Vie étudiante Apprendre à apprendre aux tout-petits Stages dans les écoles euro- péennes pour dix étudiantes de Chicoutimi en éducation préscolaire. Par Marie-Hélène Alarie n mars dernier, dix étudiantes du module d’Éducation au préscolaire et d’enseignement au primaire de l’Université du Québec à Chicoutimi (UQAC) s’envolaient vers la Belgique et la France. Pendant deux mois, elles ont vu de près comment fonc- tionne le système d’éducation là-bas. De son séjour à l’école Hamaïde de Bruxelles, Marie- Ève Jean ramène dans ses bagages une tout autre façon d’enseigner. À l’école Hamaïde, on utilise la méthode péda- gogique DeCroly. Cette pratique fait partie des pédagogies dites « actives » qui propulsent l’enfant au centre de ses apprentissages. Les nouveaux programmes d’éducation belges, français et québé- cois font la large part à ces approches par «compétences». Toutefois, tous n’appliquent pas également ces principes. En France, on aurait ten- dance à demeurer hiérarchisé dans les rapports maître-élève alors qu’en Belgique, c’est plus sou- ple. Dans ce contexte, on situe le modèle québé- cois plus proche du belge que du français. Mais en pratique, comment toutes ces théories se vivent-elles ? «On fait constamment des propo- Marie-Ève a effectué sitions aux enfants pour qu’à leur tour ils soient en son stage à la mater- mesure de proposer. Une enseignante doit être nelle. Sur la photo, capable de gérer les imprévus. Mais peu importe elle présente une l’activité, ...
Vie étudiante
Apprendre à apprendre
aux tout-petits
Stages dans les écoles euro-
péennes pour dix étudiantes
de Chicoutimi en éducation
préscolaire.
Par Marie-Hélène Alarie
n mars dernier, dix étudiantes du
module d’Éducation au préscolaire
et d’enseignement au primaire de
l’Université du Québec à Chicoutimi
(UQAC) s’envolaient vers la Belgique
et la France. Pendant deux mois,
elles ont vu de près comment fonc-
tionne le système d’éducation là-bas. De son
séjour à l’école Hamaïde de Bruxelles, Marie-
Ève Jean ramène dans ses bagages une tout
autre façon d’enseigner.
À l’école Hamaïde, on utilise la méthode péda-
gogique DeCroly. Cette pratique fait partie des
pédagogies dites « actives » qui propulsent l’enfant
au centre de ses apprentissages. Les nouveaux
programmes d’éducation belges, français et québé-
cois font la large part à ces approches par
«compétences». Toutefois, tous n’appliquent pas
également ces principes. En France, on aurait ten-
dance à demeurer hiérarchisé dans les rapports
maître-élève alors qu’en Belgique, c’est plus sou-
ple. Dans ce contexte, on situe le modèle québé-
cois plus proche du belge que du français.
Mais en pratique, comment toutes ces théories
se vivent-elles ? «On fait constamment des propo-
Marie-Ève a effectué sitions aux enfants pour qu’à leur tour ils soient en
son stage à la mater- mesure de proposer. Une enseignante doit être
nelle. Sur la photo, capable de gérer les imprévus. Mais peu importe
elle présente une
l’activité, l’enfant trouve lui-même les réponses.
leçon sur le dévelop-
Finalement, c’est l’emploi de la démarche
pement des sens,
scientifique appliquée au primaire.»
notamment le goût,
en y introduisant le Pendant ce temps,
sirop d’érable. chez les petits Français...
Auparavant, elle avait
En France, certains éducateurs reçoivent une forma-
expliqué les origines
tion spécifique afin de devenir maîtres-formateurs,et la composition du
pratique qu’on ne rencontre pas au Québec.sirop d’érable.
28 RÉSEAU / AUTOMNE 2002 Laurie Sasseville: Stagiaire avec sa À Clermont-Ferrand,
eclasse de 3 année au terme de son quatres étudiantes
stage. Les élèves y étaient beaucoup visitent un centre
attachés. de vulcanologie
tout juste inau-
École Hamaïde: Du nom de Amélie
guré et très bien
Hamaïde, pédagogue qui a beaucoup
conçu. Comme a
développé l’approche DeCroly. Trois
dit Archimède,
étudiantes de l’UQAC y ont effectué
«Donnez-moi un
leur stage. C’est une très vieille
levier et un point
maison convertie en école.«Je ne suis
d’appui, et je
pas certaine que les normes physi-
soulèverai le
ques respecteraient les exigences de
monde. »
sécurité au Québec, mais c’est un
Le point d’appui:
environnement très chouette.»
la formation des
étudiantes à
l’UQAC.Dans le cadre du programme de stages, les étu-
Le levier : les stagesdiants québécois sont toujours reçus à la même
internationaux.école de Clermont-Ferrand. En fait, cette école se
spécialise dans l’accueil de stagiaires tant français
qu’étrangers.
Corinne D’Amours , qui foulait le sol de la mère
patrie pour la première fois , a connu là-bas la
totale immersion : « J’ai adoré l’expérience de m’in-
tégrer à une nouvelle culture» dit-elle. Corinne a
fait son stage dans une classe de maternelle avec
un groupe de 4, 5 et 6 ans. « Les méthodes péda-
gogiques ressemblent beaucoup à celles utilisées
au Québec. On investit les champs de compétences
et l’apprentissage se fait par découvertes.»
Dans cette classe de maternelle, on demande
beaucoup de travail à l’enfant. À la différence de
la plupart des écoles maternelles au Québec, le
groupe connaît déjà quelques rudiments de lec-
ture, d’écriture et de mathématiques. «Dans une
journée type, les enfants commencent la matinée
avec un peu de lecture et des mathématiques. Par
la suite, on sépare la classe selon les groupes d’âge.
RÉSEAU / AUTOMNE 2002 29
PHOTOS
: ROBERTO GAUTHIERLes étudiantes qui
ont participé au
stage en Europe
cette année (de
mars à mai 2002).
En petits ateliers, les élèves pourront s’exercer à Laurie Sasseville, pour sa part, considère avoir
l’écriture et la lecture. Après une période de récréa- davantage évolué dans la profession durant les sept
tion, on revient en ateliers et, cette fois, les en- semaines qu’a duré le stage que pendant tout son
fants font des présentations de leurs travaux. baccalauréat.
L’après-midi est consacré aux arts. Que ce soit le Toujours à Clermont-Ferrand, dans sa classe de
echant chorale, la musique, la danse ou les arts plas- 3 année avec des élèves de 8 ans, Laurie a profité de
tiques, les élèves bougent beaucoup contrairement la grande expérience d’une éducatrice chevronnée.
au matin raconte Corinne. Laurie n’a pas été dépaysée par les méthodes
Ce qui m’a frappée, c’est «à quel point on n’in- pédagogiques françaises: «La façon d’enseigner
tègre pas le jeu dans les activités. D’ailleurs, les là-bas ressemble énormément à la nôtre. Par con-
enfants emploient souvent le terme «travailler», tre, les matières sont plus compartimentées. Par
ils sont en classe pour « travailler » pas pour s’amu- exemple, en mathématiques on consacrera du
ser. Et la preuve de leur travail, c’est qu’ils doivent temps aux divisions avec retenues ; une fois la ma-
constamment laisser une trace écrite, le support tière maîtrisée, les élèves subiront un contrôle.
d’un projet sera toujours la feuille de papier. Ensuite on entreprendra une autre facette des
Corinne constate à quel point dans cette classe, le maths avec contrôle à la fin. On n’attend pas la
Corinne D’amours professeur est considéré comme l’autorité: «Les fin d’une étape pour évaluer les jeunes, tout se
stagiaire à la activités et ateliers sont très dirigés... trop dirigés fait au fur et à mesure.»
maternelle. peut-être à mon goût de Nord-Américaine.» Ce qui a fasciné Laurie, c’est toute la culture qui
s’intègre naturellement au programme scolaire:
«Les enfants sont sensibilisés à toutes les formes
d’art. Ils participent à des ateliers de sculpture et
de cinéma et connaissent l’œuvre de plusieurs
peintres. C’est captivant de voir des enfants s’ouvrir
à la poésie, ils s’y abandonnent plus facilement
que les adultes. Je ramène avec moi l’envie
d’exploiter ce côté culturel de l’enseignement. »
Au fil des ans, le programme de stages à
l’étranger s’est développé conjointement avec le
Département des sciences de l’éducation et de psy-
chologie de l’UQAC, l’Institut pédagogique De Fré,
attaché à la Haute École de Bruxelles en Belgique,
et l’Institut Universitaire de Formation des Maîtres
d’Auvergne en France. Ce programme est offert aux
eétudiants inscrits en 3 année du baccalauréat
d’Éducation au préscolaire et d’enseignement au
primaire.
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