L’Affaire de la philosophie africaine Au-delà des querelles , livre ebook

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Publié par

Date de parution

01 janvier 2011

EAN13

9782811105228

Langue

Français

Poids de l'ouvrage

1 Mo

Fabien Eboussi Boulaga
L’Affaire de la philosophie africaine
Au-delà des querelles
 KARTHALA
LXAFFAIRE DE LA PHILOSOPHIE AFRICAINE
AU-DELÀDES QUERELLES
KARTHALAsur Internet : http://www.karthala.com Paiement sécurisé & Editions Terroirs : terroirs2004@yahoo.fr – www.revue-terroirs.net
é t ditions erroirs& KARTHALA, août 2011 Pour les Editions Terroirs, ISBN : 978-9956-464-36-8 Pour KARTHALA, ISBN : 978-2-8111-0522-8
Fabien Eboussi Boulaga
LXAffaire de la philosophie africaine
Au-delà des querelles
ét ditionserroirset KARTHALA
DU MÊME AUTEUR
1977,La crise du Muntu. Authenticité africaine et philosophie, Paris, Présence africaine, 235 p. 1978 (dir.),Dieu en Afrique, Douala, VPAO, 108 p. 1981,Christianisme sans fétiche. Révélation et domination, Paris, Présence africaine, 230 p. 1984,Christianism Without Fetishes, New York, Orbis Book, 238 p. 1991,À contretemps. L’enjeu de Dieu en Afrique, Paris, Karthala, 267 p. 1993,Les conférences nationales en Afrique noire. Une affaireàsuivre, Paris, Karthala, 230 p. 1997,La démocratie de transit au Cameroun, Paris, L’Harmattan, 456 p. 1999,Lignes de résistance, Yaoundé, Clé, 296 p. 2003,Lutte contre la corruption. Impossible est-il camerounais ?, avec Valentin S. ZINGA, Yaoundé, Presses universitaires d’Afrique, 71 p. 2006,Le génocide rwandais. Les interrogations des intellectuels africains, Fabien EBOUSSIBOULAGAet Alain DIDIEROLINGA(dir.), Yaoundé, Clé, 205 p.
Préface
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ous la contrainte d'une reliure, l'arbitraire d'un titre, la fiction d'un nom S propre, le lecteur de bonne volonté, - c'est-à-dire celui qui y met du sien et engage sa propre faculté d'initiative et son activité créatrice, peut dé-couvrir des continuités et des discontinuités, des correspondances, des trans-formations de style, des déplacements de problématique, non sans relever des incohérences, des contradictions, et noter des obscurités, des redites, voire des radotages dans les textes ainsi rassemblés. Il ne risque guère, dans les inter-prétations qu'il en donne, dans les évaluations et les usages qu'il en fait, de subir la censure ou le démenti d'un magistère préposé à la garde de leur « sens unique et véritable ».
La relation qu'un « auteur » entretient avec ses productions ne l'oblige pas à en être le greffier tatillon ou le commentateur scrupuleux et révérencieux, celui-là qui s'acharne à en faire l'apologie, en les exonérant de toute erreur, en les dotant d'une inflexible unité de propos, d'une clairvoyance et d'un juge-ment infaillibles dont il serait la source et l'origine ultimes, l'immuable et transcendant substrat. Il n'empêche que le geste banal d'assembler, de recueil-lir et de relier ces essais, surtout de leur donner un nom propre, équivaut à leur prêter, implicitement et par hypothèse, une destination commune et une iden-tité, que l'on convoque à témoigner de l'enjeu qui s'y dispute, qui s'y voile et s'y manifeste en même temps, bref, de ce qui constitue l'essentiel auquel tous s'affairent d'une façon ou d'une autre.
Fruits du hasard et de la nécessité, ces écrits d'occasion se prêteraient-ils ce-pendant à une mise en ordre après coup ? Se pourrait-il qu'ils s'accordent et s'ajustent harmonieusement à partir d'un foyer qui les pré-contient et qui dé-termine la loi de leur essence et celle de leur développement ? Ou bien serait-ce par le téléguidage d'un attracteur final qui leur imprime une évolution sensée, en leur ouvrant une perspective et un horizon avec son point de fuite vers l'infini ? A moins peut-être que l'unité présomptive ou postulée n'émerge, contre toute prévision, comme une improbable création, le déploiement de
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L’affaire de la philosophie africaine...
cette «intuition simple, encore que inépuisable», dont Bergson crédite « le phi-losophe digne de ce nom qui ne dit jamais qu'une seule chose » (H. Bergson, La pensée et le mouvant, Paris, 1934, p.141).
Au-delà du mode de procéder par analogie où la comparaison des contenus tient lieu de raison, il vaut mieux penser ce que nous faisons et s'attendre à quelque chose de plus fugitif. Il ne transparaîtrait qu'en filigrane des préoccu-pations récurrentes, méthodiques, polémiques ou thématiques, de façon indi-recte, comme une manière et un style de pensée, ou comme le tracé évanescent d'une trajectoire. Plus exactement encore, la réponse la moins épistémologi-quement hasardeuse est celle qui sera attentive aux actes, aux opérations et aux paradoxes qu'implique le projet de donner à soi-même et à d'autres une lec-ture de « ses » écrits, de procéder à leur écriture seconde.
Qu'est-ce à-dire ? Ce genre singulier impose de prendre acte de la distance qu'il y a entre soi et les productions qui sont affectées de son nom propre et qu'on s'attribue. Il importe de les voir comme les autres les voient, en exhibant les marques, les empreintes, les traces, les codes et les procédures, bref les coor-données qui les instituent en un «objet » situé, susceptible d'exhiber une réfé-rence commune. Par là, s'opère le détachement de ce qui est propre, l'acte de production, et qui rend visibles les conditions de possibilité du sens d'une œuvre, son objectivité. Dès lors que je me prends pour matière d'étude, « je est un autre ». Mais cette opération est un dédoublement. L'autre est encore moi-même d'une certaine façon. Je rétablis la continuité de ces œuvres avec mon présent. La coupure qui les posait dans la différence d'un passé ou l'opacité d'une altérité, s'estompe dans l'avènement d'un présent contingent qui s'ouvre sur l'indétermi-nation du possible, à la fois futurible et éventuel. La subjectivité revient en force, par la médiation de la lecture qui s'insère entre les écrits d'hier et leur écriture se-conde qui est une activité présente. Pourtant, sans ces événements et ces produits antérieurs, sans cette organisation sémantique qui les maintient dans leur diffé-rence comme advenus dans le passé, il n'y aurait pas d'activité actuelle ni de ré-interprétation. La primauté est cependant du côté du présent, de l'individualité vivante d'aujourd'hui, qui se réinvente un passé et des œuvres pour en faire le lan-gage de son expérience en son actualité éphémère et sursitaire.
« Par un rapport de l'écrit à ce qu'il permet de lire, et de cette lecture à ce qu'elle permet d'écrire, une pratique développe ses possibilités de pro-duction. Elle vise à faire autre chose avec le texte qui le rend possi-ble...Elle change également la position du lecteur. Au lieu que les connaissances ou des idées s'empilent dans un lieu d'où le savoir serait
L’affaire de la philosophie africaine...
censé toujours parler, l'énonciation même se laisse altérer de manière à changer, avec le savoir, le lieu où il se tient »(Michel de Certeau,L'ab-sent de l'histoire, Mame, Paris, 1973, p.172).
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Pour récapituler, l'exigence d'unité exclut la discontinuité rhapsodique d'une subjectivité délirante, d'une création continue aussi bien que la permanence d'un « fond » ou d'un « sol » immuable. Elle n'admet pas non plus la préfor-mation ni une nécessaire croissance par complexification régulière. Elle n'est pas incompatible avec des ruptures et des déplacements. La dialectique du même et de l'autre règne ici, avec ses va-et-vient, ses renversements, ses pa-radoxes. L'auto-implication fait de l'énonciateur l'enjeu de sa performance. L'activité du discours et de l'écriture se transforme en un travail sur soi qui al-tère celui qui s'y livre. Elle le déporte ailleurs, loin de la stabilité et de l'au-torité d'un canon, de la majesté d'une statue de commandeur qu'il se sculpterait. Qui s'adonne à un tel exercice peut éprouver le plaisir d'une liberté qui se construit un labyrinthe, dans lequel il est loisible d'être le même et l'autre en même temps que de n'être ni l'un ni l'autre, où, comme disait M. Foucault, « m'aventurer, déplacer mon propos, lui ouvrir des souterrains, l'enfoncer loin de lui-même, lui trouver des surplombs qui résument et déforment son par-cours, où me perdre et apparaître finalement à des yeux que je n'aurai plus à rencontrer »(L'archéologie du savoir, Gallimard, Paris, 1969, p.28).
Si le retour sur quelque résultat ou « acquis » ne se justifie que pour autant qu'il donne matière à penser au présent, qu'il autorise à recommencer la pensée comme activité, mode de la vie sous forme humaine, qui est spontanéité, faculté d'initiative ou de commencement, il est vain de vouloir en faire un acte d'ins-cription dans une généalogie ethnique ou nationale, culturelle ou social-histo-rique, d'adhésion et d'appartenance à une école, secte ou fratrie. Il est encore moins pertinent d'en faire une opération de constitution d'un savoir cumulatif, d'un « capital symbolique », lors même qu'il s'agirait d'un regard rétrospectif sur une longue production. Le bilan d'une œuvre va avec le dénuement de son « créateur » qui ne s'est pas affranchi de la nécessité mais, par celle-ci, s'est fait liberté vis-à-vis de ses créatures, dont il peut et doit se passera posteriori. Ce qui en reste ou en émane est de l'ordre des conséquences et du destin. Socrate, avant de s'en aller boire la ciguë, peut donc enfin se tourner vers les Muses et leur rendre l'hommage qui leur est dû. Qui, en effet, mieux qu'un poète exprime le fait que, au bout du compte ou d'un parcours de vie, il n'importe en rien « d'engranger » mais plutôt « d'éventer et d'honorer notre aire » ?
« Grand âge, vois nos prises : vaines sont-elles, et nos mains libres. La course est faite et n'est point faite ; la chose est dite et n'est point dite.
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