Discours de réception de Victor Hugo àl’Académie françaiseActes et paroles - Avant l’exilAnonymeVictor HugoAcadémie Française 1841-1844DISCOURS DE RÉCEPTION2 JUIN 1841.[Note: M. Victor Hugo fut nommé membre de l’académie française, par 18 voixcontre 16, le 7 janvier 1841. Il prit séance le 2 juin.]Messieurs,Au commencement de ce siècle, la France était pour les nations un magnifiquespectacle. Un homme la remplissait alors et la faisait si grande qu’elle remplissaitl’Europe. Cet homme, sorti de l’ombre, fils d’un pauvre gentilhomme corse, produitde deux républiques, par sa famille de la république de Florence, par lui-même dela république française, était arrivé en peu d’années à la plus haute royauté quijamais peut-être ait étonné l’histoire. Il était prince par le génie, par la destinée etpar les actions. Tout en lui indiquait le possesseur légitime d’un pouvoirprovidentiel. Il avait eu pour lui les trois conditions suprêmes, l’événement,l’acclamation et la consécration. Une révolution l’avait enfanté, un peuple l’avaitchoisi, un pape l’avait couronné. Des rois et des généraux, marqués eux-mêmespar la fatalité, avaient reconnu en lui, avec l’instinct que leur donnait leur sombre etmystérieux avenir, l’élu du destin. Il était l’homme auquel Alexandre de Russie, quidevait périr à Taganrog, avait dit: Vous êtes prédestiné du ciel ; auquel Kléber, quidevait mourir en Egypte, avait dit: Vous êtes grand comme le monde ; auquelDesaix, tombé à Marengo, ...
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