Guy de MaupassantLa Vie erranteParis : P. Ollendorff, 1890 (pp. 141-168).Le chemin de fer avant d’arriver à Tunis traverse un superbe pays de montagnesboisées. Après s’être élevé, en dessinant les lacets démesurés, jusqu’à unealtitude de sept cent quatre-vingts mètres, d’où on domine un immense etmagnifique paysage, il pénètre dans la Tunisie par la Kroumirie.C’est alors une suite de monts et de vallées désertes, où jadis s’élevaient des villesromaines. Voici d’abord les restes de Thagaste où naquit saint Augustin, dont lepère était décurion.Plus loin c’est Thubursicum Humidarum, dont les ruines couvrent une suite decollines rondes et verdoyantes. Plus loin encore, c’est Madaure, où naquit Apulée àla fin du règne de Trajan. On ne pourrait guère énumérer les cités mortes, prèsdesquelles on va passer jusqu’à Tunis. Tout à coup, après de longues heures de route, on aperçoit dans la plaine basseles hautes arches d’un aqueduc à moitié détruit, coupé par places, et qui allait,jadis, d’une montagne à l’autre. C’est l’aqueduc de Carthage dont parle Flaubertdans Salammbô. Puis, on côtoie un beau village, on suit un lac éblouissant, et ondécouvre les murs de Tunis.Nous voici dans la ville.Pour en bien découvrir l’ensemble, il faut monter sur une colline voisine. Les Arabescomparent Tunis à un burnous étendu ; et cette comparaison est juste. La villes’étale dans la plaine, soulevée légèrement par les ondulations de la terre qui fontsaillir par places les ...
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