On est à des années-lumière des escouades foisonnantes aperçues dans le football. Quand le ballon rond consacre des moyens financiers démesurés pour constituer des équipes de recruteurs, le vélo fait avec les moyens du bord, c'est-à-dire avec les membres du staff. Sus aux cellules de recrutement pléthorique ou aux "scouts", fonction très à la mode dans le foot, le recrutement est l'apanage du staff, et n'est qu'une simple facette de leur métier. "Chez nous, c'est la cellule de direction sportive qui s'en occupe, explique Stéphane Heulot, manager de Saur-Sojasun. Le recrutement concerne donc les directeurs sportifs, les entraîneurs, ainsi que les différentes personnes qui interviennent directement sur le terrain et vont à la pêche aux infos tout au long de l'année. La proximité avec certains coureurs nous permet également de récupérer des informations.
A la fin, c'est moi qui tranche, surtout pour statuer d'un point de vue budgétaire." Le staff est donc mis à contribution tout au long de la saison, une répartition des rôles qu'a également adoptée AG2R-La Mondiale, pourtant en World Tour. "Les plus investis dans le recrutement sont Julien Jurdie, Laurent Biondi (tous deux directeurs sportifs, Ndlr) et moi-même. On décide ensemble des coureurs que l'on souhaite engager en fonction des possibilités existantes. Tout marché a ses règles, les mêmes coureurs sont sollicités souvent par de nombreuses équipes. Il faut donc s'arracher pour arriver à construire l'équipe que l'on souhaite. Quelquefois, c'est l'inverse : des coureurs aimeraient bien intégrer l'équipe, mais ils ne sont pas forcément en positon favorable. C'est la loi de l'offre et de la demande, comme dans tous les domaines." Il s'agit ici de recrutement à proprement parler, mais les équipes professionnelles puisent également dans le vivier amateur pour dégoter des perles rares et... bon marché.
C'est la raison d'être des équipes réserves, Chambéry Cyclisme Formation pour AG2R et Sojasun Espoir pour Saur-Sojasun qui évoluent en DN1. "C'est là qu'on va puiser nos néoprofessionnels, commente Stéphane Heulot. On en a déjà sorti un bon petit paquet : Pierre Rolland, Julien Simon..."
Ces solutions internes - expertise des directeurs sportifs d'un côté et équipe espoirs de l'autre - ne sont qu'une des facettes du recrutement, et bien souvent, les sollicitations viennent de l'extérieur, au grand dam du staff... "On est souvent abordés par des managers ou des agents", confirme Vincent Lavenu. "Ce sont des gens dont on se passerait bien, lâche Stéphane Heulot. Personnellement, je préfère discuter directement avec le coureur, je n'achète pas un numéro ni du bétail. Ce système comporte peut-être des avantages pour le coureur, mais je préfère avoir affaire à la personne avec qui je compte travailler." Les voies de recrutement sont classiques, mais elles ne disent rien des critères sur lesquels se fonde la prise de décision. Ils sont de deux ordres, objectifs et subjectifs. "Le staff fait remonter des informations sur untel ou untel, précise Stéphane Heulot.