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ÉMI LE ZOLA
PO T -BOU I LLE
BI BEBO O KÉMI LE ZOLA
PO T -BOU I LLE
1883
Un te xte du domaine public.
Une é dition libr e .
ISBN—978-2-8247-0254-4
BI BEBO OK
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Le te xte suivant est une œuv r e du domaine public é dité
sous la licence Cr e ativ es Commons BY -SA
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signifie que v ous p ouv ez lég alement la copier , la r e
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encourag é à le fair e .
V ous de v ez aribuer l’ o euv r e aux différ ents auteur s, y
compris à Bib eb o ok.CHAP I T RE I
NS A, embar ras de v oitur es ar rêta le
fiacr e char g é de tr ois malles, qui amenait O ctav e de la g ar e deR Ly on. Le jeune homme baissa la glace d’une p ortièr e , malgré le
fr oid déjà vif de cee sombr e après-midi de no v embr e . Il r estait sur pris
de la br usque tombé e du jour , dans ce q uartier aux r ues étranglé es, toutes
gr ouillantes de foule . Les jur ons des co cher s tap ant sur les che vaux qui
s’ébr ouaient, les coudoiements sans fin des tr ooirs, la file pr essé e des
b outiques déb ordantes de commis et de clients, l’étourdissaient ; car , s’il
avait rê vé Paris plus pr opr e , il ne l’ esp érait p as d’un commer ce aussi âpr e ,
il le sentait publiquement ouv ert aux app étits des g aillards solides.
Le co cher s’était p enché .
― C’ est bien p assag e Choiseul ?
― Mais non, r ue de Choiseul. . . Une maison neuv e , je cr ois.
Et le fiacr e n’ eut qu’à tour ner , la maison se tr ouvait la se conde , une
grande maison de quatr e étag es, dont la pier r e g ardait une pâleur à p eine
1Pot-b ouille Chapitr e I
r oussie , au milieu du plâtr e r ouillé des vieilles façades v oisines. O ctav e ,
qui était descendu sur le tr ooir , la mesurait, l’étudiait d’un r eg ard
machinal, depuis le mag asin de soierie du r ez-de-chaussé e et de l’ entr esol,
jusqu’aux fenêtr es en r etrait du quatrième , ouv rant sur une étr oite
terrasse . A u pr emier , des têtes de femme soutenaient un balcon à ramp e de
fonte très ouv rag é e . Les fenêtr es avaient des encadr ements compliqués,
taillés à la gr osse sur des p oncifs ; et, en bas, au-dessus de la p orte co chèr e ,
plus char g é e encor e d’ or nements, deux amour s dér oulaient un cartouche ,
où était le numér o , qu’un b e c de g az intérieur é clairait la nuit.
Un gr os monsieur blond, qui sortait du v estibule , s’ar rêta net, en ap
erce vant O ctav e .
― Comment ! v ous v oilà ! cria-t-il. Mais je ne comptais sur v ous que
demain !
― Ma foi, rép ondit le jeune homme , j’ai quié P lassans un jour plus
tôt. . . Est-ce que la chambr e n’ est p as prête ?
― Oh ! si. . . J’avais loué depuis quinze jour s, et j’ai meublé ça tout de
suite , comme v ous me le demandiez. Aendez, je v eux v ous installer .
Il r entra, malgré les instances d’O ctav e . Le co cher avait descendu les
tr ois malles. D eb out dans la log e du concier g e , un homme digne , à longue
face rasé e de diplomate , p ar courait grav ement le Moniteur . Il daigna p
ourtant s’inquiéter de ces malles qu’ on dép osait sous sa p orte ; et, s’avançant,
il demanda à son lo catair e , l’ar chite cte du tr oisième , comme il le
nommait :
― Monsieur Camp ardon, est-ce la p er sonne ?
― Oui, monsieur Gourd, c’ est monsieur O ctav e Mour et, p our qui j’ai
loué la chambr e du quatrième . Il couchera là-haut et il pr endra ses r ep as
chez nous. . . Monsieur Mour et est un ami des p ar ents de ma femme , que
je v ous r e commande .
O ctav e r eg ardait l’ entré e , aux p anne aux de faux marbr e , et dont la
v oûte était dé coré e de r osaces. La cour , au fond, p avé e et cimenté e , avait
un grand air de pr opr eté fr oide ; seul, un co cher , à la p orte des é curies,
fr oait un mor s av e c une p e au. Jamais le soleil ne de vait descendr e là .
Cep endant, M. Gourd e x aminait les malles. Il les p oussa du pie d,
devint r esp e ctueux de vant leur p oids, et p arla d’aller cher cher un
commissionnair e , p our les fair e monter p ar l’ escalier de ser vice .
2Pot-b ouille Chapitr e I
― Madame Gourd, je sor s, cria-t-il en se p enchant dans la log e .
Cee log e était un p etit salon, aux glaces clair es, g ar ni d’une mo quee
à fleur s r oug es et meublé de p alissandr e ; et, p ar une p orte entr’ ouv erte ,
on ap er ce vait un coin de la chambr e à coucher , un lit drap é de r eps gr enat.
Madame Gourd, très grasse , coiffé e de r ubans jaunes, était allong é e dans
un fauteuil, les mains jointes, à ne rien fair e .
― Eh bien ! montons, dit l’ar chite cte .
Et, comme il p oussait la p orte d’acajou du v estibule , il ajouta, en
v o yant l’impr ession causé e au jeune homme p ar la caloe de v elour s noir
et les p antoufles bleu ciel de M. Gourd :
― V ous sav ez, c’ est l’ancien valet de chambr e du duc de V aug elade .
― Ah ! dit simplement O ctav e .
― Parfaitement, et il a ép ousé la v euv e d’un p etit huissier de
Mort-laVille . Ils p ossèdent même une maison là-bas. Mais ils aendent d’av oir
tr ois mille francs de r ente p our s’y r etir er . . . Oh ! des concier g es conv
enables !
Le v estibule et l’ escalier étaient d’un lux e violent. En bas, une figur e
de femme , une sorte de Nap olitaine toute doré e , p ortait sur la tête une
amphor e , d’ où sortaient tr ois b e cs de g az, g ar nis de glob es dép olis. Les
p anne aux de faux marbr e , blancs à b ordur es r oses, montaient régulièr
ement dans la cag e r onde ; tandis que la ramp e de fonte , à b ois d’acajou,
imitait le vieil ar g ent, av e c des ép anouissements de feuilles d’ or . Un
tapis r oug e , r etenu p ar des tringles de cuiv r e , couv rait les mar ches. Mais ce
qui frapp a surtout O ctav e , ce fut, en entrant, une chaleur de ser r e , une
haleine tiède qu’une b ouche lui soufflait au visag e .
― Tiens ! dit-il, l’ escalier est chauffé ?
― Sans doute , rép ondit Camp ardon. Maintenant, tous les pr
opriétair es qui se r esp e ctent, font cee dép ense . . . La maison est très bien, très
bien. . .
Il tour nait la tête , comme s’il en eût sondé les mur s, de son œil
d’archite cte .
― Mon cher , v ous allez v oir , elle est tout à fait bien. . . Et habité e rien
que p ar des g ens comme il faut !
Alor s, montant av e c lenteur , il nomma les lo catair es. A chaque étag e ,
il y avait deux app artements, l’un sur la r ue , l’autr e sur la cour , et dont
3Pot-b ouille Chapitr e I
les p ortes d’acajou v er ni se faisaient face . D’ab ord, il dit un mot de M.
A uguste V abr e : c’était le fils aîné du pr opriétair e ; il avait pris, au
printemps, le mag asin de soierie du r ez-de-chaussé e , et o ccup ait ég alement
tout l’ entr esol. Ensuite , au pr emier , se tr ouvaient, sur la cour , l’autr e fils
du pr opriétair e , M. é ophile V abr e , av e c sa dame , et sur la r ue , le pr
opriétair e lui-même , un ancien notair e de V er sailles, qui log e ait du r este
chez son g endr e , M. Duv e y rier , conseiller à la cour d’app el.
― Un g aillard qui n’a p as quarante-cinq ans, dit en s’ar rêtant
Camp ardon, hein ? c’ est joli !
Il monta deux mar ches, et se tour nant br usquement, il ajouta :
― Eau et g az à tous les étag es.
Sous la haute fenêtr e de chaque p alier , dont les vitr es, b ordé es d’une
gr e cque , é clairaient l’ escalier d’un jour blanc, se tr ouvait u