Sur le bavardagePlutarqueVictor BÉTOLAUD, Œuvres complètes de Plutarque - Œuvresmorales, t. I , Paris, Hachette, 1870[0] SUR LE BAVARDAGE.[1] C'est pour la philosophie une cure difficile à entreprendre et à mener à bonne finque celle du bavardage. Le moyen de se guérir de cette maladie c'est d'écouter.Or les bavards n'écoutent jamais. Ils parlent toujours ; et le premier mal de leurintempérance de langue, c'est qu'elle les empêche de rien entendre. Leur surditéest volontaire. Ils ont l'intention, je pense, de protester ainsi contre la nature, qui nenous a donné qu'une seule langue en même temps qu'elle nous a pourvus de deuxoreilles. Si donc Euripide a eu raison de dire à un auditeur peu intelligent :« Je ne saurais remplir ton cerveau toujours vide,Ni verser la raison dans une âme stupide »,on dirait plus judicieusement encore au bavard, ou plutôt à propos du bavard :« Je ne saurais remplir oreille toujours vide,Ni verser la raison dans une âme stupide ».Disons mieux : « ni verser des paroles dans les oreilles d'un homme qui parle sansêtre écouté et qui n'écoute pas quand on lui parle. »Si par hasard il prête un instant son attention, ce n'est qu'un mouvement de reflux :car il va bientôt redonner au centuple ce qu'il a reçu. À Olympie on montre unportique qui répète plusieurs fois les mots, et qu'on appelle l'heptaphone. Quel'oreille du bavard reçoive une seule parole, sur-le-champ il en répète mille, et ainsi« Dans l'âme fait vibrer mille cordes ...
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