La région alaouite et le pouvoir syrien , livre ebook

icon

322

pages

icon

Français

icon

Ebooks

2006

Écrit par

Publié par

Lire un extrait
Lire un extrait

Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne En savoir plus

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris
icon

322

pages

icon

Français

icon

Ebook

2006

Lire un extrait
Lire un extrait

Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne En savoir plus

Publié par

Date de parution

01 janvier 2006

Nombre de lectures

0

EAN13

9782845868189

Langue

Français

Poids de l'ouvrage

10 Mo

Fabrice Balanche
La région alaouite et le pouvoir syrien
les éditionsKARTHALA
LA RÉGION ALAOUITE ET LE POUVOIR SYRIEN
Suivi de la publication : Laetitia Démarais et Souha Taraf
PAO : Antoine Eid
KARTHALAsur Internet : http://www.karthala.com Paiement sécurisé
Couverture :
½ Lattaquié, tribune de soutien à H. Al Assad à l¿occasion de l¿élection présidentielle de 1991. ½ Tartous, le front de mer et la vieille ville.
Éditions KARTHALA, 2006 ISBN : 2-84586-818-9
Fabrice Balanche
La région alaouite et le pouvoir syrien
Éditions KARTHALA 22-24, boulevard Arago 75013 Paris
REMERCIEMENTS
Cet ouvrage, issu dʼun travail de thèse, est le résultat dʼune coopération entre plusieurs personnes que je tiens particulièrement à remercier. Tout dʼabord Monsieur Pierre Signoles, mon directeur de thèse, qui a su me soutenir durant ces années dificiles et surtout mʼaiguiller vers les bonnes questions ; Souha Taraf qui, durant plusieurs mois, a relu, réorganisé et allégé ce lourd travail pour aboutir à cet ouvrage plus digeste ; toute lʼéquipe du service des publications de lʼInstitut français du Proche-Orient, Laetitia Démarais, Antoine Eid et Rami Yassine ; lʼInstitut français du Proche-Orient qui, depuis quinze ans, mʼa donné les moyens dʼeffectuer et de publier cette recherche. Enin, nʼoublions pas toutes les personnes qui, en Syrie, par leur témoignage et leur aide, ont contribué à cette étude.
INTRODUCTION
En conclusion de son étude sur«le pays des Alaouites », effectuée dans les années 1930, le géographe Jacques Weulersse sʼinterrogeait en ces termes : «Comment envisager lʼavenir des populations alaouites, placées aujourdʼhui par la destinée dans une situation aussi incertaine, et bien incapables par surcroît de décider de leur propre sort ? Nous avons vu, en effet, combien amorphe était leur état social et combien décevants les espoirs que lʼon pouvait concevoir sur une évolution rapide de leur part. Mais peut-on tenir 1 rigueur à ces attardés de lʼ»histoire ? Un quart de siècle plus tard, cʼest ce pays alaouite des«attardés de lʼhistoire » qui«fournit » les hommes forts du régime baathiste syrien : il sʼagit moins de critiquer rétrospectivement un grand géographe-explorateur, à sa manière, que de mesurer le chemin parcouru en quelques décennies par une région parmi les plus défavorisées et les plus périphériques de la Syrie née des décombres de lʼEmpire ottoman. La région côtière, au nord-ouest de la Syrie(Fig. 1), est en majorité habitée par des alaouites (plus des deux tiers de la population), aux côtés des musulmans sunnites et dʼune minorité chrétienne et ismaélienne ; elle est lʼunique territoire de référence dʼune communauté alaouite qui nʼa aucune ramiication connue au-delà de son berceau originel montagnard local, le Jebel Ansariyeh(Fig. 2). Avantage considérable de situation, cette région est la seule façade maritime de la Syrie. Elle est, par conséquent, celle dont lʼouverture sur la mer Méditerranée sera mise à proit par les dirigeants baathistes dès leur prise du pouvoir en 1963 pour y impulser une dynamique spatio-économique, sociale et politique exceptionnelle par rapport au reste du pays. Depuis lʼouverture économique de 1991, un tournant est en train de se produire : lʼancienne région vitrine et modèle du développement façon
1 W 1940, p. 377. EULERSSE
2
LA RÉGION ALAOUITE ET LEPOUVOIR SYRIEN
Figure 1 : La région côtière dans le territoire syrien.
Baath est en nette perte de vitesse, et les nouveaux investisseurs boudent la région côtière. Malgré (ou à cause de) son«passif » de région choyée par le pouvoir, celle-ci présente pourtant des avantages physiques et techniques incontestables, au plan économique. Comment se fait-il que les investisseurs privés, au lieu dʼutiliser les infrastructures considérablement développées en quelques décennies dans lʼunique région littorale du pays, ses capacités industrielles dʼaccueil inégalées (sur le papier du moins), et malgré un potentiel touristique unique, sʼen détournent ? Dans cette étude, une question centrale nous préoccupera : pourquoi cette région, à lʼévidence favorisée par le pouvoir baathiste, reste-t-elle aujourdʼhui mal insérée dans lʼespace national ? Il sera important de comprendre, à travers le fonctionnement de cette région, la relation entre le pouvoir syrien et ses territoires, dans un pays tenu
INTRODUCTION
Figure 2 : Le relief de la région côtière syrienne.
3
4
L A RÉGION ALAOUITE ET LEPOUVOIR SYRIEN
dʼune main de fer depuis des décennies par une famille-clan«dynastique », celle des Assad. Quel est donc lʼobjectif des autorités syriennes ? Asseoir lʼemprise dʼune communauté (alaouite), celle de la famille régnante, sur«son » territoire régional ? Ou bien sʼagit-il également, et plus largement, dʼune volonté classique du pouvoir central de dominer, en la favorisant, une régionviapar exemple des services à la population, le développement des infrastructures locales, en brefviaune clientélisation des habitants (alaouites et non alaouites) ? Àlʼévidence, une lecture uniquement communautaire ne sufit pas pour comprendre lʼévolution de la région côtière syrienne sur près de quarante ans : il est nécessaire dʼintroduire le prisme du politique. Notre hypothèse est que la dynamique de développement impulsée par le haut dans la région du Jebel Ansariyeh, pour puissante quʼelle ait étéet quʼelle restenʼa pas abouti à son but prévu, attendu : lʼintégration totale de lʼancien«pays des Alaouites » à la Syrie baathiste actuelle, voire lʼémergence de cette région comme une locomotive du développement national. Il sʼagit de réléchir en termes dʼintégration ambiguë, en tout cas incomplèpour étonnant que cela puisse en effet paraître et pourte : différentes raisons, la région dʼorigine des Assad, malgré sa situation géographique unique, des investissements massifs exceptionnels consentis par lʼÉtat baathiste et sa proximité politique avec le pouvoir, demeure aujourdʼhui une périphérie économique du pays.
Lʼaménagement du territoire : un instrument de contrôle politique
Si, dans la foulée de grands projets dʼaménagement du territoire mis en place depuis lʼarrivée au pouvoir de Hafez Al Assad en 1970, la Syrie entière a vécu de profondes mutations territoriales, celles-ci témoignent dʼune vision totalement politique de lʼlespace : ʼaménagement du territoire a été uniquement conçu comme un moyen de contrôle politique de lʼespace, et non comme un outil de développement du pays. Ainsi, théoriquement, lʼagrandissement des ports, la construction dʼune autoroute et les implantations industrielles sont des actions justiiées dans une région littorale ; elles doivent à la fois contribuer à une meilleure intégration de cette région périphérique dans lʼespace national et desservir lʼensemble du territoire. Mais quʼ? Aménagement du territoireen a-t-il été exactement dans un souci dʼégalité, favoritisme communautaire, repli identitaire ou confusion de tout cela en fonction des moyens et de la conjoncture politique ?
INTRODUCTION
5
Le projet du pouvoir pour la région côtière détermine les modalités de lʼintégration de celle-ci à lʼespace syrien et organise ses structures spatiales ; cela nʼexclut pas des mouvements contradictoires dʼorigine locale, intégrateurs ou désintégrateurs, puisque lʼÉtat nʼest évidemment pas le seul dépositaire du pouvoir ni le seul acteur de lʼespace. Il faudra également sʼinterroger sur le concept dʼintégration dans un pays du Tiers Monde : lʼintégration nationale est le leitmotiv de ces pays depuis leur indépendance et, en théorie, lʼaménagement du territoire est conçu dans ce but, avec un primat de lʼéconomie considérée comme le facteur principal de tout processus dʼintégration, les particularismes locaux devant disparaître avec lʼintégration au marché. Or, nous le constaterons pour le cas de la région côtière, loin de se réduire, ces particularismes reviennent en force. Depuis lʼindépendance et jusquʼà lʼUnion avec lʼÉgypte (1945-1958), lʼinstabilité politique de la Syrie nʼa pas permis la mise en place dʼune véritable politique dʼaménagement du territoire. Les gouvernements successifs ont suivi une politique économique libérale, qui limitait naturellement les interventions de lʼÉtat.Àlain des années 1950, un véritable fossé séparait les grandes villes (Damas, Alep, Homs et Hama)celles qui fournissaient lʼessentiel du personnel politique syrien et le reste du pays. De tels écarts économiques et sociaux ont pavé le terrain de profondes dissensions politiques internes, qui ont conduit à «lʼexpérience » de lʼUnion avec lʼÉgypte nassérienne en 1958, puis au coup dʼÉtat militaire baathiste en 1963. Le nouveau personnel politique (baathiste) était essentiellement originaire des périphéries délaissées et des communautés minoritaires (alaouites, druzes, ismaéliens).Àla suite 2 de conlits au sein du parti Baath et de lʼarmée, cʼest uneʻassabiyyaà majorité alaouite menée par le général Hafez Al Assad qui sʼempare du 3 pouvoir en 1970viale«Mouvement de rectiication » . Les nouveaux dirigeants syriens, bien quʼissus des régions périphériques, se sont efforcés de consolider la centralisation politique et économique du pays autour de Damas, notamment en créant un réseau de transports terrestres rayonnant autour de la capitale au détriment de la bicéphalie traditionnelle Damas-Alep. En outre, le maillage administratif du pays est resserré au niveau des mailles de rang inférieur,nahya(canton), ou moyen,mantiqa (département) : cʼest à cette échelle que les structures dʼencadrement de la population sont en effet les plus eficaces(Fig. 3). Le choix des chefs-lieux nʼest pas lié à des critères objectifs en matière dʼaménagement spatial ; à de
2 Sur la déinition du concept deʻassabiyya, voir p. 145. 3 «Rectiication » car, selon Hafez Al Assad, la révolution baathiste prenait une mauvaise direction à lain des années 1960.
Voir Alternate Text
  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents
Alternate Text