ROYAUME DU MAROC Ministère de l'Aménagement du Territoire, HautCommissariat aux Eaux et Forêts et à la del'Eauetdel'Environnement la Lutte Contre la Désertification Département de l Environnemen t AROC Aspects Socioéconomiques des Zones humides marocaines (Éléments de réflexion pour lélaboration de la Stratégie Nationale des zones humides)
Novembre 2006 Abdellatif Khattabi Avec la collaboration de Besri Mouad
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Table des matières Liste des tableaux .................................................................................................................... 3 Liste des figures ....................................................................................................................... 3 Liste des abréviations .............................................................................................................. 3 Résume de synthèse ................................................................................................................ 5 A. Introduction ........................................................................................................................ 9 B. Biens et services des zones humides .............................................................................. 12 C. Tendance démographique et exploitation des ressources naturelles ....................... 14 D. Etat actuel des écosystèmes humides au niveau international......................................... 15 E. Biodiversité des Zones humides et politiques de conservation ................................. 19 F. Zones humides marocaines ............................................................................................. 21 G. Cadres de référence international et national sur les zones humides. ..................... 22 G.1. Cadre de référence international................................................................................... 22 G.2. Cadre institutionnel des zones humides au Maroc...................................................... 26 G.3.LeCentreMarocaindesZonesHumides......................................................................28G.4.Cadrejuridique..............................................................................................................30H. Statuts fonciers des zones humides marocaines .......................................................... 38 I. Activités humaines ............................................................................................................ 40 1) A GRICULTURE .............................................................................................................. 41 2) ELEVAGE ....................................................................................................................... 43 3) T OURISME ..................................................................................................................... 43 4) E AUX DOUCES .............................................................................................................. 47 5) P ECHE ET AQUACULTURE ............................................................................................ 48 6) P RODUCTION DE SEL .................................................................................................... 58 7) C HASSE ......................................................................................................................... 58 8) PRODUITS ARTISANAUX ................................................................................................ 59 9) Z ONES HUMIDES ET REVENUS DES MENAGES .............................................................. 59 10) A CTIVITES HUMAINES DANS CERTAINS SITES RAMSAR ........................................... 60 J. Dysfonctionnements et menaces des zones humides marocaines .............................. 63 K. Cadre FPEIR (DPSIR) des zones humides marocaines ............................................... 79 L. Conclusion ......................................................................................................................... 82
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Liste des tableaux T ABLEAU N°1 : L ES STATUTS FONCIERS DES ZONES HUMIDES MAROCAINES QUI SONT INSCRITES SUR ................. 38 LA LISTE R AMSAR .................................................................................................................................................. 38 T ABLEAU N°2 : S TATUT FONCIER DES ZONES HUMIDES SIBE CONTINENTAUX AUTRES QUE LES SITES R AMSAR .. 39 T ABLEAU N O 3 : E SPÈCES DE POISSONS PÊCHÉS ..................................................................................................... 55 T ABLEAU 4 : B IENS ET SERVICES DE CERTAINES ZONES HUMIDES ......................................................................... 60 T ABLEAU N°5 : Q UALITÉ DES EAUX DES RIVIÈRES ................................................................................................ 63 T ABLEAU N° 6 : LES DYSFONCTIONNEMENTS ET MENACES DE CERTAINES ZONES HUMIDES CONTINENTALES ...... 69 T ABLEAU N° 7 : LES DYSFONCTIONNEMENTS ET MENACES DE CERTAINES ZONES HUMIDES LITTORALES ............. 73 Liste des figures F IGURE 1: LES PROPORTIONS DES STATUTS FONCIERS DES ZONES HUMIDES MAROCAINES ..................................... 40 F IGURE 2: C OMPOSITION DU REVENU ISSU DE M ERJA Z ERGA ............................................................................... 60 F IGURE 3: C OMPOSITION DE LA VALEUR D USAGE DIRECT DE R ESTINGA S MIR ...................................................... 60 F IGURE 4: Q UALITE DES EAUX DES RIVIERES MAROCAINES ................................................................................... 65 F IGURE 5: E VOLUTION DES PERMIS DE PECHE S PORTIVE ENTRES LES ANNEES 1992-2003 ..................................... 68 F IGURE 6: DEGRE DE FREQUENCES DES PRINCIPALES MENACES SUR LES ZONES HUMIDES MAROCAINES ................ 78 F IGURE 7: M ODELE D.P.S.I.R ................................................................................................................................ 82 Liste des abréviations -AFD : Agence Française de Développement -BMM : Business Motivation Model -BO : Bulletin Officiel -CMAZH : Centre Marocain des Zones Humides -CNE : Conseil National de LEnvironnement -CNEE : Centre National dEducation à lEnvironnement -CNHP : Centre National dHydrologie et Pisciculture -COP : Conférences des Parties contractantes -DGH : Direction Générale Dhydraulique -D.P.S.I.R : Driving forces Pressures State Impact Responses -DREF : Direction Régionale des Eaux et Forêts -FEM : Fond Mondial de lEnvironnement -FFEM : Fond Français de lEnvironnement Mondial -GEST : Groupe dEvaluation Scientifique et Technique -GIZC : Gestion Intégrée des Zones Côtières -HCEFLD : Haut Commissariat aux Eaux et Forêts et à la Luttes Contre la Désertification -HPAI : Incidences de lInfluenza Aviaire Hautement Pathogène -MATEE : Ministère de lAménagement du Territoire de lEau et de lEnvironnement -ONG : Organisations Non Gouvernementales -ONP : Office National de la Pêche -PANE :Plan dAction National pour la protection de lEnvironnement -PANLCD : Plan dAction National pour la Lutte Contre la Désertification -PER : Pression Etat- Réponse
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PFN:ProgrammeForestierNational
PFNL : Produits Forestiers Non Ligneux PMVE : Protection et Mise en Valeur de lEnvironnement PNABV : Plan National dAménagement des Bassins Versants PNPI : Plan directeur National de la Protection des Inondations RDH : Rapport de Développement Humain SIBE : Site dintérêts Biologique et Ecologique SIG : Système dInformation Géographique SMBA : Sidi Mohammed Ben Abdellah S.W.O.T : Strengths-forces, Weaknesses-faiblesses, Opportunities-occasions, Threats-menaces
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Résume de synthèse 1) Selon la convention Ramsar, les zones humides sont des étendues de marais, de fagnes, de tourbières ou d'eau naturelles ou artificielles, permanentes ou temporaires, ou l'eau est stagnante ou courante, douce, saumâtre ou salée, y compris des étendues d'eau au marine dont la profondeur à marée basse n'excède pas six mètres. 2) La durabilité des écosystèmes humides est menacée par les impacts négatifs qui sont susceptibles d'être engendrés par la construction de barrages, le pompage excessif des eaux souterraines, la mise en culture des marais et l'intensification agricole, le surpâturage, l'urbanisation, et la poussée démographique. Une estimation officielle de ces dégâts n'est pas disponible, mais l'observation montre que les caractéristiques écologiques de plus d'un site sont en voie de dégradation. 3) Les écosystèmes humides offrent à lhomme une multitude de services quon peut regrouper en quatre grandes catégories à savoir : • Les services de prélèvement qui englobent la nourriture, leau, le bois, les fibres et les ressources génétiques; • Les services de régulation tels que la régulation des inondations, la régulation du climat, la régulation des maladies et lépuration de leau,; • Les services culturels comportent les bienfaits non matériels quon peut tirer des écosystèmes humides et dans lesquels on trouve des bénéfices dordre récréatif, esthétique, éducatif et spirituel ; • Les services de soutien assurés par la formation des sols, la photosynthèse et le cycle des éléments nutritifs. 4) Ces biens et services contribuent à lamélioration du bien être de lhomme en agissant sur ses éléments constitutifs : 9 la liberté de choix et d'action ; 9 lexistence de moyens sûrs et appropriés ; 9 la santé; 9 les bonnes relations sociales; 9 la sécurité pour l'accès aux ressources naturelles, et la protection contre les catastrophes naturelles. 5) Cependant, la pollution de lenvironnement qui augmente de façon continue et proportionnelle à laugmentation de la population, lurbanisation, laccroissement de la demande humaine en eau et en dautres ressources naturelles, les rejets des eaux usées et de déchets solides, lextension et lintensification agricoles, le développement dinfrastructures constituent une menace pour ces ressources. 6) Lévaluation millénaire des écosystèmes qui a conclu que les écosystèmes de zones humides couvrent une partie importante de la superficie de la planète ; lestimation mondiale est de 1280 millions dhectares. Les décideurs et ceux qui élaborent les politiques doivent, de toute urgence, adopter une perspective intersectorielle et mettre laccent sur la sauvegarde des écosystèmes des zones humides et de leurs services dans le contexte de la réalisation du développement durable et de lamélioration du bien-être humain ; 7) La dégradation et la perte des zones humides sont plus rapides que pour les autres écosystèmes. Cette perte et dégradation continues entraîneront dautres réductions du
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bien-être humain, en particulier pour les couches les plus vulnérables dans les pays les moins développés où il ny a pas de solution technique aisément disponible. 8) Au Maroc, même si le climat y est caractérisé par une forte aridité, on y rencontre une grande diversité d'écosystèmes humides allant des lacs de montagne jusqu'aux lagunes costales. Ils s'étendent approximativement sur une superficie de 200.000 ha, représentant ainsi 0,3% du territoire national (Dakki et El Hamzaoui, 1998). 9) Les textes législatifs, et le cadre légal propre aux zones humides rend la conservation des ces écosystèmes assez difficile. Il faut rappeler en particulier que cette conservation se heurte à la multiplicité des statuts juridiques des terrains (privé, collectif, Habous, domanial), des droits dusage attribués à certains acteurs (industrie, tourisme, pêcheurs, population locale, chasseurs ). 10) Le statut foncier des zones humides marocaines nest pas uniforme. On peut rencontrer du domaine public maritime, du domaine forestier, des terres privées, des terrains collectifs, des terrains Habous, etc. Cet état de fait rend leur gestion rationnelle relativement problématique. 11) Les principales activités économiques pratiquées dans les zones humides marocaines sont :
• Lagriculture : cest une pratique assez répandue. Les vallées fluviales, les plaines dinondation et les basses terres côtières en particulier de part leur forte productivité sont souvent mises en valeur. Les sols sont souvent riches et la présence de leau est rarement un facteur limitant dans ces zones. • Lélevage : Les pâturages des zones humides, milieux généralement riches et accessibles, jouent un rôle important dans lélevage du bétail dans plusieurs zones du Maroc. • Le tourisme : le littoral marocain est très sollicité pour le développement touristique et cette activité si elle nest pas bien gérée peut devenir une menace sérieuse pour lintégrité des nombreux écosystèmes humides littoraux. Lécotourisme, si il est bien planifié et géré, pourra constituer un outil de développement et en même temps contribuera efficacement à lutilisation durable des diversités biologique et culturelle. • Les eaux douces : La disponibilité de quantités suffisantes d'eau de bonne qualité est fondamentale pour tous les processus biologiques, pour la préservation de la biodiversité et des écosystèmes et pour les fonctions primaires et secondaires de production. Cette nécessité rend cette ressource dune première priorité du point de vue utilisation rationnelle surtout au Maroc qui est un pays à climat plutôt aride et ou la sécheresse peut être considérée plutôt structurelle que conjoncturelle. • La pêche et laquaculture : La pêche est considérée comme lune des activités principales qui sexercent dans les zones humides. Elle joue un rôle primordial dans léconomie locale des riverains de ces milieux, et constitue parfois la seule source de revenu pour la population locale. • La production de sel : La production de sel se pratique dans plusieurs zones humides littorales et continentales et se fait par le procédé de séchage solaire dans des bassins artificiels conçus à cette fin. • La chasse : Les zones humides constituent des lieux daccueil pour des populations doiseaux deaux, cest pour cela quelles représentent une destination idéale pour les chasseurs de ce genre de gibier qui sont autorisés à pratiquer ce sport mais dans le cadre des lois en vigueur. Certaines zones humides sont érigées en réserves permanentes de chasse. • Les produits artisanaux : La végétation des zones humides est parfois une source de revenu, citons à ce propos la végétation à base des joncs qui sert à la fabrication de
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nattes artisanales, les roseaux utilisés dans la confection de divers ustensiles et articles ménagers (meubles en particulier), etc. 12) Ces activités engendrent souvent des impacts négatifs sur les écosystèmes humides ce qui cause des dysfonctionnements de ces milieux. On peut citer comme forces motrices de changements : • extension et intensification agricoles ; • développement de l'élevage extensif ; • augmentation de l'effort de pêche ; • chasse abusive : • regain d'intérêt pour la production de sel marin et développement de marais salants ; • développement d'infrastructures touristiques ; • urbanisation rapide et intense ; • développement industriel dans certaines zones ; • ramassage non contrôlé de la végétation des milieux humides. 13) Les pressions engendrées par ces forces de changements sont : • pollution par des rejets solides, urbains et industriels ; • pollution par effluents agricoles et industriels ; • surexploitation des ressources halieutiques ; • braconnage et surexploitation du gibier ; • prélèvements excessifs d'eau pour les besoins d'irrigation ou d'eau potable ; • défrichement et assèchement des milieux naturels humides pour des besoins d'extension agricole ; • transformation des milieux naturels en zones d'urbanisation ou autres infrastructures ; • surpâturage ; • sur-fréquentation par des visiteurs ; • dérangement des oiseaux migrateurs et la quiétude du milieu naturel par les activités anthropiques • autres pressions 14) Létat des lieux résultant de ces pressions est : • envasement des retenus de barrages ; • changement dans la qualité de leau ; • augmentation du taux de germes pathogènes dans les eaux douces ; • dégradation des écosystèmes humides et des habitats ; • appauvrissements des parcours des zones humides ; • diminution de la population des faunes terrestre et aquatique : • perte de fertilité des sols ; • diminution du volume et de la composition des stocks de poissons ; • dégradation de la qualité des paysages. 15) Les impacts induits par le nouvel état des lieux sont : • perte de productivité de la pêche ; • perte de productivité de laquaculture ; • perte de la productivité agricole ; • perte de la biodiversité ; • perte de valeurs dusage de certaines plantes et animaux ;
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• • • • • •
perte de la productivité de lélevage ; perte de journées de recréation et de tourisme ; perte de valeurs dexistence liées à la biodiversité ; perte de bien être lié à la qualité de la vie ; pertes liées à la santé ; perte deau douce et deau de baignade.
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A. Introduction Comme leur nom l'indique, les zones humides sont des systèmes de transition entre les environnements terrestres et aquatiques permanents (mer, lacs, rivières,...). Même si elles possèdent des traits communs avec ces deux environnements, pour lesquels elles forment l'interface physique, elles sont différentes d'eux à plusieurs niveaux, et sont donc considérées comme une classe distincte d'écosystèmes.
Une définition unique et commune à ces milieux n'est pas disponible. Toutefois, si nous nous référons à la convention Ramsar relative aux zones humides d'importance internationale, ils sont définis comme " des étendues de marais, de fagnes, de tourbières ou d'eau naturelles ou artificielles, permanentes ou temporaires, ou l'eau est stagnante ou courante, douce, saumâtre ou salée, y compris des étendues d'eau au marine dont la profondeur à marée basse n'excède pas six mètres ".
La définition générale des zones humides recouvre une diversité de masses deau peu profondes et de milieux où la nappe souterraine affleure, qui se caractérisent par la présence permanente ou temporaire de leau, des sols aux propriétés hydriques et des plantes et animaux qui se sont adaptés à la vie dans des conditions saturées (Lewis 1995). Les zones humides comprennent un groupe particulier d'habitats aquatiques présentant une variété d'écosystèmes superficiels couverts de végétation, tels que les tourbières, les marécages, les marais: les plaines inondables et les lagons côtiers, qui servent souvent de tampons contre les événements climatiques extrêmes tels que les ouragans.
Les zones humides couvrent près de 10% de la superficie terrestre : 2% sont des lacs, 30% des tourbières, 26% des fagnes, 20% des marécages et 15% des plaines dinondation. Les mangroves couvrent, en outre, quelque 24 millions dhectares et les récifs coralliens environ 60 millions dhectares. Les dernières grandes régions de zones humides se trouvent sous les hautes latitudes et sous les Tropiques. Lexpansion agricole et dautres formes de développement ont détruit de nombreuses zones humides dans les régions tempérées (Ramsar 1998).
La présence abondante de l'eau constitue donc leur caractéristique principale, et les paramètres hydrologiques sont les facteurs déterminants de leur développement. En plus de l'eau, ils sont structurellement aussi composés de plantes, d'animaux, de sol, et d'air. Les interactions qui existent entre ces différentes composantes, conditionnent l'importance des processus biotiques et abiotiques responsables des services fonctionnels quils fournissent.
Ces écosystèmes désignent donc un large éventail d'habitats qui se partagent un certain nombre de caractéristiques structurelles et fonctionnelles. Ils sont très diversifiés et comptent plus de 30 types, mais peuvent être classés selon leurs caractéristiques hydro géomorphologiques en cinq groupes principaux : lagunaire
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côtier, estuarien, fluvial, lacustre et marécageux. Ces écosystèmes peuvent continentaux ou littoraux.
Les zones humides continentales peuvent être constituées des eaux stagnantes (étangs, gravières, lacs, lagune, mouillères, retenue de barrage) ; des eaux courantes (fleuves, rivières, ruisseaux et leurs sources) ; des zones inondables (bois marécageux, forêts alluviales ou humides, landes humides, marais, marécages, prairies alluviales ou humides, ripisylves, plaines et vallées alluviales, vasières) ; ou de zones hydromorphes à végétations remarquables (rizières, roselières, saulaies, tourbières).
Les zones humides des domaines littoraux et océaniques peuvent être des Archipel, îles et îlots ; des baies, criques, golfes et lagunes ; des bancs, dunes littorales et plages de sable ; des bras de mer de faible profondeur ; des deltas et estuaires ; des falaises maritimes ; des marais côtiers, salants, salés ou saumâtres ; des mangroves ; des plages de galets ; ou des récifs coralliens.
Les zones humides ont toujours été considérées par les scientifiques et les environnementalistes comme des unités écologiques importantes. Elles sont très riches en faune et en flore, et sont parmi les écosystèmes les plus productifs de matière organique sur la terre.
Dans les trois dernières décennies, l'attitude du public et les valeurs économiques associées aux écosystèmes humides ont beaucoup évolué. Au lieu d'être considérés comme des zones incultes et insalubres, comme c'était le cas dans le passé, on leur reconnaît maintenant d'être sources d'un grand nombre de biens et services directement exploitables par la population, et aussi d'être des ressources multifonctionnelles dont l'importance dépasse souvent les frontières de ces écosystèmes.
Dans le passé, une grande partie des écosystèmes humides était encore protégée grâce à sa faible utilité marginale pour l'agriculture et pour les autres usages. Les utilisations traditionnelles pratiquées par les populations riveraines, ne déstabilisaient en aucun cas les équilibres écologiques de ces milieux. Cependant, dans les dernières années, les actifs naturels subissent de fortes pressions engendrées par l'expansion démographique, la facilité d'accès, et le développement économique qui les transforment en d'autres usages. Aujourd'hui, et de l'avis des autorités scientifiques dans ce domaine, les zones humides sont parmi les écosystèmes les plus menacés de dégradation sur la terre.
En effet, de très importantes étendues de zones humides ont déjà disparu ou sont en phase de dégradation, aussi bien dans les pays développés que dans les pays en voie de développement. Les dégâts sont causés soit directement par une conversion de ces écosystèmes en agriculture intensive, ou en zones résidentielles et industrielles, soit indirectement par les externalités négatives générées par les activités économiques dans les zones qui leur sont adjacentes. Une estimation des pertes globales (en surface) des zones humides au niveau international n'est pas connue avec exactitude.
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Les valeurs culturelles et sociales ainsi que les systèmes économiques tendent à favoriser les gains individuels au lieu de l'intérêt collectif. Cet état de fait a entraîné une certaine dégradation des ressources biologiques, et occasionne le plus souvent l'apparition d'externalités négatives supportées par la collectivité. La présence des ces externalités est souvent due aux échecs de marchés et de politiques gouvernementales. La non- internalisation de ces effets externes est à la base d'une utilisation non rationnelle des ressources biologiques.
Il est vrai que l'extinction des espèces est un phénomène naturel, mais ce qui n'est pas normal est le rythme de disparition observé dans les derniers siècles. Le déclin considérable observé dans la fréquence et l'abondance des ressources biologiques, et qui est causé principalement par la destruction des habitats naturels, la surexploitation et l'introduction despèces exotiques, a poussé la communauté internationale à tirer la sonnette d'alarme quant à la durabilité de ce potentiel, et à la nécessité de sa préservation.
Au Maroc, la durabilité des écosystèmes humides est menacée par les impacts négatifs qui sont susceptibles d'être engendrés par la construction de barrages, le pompage excessif des eaux souterraines, la mise en culture des marais et l'intensification agricole, le surpâturage, l'urbanisation, et la poussée démographique. Une estimation officielle de ces dégâts n'est pas disponible, mais l'observation montre que les caractéristiques écologiques de plus d'un site sont en voie de dégradation.
On assiste maintenant à une prise de conscience à ce que les zones humides sont des ressources économiques plus importantes à l'état naturel, que si elles sont transformées par des activités de développement. Cette prise de conscience internationale était à l'origine de la convention Ramsar relative aux zones humides d'importance internationale.
Les parties contractantes à cette convention se sont mises d'accord sur le respect et l'adoption de quatre principales actions qui sont :
a. Inscrire au moins un site sur la liste Ramsar, et s'engager à préserver ses caractéristiques écologiques; b. promouvoir l'utilisation rationnelle des zones humides dans leurs pays respectifs; c. promouvoir la conservation des zones humides en les classant comme réserves naturelles; d. communiquer et collaborer avec les autres parties contractantes, particulièrement lorsque des ressources en commun sont considérées.
Le Maroc a adhéré à cette Convention le 20/10/1980, en inscrivant sur la liste Ramsar quatre zones humides couvrant plus de 10500 ha. Ces sites sont Merja Zerga, Merja Sidi Boughaba, le lac Afnourir, et la baie de Khnifiss, actuellement il en est à 24 sites Ramsar dune superficie totale de 272010 ha.