Discours prononcé à la Sorbonne, lors dumeeting « Hommage à l’Arménie »Anatole FranceAnonymeDiscours prononcé à la Sorbonne, lors du meeting« Hommage à l’Arménie »9 avril 1916Il y a vingt ans, lorsque les massacres ordonnés par le sultan Abdul Hamidensanglantèrent l’Arménie, quelques voix seulement en Europe, quelques voixindignées protestèrent contre l’égorgement d’un peuple. En France, un très petitnombre d’hommes appartenant aux partis les plus opposés s’unirent pourrevendiquer les droits de l’humanité grandement offensée. Vous les connaissez :Jaurès, Denys Cochin, Gabriel Séailles, Ernest Lavisse, Jean Finot, Victor Bérard,Francis de Pressensé, le père Charmetant, Pierre Quillard, Clemenceau, AlbertVandal, quelques autres encore que je m’excuse de ne pas nommer. Le restedemeura muet. Plusieurs se sentaient émus d’une grande pitié ; mais comme lesmalheureux inspirent de l’éloignement à la plupart des hommes, on chercha destorts aux victimes ; on leur reprocha leur faiblesse. Quelques-uns, prenant ladéfense des bourreaux, les montraient châtiant des séditieux ou vengeant lespopulations turques ruinées par des usuriers chrétiens. D’autres enfin voyaient dansce carnage la main de l’Angleterre ou celle de la Russie.Cependant, malgré les protestations des arménophiles et les représentationstimides de quelques puissances, en dépit des promesses du gouvernement turc, lapersécution, parfois assourdie et voilée, ne cessait pas. En vain une révolution ...
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