Femmes et politique en Suisse , livre ebook

Éditions Alphil, 2021
Case Postale 5
2002 Neuchâtel 2
 
 
www.alphil.ch
 
Alphil Distribution
commande@alphil.ch
 
 
ISBN pdf : 978-2-88930-503-2
ISBN epub : 978-2-88930-504-9
 
 
Les Éditions Alphil bénéficient d’un soutien structurel de l’Office fédéral de la culture pour les années 2021-2024.
 
Nous remercions les organismes donateurs qui ont contribué à permettre la réalisation de ce livre :
L’association Pour les Droits de la Femme Section des Montagnes Neuchâteloises
La Stiftung für Erforschung der Frauenarbeit
 
Illustration de couverture : Détail de l’invitation à la formation « Je suis politicienne et ma voix compte ! » à l’intention des politiciennes bernoises, 2021.
Bureau de l’égalité entre la femme et l’homme du canton de Berne.
Réseau égalité Berne francophone.
Graphisme : Zala Grafik.
 
Graphisme couverture : Nusbaumer-graphistes, www.nusbaumer.ch
 
Responsable d’édition : Rachel Maeder




Livret « Vraiment égales ? » accompagnant un vote symbolique à Fribourg à l’occasion des 50 ans du droit de vote et d’éligibilité des femmes suisses, 2021.
Bureau de l’égalité et de la famille de Fribourg – BEF.
Graphisme : Nathalie Bonferroni.
Logo wapico SA.
 


Préface
EGALITE.CH
Le 7 février 1971 a marqué l’aboutissement d’un long processus de mobilisation et de tentatives réitérées pas moins de 90 fois dans les urnes à différents niveaux en Suisse, pour permettre à la moitié de la citoyenneté de notre pays de sortir de l’exclusion de l’exercice des droits politiques dans laquelle elle avait été tenue jusqu’à ce jour.
La démocratie directe suisse, souvent présentée comme un modèle du genre, était imparfaite puisqu’elle n’était pas universelle. Elle excluait de manière claire la totalité des femmes, sur le simple motif de ne pas être des hommes. Comme l’établissait la Constitution fédérale de 1874 à son article 4 : «  Tous les Suisses sont égaux devant la loi. Il n’y a en Suisse ni sujet, ni privilège de lieu, de naissance, de personne et de famille.  » Mais, car il y a toujours un mais, on pouvait lire plus loin : Article 18 «  Tout Suisse est tenu au service militaire  ». La chose était dite ! Il fallait s’y attendre. Les citoyens suisses étaient tous égaux certes, mais pas les femmes. Elles passaient de l’autorité paternelle à l’autorité maritale, sans avoir le droit de signer un contrat de travail, sans pouvoir ouvrir un compte en banque.
Dans un tel contexte, il était nécessairement inconcevable qu’elles puissent participer à la vie politique. Les femmes suisses étaient destinées à rester de manière permanente des mineures sous tutelle.
Cet accès à la citoyenneté pleine est intervenu tardivement pour notre pays, plusieurs décennies après la plupart des pays dans le monde. En Europe, la majorité des femmes pouvaient voter et être élues à la fin de la Première ou de la Seconde Guerre mondiale. En 1969, lorsque s’est posée la problématique de la ratification par la Suisse de la Convention européenne des droits de l’homme avec une réserve pour le vote des femmes, ce décalage est apparu comme un éclatant et insoutenable anachronisme.
Ce premier pas nécessaire de l’accès à la citoyenneté pleine a ainsi marqué l’aboutissement de plus de 100 ans de revendications. Il a aussi été le début d’une nouvelle étape, celle de la présence des femmes dans l’espace politique et plus largement le socle sur lequel pouvait enfin reposer l’ensemble des droits qui allait progressivement pouvoir avancer vers plus d’égalité au fil des ans.
Consciente de la dimension stratégique de ce 50 e  anniversaire de l’accès des femmes suisses aux droits politiques, EGALITE.CH a voulu retracer dans cet ouvrage l’avancée des femmes dans l’espace politique.
Pour relever ce défi, la Conférence romande des bureaux de l’égalité a confié la direction scientifique de cet ouvrage à deux spécialistes dans ce domaine, issues du monde académique : Sabine Kradolfer et Marta Roca i Escoda, avec l’appui général de Tanja Bauer.
Cet ouvrage abordera à la fois des aspects historiques, les freins et les leviers pour l’accès des femmes au pouvoir politique, mais également le rôle joué par les différents acteurs et actrices institutionnels comme les bureaux de l’égalité.
La Conférence romande des bureaux de l’égalité ( EGALITE.CH ) a pour mission principale de promouvoir l’égalité entre les femmes et les hommes et d’en assurer l’application dans les faits à l’échelle de la Suisse romande. Elle réunit les instances cantonales en charge de l’égalité dans cette région. La création de ces entités dédiées à l’égalité entre les femmes et les hommes dans les administrations publiques cantonales représente un pas décisif qui fait de ce domaine un champ de politique publique à part entière. C’est le jeune Canton du Jura qui fait œuvre de pionnier en étant le premier à se doter d’un Bureau de la Condition féminine dès 1979. Progressivement, au fil des années les autres cantons romands lui emboîteront le pas en créant des structures similaires avec un mandat clair et des ressources pour mener leurs missions. 
Ce pas décisif a contribué à d’importantes avancées comme l’adoption de lois cantonales en faveur de l’égalité, la mise en œuvre de mesures spécifiques, la production de données et d’études permettant d’orienter les politiques publiques. Progressivement, l’ensemble des domaines d’action de la politique publique a été abordé : de l’accès au travail rémunéré dans des conditions d’égalité au droit de vivre une vie libre de violences, les bureaux de l’égalité ont œuvré en collaboration avec l’ensemble des départements de l’administration publique de leurs cantons, mais également en complémentarité avec les organisations de la société civile.
Tout en n’étant pas dotées du même niveau de ressources humaines et financières et en n’ayant pas le même poids institutionnel, il n’en reste pas moins que le travail et l’existence de ces structures en Romandie ont été moins remis en question que dans d’autres régions du pays, ce qui semble révélateur d’une prise de conscience politique de l’importance de l’égalité entre les femmes et les hommes dans notre société.
La philosophie de travail des bureaux de l’égalité s’est, dès leur création, caractérisée par une vision holistique de l’action des collectivités publiques ; c’est pourquoi la coopération intercantonale s’est rapidement mise en place. La Conférence romande des bureaux de l’égalité s’est consolidée au fil des années comme espace de réflexion et de travail en commun. D’importants projets intercantonaux, tels que L’école de l’égalité , le Prix femmes et médias , la campagne À travail égal, salaire égal , les ressources pédagogiques Balayons les clichés , sont autant d’initiatives qui ont permis de donner cohérence et voilure à l’égalité dans notre région. EGALITE.CH est aussi un espace de réflexion et de partage de bonnes pratiques qui s’insère dans une vision dynamique et décloisonnée de notre territoire.
Les mobilisations citoyennes de 2019 autour de la grève des femmes, qui ont rassemblé plus d’un demi-million de personnes dans notre pays, représente un clair soutien au travail des bureaux de l’égalité et de la Conférence romande dont ils sont membres. Elles ont permis de redonner au cœur de la société un souffle nouveau à l’égalité que nous saluons ici. La résurgence de ces enjeux a réaffirmé ce domaine comme une priorité en matière de politique publique clairement exprimée par la population non seulement dans l’espace public, mais également dans les urnes. L’augmentation à plus de 40 % de femmes élues aux chambres fédérales aux élections de 2019 a été l’une des conséquences immédiates de ce mouvement social.
Depuis EGALITE.CH , nous saluons ce contexte qui réaffirme l’importance du travail réalisé par nos bureaux au fil des années. L’augmentation de la présence des femmes dans la vie politique et la centralité de l’égalité dans l’agenda politique ouvrent un nouveau chapitre cinquante ans après que les femmes ont pu enfin franchir le seuil d’une citoyenneté pleine.
Nous vous offrons à travers cet ouvrage un espace de réflexion, car c’est en prenant appui sur notre passé que notre attention pourra penser l’avenir. Parmi ces défis, il convient de signaler l’autonomisation économique des femmes qui passe par un salaire égal pour un travail de valeur égale, l’accès aux positions de pouvoir et à l’ensemble des professions, mais également par une amélioration des rentes vieillesse (dans les 3 piliers). Des avancées sont également nécessaires en matière de coresponsabilité dans la sphère privée et dans l’élimination de toutes les formes de violence à l’égard des femmes dans tous les domaines de la vie privée et publique.
Les défis qui s’annoncent ne pourront être relevés qu’à travers une cohérence du travail mené depuis les bureaux de l’égalité, la société civile et le monde politique.
Nous remercions toutes les personnes qui ont contribué à cet ouvrage.
Tout au long de l’ouvrage, des images illustrent chaque chapitre. Elles sont tirées de différentes actions, principalement politiques, réalisées par EGALITE.CH ou par un des bureaux de l’égalité membre de cette Conférence romande.
Qu’il s’agisse de publications, d’ateliers ou de manifestations, ces illustrations montrent la diversité des actions menées. La carte blanche de la Grève des femmes*/ Grève féministe est pour sa part accompagnée par une des nombreuses images qui témoignent de la forte mobilisation qui a caractérisé le 14 juin 2019.


Invitation aux formations « Femmes et politique » à l’intention des politiciennes bernoises, 2019.
Réseau égalité Berne francophone.
Graphisme : Zala Grafik.
 


La participation des femmes à la vie politique suisse
Sabine Kradolfer