Marie de Rabutin-Chantal, marquise de SévignéLettres de Madame de Sévigné,de sa famille et de ses amisHachette, 1862 (pp. 235-241).468. — DE MADAME DE SÉVIGNÉÀ MADAME DE GRIGNAN.eAux Rochers, dimanche 17 novembre.Je mets sur votre conscience, ma chère fille, tout le bien que vous dites de moi.Vous avez fait un portrait de moi à l’Intendant, qui me flatte beaucoup ; mais je vousavoue que j’aimerois mieux avoir votre estime et votre approbation sincère quecelle de tout le reste du monde, dont on m’a tant voulu flatter autrefois. Je trouvequ’on ne souhaite l’estime que de ceux que nous aimons et que nous estimons :c’est une grande peine que de croire n’être pas dans ce degré ; et par la mêmeraison, jugez de mes sentiments sur ce que vous me dites.Je vous ai mandé comme Mme de Vins m’a écrit joliment sur la jalousie qu’elle a[1]de Mme de Villars : jamais vous n’avez vu un si joli fagot d’épines. Je lui ai faitréponse, et je lui écrirai dans quelque temps ; car elle est si tendre que je craindroisqu’elle ne prît trop à cœur une seconde apparence d’oubli. Pour son mari, vous lui[2]faites grâce de croire que ce soient les ordres de Pologne qui l’aient empêchéde venir ici : ce sont des ordres qu’il 1675reçoit toujours de sa timidité, quand il estquestion de chercher une bonne compagnie. Il a été un jour entier à Laval, et apassé à trois lieues d’ici ; il y a bien de la vanité à ce discours, mais je dis vrai.Voyez par combien de raisons il devoit me venir ...
Voir