Guy de MaupassantAu soleilConstantineConstantine> Du Chabet jusqu'à Sétif on croit traverser un pays en or. Les moissons coupéeshaut et non fauchées ras comme en France, pilées par les pieds des troupeaux,mêlant leur jaune clair de paille au rouge plus foncé du sol, donnent juste à la terre lateinte chaude et riche des vieilles dorures. Sétif est une des villes les plus laidesqu'on puisse voir. Puis on traverse, jusqu'à Constantine, d'interminables plaines.Les bouquets de verdure, de place en place, les font ressembler à une table desapin sur laquelle on aurait éparpillé des arbres de Nuremberg.Et voici Constantine, la cité phénomène, Constantine l'étrange, gardée, comme parun serpent qui se roulerait à ses pieds, par le Roumel, le fantastique Roumel, fleuvede poème qu'on croirait rêvé par Dante, fleuve d'enfer coulant au fond d'un abîmerouge comme si les flammes éternelles l'avaient brûlé. Il fait une île de sa ville, cefleuve jaloux et surprenant ; il l'entoure d'un gouffre terrible et tortueux, aux rocséclatants et bizarres, aux murailles droites et dentelées.La cité, disent les Arabes, a l'air d'un burnous étendu. Ils l'appellent Belad-el-Haoua,la cité de l'air, la cité du ravin, la cité des passions. Elle domine des valléesadmirables pleines de ruines romaines, d'aqueducs aux arcades géantes, pleinesaussi d'une merveilleuse végétation. Elle est dominée par les hauteurs deMansoura et de Sidi-Meçid.Elle apparaît debout sur son roc, gardée par son ...
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