Un jour, Marie-Candide eut dix-huit ans. Sa vie amoureuse, jusqu'alors, avoisinait le néant. Elle avait développé une remarquable tactique d'approche de la gent masculine, consistant à s'enticher d'un quelconque inconnu dans la cour du lycée,pour le jaune éclatant de son ciré, par exemple, et à le zyeuter en douce à la récré, l'air de rien, en faisant des gestes lascifs avec sa camel, des fois qu'il les remarquerait, elle et ses mouvements fumeux. Pendant ce temps, ses copines, moins cérébrales, les pauvres, roulaient des galoches incandescentes à de jeunes boutonneux torturés par leurs hormones. Marie- Candide les enviait,certes, subodorant le plaisir qui peut résulter du mélange des fluides, mais elle avait peur des garçons, et, malgré sa frustration galopante, jugeait plus prudent de les lorgner de loin. Vingt-cinq ans et un avorton de psychanalyse plus tard, elle est un peu moins terrorisée mais un peu plus méchante. Elle a aussi, la bienheureuse, pu mettre en application ce que ses fantasmes lui susurraient concernant la fusion des corps. Elle est grandement redevable, en la matière, à un jeune libidineux aujourd'hui presque quinquagénaire, qui bien souvent ne s'embarrasse pas de politesses pour lui pourrir l'existence, mais fut, en son temps, un excellent pédagogue, dont la patience n'avait d'égale que l'imagination. Or donc, comme cette affaire devenait sérieuse, il prit l'initiative de présenter Marie-Candide à ses parents. C'était un samedi.
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