. Enfin, la troisième forme étudiée par les auteurs de cet ouvrage est 1 celle des patrouilles de résidants (pouvant aller jusqu’au vigilantisme *) abordées dans le contexte des villes nigérianes de Lagos, Kano et Ibadan, et de la ville sud-africaine de Johannesburg. Ce phénomène, qui corres-pond à une forme d’autosurveillance des quartiers en partenariat plus ou moins étroit avec la police et les autorités publiques, renvoie ici à la notion plus large de «community policing*», forme anglo-saxonne de gouvernance sécuritaire impliquant la coopération des résidants avec la police dans la production de sécurité, et exportée à l’échelle globale comme une « bonne pratique » (Dixon, 2000 ; Brogden, 2004). Ces phénomènes, qui ne sont pas traités systématiquement dans toutes les études de cas de cet ouvrage, sont abordés dans la mesure où ils reflètent une logique de contrôle social à l’échelle locale assez similaire à celle des autres objets étudiés. À l’instar des enclosures,par exemple, ils mettent particulièrement bien en lumière à la fois les dynamiques internes aux « communautés*» (ou aux groupes de résidants, si l’on utilise une termi-nologie moins anglo-saxonne) et surtout les relations instables et en constante négociation entre État et citoyens autour de l’enjeu sécuritaire.
Une exploration du rôle changeant de l’État et des enjeux de gouvernance urbaine
La question du rôle de l’État au sein de ces nouvelles configurations d’acteurs occupe une place importante dans de nombreuses contributions. La sécurité apparaît en effet comme un analyseur de l’évolution du lien politique et social mais aussi et surtout des fonctions de l’État, de ses rapports avec la société et de sa légitimité au regard des évolutions déjà mises à jour sous les effets de la mondialisation (Du Bois de Gaudusson et Médard, 2001 ; Médard, 1991 ; Hibou, 1999b). Dans le contexte de décen-tralisation et de gouvernance urbaine participative (basée sur des principes internationaux diversement adoptés selon les études de cas), les quartiers
1. Le vigilantisme peut être défini comme une mobilisation volontaire de citoyens à des fins de maintien de l’ordre, utilisant la force ou la menace, de manière relativement autonome des autorités publiques (Johnston, 1996). La question de la nature des relations desvigilantesà l’État reste posée. Fourchard et Albert (2003) distinguent le vigilantisme du phénomène des milices, groupes engagés comme hommes de main par des partis poli-tiques ou des groupes de pression.
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sont devenus une échelle de gestion urbaine à l’importance grandissante (Brenner, 2004 ; Jaglin, 2008). La question du contrôle de l’espace local, fortement liée aux enjeux sécuritaires et aux identités communautaires, fait l’objet d’une recherche conflictuelle de légitimité de la part des différents acteurs. Les communautés fermées induisent en effet de nouvelles formes d’organisation politique et territoriale (« sécession civique », « micro-gouvernance », « régimes de servitude ») (Hook et Vrdoljak, 2002) qui invi-tent à repenser les rapports entre acteurs publics, privés et communautés. Ces formes de gouvernance privée questionnent également les notions mêmes de communauté (Gemeinschaft), de solidarité et de citoyenneté. Ces questions prennent une dimension particulière dans le contexte africain, et notamment dans les pays et les villes étudiés (voir encadré : cadre institutionnel de la recherche). Il s’agit tout d’abord d’États jeunes et en construction : le Nigeria tente de construire une culture démocratique après des années d’instabilité et d’apaiser les tendances centripètes qui traversent la nation en cherchant à tâtons un équilibre entre des États à forte velléités d’autonomie et un État central fort ; le Mozambique se relève de trente années de guerre civile qui ont conduit à un contrôle fort du parti dominant sur la société, mais laissé un État et une administration exsangues ; l’Afrique du Sud et la Namibie, au sortir de décennies d’apar-theid, construisent activement leur démocratie ; le Kenya, qui apparaissait relativement stable, vient de connaitre des soubresauts violents qui montrent une certaine fragilité démocratique. Ces éléments produisent des contextes spécifiques : les transitions démocratiques permettent souvent une assez grande ouverture à des expériences de gouvernance sécuritaire inédites (comme c’est par exemple le cas en Afrique du Sud) ; mais la fragilité des États en construction fait également de la sécurité un enjeu national fort, et un objet de lutte politique central dans les rapports entre État et acteurs non étatiques, ou au sein des États eux-mêmes. Une deuxième spécificité s’affirme par rapport aux débats relatifs aux pays du Nord : l’importance de l’insécurité quotidienne, affectant l’ensemble des classes sociales (même si les formes d’insécurité varient) ; et une insuffisance des réponses publiques suppléées par un ensemble d’alternatives privées ou collectives, plus ou moins formelles, qui ont amplement été soulignées par Baker (2008) dans ses analyses de la « police à choix multiple ». Une troisième spécificité, liée aux deux premières, est l’importance de la violence comme mode de régulation de rapports sociaux très marqués par l’inégalité sociale, à quelque échelle que ce soit (sous formes de crises violentes et d’émeutes, comme au Kenya et au Nigeria ; sous forme quoti-dienne comme des formes violentes de justice populaire ou d’auto-défense au Nigeria et en Afrique du Sud). L’inégalité sociale extrême, notamment dans les grandes villes étudiées, conduit aussi à la banalité des
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