Politique africaine n°133 • mars 2014 - Travail et politique , livre ebook

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Date de parution

01 mars 2014

Nombre de lectures

0

EAN13

9782811111625

Langue

Français

Poids de l'ouvrage

2 Mo

poliptoiliqtiquuee afarifcraiinceaine 133
Travail et politique
Retour sur les printemps arabes
L’Itorero: jeunesse et génocide au Rwanda
politique africaine n° 133mars 2014
politique
TRIMESTRIEL
africaine
Travail et politique
Éditions KARTHALA 22-24, boulevard Arago 75013 Paris
politique africaine
Rédaction Les Afriques dans le monde – Sciences Po Bordeaux Domaine universitaire 11, allée Ausone - 33607 Pessac cedex Tél. : 05 56 84 42 70 Fax : 05 56 84 43 24 e-mailsciencespobordeaux.fr: politique-africaine@ site Internet: http://polaf.hypotheses.org/ La Revue des livres continued’être éditée au secrétariat parisien de la revue. Les livres pour compte rendu doivent être envoyés à l’adresse suivante : Politique africaine, CERI,56 rue Jacob, 75006 Paris (à l’attention de Sylvie Haas). Directeur de la publication: Laurent Fourchard Rédacteurs en chef: David Ambrosetti et Didier Péclard Comité de lecture: Séverine Awenengo-Dalberto, Claire Benit-Gbaffou, Vincent Bonnecase, Florence Brisset-Foucault, Tarik Dahou, Lotje de Vries, Vincent Foucher, Thomas Fouquet, Tobias Hagmann, Dominique Malaquais, Sandrine Perrot, Marie-Emmanuelle Pommerolle, Boris Samuel Responsables de la rubrique « Lectures »: Vincent Foucher (Revue des livres) et Sandrine Perrot (Autour d’un livre et Chroniques bibliographiques) Secrétaire de rédaction: Françoise Braud Assistante de rédaction: Sylvie Haas La revuepolitique africaineest publiée par l’Association des chercheurs de Politique africaine (président Laurent Fourchard, trésorière Hélène Charton-Bigot, secrétaire générale Séverine Awenengo-Dalberto). Avec le soutien du Fonds d’analyse des sociétés politiques (Fasopo), du Centre d'études et de recherches internationales (Ceri, Fondation nationale des sciences politiques), de l’UMR Les Afriques dans le monde (LAM, Sciences Po Bordeaux), du Cemaf « Centre d'études des mondes africains » (CNRS, Université Paris 1, Université de Provence, EPHE) et de l’Institut de recherche pour le développement (IRD). Avec le concours du Centre national de la recherche scientifique et du Centre national du livre. politique africaineest une revue à comité de lecture. Elle évalue aussi les textes rédigés en anglais, en espagnol et en portugais.Les opinions émises n’engagent que leurs auteurs. La revue n’est pas responsable des manuscrits qui lui sont confiés et se réserve le droit de modifier les articles pour des raisons éditoriales. Édition, ventes et abonnements Karthala, 22-24, boulevard Arago,75013 Paris Tél. : 01 43 31 15 59 Fax : 01 45 35 27 05 e-mail : karthala@orange.fr: www.karthala.comsite Internet Bulletind’abonnement et bon de commande en fin d’ouvrage Prix au numéro : 19 € ©Éditions Karthala, 2014 Conception graphique : Bärbel Müllbacher Illustration de couverture : © Greg Marinovitch. Rassemblement de mineurs sur la colline de Thaba dans le bidonville de Nkaneng,àMarikana, Afrique du Sud, le 15 août 2012. Le lendemain, 34 mineurs en grèveétaient tués dans des affrontements avec la police (voir l’article de Judith Hayem dans ce numéro).
politique africaine n° 133mars 2014
Avant-propos Didier Péclard et David Ambrosetti. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Le Dossier Travail et politique
Introduction au thème Le travail : un phénomène politique complexe et ses mutations conjoncturelles Laurent Bazin. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Pourquoi travail et travailleurs africains ne sont plus à la mode en 2014 dans les sciences sociales. e Retour sur l’actualité d’une problématique du xx siècle Jean Copans. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Un travail de pros. Réforme de la Sodecoton et redéploiement des formes de mobilisation du travail paysan en zone cotonnière dans l’Extrême-Nord au Cameroun Guillaume Vadot. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Politisation du travail des étrangers : repenser la variable « sans-papiers » Ange Bergson Lendja Ngnemzué. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Des chercheurs d’or aux diplômés chômeurs : émigration, travail et politique entre Égypte et Golfe (2006-2012) Lucile Gruntz. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Marikana : répression étatique d’une mobilisation ouvrière indépendante Judith Hayem. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Recherches Les politiques de « loisir » et le génocide des Tutsi rwandais. Du racisme culturel aux donjons de la mémoire (1957-2013) Thomas Riot. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Conjoncture Retour sur les Printemps arabes Jean-François Bayart. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Lectures AUTOUR DUN LIVRE. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Poor Numbers. How We Are Misled by African Development Statistics and W hat to Do about Itde Morten Jerven, commentépar Nicolas van de Walle, Agnès Labrousse et Carlos Oya
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politique africaine n° 133 • mars 2014
LA REVUE DES LIVRES. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .. . . . . . . . N. Carrier et G. Lantschnig,Africa and the war on drugs(par Vincent Foucher). D. Decherf,Couleurs. Mémoires d’un ambassadeur de France en Afrique(par Yves Gounin). M. Diouf (dir.),Tolerance, Democracy, and Sufis in Senegal(par Jean-François Bayart). S. J. Ansen,Al-Shabaab in Somalia. The history and ideology of a militant Islamist group, 2005-2012(par Roland Marchal). S. Hirsch et L. Van Der Walt (dir.),Anarchism and Syndicalism in the Colonial and Postcolonial World, 1870 -1940. The Praxis of National Liberation, Inter-nationalism, and Social Revolution(par Raphaël Botiveau). Z. Mampilly,Rebel Rulers. Insurgent Governance and Civilian Life During War (par Yvan Guichaoua). D.-C. Martin,: Music, Identity, and Politics in South AfricaSounding the Cape (par David B. Coplan). D. Resnick et N. van de Walle (dir.),Democratic Trajectories in Africa. Travelling the Impact of Foreign Aid(par Isaline Bergamaschi). G. Vilnet (dir.),Mozambique : Littératures et sociétés contemporaines(par Barbara Dos Santos).
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Avant-propos
La rédaction
Nouvelle couverture, maquette légèrement retouchée, ce numéro de Politique africainemarque une transition. Laurent Fourchard et Marie-Emmanuelle Pommerolle, qui ont mitonné la revue avec talent pendant quatre ans, ont passé la main en juin 2013, et une équipe de rédaction partiellement renouvelée a pris le relais. Marie-Emmanuelle Pommerolle reste membre du comité, alors que Laurent Fourchard prend la direction de la publication, Richard Banégas s’en retournant à ses propres recherches après quinze années passées à la barre de la revue. Un grand merci au Banégas qui, « à pas de caméléon », a su dessiner les « itinéraires (coupés-décalés) d’une réussite », comme en atteste un numéro « collector » paru en octobre 2013Dès son apparition au début des années 1980,Politique africaine, née d’une volonté de renouveler l’analyse du politique en Afrique, a fait ïgure de pionnièreàla fois en mettant en lumière la « banalité »des dynamiques politiquesàl’œuvre dans les sociétés africaines et en replaçant celles-ci dans leur historicitépropre, leurs logiques de terroir ainsi que dans leur articulation de longue durée aux sociétés d’Europe, d’Amérique et d’Asie. Espace de réflexion et de débats, la revue n’a jamais succombé àla tentation de s’ériger enécole de pensée et a su se remettre en question, s’ouvriràd’autres perspectives et confronter les points de vue et les approches. Au-delàdes inexions données par les différentes équipes rédactionnelles et par-delà les modes académiques, l’originalitéet la force de la revue reposent sur la diversitédes objets et l’hétérodoxie des approches, la primautéaccordéeà la recherche de terrain conjuguéeàune grande rigueur théorique. C’est pour continuer dans cette voie que la revue reste organisée autour de dossiers thématiques, régionaux ou « pays». Par leur biais,Politique africaine montre qu’elle n’est pas qu’une revue « sur l’Afrique», mais avant tout un lieu de réexion et d’échanges sur les grands enjeux des sciences sociales du politique. Le présent numéro revient ainsi sur le travail comme objet politique, problématique ancienne mais quelque peu délaissée par la recherche en sciences sociales, malgrésa brûlante actualité. Les dossiers en cours d’éla-boration porteront sur les relations Afrique-Chine avec un accent sur le rôle des entrepreneurs (juin 2014), les politiques de la « nostalgie coloniale» (octobre 2014), la notion de «Blackness», envisagéeàtravers le prisme des jeunesses urbaines du continent et de leur rapport imaginaire auBlack Atlantic (décembre 2014), et sur l’« Algérie aux marges de l’État»(mars 2015). Continuant dans les pas de nos prédécesseurs, nous avons structuréle « hors-dossier»en trois rubriques : une rubrique « recherches»qui accueil-lera des articles analytiques ne trouvant pas leur place dans un dossier ;
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politique africaine n° 133 • mars 2014
Travail et politique
une rubrique « conjoncture » visant à mettre en perspective des événements saillants de l’actualité du continent ; et une rubrique « lectures » qui proposera, outre les traditionnels comptes rendus d’ouvrages, des débats autour d’un livre, en alternance avec des chroniques bibliographiques. Enfin, pour renouer avec une vielle tradition inventée dès les débuts de la revue, nous souhaitons également mettre en valeur, dans une rubrique distincte, des « documents » (lettres, tracts, pamphlets, photos, cartes) particulièrement parlants et difïciles d’accès. Grâce au soutien de notreéditeur et de l’ACPA, et grâceàl’œil de notre maquettiste Bärbel Müllbacher, la revue a pu s’offrir un « lifting»visuel et se présenteàvos yeux dans un nouvelécrin. La refonte de la maquette papier s’accompagne d’une stratégie de diffusion numérique qui la complète. Depuis 2013,Politique africaineest diffusée sur le portail Cairn (www.cairn. info/revue-politique-africaine), et par ce biais devient accessible dans un nombre croissant de bibliothèques de par le monde. En mars 2014, la revue aégalement lancéson nouveau site qui, sous forme de blog, regroupe des contenus en libre accès (introductions aux dossiers, articles de conjoncture, comptes-rendus d’ouvrages), informe sur son actualité, et permetégalement des rétrospectives mettant des faits d’actualitéen perspectives avec des articles déjàpubliés. Ce nouveau site (http://polaf.hypotheses.org/), conçu par Fabrice Melka et alimenté par Léa Barreau-Tran, donne enïn accès à toutes les archives de la revue, et se veut un lieu d’échange et de discussion avec nos lecteurs.Àvous d’en faire le meilleur usage et de nous aiderà l’améliorer ! Rappelons enïn quePolitique africainevit avant tout de vos contributions scientiïques : nous ne pouvons donc que vous encourager à répondre aux appels que nous lançons quatre fois par année, etànous soumettre des propositions de dossier, de chroniques bibliographiques, des manuscrits et autres documents originaux. Dans l’immédiat, nous vous souhaitons une bonne lecture ! Pour la rédaction, Didier Péclard et David Ambrosetti
politique africaine n° 133mars 2014p. 7-23 LEDOSSIER
Travail et politique Coordonné par Laurent Bazin
Introduction au thème Le travail : un phénomène politique complexe et ses mutations conjoncturelles
A fïrmer le caractère politique du travail semble aller de soi. Pourtant, ce ne sont guère les travaux sociologiques actuels qui permettent de comprendre en quoi le travail est un phénomène politique, ni comment aborder ce phénomène dans le monde contemporain. Si l’importance politique du travail est généralement reconnueelle a fourni un jalon essentiel de l’histoire de 1 toutes les sciences socialeselle s’est peu à peu effacée des problématiques scientiïques. Plus rare encore est l’optique inverse, c’est-à-dire l’idée que la politique est présente dans les univers de travail et qu’elle contribue puissamment à les structurer. C’est à l’articulation de cette double perspective que ce dossier souhaite apporter une contribution. Les articles recueillis abordent la question à partir de terrains de recherche et d’angles d’analyse très divers auxquels Jean Copans fournit un cadrage épistémologique et historique. Le lecteur pourra trouver dans ces textes des apports spéciïques et originaux à la connaissance du travailau Cameroun, en Europe, enÉgypte et dans le Golfe, en Afrique du Sudainsi que des propositions visant à étayer empiriquement et théoriquement des approches politiques du travail. Cependant, c’est en essayant d’englober dans un seul regard les processus à l’œuvre dans l’ensemble du monde que l’on peut aujourd’hui tenter de saisir le sens politique du travail, non pour en faire un élément abstrait et homogène qui présenterait partout la même façade, mais pour être capable de recontextualiser des études fragmentaires portant sur des situations particulières, des scènes de travail porteuses de dynamiques et de conits propres, des représentations et des signiïcations ancrées dans des contextes
1. L. Bazin et M. Selim, « Travail, sexe,État. Une approche anthropologique»,Variations. Revue internationale de théorie critique[en ligne], n°17, 2012,<http://variations.revues.org/360>.
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politique africaine n° 133 • mars 2014
Travail et politique
productifs qui sont aussi le produit d’histoires politiques. Celles-ci sont par déïnition toujours localisées, mais elles s’inscrivent également dans des conjonctures globales, dans le temps du monde. C’est à cet exercice de problématisation que s’efforce ce texte de présentation.
Le travail dans la gouvernance globale
Si les deux termestravail et politiqueparaissent aujourd’hui dans un voisinage familier, cela procède moins des approches scientiïques actuelles que de la prégnance d’une histoire mondiale, marquée jusqu’à une période récente par l’existence d’un mouvement ouvrier international, acteur ima-ginaire qui se traduisait par des élaborations idéologiques et des formations actives, afïrmant partout la centralité politique du travail. La guerre froide, par l’affrontement qu’elle mettait en scène entre un « bloc » socialiste qui était parvenu à englober la moitié du monde, et un « bloc » capitaliste, constituait en elle-même jusque dans les années 1980 une théâtralisation de l’antago-nisme entre le capital et le travail. Cette trame historique imprègne encore les esprits, scientiïques ou profanes, mais plus ou moins confusément selon les contextes sociaux et les sensibilités idéologiques et politiques. L’englobement du socialisme dans le marché mondial l’a en quelque sorte reléguée dans un recoin de la mémoire. Ces mutations de la conjoncture géopolitique et idéologique mondiale, de même que leurs traductions en termes épistémologiques, constituent déjà le cadre politique global dans lequel le travail prend sens. La seconde raison pour laquelle le caractère politique du travail semble aller de soi tient aux discours publics. Les thèmes du travail, de l’emploi et du chômage, de la pauvreté aussi, forment un leitmotiv des discours gouver-nementaux et des organisations internationales : le travail est à l’évidence partout une question de politique, mais la politique entendue cette fois-ci comme exercice de la rhétorique. Elle a sa traduction dans des dispositifs de politique publique, mais ceux-ci sont animés par des résolutions d’ap-parence contradictoire. Dans l’optique néolibérale qui exerce une position hégémonique, la préoccupation pour l’emploi (c’est-à-dire le chômage)ou pour le « travail décent » au niveau international qui est celui de l’Organisation 2 internationale du travail (OIT)s’afïrme par des projections qui euphémisent leur objet et leurs objectifs, parallèlement à l’intention de exibiliser le travail,
2. Bureau International du Travail,L’Agenda du travail décent en Afrique, 2007-2015, Onzième réunion régionale africaine, Addis-Abeba,Éthiopie, avril 2007, Rapport du directeur général, OIT, Genève, 2007.
Laurent Bazin
Le travail : un phénomène politique complexe et ses mutations conjoncturelles
de le déprotéger, d’en abaisser le coût, pour accroître sa compétitivitéet sa productivité face à l’intensiïcation sans cesse accrue de la concurrence internationale. L’avenir s’annonce radieux, comme au temps du socialisme et du développement, mais dans un monde oùla ligne d’horizon n’est plus une lointaine visée politique de formation d’un homme nouveau, moderne ou développé. La ligne de fuite est désormais balisée par le marchéet la consommation, ainsi que par l’argent qui assure la liaison entre les deux ; elle vise la formation d’un homme dynamique préoccupépar son bien-être, autre nom de la jouissance. Question centrale de rhétorique, le travail est l’objet d’un effort inter-national de standardisationde sa déïnition, de sa mesure, des politiques d’emploiqui s’inscrit dans un processus de normalisation des sociétés par la généralisation de l’économie de marché. Il devient un objet de gouvernance, c’est-à-dire l’objet d’une gestion globale dans le cadre du marchémondial, au même titre que l’économie elle-même, la santé, l’environnement, la pauvreté ou encore le genre, mais à la différence des masses ïnancières qui échappent précisémentàtout effort de régulation mondiale depuis le moment de leur libéralisation dans les années 1980. Cette gouvernance globale se bâtit – non sans conits et sans contradictions – en sécrétant une masse considérable d’expertises, de rapports, de conférences exprimés dans un langage incompréhensible qui devient progressivement le nouvel idiome administratif mondial. Tout un appareil de connaissance se développe, qui tendàse substituer à la connaissance scientiïque, exerce sur elle un pouvoir d’attraction considérable, et en assure la subordination. « Gouvernance»est le terme cléde ce processus de normalisation. Il s’impose rapidement dans les années 1990 sous l’impulsion de la Banque mondiale. Tout comme le terme de globalisation lui-même, il est directement empruntéau vocabulaire des grandes entreprises transnationales qui cherchent, dans les années 1980, les moyens d’ajuster leurs stratégies d’expansion au marchéqui se mondialise. Dans une période oùla terminologie marxiste et tiers-mondiste s’efface, oùl’impérialismeconceptualisédans la pensée marxiste-léniniste exactement comme stratégie d’expansion mondiale du capitalismene constitue plus qu’une cible marginale de la contestation, c’est en quelque sorte l’impérialisme lui-même qui impose au niveau international son langage et donc ses propres catégories de pensée. Le travail est par exemple reconsidéré àtravers le conceptàsuccès de capital humain ; son envers est donc la pauvreté, dont l’éradication est décrétée objectif du millénaire. La solution peut alors être recherchée dans l’adaptation des moyens d’accès à la ïnance : le développement de la microïnance est censé permettreàchaque chômeur,àchaque travailleur pauvre, perçus comme entrepreneurs en puissance, de faire fructiïer leur capital personnel en
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