Jamais je n’ai cessé d’apprendre l’Afrique , livre ebook

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Date de parution

01 janvier 2006

EAN13

9782845867352

Langue

Français

Poids de l'ouvrage

3 Mo

Jean Audibert
Jamais je n’ai cessé d’apprendre l’Afrique
KARTHALA
JAMAIS JE N’AI CESSÉ D’APPRENDRE L’AFRIQUE
KARTHALAsur Internet : http://www.karthala.com Paiement sécurisé
© Éditions KARTHALA, 2006 ISBN : 2-84586-735-2
Jean Audibert
Jamais je n’ai cessé d’apprendre l’Afrique
Éditions Karthala 22-24, boulevard Arago 75013 Paris
AVANT-PROPOS
Pourquoi Jean Audibert et l’Afrique
Jean Audibert qui a eu une carrière exceptionnelle tant en Afrique, au plus près des populations, qu’en France dans les cercles dirigeants, d’abord au ministère de la Coopération puis à l’Élysée, a développé, au cours de toutes ces années, une pensée autonome, très peu connue sur l’Afrique et ses problèmes. A toutes les étapes de sa vie, il s’est trouvé dans des périodes histo-riques charnières dans les relations entre la France et l’Afrique. D’abord, en Haute Volta, dans les années 50. C’est en tant que chef de la mission de coopération qu’il a participé dans les années 60, toujours à Ouagadougou, aux indépendances. Il deviendra ensuite dans les années 70, au ministère de la Coopération, à Paris, le « patron » des budgets de la coopération et des programmes de développement. En 1981, après l’arrivée de François Mitterrand au pouvoir, Jean Audibert sera à nouveau en « position stratégique » comme directeur de cabinet du ministre de la Coopération, Jean-Pierre Cot. Il tentera, en vain, d’impulser une nouvelle politique africaine de l’après-guerre froide. Homme de conviction, il préféra prendre quelques années de recul comme ambassadeur de France en Autriche puis en Belgique. En 1986, le président François Mitterrand, alors en cohabitation avec le Premier ministre Jacques Chirac, le rappellera à ses côtés, à l’Élysée, pour reprendre les dossiers africains. En 1988, Jean Audibert est envoyé sur un nouveau « front » : l’Algérie. Il vivra les périodes historiques les plus décisives, depuis l’indépendance, d’un pays en crise politique profonde. Haut-commis de l’État, il ne « lâchait » jamais rien aux journalistes… Il faudra attendre que l’heure de la retraite sonne pour que Jean Audibert, élevé à la dignité
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JAMAIS JE N’AI CESSÉ D’APPRENDRE L’AFRIQUE
d’ambassadeur de France, dise enfin le fond de sa pensée sur la crise algérienne au cours d’une conférence, en 1994, à l’Académie des Sciences d’outre-mer :
« Cette crise est aussi un révélateur de faiblesses de notre politique intérieure française. L’absence de politique de l’Islam en France, l’insuf-fisance de notre politique d’intégration, de notre politique de la ville sont à l’origine des difficultés que nous voyons apparaître à l’occasion du drame algérien. Rien ne serait pire que l’utilisation démagogique, par des politiciens en mal de clientèle, des répercussions inévitables sur notre sol des affrontements internes algériens, au risque de réveiller des craintes ata-viques devant l’ordre mondial ».
Visionnaire, non ?
De même, pour l’Afrique subsaharienne, le pire pour Jean Audibert aurait été que « nous considérions que l’Afrique relève désormais unique-ment de l’aide humanitaire et de l’action desONG». Il était parvenu à s’intégrer parfaitement à l’Algérie qui lui a permis de continuer à servir le continent africain. Il quitta ce pays en 1992, à l’âge de la retraite, avec une extrême tristesse, après l’assassinat de Boudiaf. Conscient de sa double culture, européenne et africaine, il vécut cette double appartenance au point que ses amis algériens le considéraient comme un frère et que, pour l’Afrique subsaharienne, il était également des leurs.
Antoine Glaser
INTRODUCTION
* Vie et parcours de Jean Audibert
Jean Audibert est né en 1927, à Salin-de-Giraud, cité industrielle et e cosmopolite bâtie auXIXsiècle à la hâte, à l’heure où la France aborde le grand tournant de l’industrie chimique, en pleine Camargue au bord du Grand Rhône. Sa jeunesse s’est épanouie sous le ciel et le soleil du Midi, mais il découvrit très vite que la Provence n’est pas uniquement la région des loi-sirs et des cigales. Les rues sans joie se vident à proximité des cités ouvrières où vivent les salariés et les émigrés à côté des chantiers, des ateliers et des marais salants. Jean Audibert vit, au quotidien durant toute sa jeunesse, les épisodes de la cohabitation des races et des classes. Ses parents instituteurs sont bien placés pour exposer aux jeunes les difficultés de ce nouveau proléta-riat installé en marge de la société traditionnelle pour répondre aux expé-riences d’une industrie chimique. Ils sont venus l’un et l’autre des terres rudes de l’Ardèche. Ils ont la vocation « des hussards noirs de la République », sévères à la tâche, exi-geants dans les résultats, soucieux du respect de l’égalité de chacun dans ses droits et ses devoirs. Le certificat d’études primaires est le premier diplôme de Jean Audibert. Il ne peut être question, pour un fils d’instituteur, d’échapper à ce brevet de civisme et de connaissances essentielles. Au hasard des divers postes dans les écoles des quartiers de Marseille, parmi d’autres enfants de familles parfois démunies, venues de tous les pays de la Méditerranée, il poursuit ses études.
* Présentation de Jean Audibert par Jean Honnorat, Administrateur de la France d’outre-mer (FOM), Promotion 1945.
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JAMAIS JE N’AI CESSÉ D’APPRENDRE L’AFRIQUE
Il n’a que 12 ans, lorsque la guerre éclate. La vie dans le port Méditerranéen n’est pas simple sous l’occupation : résistance, rationne-ment, privations, désespérance, libération enfin. Son adolescence laborieuse se développe à travers le cycle complet des épreuves qui forment les hommes et trempent les caractères. Jean Audibert a des dispositions pour les mathématiques et à la fin de la guerre il réussit son bac en mathématiques élémentaires. Certains de ses professeurs le verraient bien préparer Polytechnique. Mais il fut sensible à d’autres influences qui le conduisirent vers l’outre-mer. Il préféra donc la « Colo » : l’École coloniale, et entra en prépara-tion au lycée Thiers à Marseille. En 1946, dès sa première année, il réussit le concours de l’École natio-nale de la France d’outre-mer (ENFOM). Il va avoir 19 ans lorsqu’il arri-ve à Paris. Il choisit alors sans hésitation la section de l’ENFOM qui va le conduire à l’administration de l’Afrique Noire. C’est là qu’il va se mettre au service des autres et au nom de la République Française.
* L’Afrique en 1950
C’est un matin du printemps chaud et sec, du Sahel. Jean arrive de France, à Ouagadougou, Haute-Volta de l’époque, avec en poche son bre-vet de l’École nationale de la France d’outre-mer, la seule école d’admi-nistration où le rang de sortie ne compte pas. Il vient pour exercer son métier, en brousse. Il est arrivé dans mon bureau, alors que j’étais directeur du Cabinet du gouverneur. Il vient sans l’ombre d’une ambition, et sans le goût d’une sollicitation ; il ne demande rien sauf d’exercer la plénitude de ce métier qu’il a volontairement choisi. Je lui décris la Haute-Volta. Elle est alors en plein remembrement. Le territoire, qui avait été partagé entre ses voisins de la Côte d’Ivoire, du Soudan (Mali) et du Niger, manquait de tout. La Côte d’Ivoire n’avait rien laissé de ce qu’elle pouvait déménager, lorsque le territoire fut en 1947 reconstitué : ni personnel, ni service, ni crédits, ni matériel. Rien que des hommes laborieux, organisés, courageux. L’ambition de la nouvelle administration de la Haute-Volta est simple : lancer un grand programme de petits travaux et créer ou recréer des postes administratifs autour desquels le minimum de services compatibles
* Témoignage de Paul Masson, Administrateur de la FOM, Promotion 1941.
INTRODUCTION
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avec des soins de survie peut s’organiser, avec le médecin, l’instituteur, et le chef coutumier : trouver et associer des partenaires africains, lutter pour survivre, avec la quête de l’eau et des barrages en terre, des puits, combattre les grandes endémies : la lèpre, le paludisme, la maladie du sommeil, lutter contre la méningite, l’onchocercose. Il écoute tout cela, comme un marseillais taciturne. A la fin, il me dit :
« Tout cela me va ! J’ai choisi ce pays le plus pauvre pour y exercer dans la vérité des hommes, le métier sans doute le plus beau, celui d’y tra-vailler les mains nues avec le cœur et l’intelligence »
Et je me souviens très bien de son mot de la fin… Il m’a simplement dit :
« Je prends ! »
De 1950 à 1952, il est à Ouagadougou, chef de l’immense subdivision centrale du cercle « Mossi » par excellence. Le commandant de cercle Barbero l’accueille à bras ouverts, c’est le prototype de l’administrateur de brousse ; un peu bourru, sans ambition… sauf de bâtir, sans complexe, sauf de servir, et sans moyen sauf… la confiance qu’il propose : Audibert fait merveille auprès de cet homme au cœur d’or, comme chef de subdivi-sion de Ouagadougou de 1950 à 1952. C’est une rencontre entre le jeune et l’ancien, des hommes qui com-muniquent simplement, dans le même esprit de service, de dévouement, sans ostentation mais avec la volonté d’inspirer confiance et de passer le message. C’est le « Petit commandant » comme on l’appelle dans le cercle des copains et « le petit du commandant » pour les Africains. Il est heureux, ivre de fatigue et de projets, ivre d’amitié aussi. Avec ses « nababs » de village et de canton, avec les Africains, il appelle la confiance par le travail. Sa capacité d’écouter les autres, surtout les petits, ceux qui se confient difficilement, fait merveille. De 1952 à 1953, il est affecté à Kaya comme commandant de cercle, pour remplacer l’administrateur décédé à la suite d’une morsure de ser-pent mal soignée. Il assure l’intérim de ce cercle de 200 000 habitants. Lorsque je suis nommé administrateur-maire à Bamako, fin 1953, la capitale du Soudan, avec ses 200 000 habitants et quelques milliers d’Européens, est représentée par une municipalité nouvellement élue. J’ai besoin de Jean. Il arrive sans barguigner. Il répond à merveille à ce que j’attends de lui. A Bamako, de quartier en quartier, il parcourt la ville, rue après rue, il va à la rencontre des gens. Jamais les Africains de la ville n’avaient vu un administrateur dans leur case et dans les dispensaires de quartiers. Là encore, on invente des for-mules pour l’habitat social.
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