Al'origine, ce meuble, dont le nom vient du latin armarium, désigne l'endroit où l'on entrepose les armes. C'est d'abord un renfoncement dans le mur fermé par deux ventaux : un simple placard. Outre les armes, on y abrite les objets précieux et dans les églises, les vêtements sacerdotaux et les vases rituels. Lorsque l'armoire cesse de faire corps avec le mur, elle présente une forme ramassée et trapue qui rappelle le coffre dont elle prend peu à peu le relais.
Symbole d'union
Au fil des ans, l'armoire prend de la hauteur, se compose un temps de deux corps et au XVIIe adopte sa forme quasi définitive. Désormais, elle ne changera plus guère. Son usage se généralise avec l'élévation du niveau de vie.
Elle devient au XIXe, une des marques de la prospérité familiale. Dans certaines provinces, elle est apportée par la mariée en tant qu'élément de la dot tandis que dans d'autres, elle constitue le cadeau du promis à la promise. Elle devient ainsi prétexte à de très belles sculptures, s'ornant de bouquets, d'oiseaux, de coeurs accolés, d'épis de blés, de paniers fleuris, symboles de bonheur et de prospérité. Les armoires régionales présentent des caractères locaux très accentués, différents d'une province à l'autre.
La légendaire normande
C'est au XVIIIe siècle que l'armoire normande prend la forme caractéristique qu'on lui connaît aujourd'hui : à deux vantaux, reposant sur des pieds galbés et munie d'une ample corniche à large décoration sculptée, elle allie structure et répertoire Louis XV aux motifs Louis XVI. C'est à cette même époque de stabilité économique et sociale permettant une certaine élévation des conditions de vie qu'elle entre dans les demeures bourgeoises et paysannes. Destinée à rassembler le trousseau de la mariée, le linge et les économies du couple, elle faisait doublon, dans la salle commune, avec l'armoire de la belle-mère. Sa réalisation était l'objet d'une commande particulière auprès d'un ébéniste sculpteur local qui proposait aux parents des dessins et des modèles souvent inspirés des ornemanistes parisiens.