Voyages du développement Émigration, commerce, exil , livre ebook

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Publié par

Date de parution

01 janvier 2007

Nombre de lectures

0

EAN13

9782845869400

Langue

Français

Poids de l'ouvrage

2 Mo

sous la direction de Fariba Adelkhah et Jean-François Bayart
Voyages du développement Émigration, commerce, exil
Recherches internationales
VOYAGES DU DÉVELOPPEMENT
Fariba Adelkhahest directrice de recherche à la Fondation nationale des sciences politiques (CERI-Sciences Po).
Jean-François Bayartdirecteur de recherche au CNRS (CERI- est Sciences Po) et président du Fonds d’analyse des sociétés politiques (FASOPO).
Ont également collaboré à cet ouvrage : Claire Autant Dorier (CRESAL-CNRS et Université de Saint-Étienne) Alain Battegay (GRS-CNRS et Université de Lyon-2) Mette Louise Berg (Université d’Oxford) Jean-François Havard (Université de Mulhouse) Véronique Manry (Laboratoire méditerranéen de sociologie, Université de Provence et MMSH d’Aix-en-Provence) Roland Marchal (CERI-CNRS et Sciences Po) Michel Peraldi (CNRS et Centre Jacques Berque, Rabat) Stéphane de Tapia (Cultures et sociétés en Europe, Strasbourg, et MIGRINTER-CNRS, Poitiers)
©ÉditionsKARTHALA,2007 ISBN : 978-2-84586-940-0
Sous la direction de Fariba Adelkhah et Jean-François Bayart
Voyages du veloppement
Émigration, commerce, exil
Éditions KARTHALA 22-24, boulevard Arago 75013 PARIS
« Recherches internationales » est une collection du CERI, dirigée par Jean-François Bayart. Elle accueille des essais traitant des mutations du système inter-nationaletdes sociétés politiques, àlheuredela globalisation. Elle metl’accent surladonnéefondamentalede notre temps :linterface entre les relations internationales ou transnationales et lesproces-sus internes des sociétés politiques, que peut symboliser le fameux ruban de Möbius. Elle propose des analyses inédites et rigoureuses, intellectuellement exigeantes, écritesdans unelangue claire,indé-pmodes et desendantes des pouvoirs. Le CERI (Centre d’études et de recherches internationales) est une unité mixte de la Fondation nationale des sciences poltiques et duCNRS.
Publié avecle concoursdu Fondsd’analyse des sociétés politiques etle Départementdela recherche de l’Agence française de développement
Introduction
Pour une anthropologie politique du voyage
FaribaADELKHAH Jean-François BAYART
Le fait migratoire est un phénomène social majeur de la globalisation,que l’on considère celle-ci à l’aune des deux 1 derniers siècles, comme nous l’avonsproposé ailleurs,oudans son moment néo-libéral leplus immédiatement contemporain (1980-2006). Il l’estpar les mouvements depopulationqu’il implique, à l’échelle internationale, même si ceux-ci doivent être relativisés : de 1990 à 2000, le stock des migrants interna-tionaux estpassé de 154 à 175 millions, soit une hausse de 14 %qu’il faut mettre en regard avec l’augmentation de 15% de la population mondiale dans la même période. Le fait migra-toire est également devenu crucial sur leplan des représenta-tions et des discours, dans la mesure où il occupe une place centrale dans les débats publics des pays concernés, et singuliè-rement dans les débats électoraux, ou encore dans certaines des crises internationalesles plus aiguës.
1. J.-F. Bayart,Le gouvernement du monde. Une critique politique de la globalisation, Paris, Fayard, 2004, chapitre 1.
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VOYAGES DU DÉVELOPPEMENT
Sous ce double aspect il interpelle directement les politiques publiques del’aide au développement. D’abord parce qu’ilmet en jeu ses protagonistes, bailleurs de fonds du « Nord » ou récipien-daires du « Sud ». Ensuite parce queles remises (remittances)des migrants internationaux sont passées de 102 milliards de USD en 1995à environ 232 milliards en 2005– lepourcentage de celles-ci allant aux pays en voie de développement montant de 57 % à 72 % – etqu’elles sont désormaisplus élevéesque l’aide (officialdevelopment assistance)ouque les investisse-mentsdirects étrangersdont cesderniers sontdestinataires. Une telle évolution du fait migratoire s’est bien entendu accompagnée d’une croissance exponentielle des recherches et des études qui lui ont été consacrées. Sans dresser un état des 2 lieux decelles-ci, l’onpeut en dégagerquelques tendances saillantes. En une trentaine d’années lesproblématiques de l’exploitation de la force de travail à l’échelle internationalenotamment en termesde « réservesde main-d’œuvre » – et d’intégration des immigrés dans les sociétés dites d’accueil ont progressivement cédé la place à une anthropologie ou une socio-logie multisituée qui entend s’interroger sur les pratiques sociales des migrants eux-mêmes, sur les relations transnationales qu’ils nouent entreleur pays d’origine etleurlieu de travailou de rési-dence, éventuellement dans un contexte diasporique, surleurs formes d’organisation et de création culturelle ou économique, en bref surleurs stratégies d’acteurs. Cette reconnaissance de l’« agencéité » des migrants – pour reprendrela traduction du concept d’agencyque propose Jean-Pierre Olivier de Sardans’est départie dela vision passablement misérabiliste ou victi-3 maire dans laquelle s’étaient enfermés nombre de travaux .Au
2. L. Kucynski, E. Razy, S. Bava, O. Journet, J. Semin se sont notamment livrés à cet exercice dans un atelier, « A partir dela migration africaine en France : bilan et perspective anthropologiques »,lors dela Première rencontre du Réseau des études africaines en France, au CNRS, le 29 novembre 2006. 3. Les travaux d’Adrian Adams ont constitué un tournant pour ce qui est des recherches africanistes que dominaient jusqu’alors les interprétations de l’anthropologie marxiste française:Le long voyage des gens du Fleuve, Paris, François Maspero, 1977 etLa terre et les gens du fleuve. Jalons, balises, Paris, L’Harmattan, 1985. Voir aussi C. Quiminal,Gens d’ici,gens d’ailleurs, Paris, Christian Bourgois, 1991.
INTRODUCTION
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risque, parfois, dejeterle bébé avecl’eau du bain, d’occulterles rapports de pouvoir ou d’exploitation constitutifs du fait migra-toire et de fairela part trop belle aux conduites de consomma-tion de masse qui subvertiraientla flexibilité croissante des rela-4 tions salariales et réenchanteraient la globalisation. Ce faisant les recherches traitant des migrations internatio-nales ont mieux compris la complexité et l’hétérogénéité de ces dernières,que le débatpublic etpolémique neparvientpas à restituer. Elles sont aussiplus attentives à cequi fait la spécifi-cité du fait migratoire et qui, paradoxalement, a été si longtemps négligé au profit de l’étude de la condition statique de l’« immigré » et de la question de son « intégration » : à savoir le mouvement des populations qui au demeurant ne se réduit pasà la seule migration de travailet revêt d’autres formes de mobilité temporaire, pendulaire ou ponctuelle. L’objet privilégié de l’anthropologie ou dela sociologie est ainsi devenule « circuit» 5 ou la « circulation migratoire » et le « territoire circulatoire» . Les recherches que notre programme a rassemblées et les enquêtes de terrain inédites qu’il a engagées, d’une part, dans l’espace frontalier afghano-irano-pakistanais, pris dans sa rela-tion avecle golfe Persique etl’économie mondiale, d’autre part, auprès des réseaux marchands africains en Asie du Sud-Est, s’inscrivent dans cette démarche. Elles ont comme particularité de mettre l’accent sur les pratiques du voyage lui-même, saisi dans sa polysémie et souvent distinct de la migration de travail stricto sensu.La dimension commerciale et/ou religieuse leur apparaît comme une expression notable de cette hétérogénéité sociale du fait migratoire. Leur objet de prédilection est l’expérience sociale du voyage lui-même,plutôtque celle despopulations fixes, fût-ce au titre de l’« immigration ». Nos recherches se distinguent ainsi à la fois de l’approche classique de l’immigration dans son double
4. Une dérive que n’évite pas Arjun Appadurai dansModernityat Large. Cultural Dimensions ofGlobalization, Minneapolis, Universityof Minnesota Press, 1996. 5. A. Tarrius,La mondialisation par le bas. Les nouveaux nomades de l’économie souterraine,Paris, Balland, 2002 ; R. Rouse, « Mexican migration and the socialspace ofpostmodernism »,Diaspora1 (1),printemps 1991,pp. 8-23.
8VOYAGES DU DÉVELOPPEMENT rapport aux sociétés dites de « départ » et d’« accueil » et de la thématique dela « diaspora » posée comme paysage socialdela globalisation ou du multiculturalisme contemporains. L’expé-rience spécifique du voyage entraîne des effets sociaux propres, par exemple en termes de relations entre les genres (gender), entre les classes sociales, entre les voyageurs et les autochtones. Elle ne se confondpas avec l’expérience migratoire car elle recouvre d’autres formes de déplacement, mais elle nepeutplus s’en dissocier complètement, ne serait-cequepour des raisons administratives, du fait de lagénéralisation despolitiques restrictives de délivrance des visas à l’aune de laquestion migratoire (ou terroriste). Réciproquement le fait migratoire renvoie automatiquement à la problématique du voyage : outre que les migrants eux-mêmes se déplacent pour se rendre sur le lieu deleur immigration ou pour retourner à intervalles régu-liers dansleur société d’origine, ils induisent des pratiques complémentaires de voyage en faisant venir auprès d’eux des membres deleur famille ou des proches pour des durées plus ou moinslongues, et ils se pensent, pour une partie d’entre eux, à travers les prochaines étapes de leur pérégrination, parfois longue deplusieurs années, dans le cadre de ces « circuits » ou de ces « circulations »qui retiennent désormais la curiosité des chercheurs. Au demeurant ces voyages sont en partie virtuels, sous forme de lettres, depaquets, de cassettes audio ou vidéo, dephotos, d’e-mails, ou même de rêveries et d’attentes. Pour autant l’anthropologie du voyage ne peut pas se borner à l’étude de la mobilité. Elle doit également s’interroger sur l’économiepolitique, morale et historique de ceque Jean Schmitz nomme l’« arrière-pays » des migrations – en l’occur-rence, pour celles qu’il étudie, la Sénégambie – qui continue d’être sous-jacente aux logiques sociales des mouvements de population. Sans prétendre résumer de manière exhaustive ni pouvoir citer systématiquementles analyses qui suivent,l’on peut en dégager quelqueslignes de force : 1) Les pratiques du voyage sont dotées d’une autonomie sociale qui échappent aux politiques publiques mises en œuvre pour les réguler, les contenir ou, plus rarement, les encourager.
INTRODUCTION
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2) Le voyage est souvent vécu comme un style de vie pica-resque ou épique, mêmelorsqu’ilrépond à des contraintes structurelles ou conjoncturelles, d’ordre économique ou poli-tique, et ils’apparente à une expérience morale de subjectiva-tion qui en est l’une des motivations principales : les migrants sont moins des victimesque des héros, et dans leur dispersion ils constituent unpeuplequi sepense élu. 3) L’ampleur despratiques migratoires ne marquepas la « fin des territoires »,comme l’a affirmé une certaine théorie des rela-6 tions internationales ,maisleur recomposition sur un mode circu-7 latoire :les villes deviennent « réticulaires», sont en synergie et sont vécues parles migrants comme des tremplins permettant 8 d’autres déplacements, plus au Nord ou plus à l’Ouest ; elles abritent en leur sein des lieux, desquartiers, des «poches de 9 rassemblement» des migrants, autant de « régions morales » – pour reprendre un conceptqu’utilisentinfraClaire Autant-Dorier et Alain Battegay– où sejoue leur relation avec leur terroir d’origine, leur famille, leur appartenance religieuse, ethnique et nationale, leur société de résidence ou de négoce et leur projet personnel, dansles interstices del’économie mondiale. 4) Les migrations contribuent aussi à la configuration des processus d’intégration régionale Nord-Sud ou Sud-Sud en soumettant ceux-ci à des contraintes spécifiques, enles inspirant parfois, ou enles subvertissant ; elles sontl’un des principaux 10 v, par emboîtementecteurs de « glocalisation » dynamiquedes plansglobaux, nationaux et locaux ; elles ne se laissentpas
6. B. Badie,La fin des territoires. Essai sur le désordre international et sur l’utilité sociale du respect,Paris, Fayard, 1995. 7. B. Hazard, « Entrele pays etl’outre-pays : ‘Little Italy’ danslebisaku (Burkina Faso) »,Journal des africanistes74 (1-2), 2004,à propos de guédo, au Burkina Faso. 8. Voirpar exemplele numéro spécialdePolitique africaine100,décembre 2005-janvier 2006: « Cosmopolis : dela ville, del’Afrique et du monde ». 9. R. S. Parrenas,Servants of Globalization. Women, Migration and Domestic Work,Stanford, Stanford University Press, 2001, pp. 206 et suiv. 10. Cf par exemple B. Meyer, P. Geschiere (eds),Globalization and Identity. Dialectics ofFlow and Closure,Oxford, Blackwell, 1999. Le concept de « glocalisation » vient du vocabulairejaponais du marketing (dochakuka, i.e. « localisationglobale ») : R. Robertson,Globalization. Social Theoryand Global Culture, Londres, Sage, 1992,pp. 173-174.
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