L’extrême pauvreté au Niger Mendier ou mourir ? , livre ebook

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Date de parution

01 janvier 2005

Nombre de lectures

0

EAN13

9782845866291

Langue

Français

Poids de l'ouvrage

2 Mo

Patrick Gilliard
L’extrême pauvreté auNiger
Mendier ou mourir ?
KARTHALA
L¿EXTRÊME PAUVRETÉ AU NIGER
KARTHALAsur Internet : http://www.karthala.com Paiement sécurisé
Couverture :
Scène de mendicité : enfant conducteur d¿aveugle à Niamey, mars 2003. Crédit photo : P. Gilliard.
Éditions KARTHALA, 2005 ISBN : 2-84586-629-1
Patrick Gilliard
L¿extrême pauvreté au Niger
Mendier ou mourir ?
Éditions KARTHALA 22-24, boulevard Arago 75013 Paris
PREFACE
Il y a des livres, et singulièrement des thèses, qu’on lit par devoir, devoir de responsable, ou devoir disciplinaire. Qu’on lit peut-être aussi par intérêt « humanitaire » ou humaniste, lorsque soudain on se sent concerné, partie prenante, d’une problématique commune, celle de notre devenir d’êtres humains et solidaires. Position de qui ne serait qu’honnête homme, moins savant peut-être, mais pour qui rien de ce qui est humain ne devrait rester étranger. Il est d’autres livres qu’on lit par simple curiosité, voire seulement pour le plaisir, mais à partir desquels, tout de même, on s’interroge. Des livres enfin qui vous en font lire d’autres, à travers le monde auquel ils vous ouvrent, à travers ce qu’ils suggèrent, les comparaisons qu’ils suscitent, les parallèles qu’ils révèlent. Dans son contenu comme dans son esprit, le travail que présente Patrick Gilliard,« L’extrême pauvreté au Niger. Mendier ou mourir ? » réunit pour le soussigné toutes ces bonnes raisons de s’y plonger. Le directeur de thèse a trouvé dans cette œuvre, mais aussi dans la manière de l’entreprendre, et de la vivre, et déjà dans le choix du thème, et son titre particulièrement interpellateur, quelque chose d’unique qui en fait tout le prix, bien au-delà de ses qualités ou de ses inévitables défauts. Le responsable disciplinaire était fier de la réussite d’ensemble d’un récit bien construit et conduit, faisant alterner les référents conceptuels et disciplinaires (histoire, économie, anthropologie, sociologie), les articulant dans un souci constant d’intelligibilité. Ainsi aussi des échelles spatiales (l’Afrique, le Niger, Niamey, ses quartiers, l’extraordinaire variété des types de mendiants), des échelles temporelles, le passé (les héritages), le présent d’une conjoncture socio-spatiale extrême (celle de la pauvreté urbaine dans ses relations à la mendicité, que celles-ci soient vécues collectivement, en groupe ou individuellement), l’avenir enfin, si incertain dans le contexte d’une politique de l’échec et du paradoxe, guidée de l’extérieur. L’œuvre prend forme à travers la critique des représentations dominantes, que celles-ci viennent de droite ou de gauche, de l’économie, de l’anthropologie, voire de l’histoire, du phénomène de la pauvreté et des projets de lutte contre la pauvreté, des mesures macro-économiques ou des mesures d’incitation à l’augmentation de la productivité, les unes et les autres postulant que la pauvreté se résout par le rétablissement de la croissance économique et des politiques
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L'EXTRÊME PAUVRETÉ AUNIGER
d’ajustement structurel. De ce texte émerge une vision grinçante, des images vives, une impressionnante autorité. Des partis pris sans doute, singulièrement quand l’auteur évoque l’apport des autres disciplines ayant eu l’ambition de contribuer à diagnostiquer et éradiquer la pauvreté, partis pris qui ne réuniront pas forcément le consensus de toutes celles qu’il juge concernées, mais qui toucheront définitivement tous ceux, qui au-delà de ces dernières découvriront que l’auteur a bien atteint ses objectifs en n’hésitant pas à mobiliser ces dernières pour autant qu’elles ne renforcent pas le réductionnisme dont sa propre discipline s’est volontiers montrée tout aussi coupable. L’auteur réclamait parallèlement« une attention prononcée sur l’aspect géographique liés aux changements spatiaux des populations. » Reconnaissant la pauvreté comme étant d’abord un processus, avant d’être un état, il en arrive ainsi à sa question à double entrée : « Comment telle communauté ou tel groupe mobilise son territoire pour faire face à une situation de déficit ? Comment tel groupe ou tel espace est-il économiquement déterminé par les espaces qui l’environnent ? » Plus spécifiquement encore :« la pauvreté est-elle traduite par un état qui correspondrait à un seuil de revenu à un moment donné, ou par un processus, c’est-à-dire un certain nombre d’événements en amont qui sont responsables de cette situation de dénuement et en aval un certain nombre de réactions, d’ “actions sur l’espace” comme l’exode ou le passage à la mendicité ? »Et d’annoncer la visée qu’il veut expliciter et légitimer par son travail :« c’est bien à l’intérieur même de ces espaces que les stratégies de lutte contre la pauvreté devraient être définie. » Le lecteur curieux découvrira une construction aussi claire que séduisante, dont le contenu bouscule vite tant le cœur que l’esprit, qu’il s’agisse de la présentation globale de la pauvreté du continent, du pays ou de la ville et, à cette dernière échelle, de l’extraordinaire variété des formes de mendicité, fussent-elles simplement celles des enfants. La découverte aussi, en suivant l’auteur dans les rencontres qu’il a su organiser, des manipulations entrecroisées de ces personnages, et, singulièrement, celle de l’étonnante organisation et hiérarchisation des groupes et des modes de contrôle du territoire, ou plutôt des territoires, le tout présenté dans des portraits qui pour être pathétiques, sont décrits sans sensiblerie. Même s’il s’agit pour l’auteur d’accompagner parfois le lecteur, loin des“bons mendiants”dominants, les handicapés, dans une“descente aux enfers”, en rencontrant avec lui les“très précaires”, femmes veuves ou divorcées, en charge de famille, retraités, chômeurs et exodants récents sans réseaux de relations dans la ville ou le quartier. Une manière comme une autre, pour le géographe, de penser ou repenser la dignité de l'habitant, un habitant dont il devient possible de
PRÉFACE7 comprendre l'habitation et donc le rôle possible et souhaitable, comme personne et comme membre de la cité. À l’heure où chacun se pique de“déconstruire”, la construction de l’auteur est séduisante, à multiples facettes, agencée de manière à nous faire directement participer à d’étonnantes rencontres. Rencontres aux péripéties parfaitement maîtrisées et rendues, avec les personnes, les personnages, les groupes dont les récits de vie comme les débats non seulement viennent colorer ou animer le texte, mais sont simultanément capitalisés et signifiés, et d’une certaine manière qualitativement « modélisés » dans ce roman (noir) d’une ville aux prise avec un drame humain qui devrait tous nous concerner, non seulement au titre de la solidarité humaniste, mais encore citoyens responsables d’une politique largement issue d’organismes de nos pays riches et véhiculées, implémentées, par des recettes, celles du FMI et de la Banque mondiale, mais plus généralement encore celles de la dissimulation et de la cacophonie largement intéressée. Comme le soussigné, les lecteurs de« L’extrême pauvreté au Niger Mendier ou mourir?»découvriront certes l’œuvre d’un humaniste officiellement géographe. Mais d’autres l’auraient plutôt deviné sociologue, voire ethnométhodologue. Qu’importe : ce à quoi ils seront inévitablement sensibles, c’est ce don de la compréhension qui émane de l’ensemble du texte, celle d’une sorte derenifleur du socialqui considère que l’implication personnelle du chercheur n’est pas un obstacle à une analyse pertinente, bien au contraire. On est bien du courant, qui perdure tout de même depuis les origines de la sociologie, et qui a pour ambition - disons le ainsi pour faire vite, sans doute trop vite - d’étudier les faits sociaux comme des objets. Ces dernières années, le quotidien, le monde vécu, l’expérience humaine de la cité ont le vent en poupe. Aussi bien en géographie qu’en sociologie. Et heureusement. En dépit des plaidoyers récurrents depuis les années 60 en faveur de la scientificité de leur discipline et du recours à la formalisation et à la mesure – nous en fûmes, et l’auteur s’est d’ailleurs volontiers plié à cet apprentissage – de plus en plus nombreux sont les chercheurs qui s’attachent non seulement à faire vivre à leurs lecteurs la complexité des problèmes mais encore à leur propos, dans une approche phénoménologique, à les faire toucher du doigt, ou du regard, les formes sensibles de la vie sociale, la rencontre, la compréhension. Ils démontrent ainsi leur capacité de se mettre à la place de leurs interlocuteurs, plutôt que d’utiliser l’abstraction comme outil d’intelligibilité et la mesure comme test expérimental. S’annonçant comme géographie urbaine, cette géographie de la solitude et de la désespérance, cette thèse est peut-être aussi un roman d’amour. Et singulièrement l’amour du chercheur pour son sujet, et ceux surtout qui l’habitent, là où ils vivent, dans leur horizon quotidien,
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que celui-ci soit environnemental ou social. Et ce pour y avoir vécu, travaillé, installé sa famille, s’y étant identifié, pour un temps assez long, à son destin, sans oublier pour autant que pour pouvoir choisir parmi l’infinie multiplicité des faits à observer, pour pouvoir les accumuler et leur donner un surplus de sens, il convenait tout de même de disposer des insoupçonnables construits et concepts permettant de les discerner et de les relier les uns aux autres de manière un tant soit peu significative. C’est bien ce que notre chercheur arrive à faire, sans s’y réduire pour autant. Mais si la complexité ne permet pas de prédire des conséquences inéluctables, elle ne défie pas l'analyse : elle ne fait que la rendre plus exigeante. Patrick Gilliard s’y est plié, relevant en quelque sorte, même s’il ne s’y réfère pas explicitement, le pari d’un Pierre Sansot (1986) voulant que l’on puisse« découvrir grâce à la description des nappes de sens, exhiber toutes sortes de signes sans chercher à les formaliser dans une théorie englobante et sans verser dans l’impressionnisme.» J’ai dit qu’un livre pouvait nous marquer par les questions qu’il suggère, mais aussi par les autres livres qu’il nous invite à lire, par le monde auquel il nous ouvre, par les comparaisons qu’il suscite, les parallèles qu’il révèle. Et c’est bien le cas ici, au-delà de son apport en termes de contenu et de la thématique qui le traverse, la géographie urbaine, la ville comme espace vécu, l’Afrique, le Niger, la pauvreté, la mendicité, et de ce qu’il fait comprendre sur des modes d'être et d'habiter – de vivre – sur ce qui peut fonder, dans des situations pourtant extrêmes. Le travail de Patrick Gilliard montre, et illustre parfaitement cette possibilité également évoquée par Pierre Sansot,« de faire varier un phénomène, de le rendre plus donnant (pas nécessairement plus transparent), en le démultipliant, en le feuilletant, en préférant tel ou tel écart temporel. Une description s’achève souvent en une poétique de la vie sociale parce qu’un phénomène collectif de quelque importance voudrait être davantage et qu’il ne se réduit pas à une signification univoque. Il retentit à travers des paroles anonymes ou singulières qui le magnifient, à travers des images qui l’illimitent et dont il est la source.» Pour entrer dans le monde vécu, et singulièrement celui de la pauvreté et de la mendicité, dans ses dénotations comme dans ses connotations, il fallait des qualités exceptionnelles. L’auteur les avait et y était préparé tout à la fois par sa formation et sa personnalité, son exceptionnelle sensibilité aux êtres et aux choses. Du constat aux suggestions, en passant par un diagnostic impitoyable, tant en regard des apories théoriques que de la pauvreté des programmes de lutte contre la pauvreté, l’incapacité gouvernementaliste de concevoir une politique d’intervention ciblée face à la mendicité, et singulièrement
PRÉFACE9 dans leur milieu d’origine, en d’autres termes en amont du processus, en lieu et place des logiques préconisées par la vision externe des gourous de la lutte contre la pauvreté et à la machinerie orchestrée de longue date dans les rapports établis entre l’Afrique et les différents partenaires économiques, cette analyse se termine par un plaidoyer pour une aide enfin véritable. À vous d’en découvrir les tenants et aboutissants possibles à travers la lecture fascinante d’une œuvre que l’on refermera sans doute en faisant un bon moment de silence en soi.
Jean-Bernard
Racine, professeur de Géographie,
et directeur de l’Institut université de Lausanne.
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